Des responsables d'éçoles mettent les bouchées doubles pour accueillir leurs élèves lundi prochain (Photo: Moranvil Mercidieu) |
« Les accords ont été conclus un peu tard cette année entre le ministère et la Maison Henri Deschamps, soit à la mi-juillet. Mais, nous avons mis les bouchées doubles pour être prêts avant la rentrée scolaire. Tous les manuels subventionnés seront prêts la semaine prochaine », a indiqué M. Peter Frisch au Nouvelliste.
En effet, même si le prix des manuels est rabaissé de 70%, le fardeau des parents est seulement allégé. A quatre jours de la rentrée scolaire, plusieurs d'entre eux, décapitalisés après le séisme du 12, janvier ne savent jusqu'à aujourd'hui à quel saint se vouer pour faciliter leurs enfants à reprendre le chemin de l'école. Ils évoquent l'augmentation des frais scolaires par certains directeurs en dépit de l'annonce du ministère de l'Education nationale qui invitait ces derniers à se solidariser avec les parents qui consentent de grands efforts financiers pour la scolarisation de leurs enfants.
Rencontrée dans une file d'attente à la Maison Deschamps, Nicole venant acheter des manuels pour sa fillette de 11 ans en 5e année fondamentale n'a pas caché sa satisfaction de cette subvention de l'Etat. Toutefois, elle estime que cette subvention est une goutte d'eau dans un océan. « L'année dernière, j'ai payé 15 000 gourdes comme frais scolaires pour ma fille. Cette année, malgré les difficultés auxquelles le pays est confronté, ces frais sont passés à presque 20 000 gourdes, et je dois payer encore la mensualité très chère. Sincèrement, nous en avons marre », a déclaré perplexe la jeune mère qui arrive à payer l'écolage de sa fille grâce à un proche de la diaspora.
Robert, un homme dans la cinquantaine, pour sa part, rencontré aussi dans une file a exprimé sa déception face à un établissement scolaire qui lui a exigé de payer pour sa fille les cinq mois qui ont suivi le séisme. « A cause de ma maison qui a été détruite, j'étais obligé de me déplacer avec ma fille en province où elle a pu boucler l'année académique. A mon retour à Port-au-Prince, la direction de son école m'a exigé de payer les mois d'avril à août si je souhaiterais que l'élève conserve toujours sa place à l'école, alors que j'ai payé tous les frais annuels. C'est anormal !», raconte l'homme, haut comme trois pommes, implorant le ministère de l'Education nationale d'intervenir sur ce genre de dossiers.
Des files d'attente devant la Maison Henri Deschamps où les parents viennent acheter les manuels subventionnés. (Photo: James Alexis) |
Pour permettre à beaucoup plus d'enfants d'aller à l'école, M. Peter Frisch croit qu'il faut dynamiser le plus rapidement possible la reconstruction des écoles. « Ce n'est pas une mince affaire quand l'on sait que le coût de construction a augmenté après le séisme, dit-il. Mais, que l'on veuille ou non, les tentes ou les structures provisoires placées sur les ruines des écoles ne permettent pas d'accommoder les élèves, quand on prend le cas d'un immeuble qui était de trois étages transformé en une simple structure à un seul niveau placé sur la même espace », ajouté l'interlocuteur, affirmant que cette rentrée scolaire « reste et demeure difficile ».
Par ailleurs, si certaines écoles ont déjà accueilli leurs élèves au début de ce mois, bien avant la rentrée officielle fixée le 4 octobre prochain, les responsables d'autres établissements scolaires s'activent encore à mettre les bouchées doubles dans l'aménagement de leur site et continuent d'attendre une « manne » du ministère de l'Education nationale ou de quelques organisations ou agences internationales, comme l'Unicef, très active dans le domaine des activités scolaires, qui ont installé des centaines de tentes-écoles sur les ruines des écoles ravagées par la catastrophe.
La prochaine rentrée scolaire fait suite à une année académique qui s'est achevée dans des conditions très difficiles. Plus de 4 000 écoles ont été détruites par le séisme dans un pays où les besoins en éducation sont scandaleusement immenses. Un enfant sur deux, a souligné l'Unicef, n'allait pas à l'école en Haïti avant le tremblement de terre du 12 janvier 2010. « Contrairement à d'autres pays, en Haïti, tous les parents ont la volonté d'envoyer leurs enfants à l'école, mais il leur manque les moyens », avait déclaré récemment la représentante de l'Unicef en Haïti, Françoise Gruloos-Ackerman.
Valéry DAUDIER
vdaudier@lenouvelliste.com
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=84111&PubDate=2010-09-30