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mercredi 11 juillet 2007

Célébration officielle du centenaire de Jacques Roumain en République Dominicaine : Réhabilitation ou Récupération ?

Mercredi 11 juillet 2007
Analyse
P-au-P., 10 juil. 07 [AlterPresse] --- Les 11 et 12 juillet 2007, des activités pour commémorer le centenaire de l’écrivain poète et homme politique haïtien, Jacques Roumain, sont prévues à Santo Domingo, République Dominicaine, en présence du chef d’Etat haïtien, René Garcia Préval qui doit faire le déplacement spécialement pour l’événement.
S’agit-il d’une réhabilitation ou d’une récupération de la mémoire de Jacques Romain ?
Pour mémoire et pour l’histoire, il faut rappeler que Roumain, qui a toujours défendu les couches les plus pauvres d’Haiti, en particulier les paysans, a été trainé en justice par la République Dominicaine parce qu’il avait osé critiquer le massacre perpétré en 1937 contre plus de 10,000 ressortissants haïtiens dans ce pays, par le dictateur Léonidas Trujillo.
Selon un extrait de la biographie de J. Roumain réalisé par L F Hoffmann et mis en ligne sur le site Ile en Ile (www.lehman.cuny.edu/ile.en.ile/) :
« En novembre 1937, à la demande du Quai d’Orsay, sur plainte de la légation de la République dominicaine, Jacques Roumain et Pierre Saint-Dizier, gérant de la revue Regards, sont arrêtés et inculpés d’outrages à un chef d’État étranger. Était mis en cause l’article de Roumain ‘La Tragédie haïtienne’, paru dans le numéro du 18 novembre 1937 de la revue (c’est-à-dire cinq mois plus tôt), qui accuse de génocide le dictateur dominicain et de complicité le président Sténio Vincent. C’est la première fois qu’un journal français est poursuivi pour ‘outrage à un chef d’État étranger’.
L’audience a lieu le 5 décembre 1937 devant la 12e Chambre correctionnelle. Les écrivains Romain Rolland, Jean Cassou et Charles Vildrac et de nombreuses autres personnalités protestèrent contre les poursuites. Le 13 décembre, après plusieurs ajournements, Jacques Roumain et Pierre Saint-Dizier sont jugés et condamnés à quinze jours de prison avec sursis et 300 francs d’amende.
Raphaël Léonidas Trujillo, quant à lui, obtient un franc symbolique de dommages intérêt. »
Les événements qui auront lieu les 11 et 12 juillet à Santo Domingo, vont-ils réhabiliter Jacques Roumain ou s’agit-il d’un faux semblant pour détourner les regards de l’essentiel de sa pensée et de ses actes ? Les discussions autour de ses œuvres, notamment autour de son chef d’œuvre « Gouverneurs de la Rosée », roman qui met en scène la dure réalité des paysans haïtiens, seront-elles l’occasion de mieux faire comprendre au public dominicain l’évolution et la réalité du milieu rural haïtien d’où sont originaires la majorité des immigrants haïtiens qui se trouvent en République Dominicaine. Les discussions vont-elles se confiner aux beaux salons ou se transformeront-elles par la suite en actions concrètes en faveur de ces gens qui fuient leur pays en quête d’un mieux être ?
A noter que cette commémoration du Centenaire de Jacques Romain en République Dominicaine s’effectue dans un contexte où en France, pendant un mois durant (15 mai au 15 juin 2007), à travers une exposition de photos qui a fait coulé beaucoup d’encre et de salives, l’on vient de mettre en relief et de débattre de la réalité des travailleurs haïtiens en République Dominicaine, en particulier les coupeurs de canne.
Cet événement réalisé sous le label « Esclaves au Paradis » avec un colloque autour du thème « Sang, Sucre et Sueur », a occasionné une mobilisation hors paire du gouvernement dominicain et des secteurs nationalistes de ce pays pour condamner l’activité.
Les organisateurs ont reçu des menaces et comme pour Jacques Roumain en 1937, une plainte a été déposée contre eux à l’ambassade française à Santo Domingo.
De leur côté, les dirigeants haïtiens ont gardé le mutisme ou ont apporté leur appui à la campagne contre toutes organisations ou personnalités qui osent parler de cette réalité. Faut-il interpréter la nouvelle visite de René Préval dans cette même optique, à savoir : la réhabilitation ou la récupération de la mémoire de Jacques Romain ? [ apr 10/07/2007 23:00]

http://www.alterpresse.org/spip.php?article6183
Commentaires :
Il voit très loin l’auteur de cette analyse autour de la célébration d’un évènement dont la portée va bien au-delà des circuits qui ne savent que présenter une dialectique fondée sur l’opposition et les conflits quand il s’agit de parler d’Haïti et République Dominicaine.
Pourquoi ne pas voir cette célébration dans le simple cadre d’un évènement culturel au même titre que les célébrations réalisées à New York au Canada ou en France.
Pendant pas mal d’années, pour les dominicains les haïtiens ne représentaient que les coupeurs de canne. L’élite dominicaine en étant consciente de la valeur et surtout la qualité de l’élite intellectuelle haïtienne (Celle d’avant !) avait fait usage d’un regard divergent et dissocié pour expliquer leur comportement ambigu et discordant selon qu’il s’agisse des travailleurs agricoles jetés dans les bateyes ou de la bourgeoisie haïtienne.
Très peu de dominicains ont eu connaissance de l’existence d’un personnage de l’envergure de notre Jacques Roumain. L’épisode que rapporte le journaliste en s’appuyant sur la biographie chronologique de l’auteur de Gouverneur de la rosée traduit entre autre le sens profond de Jacques Roumain des vraies valeurs humaines et patriotiques. Il avait osé lever la voix devant une atrocité que beaucoup d’autres individus importants de l’époque avaient vue avec une indifférence complice.
Depuis la mort el la disparition du dictateur Rafael Leonidas Trujillo l’opinion publique dominicaine avait répudié le massacre. Aujourd’hui malgré les velléités sournoises ou manifestes d’anti-haitianisme personne ne saurait évoquer une nouvelle édition de cet épisode douloureux et malheureux qui butte encore contre la conscience collective.
Ceci c’est pour dire que Jacques Roumain, plutôt inconnu pour les dominicains, n’avait jamais été « déshabilité » par les dominicains donc point n’est besoin de le réhabiliter.
Pendant mes années d’études en République Dominicaine, j’avais eu l’occasion de m’approcher de l’œuvre de Jacques Stéphen Alexis dont j’avais lu les publications en espagnol : Compadre general sol (Compère général Soleil) ; En un abrir y cerrar de ojos, el romancero de las estrellas. J’avais pu initier mon entourage à la lecture d’auteurs haïtiens. Tous mes amis avaient été enchantés de lire Gouverneur de la rosée qui a fait aussi l’unanimité comme le meilleur roman haïtien.
La célébration de l’année Jacques Roumain en République Dominicaine présente une occasion sérieuse d’intéresser un pan de la conscience dominicaine à s’approcher d’Haïti. Pour vivre ensemble il faut se connaître. Pour bien vivre ensemble il faut bien se connaître.
L’auteur de cet article excelle aussi dans l’art d’amalgamer. Il est ou le rapport entre la célébration de l’année Jacques Roumain et la réalisation des évènements de Paris autour du thème « ESCALVES AU PARADIS » Si ce n’est que ce déterminisme temporel qui a voulu que les évènements se déroulent à quelques mois d’intervalle ?
On pourrait reprendre beaucoup d’éléments de l’actualité des deux pays pour délimiter le cadre conceptuel de cette célébration !
Toujours est-il que Jacques Roumain est notre « kinan nou ». Il nous revient à nous autres haïtiens de revoir le fond et la profondeur des réflexions de Jacques Roumain pour en faire des paroles d’évangile pour transformer la nation haïtienne. Aujourd’hui encore, les ancêtres se sont battus pour retrouver la source de la vie. Pour ramener l’eau indispensable pour lutter contre la sécheresse de nos convictions il nous faut la réconciliation de la nation haïtienne avec elle-même et avec les autres.
Il nous faut convaincre les GERVILIEN de toujours et les inviter à prendre une part active et effective à la réconciliation eu au « coumbite. »
La République Dominicaine en connaît et vénère ses grands penseurs. La mémoire d’un Pedro Henriquez Ureña est immortalisée dans une des plus grande et prestigieuse Université du pays.
Après les célébrations utiles mais encore abstraites de la vie et de l’œuvre de Jacques Roumain il nous faut une action concrète et intelligente. A quand l’Université Jacques Roumain ?
Dr JJ

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