Publié le dimanche 13 janvier 2013 à 14:03 par Marc MAHUZIER
Comment arrive-t-on à faire des études quand on est fils de paysan en Haïti, un des pays les plus pauvres au monde ? Réponse à l'université régionale des Gonaïves, dans le département de l'Artibonite. Avec ses 1500 étudiants et un manque effarant de moyens, elle concentre toutes les difficultés de l'enseignement supérieur public dans un pays qui n'arrive pas à se remettre du tremblement de terre de janvier 2010.
Chemise blanche et cravate foncée, Stanley, 23 ans, est élégant comme pour un mariage. La journée est importante. Sa petite université régionale des Gonaïves reçoit des visiteurs de marque : une délégation d'universitaires français et haïtiens venus inaugurer le tout nouveau « campus numérique ». Une salle équipée d'ordinateurs avec accès gratuit à Internet. On a préparé des discours, installé une sono qui se montrera capricieuse. Et prévu un buffet de boissons fraîches sur lequel tout le monde se jettera, car la chaleur est écrasante.
« Pratiquement personne n'a d'ordinateur personnel »
Ce « campus numérique » installé par l'Agence des universités francophones, c'est la bonne nouvelle du trimestre pour ces étudiants, tous fils de paysans d'une région parmi les plus pauvres du pays. « Pratiquement personne n'a d'ordinateur personnel. Quand on veut aller sur Internet, il faut payer vingt-cinq gourdes (0,50 €) de l'heure dans un cybercafé. C'est cher ! », explique le jeune homme.
Avec ses 1 500 étudiants qui suivent des formations en comptabilité, gestion, soins infirmiers ou sciences de l'éducation, l'université des Gonaïves concentre tous les problèmes de l'enseignement supérieur public haïtien. Elle a été créée en 2006, dans les bâtiments d'un hôpital désaffecté. Le nouveau « campus numérique », par exemple, a trouvé refuge dans l'ancien bloc opératoire. L'installation dans de nouveaux locaux était prévue. Mais une inondation, en 2008, a stoppé le chantier. Depuis, le provisoire dure et nul n'ose prédire quand il prendra fin.
En octobre, les étudiants ont fait grève et défilé avec des pancartes. « Depuis la sortie de la première promotion, en 2011, aucun de nous n'a reçu son diplôme », explique Nadège Jean. La jeune femme a passé une licence en comptabilité. Elle voulait poursuivre vers un master, sans doute à l'étranger, car c'est souvent la seule solution. Elle a dû renoncer.
Le recteur, Roldano Auguste, parle de « crise purement administrative ». Mais l'affaire est autrement plus grave. Son prédécesseur à la tête de l'université avait dénoncé la corruption de son adjoint, le secrétaire général. Il a reçu des menaces de mort et s'est enfui. De là, la « crise purement administrative » dont parle Roldano Auguste, qui a hérité d'une situation des plus délicates.
« On n'a rien »
Corruption ? À Port-au-Prince, Sauvenel, étudiant en droit, confirme que sans l'appui d'un « parrain », on ne peut ni s'incrire à l'université publique ni ensuite trouver un travail. Reste la solution de l'université privée. Beaucoup sont d'un niveau crasse, avec des enseignants possèdant tout juste le bac. Quelques unes sont excellentes, comme Lumière, Notre Dame ou, surtout, Quisqueya. Mais la qualité a un prix : 1 300 € l'inscription annuelle. Une fortune pour 99 % de la population. « Seule une minorité d'Haïtiens peut faire des études », regrette Stanley.
Accéder à une instruction supérieure reste un privilège dont ne profitent que 60 000 jeunes. Les facultés de médecine, par exemple, ne produisent que 400 médecins par an. Dont la moitié file exercer à l'étranger, aux États-Unis surtout. La fuite des cerveaux est le problème numéro 1 : 85 % des diplômés exercent hors du pays. Mais comment les en blâmer quand on sait qu'un médecin gagne 600 € par mois ?
« On étudie dans des conditions exécrables »
On visite les locaux des Gonaïves et on est effaré par l'indigence des moyens. Les salles de cours sont d'une simplicité monacale. Pas de restaurant universitaire ni de résidence pour loger ces garçons et filles. Certains font 25 km à vélo le matin et autant le soir pour assister aux cours. Les autres se logent comme ils peuvent.
Stanley dort par terre chez un copain qui ne le fait pas payer. « De toutes façons, je ne pourrais pas. » Il se nourrit de sandwiches, d'un plat chaud quand il peut. Et reconnaît avoir souvent faim. « Parfois, des étudiants tombent dans les pommes en cours », confirme cet universitaire français en poste à Port-au-Prince. « On étudie dans des conditions exécrables », résume Ernso, grand gaillard au verbe éloquent.
Et ce n'est pas là une exception réservée à la province. Léandre, qui étudie le droit à la capitale, témoigne du même dénuement. « On n'a rien, même pas une bibliothèque digne de ce nom. On est obligés d'acheter les manuels. Comme cela coûte cher, on se cotise à plusieurs et on recopie. »
Le gouvernement, qui annonce avoir fait de l'éducation une priorité, a promis des bourses de 60 € par mois. Mais beaucoup d'étudiants sont opposés au pouvoir et pas décidés à accepter. « Ce qu'on veut, c'est une véritable politique de l'enseignement supérieur », dit Léandre. Revendication légitime, mais qui semble pour le moment, hors de portée.
http://www.jactiv.ouest-france.fr/actualites/monde/difficile-condition-detudiant-haiti-13475
Une fenêtre ouverte sur Haïti, le pays qui défie le monde et ses valeurs, anti-nation qui fait de la résistance et pousse les limites de la résilience. Nous incitons au débat conceptualisant Haïti dans une conjoncture mondiale difficile. Haïti, le défi, existe encore malgré tout : choléra, leaders incapables et malhonnêtes, territoires perdus gangstérisés . Pour bien agir il faut mieux comprendre: "Que tout ce qui s'écrit poursuive son chemin, va , va là ou le vent te pousse (Dr Jolivert)
lundi 14 janvier 2013
Le Canada en Haïti - À qui au juste profite l’aide internationale?
14 janvier 2013, Jean-Claude Leclerc
Si Washington avait dit aux Américains d’éviter Toronto, ses gangs de rue et ses balles perdues, comment Julian Fantino, célèbre chef de police en Ontario, aurait-il réagi, en supposant que cette province, en pleine récession, ait misé sur le tourisme pour s’en sortir ? Or, le même Fantino, devenu patron de l’ACDI, l’Agence canadienne de développement international, a prévenu les touristes canadiens d’éviter Port-au-Prince. Il veut même que les Haïtiens se prennent en main plutôt que d’espérer plus d’argent du Canada.
Passe encore que l’ex-chef Fantino, un expert en police, tienne pour un échec, semble-t-il, la formation dispensée aux policiers haïtiens par des agents de la GRC. Mais à voir le bilan qu’il fait de l’aide au relèvement d’Haïti, le nouveau ministre n’a visiblement rien d’un expert en développement. Non seulement il ne comprend rien à la reconstruction d’un pays, mais il ne sait guère où l’aide canadienne est allée.
Haïti éprouvé, et désavantagé
Même des pays riches et fort bien équipés mettent des années à se remettre d’un désastre naturel. Comment Haïti aurait-il pu se relever en trois ans d’un séisme sans précédent ? New York a mis trois ans à nettoyer après le 11-Septembre les décombres du World Trade Center, ainsi que Michaëlle Jean le rappelait samedi dans La Presse. Montréal, ajoutait-elle, dépensera 180 millions de dollars en 2013 pour la collecte des déchets. Comment Port-au-Prince en ferait-elle autant avec moins d’argent ?
L’ex-gouverneure générale invite les partenaires d’Haïti à voir dans ce pays un « microcosme » des faillites et des succès de l’aide au développement. Les contribuables d’ici gagneraient, en effet, à connaître les projets et les bénéficiaires de l’aide apportée à ce pays. Les fonds de l’ACDI contribuent-ils à son développement économique ? Cet argent profiterait plutôt à des entreprises canadiennes, note également dans La Presse Frédéric Boisrond, chargé de cours à l’Université McGill.
L’aide canadienne va… au Canada
Après la catastrophe de 2010, l’ACDI a payé des habitations temporaires. Des sinistrés de Jacmel et de Léogâne ont pu, bien sûr, se loger. Mais à qui ces fonds, une trentaine de millions, sont-ils allés ? À des fournisseurs, entrepreneurs, travailleurs et experts d’Haïti ? Pas du tout. La fabrication a été donnée aux Maisons Laprise, de Montmagny, qui y a aménagé une usine et embauché des ouvriers d’ici. Et l’organisation a été confiée à SNC-Lavalin. Un projet de construction fort québécois, mais sans retombée économique pour Haïti.
Ce contrat lucratif pour des entreprises canadiennes n’est pas une exception en Haïti, mais plutôt la règle. Il en irait de même pour l’ensemble de l’aide internationale. Ce pays n’en toucherait qu’une faible partie. Les institutions internationales en seraient les principales bénéficiaires, non les autorités gouvernementales d’Haïti. Dans ce dernier cas, corruption et incompétence auraient dissuadé les donateurs étrangers de faire confiance à l’État haïtien.
Mais même un gouvernement démocratiquement élu à Port-au-Prince est tenu à l’écart des projets de développement. Sous prétexte de faire confiance à la « société civile », maintes ONG mènent leurs propres projets dans les domaines de la santé, de l’agriculture et de l’éducation. Ces organisations manquent, dit-on, de cohérence et surtout de concertation, ajoutant à l’anarchie qui accable ce pays, et laisse ses habitants dans une dépendance chronique à l’endroit des « amis » de l’extérieur.
Bref, un État parallèle, coupé de la population, prend la place d’un gouvernement national. Ce système a pour effet non seulement d’écarter les autorités locales de la planification du pays, mais aussi, chose non moins grave, d’implanter en Haïti des systèmes de gouvernance et de service qui n’en reflètent pas la culture ni le dynamisme des nouvelles générations. Faute de moyens propres, les Haïtiens et leurs dirigeants en sont encore réduits à souhaiter devenir des partenaires de leur avenir.
Entre-temps, s’il n’y a plus, dans ce Palais national en ruine, de grands voyous et de petits libérateurs pour détourner l’aide à leur profit personnel, en revanche, autour des pays donateurs, il ne manque pas de profiteurs versés dans l’art de s’enrichir à même les projets et programmes de « développement » international. Certes, Ottawa s’est permis d’évoquer la « corruption » en Haïti qui retarderait les efforts de construction. Mais un autre son de cloche est venu de Port-au-Prince.
La corruption n’est pas la chasse gardée d’Haïti
Dans Le Nouvelliste, en effet, un cadre de la planification faisait fin décembre, sous couvert d’anonymat, une déclaration qu’on aurait prise avec scepticisme autrefois, mais qu’il faut désormais recevoir avec sérieux : « Depuis des années et des années, une petite mafia canadienne fait la pluie et le beau temps en Haïti, au nom d’Haïti, avec l’argent du Canada. Ils savent avant nous les financements disponibles et les ficelles à tirer pour dénouer les cordons de la bourse. » L’ancien chef de police devrait faire enquête chez lui, ajoutait-il.
Même des projets tenus pour souhaitables et des financements honnêtes peuvent freiner le progrès en Haïti. Ainsi, ne risque-t-on pas d’y implanter trop souvent des systèmes lourds et coûteux peu compatibles avec la culture et les moyens de ce pays ? La santé, l’éducation, la construction, l’éthique professionnelle - sans parler de la démocratie - sont-elles de nos jours au Canada, notamment au Québec, de si grands modèles de succès qu’on veuille les implanter ailleurs au nom de la solidarité sociale ?
« Il y a beaucoup de charité mal ordonnée », confirmait ce week-end Michaëlle Jean, un témoin fort crédible de l’aide internationale.
Jean-Claude Leclerc enseigne le journalisme à l’Université de Montréal.
http://www.ledevoir.com/societe/ethique-et-religion/368278/a-qui-au-juste-profite-l-aide-internationale
Si Washington avait dit aux Américains d’éviter Toronto, ses gangs de rue et ses balles perdues, comment Julian Fantino, célèbre chef de police en Ontario, aurait-il réagi, en supposant que cette province, en pleine récession, ait misé sur le tourisme pour s’en sortir ? Or, le même Fantino, devenu patron de l’ACDI, l’Agence canadienne de développement international, a prévenu les touristes canadiens d’éviter Port-au-Prince. Il veut même que les Haïtiens se prennent en main plutôt que d’espérer plus d’argent du Canada.
Passe encore que l’ex-chef Fantino, un expert en police, tienne pour un échec, semble-t-il, la formation dispensée aux policiers haïtiens par des agents de la GRC. Mais à voir le bilan qu’il fait de l’aide au relèvement d’Haïti, le nouveau ministre n’a visiblement rien d’un expert en développement. Non seulement il ne comprend rien à la reconstruction d’un pays, mais il ne sait guère où l’aide canadienne est allée.
Haïti éprouvé, et désavantagé
Même des pays riches et fort bien équipés mettent des années à se remettre d’un désastre naturel. Comment Haïti aurait-il pu se relever en trois ans d’un séisme sans précédent ? New York a mis trois ans à nettoyer après le 11-Septembre les décombres du World Trade Center, ainsi que Michaëlle Jean le rappelait samedi dans La Presse. Montréal, ajoutait-elle, dépensera 180 millions de dollars en 2013 pour la collecte des déchets. Comment Port-au-Prince en ferait-elle autant avec moins d’argent ?
L’ex-gouverneure générale invite les partenaires d’Haïti à voir dans ce pays un « microcosme » des faillites et des succès de l’aide au développement. Les contribuables d’ici gagneraient, en effet, à connaître les projets et les bénéficiaires de l’aide apportée à ce pays. Les fonds de l’ACDI contribuent-ils à son développement économique ? Cet argent profiterait plutôt à des entreprises canadiennes, note également dans La Presse Frédéric Boisrond, chargé de cours à l’Université McGill.
L’aide canadienne va… au Canada
Après la catastrophe de 2010, l’ACDI a payé des habitations temporaires. Des sinistrés de Jacmel et de Léogâne ont pu, bien sûr, se loger. Mais à qui ces fonds, une trentaine de millions, sont-ils allés ? À des fournisseurs, entrepreneurs, travailleurs et experts d’Haïti ? Pas du tout. La fabrication a été donnée aux Maisons Laprise, de Montmagny, qui y a aménagé une usine et embauché des ouvriers d’ici. Et l’organisation a été confiée à SNC-Lavalin. Un projet de construction fort québécois, mais sans retombée économique pour Haïti.
Ce contrat lucratif pour des entreprises canadiennes n’est pas une exception en Haïti, mais plutôt la règle. Il en irait de même pour l’ensemble de l’aide internationale. Ce pays n’en toucherait qu’une faible partie. Les institutions internationales en seraient les principales bénéficiaires, non les autorités gouvernementales d’Haïti. Dans ce dernier cas, corruption et incompétence auraient dissuadé les donateurs étrangers de faire confiance à l’État haïtien.
Mais même un gouvernement démocratiquement élu à Port-au-Prince est tenu à l’écart des projets de développement. Sous prétexte de faire confiance à la « société civile », maintes ONG mènent leurs propres projets dans les domaines de la santé, de l’agriculture et de l’éducation. Ces organisations manquent, dit-on, de cohérence et surtout de concertation, ajoutant à l’anarchie qui accable ce pays, et laisse ses habitants dans une dépendance chronique à l’endroit des « amis » de l’extérieur.
Bref, un État parallèle, coupé de la population, prend la place d’un gouvernement national. Ce système a pour effet non seulement d’écarter les autorités locales de la planification du pays, mais aussi, chose non moins grave, d’implanter en Haïti des systèmes de gouvernance et de service qui n’en reflètent pas la culture ni le dynamisme des nouvelles générations. Faute de moyens propres, les Haïtiens et leurs dirigeants en sont encore réduits à souhaiter devenir des partenaires de leur avenir.
Entre-temps, s’il n’y a plus, dans ce Palais national en ruine, de grands voyous et de petits libérateurs pour détourner l’aide à leur profit personnel, en revanche, autour des pays donateurs, il ne manque pas de profiteurs versés dans l’art de s’enrichir à même les projets et programmes de « développement » international. Certes, Ottawa s’est permis d’évoquer la « corruption » en Haïti qui retarderait les efforts de construction. Mais un autre son de cloche est venu de Port-au-Prince.
La corruption n’est pas la chasse gardée d’Haïti
Dans Le Nouvelliste, en effet, un cadre de la planification faisait fin décembre, sous couvert d’anonymat, une déclaration qu’on aurait prise avec scepticisme autrefois, mais qu’il faut désormais recevoir avec sérieux : « Depuis des années et des années, une petite mafia canadienne fait la pluie et le beau temps en Haïti, au nom d’Haïti, avec l’argent du Canada. Ils savent avant nous les financements disponibles et les ficelles à tirer pour dénouer les cordons de la bourse. » L’ancien chef de police devrait faire enquête chez lui, ajoutait-il.
Même des projets tenus pour souhaitables et des financements honnêtes peuvent freiner le progrès en Haïti. Ainsi, ne risque-t-on pas d’y implanter trop souvent des systèmes lourds et coûteux peu compatibles avec la culture et les moyens de ce pays ? La santé, l’éducation, la construction, l’éthique professionnelle - sans parler de la démocratie - sont-elles de nos jours au Canada, notamment au Québec, de si grands modèles de succès qu’on veuille les implanter ailleurs au nom de la solidarité sociale ?
« Il y a beaucoup de charité mal ordonnée », confirmait ce week-end Michaëlle Jean, un témoin fort crédible de l’aide internationale.
Jean-Claude Leclerc enseigne le journalisme à l’Université de Montréal.
http://www.ledevoir.com/societe/ethique-et-religion/368278/a-qui-au-juste-profite-l-aide-internationale
L'ONU veut se concentrer sur la stabilisation d'Haïti selon Hervé Ladsous
Le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies, Hervé Ladsous, a effectué la semaine écoulée une visite d'évaluation de la mission onusienne en Haïti. Cette visite a coïncidé avec la commémoration du 3 eme anniversaire du violent séisme du 12 janvier.
M. Ladsous a annoncé que les nations Unies pourront se concentrer sur la tache prioritaire de stabilisation du pays après la phase d'urgence post séisme. Il admet que la phase d'urgence a été longue en raison de l'effort déployé en faveur des populations sinistrées regroupées dans les sites d'hébergement.
Faisant valoir que de nombreux progrès ont été accomplis, M. Ladsous a admis qu'il y a encore beaucoup à faire. Nous sommes ensemble avec les Haïtiens afin de trouver les bonnes solutions pour assurer la sécurité de la population qui constitue quand même une préoccupation centrale", dit –il rappelant les efforts continus de l'ONU pour appuyer la Police Nationale d'Haïti à se renforcer, se structurer et se former. Dans le même temps, la mission onusienne poursuivra ses actions dans le cadre du renforcement de l'Etat de droit car c'est là une des conditions pour garantir un avenir meilleur au pays.
Le secrétaire général adjoint de l'ONU a mis l'accent sur le rôle important de la Mission de l'ONU dans l'amélioration du climat sécuritaire. Il juge qu'une étroite collaboration entre la mission de l'ONU et les autorités haïtienne est indispensable pour consolider le processus politique, consolider l'Etat de droit qui est une condition indispensable pour inspirer la confiance aux investisseurs étrangers. La Mission des nations unies pour la stabilisation en Haïti est l'une des missions de stabilisation de sortie de crise de l'ONU.
LLM / radio Métropole Haïti
http://www.metropolehaiti.com/metropole/full_une_fr.php?id=21762
M. Ladsous a annoncé que les nations Unies pourront se concentrer sur la tache prioritaire de stabilisation du pays après la phase d'urgence post séisme. Il admet que la phase d'urgence a été longue en raison de l'effort déployé en faveur des populations sinistrées regroupées dans les sites d'hébergement.
Faisant valoir que de nombreux progrès ont été accomplis, M. Ladsous a admis qu'il y a encore beaucoup à faire. Nous sommes ensemble avec les Haïtiens afin de trouver les bonnes solutions pour assurer la sécurité de la population qui constitue quand même une préoccupation centrale", dit –il rappelant les efforts continus de l'ONU pour appuyer la Police Nationale d'Haïti à se renforcer, se structurer et se former. Dans le même temps, la mission onusienne poursuivra ses actions dans le cadre du renforcement de l'Etat de droit car c'est là une des conditions pour garantir un avenir meilleur au pays.
Le secrétaire général adjoint de l'ONU a mis l'accent sur le rôle important de la Mission de l'ONU dans l'amélioration du climat sécuritaire. Il juge qu'une étroite collaboration entre la mission de l'ONU et les autorités haïtienne est indispensable pour consolider le processus politique, consolider l'Etat de droit qui est une condition indispensable pour inspirer la confiance aux investisseurs étrangers. La Mission des nations unies pour la stabilisation en Haïti est l'une des missions de stabilisation de sortie de crise de l'ONU.
LLM / radio Métropole Haïti
http://www.metropolehaiti.com/metropole/full_une_fr.php?id=21762
La Cour des comptes juge l’aide française à Haïti
Dévoilé par La Croix, un rapport de la Cour des comptes paru le vendredi 11 janvier dresse le bilan de l’aide française, trois ans après le séisme du 12 janvier 2010.
Le rapport juge plutôt favorablement la réaction des autorités et le travail des ONG françaises tout en soulignant que des améliorations demeurent nécessaires.
Trois ans tout juste après l’effroyable séisme qui a provoqué la mort de plus de 220 000 personnes à Haïti, le 12 janvier 2010, un rapport de la Cour des comptes, que dévoile La Croix en exclusivité, fait le point sur l’aide apportée par la France aux populations sinistrées.
À l’issue d’un travail mené depuis dix-huit mois et nourri de deux missions sur place, les magistrats livrent des conclusions globalement favorables aux acteurs de l’aide humanitaire.
En ce qui concerne les services de l’État, la Cour des comptes n’a pas noté de défaillance manifeste. Le rapport salue même la « réactivité » des différents intervenants et se félicite du travail de coordination mené par la « cellule de crise » du Quai d’Orsay et du savoir-faire des gendarmes français déployés sur place.
UN ÉCART ENTRE LES ANNONCES ET LA RÉALITÉ DES AIDES DÉBLOQUÉES
Reste tout de même des constats moins enthousiastes. La Cour déplore notamment que, durant la phase d’urgence, la coordination sur place ait« présenté les mêmes faiblesses » que celles relevées lors de rapports publiés après le tsunami ayant frappé l’Asie du Sud-Est en 2004. Cette remarque vise les réticences de certains services de la sécurité civile à se placer sous l’autorité de l’ambassadeur.
La Cour regrette aussi l’écart existant entre « effets d’annonce et réalité des chiffres » à propos des aides promises par les autorités françaises à Haïti. Alors que « l’aide supplémentaire était censée se monter à 326 millions d’euros », la France n’en a finalement versé que la moitié (153 millions). « Cette différence s’explique par le fait que l’annonce initiale intégrait des décisions financières prises en faveur d’Haïti avant le séisme », notamment des annulations de dettes de plus de 50 millions d’euros, a calculé la Cour.
Au final, l’aide publique française apportée à Haïti représente 2 % du total des sommes versées par la communauté internationale pour les opérations d’urgence et de reconstruction.
LES FONDS COLLECTÉS PLUTÔT BIEN SUIVIS PAR LES ONG
Coté ONG, l’apport français s’est révélé plus important. En fournissant 240 millions d’euros d’aides, dont 87 millions issus de dons des particuliers, les ONG françaises ont contribué pour 12 % du total de l’aide privée mondiale.
La Cour des comptes, chargée de surveiller les institutions faisant appel à la générosité publique, s’est penchée sur les résultats obtenus par les plus grosses associations qui ont récolté à elles seules 80 % des dons : la Fondation de France (26 millions d’euros), le Secours catholique (13,4), la Croix-Rouge (10,3) ainsi que Unicef-France, Action contre la faim, le Secours populaire et MSF.
Le rapport estime que ces grandes associations ont « globalement respecté leurs obligations en matière de suivi de fonds collectés et d’information des donateurs ». Un jugement bien plus clément que celui émis lors d’un rapport similaire consacré à l’aide envoyé après le tsunami asiatique, où certaines ONG avaient dépensé des sommes pour des programmes différents de ceux mis en avant dans leurs appels.
AMÉLIORER LA TRANSPARENCE
Les magistrats financiers jugent toutefois que la transparence financière doit encore être améliorée et émettent des remarques sur certaines pratiques. Le rapport rappelle ainsi aux associations qu’elles ont l’obligation de bien préciser, lors de chaque appel à la générosité, la part de la somme réellement utilisée sur place et celle qui couvrira le coût de collecte des dons.
Ces frais restent parfois minimes (0,4 % pour le Secours catholique), tournent généralement autour de 5 à 8 % et peuvent parfois atteindre des proportions plus importantes, culminant à plus de 10 % pour l’Unicef France.
VERS LA FIN DES ADOPTIONS DIRECTES
Le rapport de la Cour des comptes revient également sur la polémique créée par les demandes de familles françaises de hâter le départ vers la France des enfants haïtiens en cours d’adoption après le séisme de 2010. Jugeant les critiques émises contre le ministère des affaires étrangères infondées, la Cour estime que celui-ci a agi « dans l’intérêt des enfants et des familles ».
Surtout, les rapporteurs estiment que « la catastrophe haïtienne illustre les difficultés supplémentaires que crée l’usage de la procédure d’adoption individuelle », où les parents effectuent eux-mêmes les démarches, sans passer par des organismes officiels. Le rapport demande la fin de cette procédure, rappelant que la convention de la Haye, ratifiée par la France, recommande sa suppression progressive.
MATHIEU CASTAGNET
http://www.la-croix.com/Actualite/Monde/La-Cour-des-comptes-juge-l-aide-francaise-a-Haiti-_NG_-2013-01-10-897648
Pourquoi faut-il continuer à aider Haïti ?
Mgr Marc Stenger s’est rendu en Haïti du 30 décembre au 8 janvier.
Trois ans après le séisme qui a ravagé le pays, il estime qu’il reste encore beaucoup à faire pour effacer les traces de la catastrophe et soutenir les Haïtiens dans leur œuvre de construction.
EntretienMgr Marc Stenger Évêque de Troyes, membre de la commission épiscopale pour la mission universelle de l’Église, accompagnateur du pôle Amérique latine et Caraïbes
« Depuis le séisme, je suis allé à plusieurs reprises en Haïti. Les traces de la catastrophe sont loin d’être effacées. Tout demeure fragile. De nombreux Haïtiens resteront marqués à vie par des traumatismes à la fois physiques, psychologiques et matériels. Les camps sont encore nombreux. Les cyclones successifs détruisent l’économie haïtienne, particulièrement agricole. Malgré une vraie volonté de l’État haïtien, les choses n’avancent que très lentement, et pas toujours bien, en raison de la corruption.
Par ailleurs, les ONG venues pour une intervention d’urgence commencent à plier bagage. Pourtant, malgré tous ces aspects négatifs, je reviens une nouvelle fois frappé par la confiance qui habite ce peuple joyeux, par sa foi en l’avenir même s’il a beaucoup de raisons de se laisser abattre par la tristesse. Dans la nuit du 31 décembre, j’ai présidé une messe dans une paroisse provisoire. À minuit précis, lors du geste de la paix, j’ai été témoin d’un déclenchement de joie. Nouvelle année signifiait espoir.
La cathédrale de Port-au-Prince et les deux tiers des églises et des chapelles du diocèse sont encore en ruine. Le 1er janvier, nous avons célébré le jour de la Fête de l’indépendance nationale avec Mgr Guire Poulard, archevêque de Port-au-Prince, dans sa cathédrale de « toile », au pied des ruines de l’autre cathédrale. Nous y avons tous chanté un Te Deum vibrant. Mais j’ai aussi visité une église toute neuve. Au grand séminaire, les 250 séminaristes, qui vivaient sous la tente depuis 2010, disposent désormais de petites maisons en dur.
Et j’ai été témoin des efforts considérables consentis pour arriver à se remettre debout et à aider les autres à lever la tête, notamment dans le domaine de l’éducation. Les sœurs de la Sagesse ont ainsi par exemple tout fait pour relever leur lycée de 1 500 élèves. Mais la reconstruction ne concerne pas seulement les bâtiments. Le CCFD et le Secours catholique sont engagés dans des projets de développement.
Les Caritas collaborent à la construction de « villages » qui facilitent le vivre-ensemble. Nous avons bien des raisons d’oublier Haïti. Mais l’aide la plus précieuse que nous pouvons apporter à ce peuple qui n’a pas peur de la difficulté et à tous ceux qui travaillent à ses côtés, c’est de continuer à le soutenir (1) jusqu’à ce qu’il trouve une forme d’indépendance qui lui permette de ne plus être dans le provisoire. »
(1) Dons : CEFAL Urgence Haïti, 58, avenue de Breteuil, 75007 Paris.
Recueilli par Martine de SAUTO
http://www.la-croix.com/Religion/Actualite/Pourquoi-faut-il-continuer-a-aider-Haiti-_NP_-2013-01-13-897919/(CRX_ARTICLE_ACCESS)/ACCESS_CONTENT
Trois ans après le séisme qui a ravagé le pays, il estime qu’il reste encore beaucoup à faire pour effacer les traces de la catastrophe et soutenir les Haïtiens dans leur œuvre de construction.
EntretienMgr Marc Stenger Évêque de Troyes, membre de la commission épiscopale pour la mission universelle de l’Église, accompagnateur du pôle Amérique latine et Caraïbes
« Depuis le séisme, je suis allé à plusieurs reprises en Haïti. Les traces de la catastrophe sont loin d’être effacées. Tout demeure fragile. De nombreux Haïtiens resteront marqués à vie par des traumatismes à la fois physiques, psychologiques et matériels. Les camps sont encore nombreux. Les cyclones successifs détruisent l’économie haïtienne, particulièrement agricole. Malgré une vraie volonté de l’État haïtien, les choses n’avancent que très lentement, et pas toujours bien, en raison de la corruption.
Par ailleurs, les ONG venues pour une intervention d’urgence commencent à plier bagage. Pourtant, malgré tous ces aspects négatifs, je reviens une nouvelle fois frappé par la confiance qui habite ce peuple joyeux, par sa foi en l’avenir même s’il a beaucoup de raisons de se laisser abattre par la tristesse. Dans la nuit du 31 décembre, j’ai présidé une messe dans une paroisse provisoire. À minuit précis, lors du geste de la paix, j’ai été témoin d’un déclenchement de joie. Nouvelle année signifiait espoir.
La cathédrale de Port-au-Prince et les deux tiers des églises et des chapelles du diocèse sont encore en ruine. Le 1er janvier, nous avons célébré le jour de la Fête de l’indépendance nationale avec Mgr Guire Poulard, archevêque de Port-au-Prince, dans sa cathédrale de « toile », au pied des ruines de l’autre cathédrale. Nous y avons tous chanté un Te Deum vibrant. Mais j’ai aussi visité une église toute neuve. Au grand séminaire, les 250 séminaristes, qui vivaient sous la tente depuis 2010, disposent désormais de petites maisons en dur.
Et j’ai été témoin des efforts considérables consentis pour arriver à se remettre debout et à aider les autres à lever la tête, notamment dans le domaine de l’éducation. Les sœurs de la Sagesse ont ainsi par exemple tout fait pour relever leur lycée de 1 500 élèves. Mais la reconstruction ne concerne pas seulement les bâtiments. Le CCFD et le Secours catholique sont engagés dans des projets de développement.
Les Caritas collaborent à la construction de « villages » qui facilitent le vivre-ensemble. Nous avons bien des raisons d’oublier Haïti. Mais l’aide la plus précieuse que nous pouvons apporter à ce peuple qui n’a pas peur de la difficulté et à tous ceux qui travaillent à ses côtés, c’est de continuer à le soutenir (1) jusqu’à ce qu’il trouve une forme d’indépendance qui lui permette de ne plus être dans le provisoire. »
(1) Dons : CEFAL Urgence Haïti, 58, avenue de Breteuil, 75007 Paris.
Recueilli par Martine de SAUTO
http://www.la-croix.com/Religion/Actualite/Pourquoi-faut-il-continuer-a-aider-Haiti-_NP_-2013-01-13-897919/(CRX_ARTICLE_ACCESS)/ACCESS_CONTENT
Haïti, 3 ans après : le peuple prie Dieu, c’est pas la faute à Voltaire
LE PLUS. Il y a trois ans, le 12 janvier 2010, un séisme a dévasté Haïti. Très pieux, les habitants de l'île ont prié Dieu, attitude souvent taxée de naïve par les commentateurs. Peut-on continuer à vivre sa religion après une telle catastrophe ? Analyse de Francis Métivier, philosophe.
Au moment du séisme de Port-au-Prince, le 12 janvier 2010, certains occidentaux avaient trouvé incongrue la ferveur religieuse du peuple haïtien, aux motifs suivants : comment peut-on prier Dieu, comment peut-on remercier Dieu d’être en vie, alors que Dieu, être suprême censé diriger le monde selon le principe du bien, de l’harmonie préétablie, aurait laissé faire cette catastrophe naturelle et, même, l’aurait voulue et provoquée ?
Pire : certains ont vu dans l’attitude du peuple haïtien une forme de naïveté, celle qui consiste à croire en un Dieu qui, en réalité, ferait ou accepterait le mal, et dont la faiblesse serait au fond la preuve de son inexistence.
Dieu a sauvé des vies
Dans ce préjugé, le "Candide" de Voltaire n’est pas loin. Ainsi que son ironique : "Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles." Ou bien Dieu est infaillible et il existe, ou bien Dieu est faillible et il n’existe pas. Mais notre penseur apparemment anti-optimiste semble exprimer ici, plus qu’une certitude, un doute.
Voltaire, faut-il le rappeler, était croyant, selon les principes du déisme, c’est-à-dire l’idée que Dieu et l’homme puissent être en relation directe, en vertu de la raison naturelle du second, et ce en dehors des règles et des cultes de toute religion révélée et officielle. Voltaire est l’auteur du "Candide" et de l’article "Prière à Dieu".
Continuer à croire en Dieu dans les décombres, le deuil et la misère, ne revient donc pas à justifier l’injustifiable. Il faut cesser de se prendre pour Voltaire ou plutôt de se prendre pour la figure de son contresens. La croyance en Dieu est ce qui fait danser les Haïtiennes qui n’ont plus de jambes.
Oui, les Haïtiens ont remercié Dieu d’être en vie et ils le remercient encore aujourd’hui. Il faut bien comprendre : le mal existe et c’est le mal qui a frappé. Peu importe sa provenance. Dieu est intervenu pour sauver des vies. Limiter les dégâts. Dans la panoplie des éléments de langage du sens commun athée, le plus insignifiant consiste à prétendre que si Dieu était tout puissant, il aurait évité cette catastrophe.
La philosophie des catastrophes
Les Haïtiens ne savent qu’une chose : Dieu est grand, donne un sens aux vivants, et même aux morts. Qui oserait alors expliquer le contraire, simplement parce qu’on aura entendu parler de Voltaire au lycée dans un incroyable malentendu ? Qui aurait cette indécence de vouloir qu’une idée soit plus forte qu’une vie ? Quel homme stupide et sans culture irait faire la morale aux Haïtiens, leur expliquer que Dieu n’existe pas, comme les colons de la foi expliquaient que Dieu existe ?
Aujourd’hui, c’est toujours la même foi qui fait vivre les Haïtiens. La même foi qui, dans les camps, anime la survie des réfugiés sans abris "en dur". Mais l’on sait ce que peut vouloir dire "en dur" quand le mur s’effondre. Un réfugié des camps m’a dit un jour "un chiffon fait moins mal qu’une pierre".
Alors, plutôt que de se référer à un Voltaire inapproprié et de faire des comparaisons idéologiques entre le tremblement de terre de Port-au-Prince en 2010 et celui de Lisbonne en 1755 (dont parle Voltaire), contentons-nous d’abord de reconnaître que les Haïtiens possèdent une philosophie de vie qui relève de la philosophie des catastrophes. Il suffit de regarder l’histoire du pays pour s’en rendre compte.
Mais qu’est-ce qu’une philosophie de vie ? C’est une manière pratique de vivre, de laquelle un sens se dégage. Ce sens peut être voulu comme il peut être subi. Cela ne revient pas à dire qu’une vie sensée soit toujours douée de logique et empreinte de justice. Car celle de beaucoup d’Haïtiens ne semble ni logique ni juste. Cette vie est "bagay", "ti désowdwe", un fait tragique qui entraîne une existence dramatique, le "ti", "petit", étant très ironique.
La philosophie de vie des Haïtiens s’articule autour de valeurs qui, pour nous, ne s’inscrivent que dans une dimension rhétorique et dont, pour eux, l’application concrète est une question de vie ou de mort. Ce qui est pour nous de l’ordre de la morale très théorique est pour les Haïtiens de l’ordre du vital, du biologique. C’est là tout le décalage entre eux et nous. Et c’est également pour cette raison que, d’eux, nous ne sommes pas, comme on le dit, tellement près et tellement loin à la fois, mais pour beaucoup d’entre nous – et même les politiques qui ont pu être les mieux attentionnés et ne le sont plus – tellement loin, seulement.
À titre personnel, je ne sais pas si Dieu existe, mais son idée, dans le cas de la vie des Haïtiens, est infiniment plus grande que le petit comportement des moqueurs. Alors laissons les hommes croire en Dieu et espérer. Cette croyance et cette espérance sont tellement plus intelligentes que certaines de nos dépressions nerveuses et nos petits complexes… Et surtout, la croyance religieuse de l’homme qui vit dans les catastrophes ne nous fait aucun mal.
http://leplus.nouvelobs.com/contribution/759388-haiti-3-ans-apres-le-peuple-prie-dieu-c-est-pas-la-faute-a-voltaire.html
Au moment du séisme de Port-au-Prince, le 12 janvier 2010, certains occidentaux avaient trouvé incongrue la ferveur religieuse du peuple haïtien, aux motifs suivants : comment peut-on prier Dieu, comment peut-on remercier Dieu d’être en vie, alors que Dieu, être suprême censé diriger le monde selon le principe du bien, de l’harmonie préétablie, aurait laissé faire cette catastrophe naturelle et, même, l’aurait voulue et provoquée ?
Pire : certains ont vu dans l’attitude du peuple haïtien une forme de naïveté, celle qui consiste à croire en un Dieu qui, en réalité, ferait ou accepterait le mal, et dont la faiblesse serait au fond la preuve de son inexistence.
Dieu a sauvé des vies
Dans ce préjugé, le "Candide" de Voltaire n’est pas loin. Ainsi que son ironique : "Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles." Ou bien Dieu est infaillible et il existe, ou bien Dieu est faillible et il n’existe pas. Mais notre penseur apparemment anti-optimiste semble exprimer ici, plus qu’une certitude, un doute.
Voltaire, faut-il le rappeler, était croyant, selon les principes du déisme, c’est-à-dire l’idée que Dieu et l’homme puissent être en relation directe, en vertu de la raison naturelle du second, et ce en dehors des règles et des cultes de toute religion révélée et officielle. Voltaire est l’auteur du "Candide" et de l’article "Prière à Dieu".
Continuer à croire en Dieu dans les décombres, le deuil et la misère, ne revient donc pas à justifier l’injustifiable. Il faut cesser de se prendre pour Voltaire ou plutôt de se prendre pour la figure de son contresens. La croyance en Dieu est ce qui fait danser les Haïtiennes qui n’ont plus de jambes.
Oui, les Haïtiens ont remercié Dieu d’être en vie et ils le remercient encore aujourd’hui. Il faut bien comprendre : le mal existe et c’est le mal qui a frappé. Peu importe sa provenance. Dieu est intervenu pour sauver des vies. Limiter les dégâts. Dans la panoplie des éléments de langage du sens commun athée, le plus insignifiant consiste à prétendre que si Dieu était tout puissant, il aurait évité cette catastrophe.
La philosophie des catastrophes
Les Haïtiens ne savent qu’une chose : Dieu est grand, donne un sens aux vivants, et même aux morts. Qui oserait alors expliquer le contraire, simplement parce qu’on aura entendu parler de Voltaire au lycée dans un incroyable malentendu ? Qui aurait cette indécence de vouloir qu’une idée soit plus forte qu’une vie ? Quel homme stupide et sans culture irait faire la morale aux Haïtiens, leur expliquer que Dieu n’existe pas, comme les colons de la foi expliquaient que Dieu existe ?
Aujourd’hui, c’est toujours la même foi qui fait vivre les Haïtiens. La même foi qui, dans les camps, anime la survie des réfugiés sans abris "en dur". Mais l’on sait ce que peut vouloir dire "en dur" quand le mur s’effondre. Un réfugié des camps m’a dit un jour "un chiffon fait moins mal qu’une pierre".
Alors, plutôt que de se référer à un Voltaire inapproprié et de faire des comparaisons idéologiques entre le tremblement de terre de Port-au-Prince en 2010 et celui de Lisbonne en 1755 (dont parle Voltaire), contentons-nous d’abord de reconnaître que les Haïtiens possèdent une philosophie de vie qui relève de la philosophie des catastrophes. Il suffit de regarder l’histoire du pays pour s’en rendre compte.
Mais qu’est-ce qu’une philosophie de vie ? C’est une manière pratique de vivre, de laquelle un sens se dégage. Ce sens peut être voulu comme il peut être subi. Cela ne revient pas à dire qu’une vie sensée soit toujours douée de logique et empreinte de justice. Car celle de beaucoup d’Haïtiens ne semble ni logique ni juste. Cette vie est "bagay", "ti désowdwe", un fait tragique qui entraîne une existence dramatique, le "ti", "petit", étant très ironique.
La philosophie de vie des Haïtiens s’articule autour de valeurs qui, pour nous, ne s’inscrivent que dans une dimension rhétorique et dont, pour eux, l’application concrète est une question de vie ou de mort. Ce qui est pour nous de l’ordre de la morale très théorique est pour les Haïtiens de l’ordre du vital, du biologique. C’est là tout le décalage entre eux et nous. Et c’est également pour cette raison que, d’eux, nous ne sommes pas, comme on le dit, tellement près et tellement loin à la fois, mais pour beaucoup d’entre nous – et même les politiques qui ont pu être les mieux attentionnés et ne le sont plus – tellement loin, seulement.
À titre personnel, je ne sais pas si Dieu existe, mais son idée, dans le cas de la vie des Haïtiens, est infiniment plus grande que le petit comportement des moqueurs. Alors laissons les hommes croire en Dieu et espérer. Cette croyance et cette espérance sont tellement plus intelligentes que certaines de nos dépressions nerveuses et nos petits complexes… Et surtout, la croyance religieuse de l’homme qui vit dans les catastrophes ne nous fait aucun mal.
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"Où est allé l'argent donné à Haïti après le séisme ?"
Le président haïtien Michel Martelly a affirmé qu'il n'était "pas satisfait" de la coopération internationale avec son pays qui commémore ce 12 janvier le violent séisme qui l'a ravagé en 2010.
"Où est allé l'argent donné à Haïti après le séisme ?", s'est demandé le chef de l'Etat lors d'une rencontre vendredi soir avec plusieurs journalistes. Selon lui, un tiers seulement de l'aide internationale a été confiée au gouvernement haïtien.
"La majorité de l'aide a été dépensée par les ONG pour les urgences, mais pas pour la reconstruction d'Haïti", a déploré Michel Martelly, qui souhaite revoir la coopération internationale afin d'obtenir de meilleurs résultats.
"Travailler avec le gouvernement"
"Nous ne demandons pas de gérer toute l'aide de la coopération, mais il faut parvenir à un équilibre. Et nous disons que la meilleure chose à faire est de travailler avec le gouvernement", a souhaité Michel Martelly.
Le gouvernement haïtien va notamment effectuer un audit de la coopération avec le Canada, qui va reconsidérer son aide à Haïti en vue d'une gestion plus efficace, a indiqué le président haïtien.
"Le gouvernement d'Haïti n'a jamais reçu une aide directe du gouvernement du Canada. Cette aide passe à travers des organisations internationales", a souligné Michel Martelly qui qualifie de "justes, réels et vrais" les propos du ministre canadien de la Coopération sur le peu de résultats de cette coopération.
"Quelque chose ne marche pas"
"Plus on envoie de l'aide à Haïti, plus on dirait que les choses n'avancent pas. Donc il y a quelque chose qui ne marche pas. Alors arrêtez d'envoyer de l'argent. Regardons les choses en face pour mettre en place un meilleur mécanisme pouvant apporter des résultats", a suggéré Michel Martelly.
Il a cependant salué l'aide de l'Union européenne. Il s'agit d'une "coopération constante, qui travaille directement avec le gouvernement d'Haïti, et nous disons 'merci' à l'UE", selon Michel Martelly, qui assure que l'argent va à ceux qui sont dans le besoin.
De son côté, le Premier ministre Laurent Lamothe s'est dit "heureux" de l'aide du Venezuela, qui permet, selon lui, de financer plus de 90% des programmes de développement d'Haïti.
http://tempsreel.nouvelobs.com/monde/20130112.OBS5237/ou-est-alle-l-argent-donne-a-haiti-apres-le-seisme.html
"Où est allé l'argent donné à Haïti après le séisme ?", s'est demandé le chef de l'Etat lors d'une rencontre vendredi soir avec plusieurs journalistes. Selon lui, un tiers seulement de l'aide internationale a été confiée au gouvernement haïtien.
"La majorité de l'aide a été dépensée par les ONG pour les urgences, mais pas pour la reconstruction d'Haïti", a déploré Michel Martelly, qui souhaite revoir la coopération internationale afin d'obtenir de meilleurs résultats.
"Travailler avec le gouvernement"
"Nous ne demandons pas de gérer toute l'aide de la coopération, mais il faut parvenir à un équilibre. Et nous disons que la meilleure chose à faire est de travailler avec le gouvernement", a souhaité Michel Martelly.
Le gouvernement haïtien va notamment effectuer un audit de la coopération avec le Canada, qui va reconsidérer son aide à Haïti en vue d'une gestion plus efficace, a indiqué le président haïtien.
"Le gouvernement d'Haïti n'a jamais reçu une aide directe du gouvernement du Canada. Cette aide passe à travers des organisations internationales", a souligné Michel Martelly qui qualifie de "justes, réels et vrais" les propos du ministre canadien de la Coopération sur le peu de résultats de cette coopération.
"Quelque chose ne marche pas"
"Plus on envoie de l'aide à Haïti, plus on dirait que les choses n'avancent pas. Donc il y a quelque chose qui ne marche pas. Alors arrêtez d'envoyer de l'argent. Regardons les choses en face pour mettre en place un meilleur mécanisme pouvant apporter des résultats", a suggéré Michel Martelly.
Il a cependant salué l'aide de l'Union européenne. Il s'agit d'une "coopération constante, qui travaille directement avec le gouvernement d'Haïti, et nous disons 'merci' à l'UE", selon Michel Martelly, qui assure que l'argent va à ceux qui sont dans le besoin.
De son côté, le Premier ministre Laurent Lamothe s'est dit "heureux" de l'aide du Venezuela, qui permet, selon lui, de financer plus de 90% des programmes de développement d'Haïti.
http://tempsreel.nouvelobs.com/monde/20130112.OBS5237/ou-est-alle-l-argent-donne-a-haiti-apres-le-seisme.html
Trois ans après le séisme, "Haïti se relève", selon son président
Le 12 janvier 2010, Haïti était frappé par un séisme extrêmement violent. Plus de 250 000 personnes avaient été tuées, 1,5 million d'autres déplacées et le pays dans son ensemble était à genoux. Trois ans plus tard, le président haïtien Michel Martelly a salué la mémoire des victimes lors d'une cérémonie, samedi 12 janvier.
"Je m'incline en souvenir des victimes. J'entends encore cet immense cri de douleur des familles amputées, mais essuyez vos larmes ! Malgré toutes les souffrances, Haïti se relève", a déclaré le chef de l'Etat, debout sur une estrade dressée sur les ruines du palais présidentiel, qui s'était effondré le jour du séisme. Des membres du gouvernement, des diplomates et des fonctionnaires ont assisté à une courte cérémonie ponctuée par une sonnerie aux morts actionnée par lapolice haïtienne.
"LA MAJORITÉ DE L'AIDE A ÉTÉ DÉPENSÉE PAR LES ONG"
"Un tas de ferraille et des tas de pierres, c'est tout ce que le 12 janvier 2010 a laissé du palais du peuple haïtien, mais le drapeau reste debout et fier", a-t-il ajouté, promettant de reconstruire l'édifice dans le respect des normes sismiques.
Au moment où le chef de l'Etat adressait son message à la nation, de nombreux Haïtiens se recueillaient dans les églises ouvertes pour la circonstance, d'où montaient des chants tristes en mémoire des victimes.
La veille, Michel Martelly avait déploré le fonctionnement de la coopération internationale après le séisme. Selon lui, un tiers seulement de l'aide a été confiée au gouvernement haïtien. "La majorité a été dépensé par les ONG pour les urgences, mais pas pour la reconstruction d'Haïti, a-t-il déploré, Nous ne demandons pas de gérer toute l'aide de la coopération, mais il faut parvenir à un équilibre. Et nous disons que la meilleure chose à faire est de travailler avec le gouvernement". Dans cette optique, il souhaite revoir la coopération internationale afin d'obtenir de meilleurs résultats.
http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2013/01/12/trois-ans-apres-le-seisme-haiti-se-releve-selon-son-president_1816242_3222.html
"Je m'incline en souvenir des victimes. J'entends encore cet immense cri de douleur des familles amputées, mais essuyez vos larmes ! Malgré toutes les souffrances, Haïti se relève", a déclaré le chef de l'Etat, debout sur une estrade dressée sur les ruines du palais présidentiel, qui s'était effondré le jour du séisme. Des membres du gouvernement, des diplomates et des fonctionnaires ont assisté à une courte cérémonie ponctuée par une sonnerie aux morts actionnée par lapolice haïtienne.
"LA MAJORITÉ DE L'AIDE A ÉTÉ DÉPENSÉE PAR LES ONG"
"Un tas de ferraille et des tas de pierres, c'est tout ce que le 12 janvier 2010 a laissé du palais du peuple haïtien, mais le drapeau reste debout et fier", a-t-il ajouté, promettant de reconstruire l'édifice dans le respect des normes sismiques.
Au moment où le chef de l'Etat adressait son message à la nation, de nombreux Haïtiens se recueillaient dans les églises ouvertes pour la circonstance, d'où montaient des chants tristes en mémoire des victimes.
La veille, Michel Martelly avait déploré le fonctionnement de la coopération internationale après le séisme. Selon lui, un tiers seulement de l'aide a été confiée au gouvernement haïtien. "La majorité a été dépensé par les ONG pour les urgences, mais pas pour la reconstruction d'Haïti, a-t-il déploré, Nous ne demandons pas de gérer toute l'aide de la coopération, mais il faut parvenir à un équilibre. Et nous disons que la meilleure chose à faire est de travailler avec le gouvernement". Dans cette optique, il souhaite revoir la coopération internationale afin d'obtenir de meilleurs résultats.
http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2013/01/12/trois-ans-apres-le-seisme-haiti-se-releve-selon-son-president_1816242_3222.html
Haïti: le président Martelly rejette le système actuel de l'aide humanitaire
Par RFI
Le 12 janvier 2010, un séisme d'une magnitude 7 ravageait Haïti, tuant plus de 200 000 personnes. L'élan de solidarité internationale a été massif. Pour aider le pays à se reconstruire, des milliards de dollars de dons ont été promis par les partenaires étrangers. Mais ces montants n'ont pas été entièrement donnés. Et le président haïtien déclare aujourd'hui que ce système d'aide internationale est un échec. Dans le même temps, la commissaire européenne à la coopération internationale et l'aide humanitaire, en visite officielle à Port-au-Prince, a appelé les bailleurs à poursuivre leur soutien pour la reconstruction d'Haïti et promis une aide de 30,5 millions d'euros.
Avec notre correspondante à Port-au-Prince, Amélie Baron
Depuis des décennies et notamment après le séisme de 2010, Haïti a reçu des sommes considérables de la part des bailleurs internationaux. Hélas, l'aide internationale n'a pas empêché la pauvreté de s'aggraver dans le pays.
« Arrêtez d’envoyer de l’argent, changeons le système »
Devant les journalistes étrangers, Michel Martelly a clairement fait part de son rejet du système actuel de l'aide humanitaire : « Nous devons admettre que ce système est dépassé. Nous avons échoué, échoué et échoué. Néanmoins, je voudrais demander au monde de donner du crédit à notre leadership. Nous sommes ici depuis un an et demi et nous sommes ceux qui parlent de l'inefficacité de l'aide et de la coopération. Nous sommes ceux qui demandent des résultats. Nous sommes ceux qui reconnaissent qu'il n'y a aucun résultat. Nous ne sommes pas aveugles. Nous ne voulons pas simplement que l'argent vienne en Haïti. Arrêtez d'envoyer de l'argent, changeons le système.»
Le président haïtien appelle ainsi les bailleurs à mieux penser leur aide financière, en incluant tout d'abord davantage les autorités nationales car si l'Etat reste faible, Haïti sera à chaque fois dépassé par les catastrophes naturelles.
L'Union européenne appelle à la patience dans la reconstruction du pays
Sur place, les besoins humanitaires sont encore nombreux. Plus de 347 000 sinistrés vivent toujours dans des camps de fortune. En visite officielle à Port-au-Prince, la commissaire européenne à la coopération internationale et l'aide humanitaire, Kristelina Georgieva, a annoncé qu'une aide supplémentaire de 30,5 millions d'euros serait débloquée.
A l’opposé des déclarations du président Martelly, la commissaire européenne a appelé les autres bailleurs à ne pas stopper leur aide : « Haïti est un pays qui a souffert de mauvaise gouvernance pendant des décennies, depuis Papa Doc. J'appelle les autres à ne pas se détourner de cette population si sévèrement touchée. La reconstruction va prendre beaucoup de temps et nous aurons à répondre dans le même temps aux besoins urgents et à travailler pour le développement sur le long terme. Nous devons tous êtres réalistes : un pays qui a été si mal géré, pendant si longtemps, nécessite de la patience. »
Relogement des sinistrés du séisme, lutte contre le choléra, contre l'insécurité alimentaire. Les défis d'Haïti sont immenses et les très faibles ressources nationales ne pourront suffire à protéger la population et réduire la pauvreté endémique.
http://www.rfi.fr/ameriques/20130112-haiti-martelly-rejette-systeme-actuel-aide-humanitaire-union-europeenne
Témoignage sur la situation dans le pays et la continuité de la mobilisation dans le Nord.
PAR CHRISTOPHE DECLERCQ
lambersart@lavoixdunord.com
La messe célébrée dans l'église Notre-Dame de la Visitation n'a pas connu forte affluence. Avez-vous l'impression qu'Haïti retombe dans l'oubli ?
« Au début du drame, la générosité des Ch'tis a été tellement forte que les gens faisaient la queue à notre permanence à Lille pour donner leur chèque ou des médicaments. Grâce à eux, nous avons pu très vite envoyer trois avions de vingt-quatre tonnes contenant aussi des béquilles, des fauteuils roulants... Mais, au fur et à mesure que le temps passe, un événement chasse l'autre. La mobilisation s'est progressivement affaiblie. Une misère qui est durable et chronique intéresse moins les médias qui restent dans l'actualité. Pour exemple, on a beaucoup parlé de Sandy à New York alors que la tempête a aussi dévasté notre territoire et tué des animaux d'élevage. »
Que savez-vous de la situation sur place ? Où en est-on aujourd'hui ?
« Il n'y a pas que le problème de l'urgence, il existe aussi un problème de structures. Priorité a été donnée aux opérations d'urgence avec trop peu d'intérêt sur le durable. Pour exemple, on fabrique des tentes à l'étranger alors qu'il faut investir dans des logements durables.
Les besoins ont été définis par les ONG mais pas par l'État haïtien. Notre pays est devenu une république des ONG. Les contrats financiers sont octroyés à des agences non haïtiennes dont le taux d'administration est de 10 % à chaque étape. Alors que nous avons la main d'œuvre et la volonté. La reconstruction est désordonnée. »
Comment les Haïtiens vivent-ils ce quotidien ?
« Sur place, les employés étrangers de ces entreprises privées ont des salaires incroyables, roulent dans de gros 4 x 4 et logent dans des hôtels quatre ou cinq étoiles. Cette débauche de moyens choque les Haïtiens. C'est révoltant ! L'argent est mal utilisé et surtout, le pays n'est pas consulté. Un mouvement de révolte est d'ailleurs né récemment au sein même des États-Unis. »
Au niveau de la scolarisation, quels sont les axes de progrès ?
« Comme l'État est très faible, la plupart des établissements sont privés et donc chers (lire ci-contre ). C'est un problème énorme ! »
De votre côté, quelles peuvent être vos actions ?
« Avec de nombreuses associations du Nord, nous avons la volonté de créer une école dans un petit village situé près de Léogâne ( NDLR : à l'ouest de l'île), un endroit très éloigné de tout. Avec un partenariat privilégié, nous montons des projets ciblés mais surtout durables, qui tiennent compte des besoins réels de la population. »
Après l'office, vous avez participé à un temps de parole animé par l'abbé haïtien Jean-Michel Lops et où chacun a pu échanger librement. Que ressort-il de cette discussion ?
« Les sympathisants du secteur les plus mobilisés sont ceux qui ont de la famille là-bas ou qui ont tissé des liens avec la communauté haïtienne. Comme ces parents qui ont déjà adopté un orphelin et qui se battent aujourd'hui contre un imbroglio juridique pour en adopter un autre. Nous avons aussi évoqué l'histoire du pays et la dette de l'indépendance. »
C'est-à-dire ?
« Si Haïti est si pauvre, c'est parce que les Haïtiens ont dû payer à la France, de 1825 jusqu'en 1946, le préjudice causé aux colons qui ont perdu leurs terres et aussi leurs esclaves au moment de l'indépendance et de l'affranchissement du pays. Cette somme a été estimée puis valorisée à 21 milliards de dollars. Des intellectuels, et notamment des écrivains français, ont d'ailleurs appelé la France à rembourser à Haïti cette fameuse dette de l'indépendance. »
Autre chose dont vous souhaiteriez témoigner pour conclure ?
« Simplement rappeler cette intervention de Christiane Taubira en 2004, avant le séisme et avant qu'elle ne soit ministre :"Il faut que la France et les États-Unis cessent de jouer aux échecs le sort d'Haïti" ».
http://www.lavoixdunord.fr/region/trois-ans-apres-le-seisme-haiti-est-devenu-une-jna20b0n957582
lambersart@lavoixdunord.com
La messe célébrée dans l'église Notre-Dame de la Visitation n'a pas connu forte affluence. Avez-vous l'impression qu'Haïti retombe dans l'oubli ?
« Au début du drame, la générosité des Ch'tis a été tellement forte que les gens faisaient la queue à notre permanence à Lille pour donner leur chèque ou des médicaments. Grâce à eux, nous avons pu très vite envoyer trois avions de vingt-quatre tonnes contenant aussi des béquilles, des fauteuils roulants... Mais, au fur et à mesure que le temps passe, un événement chasse l'autre. La mobilisation s'est progressivement affaiblie. Une misère qui est durable et chronique intéresse moins les médias qui restent dans l'actualité. Pour exemple, on a beaucoup parlé de Sandy à New York alors que la tempête a aussi dévasté notre territoire et tué des animaux d'élevage. »
Que savez-vous de la situation sur place ? Où en est-on aujourd'hui ?
« Il n'y a pas que le problème de l'urgence, il existe aussi un problème de structures. Priorité a été donnée aux opérations d'urgence avec trop peu d'intérêt sur le durable. Pour exemple, on fabrique des tentes à l'étranger alors qu'il faut investir dans des logements durables.
Les besoins ont été définis par les ONG mais pas par l'État haïtien. Notre pays est devenu une république des ONG. Les contrats financiers sont octroyés à des agences non haïtiennes dont le taux d'administration est de 10 % à chaque étape. Alors que nous avons la main d'œuvre et la volonté. La reconstruction est désordonnée. »
Comment les Haïtiens vivent-ils ce quotidien ?
« Sur place, les employés étrangers de ces entreprises privées ont des salaires incroyables, roulent dans de gros 4 x 4 et logent dans des hôtels quatre ou cinq étoiles. Cette débauche de moyens choque les Haïtiens. C'est révoltant ! L'argent est mal utilisé et surtout, le pays n'est pas consulté. Un mouvement de révolte est d'ailleurs né récemment au sein même des États-Unis. »
Au niveau de la scolarisation, quels sont les axes de progrès ?
« Comme l'État est très faible, la plupart des établissements sont privés et donc chers (lire ci-contre ). C'est un problème énorme ! »
De votre côté, quelles peuvent être vos actions ?
« Avec de nombreuses associations du Nord, nous avons la volonté de créer une école dans un petit village situé près de Léogâne ( NDLR : à l'ouest de l'île), un endroit très éloigné de tout. Avec un partenariat privilégié, nous montons des projets ciblés mais surtout durables, qui tiennent compte des besoins réels de la population. »
Après l'office, vous avez participé à un temps de parole animé par l'abbé haïtien Jean-Michel Lops et où chacun a pu échanger librement. Que ressort-il de cette discussion ?
« Les sympathisants du secteur les plus mobilisés sont ceux qui ont de la famille là-bas ou qui ont tissé des liens avec la communauté haïtienne. Comme ces parents qui ont déjà adopté un orphelin et qui se battent aujourd'hui contre un imbroglio juridique pour en adopter un autre. Nous avons aussi évoqué l'histoire du pays et la dette de l'indépendance. »
C'est-à-dire ?
« Si Haïti est si pauvre, c'est parce que les Haïtiens ont dû payer à la France, de 1825 jusqu'en 1946, le préjudice causé aux colons qui ont perdu leurs terres et aussi leurs esclaves au moment de l'indépendance et de l'affranchissement du pays. Cette somme a été estimée puis valorisée à 21 milliards de dollars. Des intellectuels, et notamment des écrivains français, ont d'ailleurs appelé la France à rembourser à Haïti cette fameuse dette de l'indépendance. »
Autre chose dont vous souhaiteriez témoigner pour conclure ?
« Simplement rappeler cette intervention de Christiane Taubira en 2004, avant le séisme et avant qu'elle ne soit ministre :"Il faut que la France et les États-Unis cessent de jouer aux échecs le sort d'Haïti" ».
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