mardi 3 avril 2012 Par Edner Fils Décime
P-au-P, 3 avril 2012 [AlterPresse] --- Les inondations enregistrées, lors des dernières averses de mars 2012, dans la commune de Tabarre (au nord-est de la capitale), sont dues à la multiplication des constructions anarchiques et à l’absence d’un plan d’aménagement de la zone métropolitaine de Port-au-Prince
C’est l’explication fournie à AlterPresse par le maire principal de Tabarre, Frantz Théodat.
Les boulevards 15 octobre et Toussaint Louverture, Carrefour Clercine, la zone près de la base logistique de la mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah), le camp de personnes déplacées à Terre–Roche, la zone de Tabarre 27 (vers Croix-des-Bouquets) entre autres, ont été très touchés par les récentes inondations.
Ambassade des États-Unis d’Amérique, base de la Minustah : coupables ?
Les averses, enregistrées à Tabarre le 30 mars 2012, ont, une fois de plus, mis à nu la vulnérabilité de cette commune aux intempéries.
Une image effarante mais courante, celle de la ruelle de l’église (Tabarre 27) où les habitations ont été inondées par des eaux atteignant jusqu’à 1 mètre.
Pour évacuer l’eau, les résidentes et résidents sont obligés de cotiser pour acheter une pompe à eau électrique et du carburant servant à son fonctionnement.
« Je dois marcher [20 mètres] dans cette eau boueuse et sale jusqu’aux genoux, avec un pantalon de rechange en main, pour pouvoir sortir de chez moi et accéder à la rue. Ça dure depuis une semaine », explique un homme se rendant à son travail, chaussé de bottes en caoutchouc.
« J’habite ici [ruelle de l’église] depuis 2003. On n’avait jamais eu une situation pareille avant la construction de l’ambassade américaine. L’ambassade américaine et la base de la Minustah ont détourné le cours des eaux pour les déverser sur nous », lâche un autre homme avec une pointe de fureur.
La malaria et d’autres maladies infectieuses sont devenus le lot des enfants et des femmes avec les inondations, selon les témoignages des riveraines et riverains.
Il ne s’agit pas de pointer l’ambassade étasunienne uniquement, il faut aussi tenir compte de « la multiplication des constructions sur les terres qui, dans le temps, absorbaient l’eau de pluie et les eaux débordant des canaux d’irrigation qui, eux-mêmes, n’ont pas été curés », considère le maire Théodat.
« J’ai constaté que même le consulat de l’ambassade américaine est touché par ces eaux également », poursuit Théodat.
L’ambassade des États-Unis d’Amérique a emménagé à Tabarre en 2008.
Dans la foulée, plusieurs entreprises commerciales se sont établies dans ce périmètre. C’est aussi le cas de maisons résidentielles.
Tabarre a été aussi« la commune d’accueil » de bons nombres de personnes sinistrées du séisme ravageur du 12 janvier 2010.
Les solutions sont là…
Les eaux, qui se déchainent sur Tabarre, « proviennent de Pétionville et de Pernier (à l’est de la capitale), là où les eaux n’ont pas été réglées en amont. Comme Tabarre est une zone plate, elle reçoit un gros volume d’eau », signale Théodat.
Contrairement aux communes de Port-au-Prince et de Delmas, celle de « Tabarre n’a pas encore eu de système de drainage », soutient Théodat, pour qui sa commune est en « expansion certes, mais handicapée à causse de cette question de drainage ».
Sur « l’insistance de la mairie, d’hommes d’affaires, de membres de la Minustah et de l’ambassade américaine », une étude a été menée par le ministère des travaux publics, transports et communications (Mtptc) sur le drainage.
Pour remédier à cette situation, il faut canaliser les eaux vers la rivière Grise, située à environ 1 kilomètre de la zone de Tabarre 27, selon les résultats des recherches.
Jusqu’à date (avril 2012), les solutions offertes par les recherches n’ont pas été concrétisées, déplore la municipalité de Tabarre qui fait ressortir un problème de financement.
« Les travaux coûteront excessivement cher, soit près de 10 millions de dollars américains [US $ 1.00 = 42.00 gourdes ; 1 euro = 61.00 gourdes aujourd’hui], d’après les suggestions tirées de ces études », explique Théodat, soutenant tout de même que ce serait l’une des meilleures solutions pour « protéger les communautés et [le secteur] des affaires [à Tabarre] ».
La municipalité de Tabarre plaide pour une « approche globale du problème de Tabarre » qui ne saurait « être résolu seulement au niveau communal ».
Aussi, faut-il « définir les problèmes d’aménagement de la zone métropolitaine en général » dans le cadre d’un plan de drainage global des différentes communes.
A ce niveau, pourront s’impliquer le ministère de la planification et de la coopération externe (Mpce), le Mtptc, le ministère de l’intérieur, des collectivités territoriales et de la défense nationale (Mictdn) ainsi que les mairies dans la zone métropolitaine de la capitale Port-au-Prince.
Le dernier bilan des intempéries de mars 2012, établi par la protection civile pour le département de l’Ouest, fait état de 6 morts dans un éboulement de terrain (enregistré dans la nuit du mercredi 28 au jeudi 29 mars 2012) à Morne Calvaire. [efd kft rc apr 03/04/2012 8:44]
http://www.alterpresse.org/spip.php?article12639