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vendredi 15 février 2008

Haïti veut se mettre à l'heure du tourisme mondial

A entendre le ministre du Tourisme, Patrick Délatour, présenter ce jeudi à la primature son nouveau plan directeur du tourisme axé sur une vingtaine d'années, Haïti connaîtra un bond des plus significatifs en matière de développement.
Avec ses quatre zones étudiées et données en priorité dans le cadre du document de stratégie nationale pour le développement et la réduction de la pauvreté (DSNCRP), le ministère du Tourisme donne naissance à un projet porteur qui privilégie les départements de l'Ouest, du Nord, du Sud et du Sud-Est comme des pôles d'attraction les plus envieux de la Caraïbe. D'ici 2010, promet M. Délatour, les premiers résultats seront tangibles.
Le Parc historique du Nord, classé patrimoine mondial de l'Unesco, la Côte des Arcadins, le centre touristique du Sud-Est et les sites naturels du Sud et de sa côte feront intégrer Haïti dans le rang des grandes destinations touristiques, annonce le ministre.
Dans un contexte où Haïti serait l'une des destinations touristiques les plus dangereuses, des travaux de diagnostic, d'orientations clairement exprimées et de schémas d'aménagement de zones ont été au centre de profondes réflexions entre les acteurs haïtiens du tourisme et les autres concernés.« Le niveau de sécurité a considérablement augmenté en 2007, la stabilité politique et sociale est une chose acquise, rassure le ministre Délatour. Haïti a donc été victime d'une étude pour le moins biaisée. »

Patrick Délatour fait état d'une trentaine de projets en attente valant 9.7 milliards de gourdes. Construction de ports et d'aéroports, de réseaux routiers et d'infrastructures d'accueil, aménagement de villes prioritaires et de côtes et ravalement de façades de maisons coloniales figurent dans ce programme qui se fixe de repositionner Haïti sur la carte touristique mondiale.
Cap-Haïtien et les principaux sites naturels et historiques du Nord - la baie l'Acul, Milot, la Citadelle La Ferrière, le Palais sans Souci -Jacmel avec ses plages environnantes, son centre-ville composé de maisonnettes coloniales, Port-au-Prince, la Côte des Arcadins, Malpasse, Petit-Goâve, les Cayes, Port-Salut, feront l'objet des premières réalisations listées dans le cadre de ce projet.
Le ministre du Tourisme souligne que son institution a déjà enregistré des manifestations d'intérêt de la part du secteur privé haïtien et notamment de l'international. « Alors que nous planchons sur ces départements géographiques, des offres nous viennent pour les autres régions du pays, dit-il.
Cela signifie que les investisseurs n'attendent pas pour intervenir. »Pour le Sud-Est, le nouveau plan directeur du Tourisme présente « Jacmel dans tous nos rêves et Le Sud-Est de demain ». Il retient pour l'Ouest « Une capitale à réinventer »; pour le sud, « L'essence de nos richesses » et le Nord, « Notre berceau identitaire, l'expression de notre différence ».
La construction du siège social du ministère du Tourisme au Champ de Mars est prévue dans le cadre de ce plan proposé en 1996 et révisé en 2006. Il est prévu dans le Sud-Est la construction du Musée de Jacmel, dans le Nord, l'aménagement de certains sites touristiques et la réhabilitation d'autres en état de délabrement dont le Palais Sans-Souci.
Le document présenté par Patrick Délatour prend en compte la féroce compétition existant entre les destinations méditerranéenne et caribéenne, celle qui fait rage entre les Etats de la Caraïbe et celle entre les compagnies de croisières défendant leurs parts de marché. Le nouveau plan haïtien n'attend que d'être validé par l'Exécutif pour intégrer le DSNCRP et passer dans sa phase opérationnelle.
M. Délatour rappelle que les pays de la Caraïbe projettent en 2014 de porter le tourisme à un revenu évalué à plus de 80 milliards de dollars. « A l'heure où la Caraïbe continue d'investir, se dit-il, pouvons-nous encore attendre pour relancer notre destination.» C'est dans cette optique qu'Haïti oeuvre à se faire une santé dans ce domaine, précise-t-il. Le dynamisme du secteur privé est un paramètre d'une importance considérable pour la réussite de ce plan.
« Les projets immobiliers à Jacmel, de l'aménagement touristique de l'île de La Tortue et du Môle Saint-Nicolas, le projet de Marina du Club Indigo témoignent de cette volonté manifestement réelle du secteur privé haïtien », fait-il remarquer.

Hinche, des talents sortent de l'ombre

Quelque 350 enfants et adolescents venus de plusieurs régions du pays ont participé du 6 au 10 février 2008, à Hinche, à la 2e édition de La Découverte culturelle organisée par l'ONG World Vision. Le talent artistique des participants a médusé les formateurs et la population hinchoise.
Le travail réalisé par les enfants et adolescents dans les différents ateliers a été présenté dimanche dernier à la population de Hinche et de ses environs lors d'un grand spectacle dans la cour du collège Notre-Dame du Saint Esprit.

Sous la direction des encadreurs - Marc Exavier (poésie), Fabienne Denis (chant), Wooly Saint-Louis Jean, Dickens Princivil et Cynthia Lamy (musique), Jean Cajou (théâtre), Laurent Rénold et Jean Eddy Sanon (peinture), Djenane Saint-Juste, Rose Carmel et Margarett Merveillé (danse), les participants retenus pour le programme de clôture ont donné le meilleur d'eux-mêmes. Ils ont gratifié le public d'un superbe spectacle. Des poésies traitant de l'amour, de l'enfance, de l'environnement ont été composées et déclamées par des poètes en herbe.

Trois chorégraphies montées en quatre jours ont été exécutées par l'atelier de danse pour le bonheur du public. Des tableaux mettant en valeur notre patrimoine culturel, la femme haïtienne, la paysannerie ...ont été exhibés par les jeunes peintres. La citadelle Laferrière peint par un jeune Capois et une fresque réalisée par l'atelier de peinture en une demi-heure a suscité l'admiration de tout le monde. Les enfants qui ont interprété une composition de Dickens Princivil ont regagné leur place sous une pluie d'applaudissements. Les ateliers de chant, de musique, de théâtre avaient chacun, à leur façon, charmé l'assistance.
Les enfants, les jeunes, les formateurs et les organisateurs ont exprimé leur satisfaction à l'issue du programme. « La 2e édition de La Découverte culturelle est une réussite, a laissé entendre Kelas Valès, le coordonnateur de l'activité. J'ai été ému de voir de jeunes musiciens venus des coins reculés du Plateau Central jouer avec dextérité une musique de jazz. » Ce ne sont pas les formateurs qui diront le contraire. « J'ai été ébloui devant le talent des jeunes ayant participé à l'atelier de danse, a indiqué Djenane Saint-Juste.


La meilleure des danseuses n'avait jamais suivi un cours de danse, elle se révèle pourtant une excellente danseuse. » « C'était une très belle expérience, a ajouté, pour sa part, Wooly Saint-Louis Jean. Les participants aux différents ateliers nous prouvent qu'il existe beaucoup de talents dans les villes de province. C'est le temps d'aller vers eux. » Ont abondé dans le même sens, les autres formateurs qui ont salué l'assiduité des enfants et des adolescents pendant les travaux en atelier.


Plaidant en faveur de la continuité d'une telle activité, ils se disent prêts à réitérer l'expérience. « Pendant mon séjour à Hinche, j'ai rencontré des futures vedettes, a lancé Fabienne Denis. On doit les encadrer. Je suis prête à retourner dans le Plateau Central ou aller dans les autres villes de province pour les aider. » Même son de cloche du côté du PDG de Musiphotart, Dickens Princivil : « La volonté des jeunes d'apprendre m'a surpris. Je veux me mettre à leur service et à celui des autres régions du pays. »
Marc Exavier a, de son côté, félicité les responsables de la World Vision pour avoir pensé à organiser ce programme. Il a salué le courage des enfants, adolescents et jeunes du Plateau Central qui, en dépit des difficultés, veulent se lancer dans la production artistique et culturelle. Il a toutefois indiqué que le rêve de ces jeunes ne sera pas concrétisé s'ils n'ont pas un meilleur encadrement.


Tout en faisant l'éloge de La Découverte culturelle, il a fustigé le manque de bibliothèque criant auquel fait face la Cité de Charlemagne Péralte. Il a invité les différentes institutions travaillant dans la zone à collaborer avec la population en vue de changer cette triste réalité.Organisée par la World Vision, la Découverte culturelle est pour l'instant la plus grande activité culturelle de Hinche. Cette année, elle a réuni des enfants et adolescents de Port-au-Prince, des Cayes, de La Gonâve, du Cap-Haïtien et de toutes les régions du Plateau Central.
Jean Pharès Jérôme
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=54131&PubDate=2008-02-13

L'Inde entend renforcer sa coopération avec Haïti

Une délégation composée de membres de l'ambassade de l'Inde accrédités à Port-au-Prince, avec résidence à La Havane, a effectué une visite de routine à Port-au-Prince mardi en vue de constater l'état des relations entre les deux pays. L'un des membres de la délégation qui a parlé au journal sous couvert de l'anonymat a parlé de la convivialité et de l'amitié qui ont toujours caractérisé les relations indo-haïtiennes. Il a, par ailleurs, rappelé l'engagement des Indiens en faveur de l'amélioration des conditions de vie du peuple haïtien.
Les membres de cette délégation qui ont passé 24h à Port-au-Prince ont renouvelé l'engagement de l'Inde à continuer à soutenir les efforts des autorités haïtiennes pour permettre aux Haïtiens de connaître des jours meilleurs. Dans les prochains jours, ont-ils indiqué, Haïti va recevoir des lots de médicaments évalués à 50 mille dollars américains. Ces médicaments constitueront le support de l'Inde aux victimes du cyclone Noël qui a ravagé Haïti à la fin de l'année dernière. ''L'Inde reste l'un des meilleurs partenaires d'Haïti dans le domaine des produits pharmaceutiques, ont-ils dit. L'année dernière, quatre compagnies pharmaceutiques haïtiennes avaient été invitées en Inde pour rencontrer les acteurs évoluant dans le secteur.''
A part le secteur pharmaceutique, l'Inde aide Haïti dans le domaine de la formation. L'année dernière, 17 bourses d'études complètes dans plusieurs filières de développement avaient été accordées à Haïti. Depuis décembre, un programme de transformation d'ordures solides a été inauguré à Carrefour-Feuilles. Cette activité financée par l'Inde, le Brésil et l'Afrique du Sud (IBSA) à hauteur de 1. 215.300 dollars américains entre dans le cadre de la coopération Sud-sud et vise à générer des emplois dans la communauté.
Les fonctionnaires de l'ambassade de l'Inde avec résidence à Cuba qui ont visité Port-au-Prince ont laissé entendre que l'Inde va, cette année, renforcer sa coopération avec Haïti dans plusieurs domaines notamment l'agriculture. Interrogés sur la capacité de leur pays d'aider Haïti à trouver une issue à la grave crise énergétique qu'elle traverse actuellement, ils se disent prêts à aider Haïti à développer l'énergie solaire et éolienne, mais il faut une demande formelle du gouvernement haïtien. ''L'Inde est très avancée dans ce domaine, nous sommes disposés à transmettre notre expertise aux Haïtiens'', ont-ils avancé.
''La relation amicale et profonde qui existe entre les deux pays a besoin d'un muscle économique'', a constaté l'un des visiteurs, avant de souligner les démarches en cours pour encourager des hommes d'affaires indiens à venir investir en Haïti.
Jean Pharès Jérôme

pjerome@lenouvelliste.com
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=54166&PubDate=2008-02-15

Le préscolaire plus cher que l'université !

La Noël, le carnaval, la Saint-Valentin et d'autres festivités sont perçus par certains parents comme une source d'enrichissement pour certains responsables d'établissements préscolaires. Pourtant, comme des victimes-complices, ils souscrivent à toutes les cotisations réclamées. Sans réchigner!
« Mon petit-fils a deux ans et six mois. Et déjà, son éducation me coûte mensuellement plus cher que celle de sa mère », telle est la déclaration de Charles-Henry, un jeune grand-père de 48 ans, devant la barrière principale d'une école préscolaire de Port-au-Prince. Sa fille aînée, 22 ans, mariée et jeune mère de famille, est étudiante en sciences informatiques dans un centre universitaire privé de la capitale. Son gendre étant en voyage, et sa fille occupée par ses études, il se charge en grande partie de son petit-fils.« Sébastien peut à peine marmonner quelques mots. Et déjà, son école me réclame sept cent cinquante gourdes pour la célébration de la fête de la Saint-Valentin », lance Charles-Henry qui en profite pour énumérer l'ensemble des cotisations réclamées par la direction de cette école préscolaire pour chaque activité qu'elle organise.

En décembre, dit-il, cette école réclamait mille gourdes de chaque parent pour les fêtes de fin d'année. A l'anniversaire de son petit-fils, en novembre dernier, il a déboursé cinq cents gourdes et pour le carnaval des enfants, sept cent cinquante gourdes.
« Pour les frais d'entrée, la direction réclame une somme mirobolante. Ces frais et la scolarité se paient en dollars américains, dans certains cas. Je ne sais vraiment pas pourquoi on paie tout cet argent », se plaint-il. Pour sa fille, il verse sept mille gourdes par session de cinq mois. Ce qui totalise quatorze mille gourdes pour son année scolaire. « Si je devais faire le calcul, la scolarité de ma fille serait inférieure à celle de mon petit-fils. Je préfère ne pas y penser », a-t-il conclu.
Comme Charles-Henry, de nombreux autres parents subissent passivement la cupidité de certains responsables d'école qui font de leurs établissements une source d'enrichissement.
Margalie, 28 ans, raconte avec une pointe d'amertume son calvaire. Sa benjamine, trois ans, et son fils aîné de cinq ans, fréquentent tous deux le même établissement scolaire. En plus des frais d'entrée et de la scolarité mensuelle, elle dit avoir été «invitée» l'année dernière à cotiser à au moins six reprises pour sa fille : « la Noël, l'anniversaire de ma fille, le carnaval, la Saint-Valentin, la fête de Pâques et la fête du drapeau le 18 mai. » Membres des Témoins de Jéhovah, Margalie ne participe à aucune de ces festivités. « Pourtant, dit-elle, je suis obligée de payer ces frais car c'est une très bonne école et je ne voudrais pas qu'on renvoie mes enfants si je ne les paie pas. »« Je ne vois vraiment pas pourquoi réclame-t-on autant d'argent pour des futilités», a-t-elle murmuré avant d'ajouter : « Bientôt, à la fin de l'année scolaire, l'école va réclamer des frais pour la cérémonie de graduation.»
Murielle, une haïtiano-québécoise vivant à Port-au-Prince, est moins alarmée. Sa fille unique fréquente une école préscolaire à Delmas. Pour les frais d'entrée, elle a versé 286 dollars américains et la scolarité mensuelle est fixée à deux mille gourdes. A Noël, la direction de l'école de sa fille lui avait réclamé quatre cents gourdes comme cotisation pour la réalisation des « festivité ». Elle vient de verser trois cents gourdes pour le carnaval 2008. Pour l'éducation physique, tous les vendredis, assez souvent l'école lui réclame de l'argent. La fille de Murielle qui ne vivait pas encore à Port-au-Prince, est rentrée en octobre alors que la réouverture des classes a eu lieu en septembre. Elle a quand même été «invitée» à verser la scolarité du mois écoulé. En plus, elle s'est étonnée de n'avoir reçu aucun détail sur l'affectation des frais scolaires.
« Quand je leur demande pourquoi ils ne fournissent pas de détails sur les frais scolaires, ils répondent que les gens ne comprennent pas ces détails. C'est pourquoi on n'en fournit pas. Mais ça ne me dérange pas car je suis satisfaite du travail qu'ils réalisent avec ma fille », ajoute-elle comme une victime complice.Le nombre d'écoles préscolaires dans l'aire métropolitaine de Port-au-Prince et à travers le pays est en nette augmentation. Les activités qu'elles proposent pour soutirer de l'argent aux parents le sont aussi. Cependant, presque tout le monde ferme les yeux sur ce phénomène qui grève le budget de nombreux ménages haïtiens.
Samuel BAUCICAUT
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=54230&PubDate=2008-02-14

Montegrande, le même visage

Après la publication par Le Nouvelliste en mars 2007 de l'article : « Montegrande, un village d'aveugles », la localité située près de Papaye (Hinche) a reçu de multiples visiteurs. Pourtant, sa situation ne s'est guère améliorée. La population patauge toujours dans la misère.

Le centre de santé, la seule institution publique de Montegrande (Photo: Jean Pharès Jérôme)
Vivre dans la localité sèche et aride de Montegrande s'apparente à une punition. Les vieillards et enfants majoritaires dans la zone sont privés de tout. On se souvient de l'article qui traitait des pénibles conditions de vie des aveugles de la zone et qui avait provoqué des remous à travers le pays. Certaines institutions et des particuliers avaient apporté leur soutien aux habitants de Montegrande. Une quinzaine de personnes ayant des problèmes visuels avaient été envoyées à la capitale pour recevoir les soins que nécessitait leur cas.



Certains ont pu recouvrer la vue. D'autres non, parce qu'ils ont vécu trop longtemps avec la maladie. Aucune action concrète n'a cependant été posée au profit de la population de Montegrande qui vit en 2008 comme au siècle dernier. Bon nombre d'enfants ne vont toujours pas à l'école. L'institution scolaire gérée par l'association des aveugles a failli à sa mission. Ses portes sont restées cadenassées, faute d'argent pour payer les enseignants. Des particuliers essayent de combler le vide. Ils ont créé une école communautaire accueillant seulement une centaine d'élèves. Fonctionnant dans une bicoque, cette institution peut à n'importe quel moment cesser ses activités puisque les pauvres parents qui tirent le diable par la queue n'ont pas payé jusqu'ici la modique somme qui leur est réclamée.

Les gens coupent les manguiers pour faire du charbon (Photo: Jean Pharès Jérôme)
Un centre de santé, l'unique institution construite par l'Etat haïtien dans la zone, n'existe que de nom. La seule infirmière en poste n'arrive pas, à elle seule, à prodiguer des soins à tous les malades recensés à Montegrande.
Toute indisponibilité de cette infirmière, au dévouement exceptionnel, entraîne automatiquement la fermeture du centre. «Il arrive des fois que des patients font le va-et-vient ici pendant une semaine sans que personne ne les prenne en charge », précise un vieillard chenu, rappelant que le centre de santé fonctionnait à ses débuts avec trois infirmières. Les activités économiques sont pratiquement au point mort à Montegrande. L'agriculture et l'élevage qui devraient permettre au gens de subsister, ne sont au fait qu'une perte d'argent et d'énergie. « L'année dernière, j'ai investi environ 5000 gourdes en plantules et en semences pour mon lopin de terre et en retour, je n'ai récolté que deux sacs de maïs, quelques marmites de pois, et des bananes chétives », se désole Joseph Délince, père de quatre enfants.
Pour survivre, la population se tourne vers la production du charbon de bois. Cette activité jugée plus rentable que l'agriculture et l'élevage donne aujourd'hui à Montegrande l'allure d'un désert. N'ayant plus d'arbres pour faire du charbon, les gens se ruent vers les rares manguiers dissimulés au milieu des herbes sauvages.

L'école communautaire de Montegrande (Photo: Jean Pharès Jérôme)





Pas étonnant que certaines personnes, à la faveur de la nuit, coupent les arbres sur la propriété d'autrui pour alimenter l'industrie du charbon, principale ennemie de ce hameau sec et enclavé. « Je sais qu'il est mauvais de couper les manguiers, mais je n'ai pas d'alternative », déclare un jeune homme d'une trentaine d'années. Embarrassé, il a ajouté : « nous ne les déracinons pas complètement dans l'espoir qu'ils recommenceront à donner des fruits. »
Jean Pharès Jérôme

pjerome@lenouvelliste.com
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=54212&PubDate=2008-02-15

Double nationalité, la boite à surprise

L'enquête sur la simple ou double nationalité du sénateur Rudolph Boulos pourrait être une boite à surprise. On craint qu'elle démasque ministres et parlementaires. L'enquête se poursuit...
L'étau se resserre davantage autour du sénateur Rudolph Boulos dont la simple nationalité haïtienne est mise en cause par certains de ses collègues. Absent depuis le compromis politique prolongeant le mandat des sénateurs élus pour deux (2) ans, le tonitruant Gabriel Fortuné traîne depuis plusieurs jours un lot de documents accablants pour sortir Boulos du Sénat. Motivée, la commission d'enquête spéciale récemment créée a fait venir le ministre de l'Intérieur, Paul-Antoine Bien-Aimé et le directeur général de l'Immigration, Roland Chavannes pour authentifier certains des documents relatifs à la simple ou double nationalité du sénateur Boulos.
« Le Directeur de l'Immigration a donné toutes les preuves sur la nationalité américaine de Rudolph Boulos, a jubilé Gabriel Fortuné à l'issue d'une rencontre avec les membres de la commission spéciale d'enquête. Boulos est détenteur d'un passeport américain valable jusqu'au 19 mars 2011. Des pressions auraient été exercées sur la Direction de l'Immigration pour produire le 31 août 2005 un passeport haïtien au profit du sénateur Boulos. » Le Sénat, dit-il, doit convoquer l'ex-ministre de l'Intérieur Gustave Magloire pour établir les preuves.
Le sénateur Gabriel Fortuné a, par ailleurs, dénoncé l'hypocrisie et la lâcheté de l'élite haïtienne qui a aidé à la décapitation de la Cour de cassation pour exclure Dumarsais Mécène Siméus de la présidentielle de 2006 alors que cette même élite a produit des documents pour produire un passeport haïtien au profit de l'industriel Rudolph Boulos.
Laconiquement, le ministre de l'Intérieur qui répondait aux questions des journalistes, dit avoir révélé des anomalies dans le dossier de Boulos. « Au niveau de l'Immigration, nous disposons d'un certain nombre de dossiers que nous nous gardons de citer », a déclaré le ministre de tutelle de la Direction de l'Immigration et de l'Emigration.
L'enquête sur la «double nationalité » du sénateur Rudolph Boulos pourrait être une boite de pandore. On craint déjà qu'elle ne démasque des ministres de l'administration Préval/Alexis. Des fichiers retraçant les voyages effectués de 1986 à nos jours de tous les ministres, sénateurs et Premier ministre, a annoncé le sénateur Youri Latortue, président de la commission d'enquête spéciale, seront exigés du ministère de l'Intérieur et de la Direction de l'Immigration. La commission spéciale de six sénateurs formée récemment n'aura pas seulement à plancher sur le cas du sénateur Rudolph Boulos. Des soupçons pèsent aussi sur des députés et des ministres qui seraient détenteurs d'un passeport étranger, ce qui est interdit par la Constitution de 1987. Le principal concerné défend toujours sa simple nationalité - haïtienne - mise en cause. Exhibant son passeport haïtien aux journalistes accrédités au Parlement, Rudolph Boulos a traité de «restavèk» - une façon pour lui de qualifier de valets - ses détracteurs qui sont à la solde d'un certain laboratoire. « En tant qu'homme d'affaires, je suis en possession de cartes de résidence de plusieurs pays, dont la République dominicaine, où je possède une firme de construction », avait répliqué M. Boulos, sans indiquer s'il avait renoncé à sa nationalité haïtienne. « Boulos doit démissionner. Et s'il insiste davantage, il pourrait être arrêté pour usage de faux », a tranché Gabriel Fortuné.

La télé, un poison lent

A Port-au-Prince, des stations de télévision diffusent à n'importe quelle heure des films et autres programmes exaltant le sexe et la violence. Souvent, des enfants restés scotchés devant leur petit écran « encaissent » et développent des comportements inquiétants.
Les yeux rivés sur le téléviseur installé dans le salon, Stéphanie et Giselle zappent. Bouillonnantes de curiosité, les gamines qui font encore pipi dans leurs couches « ingurgitent », comme tous les samedis matin et autres jours fériés, des clips raps montrant des femmes presque nues se déhancher et des films d'action exaltant la mort du bandit, du mauvais gars. Le tout saupoudré de scènes érotiques. Rien de plus « normal » dans le quotidien de ces enfants confinées à la maison soit par manque de loisir, soit pour cause d'insécurité, raconte un ami de la famille, jusqu'à ce que le père, scandalisé, tombe sur ses fillettes en train de s'embrasser intimement. Sommées de s'expliquer, les petites, avec innocence, répondent qu'elles font comme les gens à la télé. Cette histoire n'est pas unique. Au contraire.
« La télévision, source de mauvaise conduite chez le enfants, peut provoquer toutes sortes de déformations de la personnalité, confie le Dr Jeanne Phillipe. Outre la confusion sexuelle, certains deviennent violents », ajoute la psychologue qui appelle à une réflexion et des actions face à la dérive consistant à exposer les enfants à des programmes auxquels ils n'auraient jamais dû avoir accès.

« La nation doit avoir un regard inquisiteur sur la télévision », appelle-t-elle, invitant, d'un autre côté, à la production d'émissions de divertissement qui mettent en relief les aspects positifs de la culture locale. « Ce n'est pas facile de produire, c'est difficile et coûteux, surtout pour les enfants, mais il faut le faire », explique le Dr Jeanne Philippe qui a travaillé pendant des années à la Télévision nationale d'Haïti (TNH). Selon un spécialiste en communication requérant l'anonymat, l'Etat, la société doivent se donner les moyens pour freiner la dérive audiovisuelle en Haïti. Dans les pays où l'on connaît l'influence de la télévision sur la culture, les comportements, les esprits et les conséquences de ces dérives, on monte des institutions. « En France, par exemple, le Conseil supérieur de l'audiovisuel est très strict sur les programmes, leur nature, leur contenu, leur tranche horaire et leur public. En aucun cas, on ne saurait présenter à des enfants à peine sevrés du sein maternel des scènes érotiques un samedi matin », indique-t-il.Croyant qu'il est temps de lancer le débat sur l'urgence de définir notre politique communicationnelle afin de choisir un système s'inspirant du modèle français ou américain..., l'expert en communication rejoint le Dr Jeanne Philippe qui invite à la création ou au renforcement des structures de production audiovisuelle véhiculant les mérites et les aspects positifs de la culture haïtienne. C'est, estime-t-il, l'un des moyens de limiter « l'envahissement culturel ». S'agissant des films, surtout de longs métrages produits par Hollywood, des pays comme la France repoussent difficilement l'acculturation, l'hégémonie culturelle des Américains.
Les décideurs des médias américains sont généralement des libéraux qui aiment bousculer ce qu'ils appellent le « statu quo culturel ». C'est pourquoi, avance-t-il, qu'ils ne voient pas de mal à exalter l'homosexualité, l'adultère. La machine à rêver d'Hollywood s'est transformée en poison en vendant le sexe et la violence comme divertissement, dit-il, en se défendant d'avoir un jugement moraliste par rapport à cette industrie qui impose des modèles au monde. Jusqu'ici, l'unique chaîne de télévision qui censure les scènes érotiques d'un film ne le fait pas lorsqu'il y a une exécution ou une décapitation, fait-il remarquer en insistant sur rôle que doivent jouer les parents afin de protéger les enfants.
Vecteur de divertissement et d'information, la télévision peut aussi être un poison lent quand son fonctionnement n'est pas règlementé. Ce ne sont pas les parents des gamines qui se bécotent qui diront le contraire.
Roberson Alphonse

robersonalphonse@yahoo.fr
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=54225&PubDate=2008-02-14

L’avant projet de loi électorale a été transmis à l’exécutif

L’avant projet de loi électorale a été soumis à l’exécutif lundi dernier a révélé le président du CEP, Frantz Gérard Verettes, qui souligne qu’un copie du document a été expédiée aux partis politiques et à la société civile. Cependant l’exécutif ne prendra pas en considération les remarques des chefs de partis qui devront faire valoir leur point de vue par le truchement de leurs représentants au parlement.
Cette fois ci l’institution électorale n’utilisera pas un décret mais une loi électorale fait remarquer M. Verettes estimant qu’il ne devrait pas y avoir de retard dans les échéances électorales. De son coté, le porte parole de la Fusion des sociaux démocrates, Micha Gaillard, salue l’intérêt manifesté par les conseillers électoraux pour les partis politiques. Toutefois il déplore que jusqu'à présent les décisions importantes avaient été prises au palais national sans l’aval des partis. " Nous souhaitons une normalisation des relations entre le CEP et les partis politiques ", dit-il rappelant que l’institution électorale doit être indépendante des pouvoirs législatif et exécutif. Il faut rappeler que les conseillers électoraux avaient, la semaine dernière, rencontré les membres des bureaux des deux chambres et les responsables de l’exécutif avant la publication de la loi électorale. Il s’agissait d’une rencontre d’évaluation assure M. Verettes qui souligne que les différentes personnalités présentes avaient su trouvé des points concordants. Le président du sénat Kelly Bastien avait indiqué que certains sénateurs avaient formulé des remarques sur la gestion du vote blanc et le contentieux électoral. " La loi électorale compte 220 articles et traite également des collectivités territoriales", déclare M. Bastien qui espère que cette loi pourra être votée avant la fin du mois de février.
http://www.metropolehaiti.com/metropole/full_une_fr.php?id=13485

Accord minimum entre le sénat et le gouvernement sur la stratégie face à la cherté de la vie

A la fin de la deuxième journée de débat, le gouvernement et les sénateurs sont parvenus à un accord sur le dossier de la vie chère. " Après d’intenses discussions ont est parvenu à un accord de principe qui consiste en des subventions pour la production", indique le sénateur Rudy Herivaux. " Il s’agira d’accompagner les entrepreneurs parce que la subvention à la consommation entraînera une augmentation du taux du dollar", ajoute t-il.
Le sénateur Herivaux fait remarquer que la marge de manœuvre du gouvernement est réduite par rapport aux exigences du FMI, soulignant que les sénateurs ont proposé une réunion d’état qui permettra de faciliter le processus de décaissement des fonds octroyés par la communauté internationale. En ce qui concerne l’exception de taxe le chef du gouvernement entend étudier la question. Auparavant plusieurs sénateurs sollicité des mesures d’urgence en vue de soulager la misère de la population. " Au cours des deux prochains mois la population doit bénéficier d’une subvention sur des produits alimentaires tel le riz", a lancé le sénateur Maxime Roumer. De son coté, le sénateur Youri Latortue a rejeté en bloc les propositions du premier ministre estimant qu’il faut trouver des solutions à court terme. Tout en précisant que le projets proposés se réaliseront au mieux dans 9 mois, M. Latortue soutient que la population est impatiente. Il propose que des mesures d’exception soit adoptées dans le cadre d’une réunion d’état. " Nous avons une situation explosive, les facteurs externes agissent sur le pays et nous n’avons rien pour faire face à cette situation ", argue t-il estimant que le pays a perdu sa souveraineté économique. Si le chef du gouvernement, Jacques Edouard Alexis n’a affiché aucune opposition claire aux recommandations des sénateurs il a tout de même fait valoir que l’état doit respecter ses engagements au niveau de la scolarisation universelle et de la santé.
Les ministres des finances, Daniel Dorsainvil et des affaires sociales, Gerald Germain ont été plus directs, affichant leur opposition aux recommandations des sénateurs. Le ministre Dorsainvil a plaidé pour le maintien du cadre économique actuel estimant qu’on ne peut pas envisager l’exemption de taxes. " La politique qui a permis la stabilité des prix est bonne", martèle M. Dorsainvil.
Pour le ministre des affaires sociales les décisions doivent être prises en considérant le long terme parce que la crise risque d’être longue. " Une exemption de taxes pourraient a terme avoir de graves conséquences sur la production nationale", ajoute t-il.
http://www.metropolehaiti.com/metropole/full_une_fr.php?id=13486

Menaces d’interpellation et manifestations contre le gouvernement en raison de la vie chère

Plusieurs députés font état de tractations visant l’interpellation du premier ministre Jacques Edouard Alexis en raison de la cherté de la vie.Le député de Chantal Torbeck, Guy Gérard Georges, appui l’initiative visant l’interpellation du premier ministre. Le parlement ne doit pas rester indifférent nous sommes les portes paroles de la population explique t-il. De son coté, le député de Jérémie, Isidor Joseph Mercier, réclame l’adoption de mesures urgentes pour éviter " l’asphyxie économique du pays". " La situation devient explosive", dit-il souhaitant le renvoi de certains ministres.
Le député d’Aquin, Fritz Gerald Bourgeolly, assure que des parlementaires envisagent d’interpeller le premier ministre en raison de l’inaction du gouvernement face à la cherté de la vie. " Les 19 élus de la Fusion sont prêts à convoquer le premier ministre Jacques Edouard Alexis ", révèle t-il invitant les autres députés à se joindre à la démarche. Face à ce qu’il qualifie d’incapacité de l’équipe gouvernementale, le député Bourgeolly accorde un délai de 2 mois au premier ministre pour la mise en application des solutions en vue de soulager la misère de la population.
Dans le même temps dans la ville des Cayes une manifestation contre la vie chère a été organisée hier à l’initiative de la Plate forme des militants du sud.
Les responsables de cette organisation envisagent de lancer une campagne de désobéissance civile face à l’inaction du gouvernement. D’autre part, des habitants de Pointe-a-Raquete (ile de la Gonave) ont lancé lundi dernier un cri d’alarme aux autorités en raison de la cherté de la vie. Plusieurs personnes ont abandonné la région frappée par la famine lance un manifestant expliquant que toutes leurs ressources sont épuisées.
A Port-au-Prince une manifestation a été organisée devant le ministère du commerce alors qu’une nouvelle organisation syndicale annonce une grande manifestation contre la vie chère.
Dans la région des Nippes plusieurs familles se déclarent émoussés par la cherté de la vie. Les citoyens critiquent l’inaction du gouvernement et envisagent de réclamer le départ du premier ministre et du chef de l’état.http://www.metropolehaiti.com/metropole/full_une_fr.php?id=13484

Haiti/Politiques publiques territoriales : Le cas de Cité Soleil

Depuis la fin avant l’heure du dernier gouvernement de Jean Bertrand Aristide, un quartier de Port-au-Prince est devenu symbole de misère, d’insécurité, de pauvreté, de gangs, de repère de kidnapping, symbole de la déchéance de la société haïtienne, symbole d’un état en faillite : CITE SOLEIL
Tandis que la cartographie du pays pullule de quartiers pauvres et abandonnés, cité soleil a su gagner une renommée malheureuse. On dirait que la seule zone à problème d’Haïti n’est que Cité soleil.
Les quartiers comme Bel air, grande ravine, martissant, Décayette etc peuvent être relégués au second plan car si Cité Soleil va bien Haïti ira bien. Rien de plus erroné. Ce qui est entrain de se dire de façon non dissimulée aux habitants des autres quartiers défavorisés c’est de foutre le bordel, de s’armer et de kidnapper des gens…Bref..


jeudi 14 février 2008
Par Vario Sérant, Patricia Sanon, Jeffson Bercy, Ferry Pigne, Myriame Etienne, Natacha Fresnel Mainsou
Soumis à AlterPresse le 13 février 2007
Située au nord de Port-au-Prince et traversée par le tronçon urbain de la (route) nationale numéro 1, Cité Soleil représente, de par sa superficie et (la taille de) sa population, le plus grand bidonville des Antilles. Elle compte près de quatre cent mille (400 000) habitants. Sa superficie exacte est difficile à établir en raison de l’absence d’une délimitation officielle définitive.
Cité Soleil ne génère pas de recettes communales ou d’impôts directs annuels. Cette agglomération est pourtant limitrophe de la zone industrielle de la capitale (ne faisant pas partie de sa juridiction). Cette situation confère à la Mairie de Cité Soleil un statut de Mairie assistée (par excellence), pouvant difficilement voler de ses propres ailes et jouer à fond la carte de la décentralisation.
Les habitants de Cité Soleil vivent en marge (par le bas s’entend) d’une bonne partie du pays, privés donc des services essentiels. Naguère (voire longtemps) une zone de « non droit » exposée et livrée à des violences multiformes, Cité Soleil connaît depuis peu une certaine accalmie. Mais la situation demeure pour le moins fragile. Une fragilité liée non seulement aux aléas politiques et à l’état des initiatives et actions ponctuelles en matière de sécurité et de justice, mais aussi et surtout aux problèmes structurels et récurrents que sont le chômage endémique, l’analphabétisme, la désertion des services publics, l’insalubrité, la faible couverture sanitaire, etc.
Une visite à la Mairie de Cité Soleil et un long et enrichissant entretien avec les édiles nous ont permis de réunir des éléments pour établir la grille d’analyse que voici :
Interprétation
Les politiques - mentionnées dans la grille - font partie d’un plan directeur élaboré par l’Administration communale de concert avec « la population » lors de « forums citoyens des notables ». Dit autrement, ce document cadre est le fruit de forums d’évaluation des besoins de planification des interventions réalisées dans les trente-quatre (34) quartiers de Cité Soleil avec la participation de membres de la communauté.
Les sources de financement de ces politiques dénotent une certaine indifférence du pouvoir central par rapport à la gestion des affaires de la commune et une absence de vision en terme de développement humain durable de Cité Soleil. La part relative du financement de ces politiques par le Trésor public est très faible.
Le gouvernement local (l’Administration communale de Cité Soleil) semble pétri de velléités et de volonté démocratiques en regard de leur démarche participative dans l’étude et l’exécution des plans.
Nombre de ces politiques sont inclusives et visent à améliorer les conditions de vie de la population durement éprouvée par les récentes crises que le pays a connues. On est toutefois en droit de se demander si les édiles ont les moyens de leurs politiques, celles-ci étant assujetties presqu’exclusivement aux financements externes (étrangers).
Politique éducative
La politique communale d’éducation rejoint - dans son esprit - les plus hautes préoccupations démocratiques et de justice sociale exprimées dans la Constitution (du 29 mars 1987). Elle vise à répondre, soulignes les édiles, à la demande de quelque cinquante mille (50 000) enfants en âge de scolarisation et (à) casser la logique d’une éducation à deux vitesses qui perpétue le classement des individus de la Cité et freine leur mobilité (sociale).
La démarche consistant à rechercher l’apport de l’Université Quisqueya à l’élaboration d’un plan de réforme éducative est louable. Elle procède d’une quête d’excellence et d’une volonté de bannir l’exclusion. La reconstruction des écoles aura à terme un impact certain sur le taux de scolarisation dans la commune, conformément au vœu de scolarisation universelle clairement exprimé par la charte fondamentale (la constitution).
Toutefois, comme nous le mentionnions chemin faisant, la question du financement reste un point d’achoppement vu que ces appuis financiers proviennent exclusivement de la coopération externe.
Politique d’urbanisation
La politique d’urbanisation s’attache à aménager l’espace physique de la commune, l’assainir et réduire sa vulnérabilité face aux intempéries.
Quelques résultats sont visibles en termes de ramassage de détritus, d’un certain nombre d’emplois directs et indirects (notamment pour des techniciens de surface) et (en terme de) tracé de routes.
À plus long terme, la politique d’urbanisation se propose d’améliorer la qualité de vie de la population de Cité Soleil, améliorer l’habitat et faire reculer (considérablement) le chômage).
Mais tous ces efforts peuvent déboucher sur des résultats très modestes en raison des limitations d’ordre opérationnel. La quasi-totalité du financement (non exempt de toutes sortes d’aléas) provient de la coopération internationale. Il en est de même pour l’expertise devant paver la voie à une éventuelle réponse aux problèmes d’urbanisation de la commune.
Le pouvoir central se fait sentir un tant soit peu (au niveau de l’opérationnalisation) à travers le Programme d’apaisement social (financé partiellement par le Trésor public et la « communauté internationale »).
Lancé officiellement par le gouvernement Haïtien en 2006, le PAS devait contribuer à lever les obstacles les plus évidents à l’inclusion sociale, rétablir l’accès aux services de base (eau potable, assainissement, électricité, infrastructures, santé et éducation), relancer la production nationale et créer des emplois pour les travailleurs non spécialisés.
Mais dans la réalité, le PAS a évolué en dents de scie et ne paraît pas avoir d’impact réel sur la vie de la population.
Politique sécuritaire
La politique sécuritaire cherche à exorciser un passé récent fait de turbulences politiques, de grand banditisme et de criminalité galopante ayant valu à Cité Soleil la réputation de « zone de non droit ».
Dans cette recherche d’un climat sécuritaire, sûr et stable, la Mairie est partie prenante d’initiatives et d’actions visant au désarmement, au démantèlement et à la réinsertion de gangs armés ainsi qu’au renforcement et à l’équipement des forces de sécurité de la Cité, à travers notamment la CNDDR.
Elle s’emploie également à encadrer la population civile à travers la réhabilitation du Commissariat et la mise en place d’une structure d’accompagnement des plaignants en matière judiciaire (« Kay Jistis »).
Quelques résultats sont tangibles comme la réhabilitation du Commissariat, la récupération d’un certain nombre d’armes à feu, le démantèlement, la réinsertion ou l’emprisonnement d’une quantité indéterminée de membres de gangs armés.
La politique sécuritaire a eu pour effet de réduire le taux de criminalité dans la commune et d’y faciliter le retour de plus en plus de déplacés (qui avaient fui les violences des récentes années).
Néanmoins, malgré les acquis sécuritaires à Cité Soleil, la situation (y) demeure fragile. En témoignent de récentes altercations entre chefs de bandes rivales, partie prenantes du programme de réinsertion (mis en place par la CNDDR) à la faveur d’un forum de sécurité communautaire organisé par la CNDDR avec l’appui du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD).
Politique de santé
La politique de santé se voudrait participative et viserait à améliorer la qualité de vie de la population. Pour parvenir à cette fin, la Mairie s’est employée à augmenter l’offre sanitaire à travers la construction d’un hôpital de district, grâce un appui du gouvernement cubain.
Elle a aussi entamé la restructuration du système de distribution d’eau courante à travers un partenariat avec une ONG locale, les CDS (Centres de Santé Communautaire). Ces initiatives ont débouché sur la construction effective d’un hôpital communal et d’une extension relative de la distribution de l’eau courante.
Si cette politique proactive de santé a certes influé positivement sur les indicateurs de santé, elle n’en constitue pas moins une goutte dans la mer, en raison des criantes limitations en terme d’opérationnalisation, comme nous l’évoquions plus haut pour d’autres domaines.
La Mairie s’appuie prioritairement sur des partenaires étrangers et ONGs locales. Le pouvoir central est présent à Cité Soleil à travers le Ministère de la Santé Publique et de la Population. Mais cette présence est marginale. La clinique communautaire du MSPP a en effet une capacité d’accueil extrêmement limitée par rapport à la demande (aux besoins) de (soins de) santé de la population de Cité Soleil.
Politique de divertissement et de loisirs
Pour pallier la carence, voire l’absence de lieux de loisirs adéquats à Cité Soleil, la Mairie s’est employée à réhabiliter des centres (de loisirs) dans un souci d’épanouissement des habitants de la commune.
Ces projets dont la plupart se sont déjà matérialisés comme la réhabilitation d’un cinéma (Ciné Babette) et le réaménagement de places publiques sont financés par des bailleurs étrangers.
Ces initiatives ont dû probablement peser, à côté d’autres facteurs déjà mentionnés plus haut, dans la réduction du taux de criminalité à Cité Soleil. En attendant que des statistiques (fiables) viennent le confirmer, on peut tout aussi penser qu’elles (ces initiatives) ont également entraîné une certaine de l’incidence et de la prévalence des maladies liées au stress.
Conclusion
Les politiques publiques en cours à Cité Soleil à l’initiative de la Mairie semblent refléter en grande partie les principes et préoccupations démocratiques édictés par la Constitution Haïtienne ainsi que les besoins identifiés et exprimés par la population, à travers notamment les « forums citoyens de notables » des trente-quatre (34) quartiers du vaste bidonville.
Cependant, ces politiques achoppent sur des problèmes opérationnels sérieux inhérents à la quasi-absence de l’État central dans la Cité. L’État a semble-t-il choisi de faire dépendre le fonctionnement et la survie de cette commune des aléas de la coopération internationale, en dehors de tout projet national transversal et inclusif.
Par ailleurs, dépourvue de recettes internes (propres), consécutivement à une délimitation (quoique non définitive) jugée discriminatoire, la Mairie ne peut pas jouir d’une réelle autonomie telle que stipulée dans la Constitution.
Pour la plupart des initiatives qu’ils souhaitent entreprendre, les édiles n’ont d’autres choix que d’entreprendre des démarches auprès du pouvoir central (du Ministère de l’Intérieur plus précisément). Le sort de telles démarches est souvent lié à des considérations d’ordre politique. Car, malgré son dénuement, Cité Soleil représente un enjeu politique important.
La décision de faire voter par le Parlement un budget précis pour chaque commune (chaque Mairie) pourrait porter l’État central à se décharger d’un certain nombre de responsabilités et renforcer la marge de manœuvre des administrations communales face aux réponses à donner à certains besoins identifiés et exprimés par la population.
Bien entendu cela suppose aussi une gestion transparente, saine et éclairée de la part des Mairies et une évaluation constante des politiques (dans les municipalités) de sorte à mesurer l’efficacité à l’aide d’indicateurs de performance pour, dans un second temps, en apprécier la pertinence.
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Références bibliographiques
http://www.lemonde.fr/cgi-bin/ACHATS/acheter.cgi ?offre=ARCHIVES$type_item=ART_ARCH30J&objet_id=993937&clef=ARC-TRK-G_01
http://www.pyepimanla.com/decembre/cite_soleil.html
http://www.operationspaix.net/Haiti-a-la-croisee-des-chemins
http://www.ena.fr/index.php ?page=ressources/rapports/memoires/1999/andrianirina
http://www.afsp.msh-paris.fr/activite/groupe/pp/pptxt.html
http://www.ladocumentationfrancaise.fr/dossiers/evaluation-politiques-publiques/index.shtml
MINOT, Didier et al, Le projet de territoire, _ http://www.redcross.int/FR/mag/magazine2006_2/10-11.html http://www.enfants-soleil.org/Chap_Activites/ecoles_partenaires.htm
Séances Politiques Publiques, Prof. Wilson Jabouin, CEPODE, 2007http://www.alterpresse.org/spip.php?article6936