En effectuant des recherches sur les membres de l’invasion anti-duvaliériste ratée du 28 juillet 1958 je suis tombé sur un neveu du Capitaine ALIX PASQUET tué lors de cet épisode de l’histoire récente d’Haïti. Jean-Marie PASQUET. Un personnage fascinant découvert entre les lignes d’un entretien réalisé par Rocio Rodriguez, en novembre 2006 pour la revue « Vetas Magazine ». L’entretien tient sur 13 pages. Nous pensons le retranscrire par segments sur quelques jours de façon à permettre aux lecteurs de ce blog de faire connaissance avec un des nôtres.
Jean-Marc PasquetNé en Suisse (1957), de mère Franco-russe, de père Haïtien, élevé à travers le monde, de culture européenne et métissé de quatre continents, Jean-Marc Pasquet nourrit son imaginaire de ses multiples voyages.
À 13 ans, il quitte Genève pour devenir Maharadjah aux Indes, un pistolet à plomb et 50'000 francs de billets de Monopoly en poche. On le retrouve quelques jours plus tard, dormant dans le Zoo de Turin où il voulait s'habituer aux cris des bêtes féroces. Le pli de l'aventure est pris. Son adolescence mouvementée le voit rebondir de Genève à Addis-Abeba, de Bangkok à New York, de Londres à Madrid, en passant par Port-au-Prince. De sa scolarité, il retient surtout les leçons de l'école buissonnière qu'il pratique avec assiduité dans les forêts proches ou les jungles urbaines.
À 18 ans, il vit entre la Côte d'Ivoire et le Ghana, oscillant dangereusement entre banditisme et musique. C'est la rencontre de musiciens africains, notamment Fela Anikulapo Kuti, qui déterminera ses choix. Il arpente sans le savoir ce qui deviendra plus tard le décor de son premier roman. De retour en Europe, il replonge dans l'écriture à travers la chanson. En 15 ans de musique, il forge son style et sa voix aux feux de la scène, en écrivant plus de 250 chansons qu'il interprète, d'abord avec son groupe de Ska « The Gordini's » puis son groupe de rock tribal « Monkey's Touch ». Il compose, enregistre des disques et se produit sur les scènes européennes. (New-Morning Paris, Paleo Nyon, festival de Leysin, « Gradus ad Parnassum » Moscou)Dès 1991, lauréat d'un concours d'écriture cinématographique, il écrit des scénarios de courts-métrages qu'il réalise et produit lui-même. À la demande de réalisateurs, il écrit plusieurs longs-métrages, et participe à des tournages en tant que comédien, (notamment 1 er rôle dans « Ashakara », long-métrage tourné au Togo par Gérard Louvin). Rassemblant l'efficacité de la structure narrative cinématographique, le rythme des chansons et le lyrisme de la poésie, il se lance dans son premier roman « Nègre Blanc ».
Paru en 1996 aux Editions Robert Laffont, le roman est salué par le public et la critique qui qualifie « Nègre Blanc » de « fusion pananimiste, une érection de l'âme doublée d'un chant d'amour à la femme et à l'Afrique », (A. Duplan, L'Hebdo).
Aux confins des contes Amérindiens, de la cryptozoologie et des légendes urbaines, son nouveau roman « Le Don de Qâ », paru aux Editions Jean-Claude Lattès, en avril 01, se situe au Canada. C'est l'histoire d'amour sensuelle et initiatique de Qâ, la dernière femme poilue des bois, et de Boris, un Européen égaré, citadin incrédule, chaman malgré lui. En une quête haletante, on participe à la métamorphose de Boris, de son départ forcé d'Europe, à son accession à des dons extraordinaires que, grâce à l'aide de chamans Amérindiens, il porte à la connaissance des hommes. Jean-Marc Pasquet se situe dans un courant qu'il appelle « Conscience-Fiction », et collabore avec de nombreux artistes de talent. Il se produit au sein du groupe ZFly, y interprète des chansons tirées du « Don de Qâ », et se livre à des lectures-concerts. Parallèlement, il travaille à son prochain roman, et au livret d'un opéra contemporain.
http://www.jmpasquet.com
Une fenêtre ouverte sur Haïti, le pays qui défie le monde et ses valeurs, anti-nation qui fait de la résistance et pousse les limites de la résilience. Nous incitons au débat conceptualisant Haïti dans une conjoncture mondiale difficile. Haïti, le défi, existe encore malgré tout : choléra, leaders incapables et malhonnêtes, territoires perdus gangstérisés . Pour bien agir il faut mieux comprendre: "Que tout ce qui s'écrit poursuive son chemin, va , va là ou le vent te pousse (Dr Jolivert)
vendredi 31 juillet 2009
"SI" DANS L'HISTOIRE...SI LE CAPITAINE HENRI PERPIGNAN ETAIT NON FUMEUR...L'INVASION ANTI-DUVALIERISTE DE JUILLET 1958
Si le Capitaine Henri Perpignan était non fumeur….
SI on pouvait prendre les commandes du temps et avoir le pouvoir et la faculté de faire machine arrière, l’humanité aurait été encore à ce jour au point de départ. Le scepticisme, la notion de l’inachevé auraient orienté nos actes vers un inamovible point de départ. Fort heureusement alors que nous ne soyons pas maîtres de ce temps dont nous subissons les caprices et les faveurs.
Cependant, souvent nous déplorons ne pas pouvoir revenir sur notre passé, sur le passé et surtout sur certains épisodes de notre histoire, de l’histoire et de celle de nos proches. Pourtant nous vivons constamment avec notre histoire comme structure identitaire. Elle ressasse et nous plaque à la figure le sens de nos choix à un moment déterminé et dans des circonstances données.
Notre histoire n’est rien d ‘autre qu’un ensemble de petites décisions quelques fois prises dans la bonne direction. Souvent des décisions complètement erronées et ratées.
SI au lieu de sourire à ma femme j’avais seulement souri à celle qui était à côté d’elle ?...
SI j’avais tout simplement osé dire non à l’officier d’état civil, le jour de mon mariage ?...
Heureusement aussi que l’histoire ne se reconstitue pas en tenant compte des « SI ». Sauf ce qui concerne le nez de Cléopâtre. Car il est évident que si le nez de Cléopâtre eut été moins long….
Mais il est tout de même rageant de voir des pans d’histoires mal tourner à cause d’un détail insignifiant non indispensable. Si insignifiant qu’ils ne sont même pas envisagés au cours de la planification. Fumeur ou non fumeur…That’s the point !
La lutte sans concession pour le pouvoir en Haïti a maintenu une instabilité politique de plus de 150 ans ponctuée par la première occupation américaine de 1915. Pendant près de 20 ans la gestion du pays a été assurée par les américains tenant les ficelles d’un certain nombre de président-marionnettes qui ont pu terminer leurs mandats présidentiels.
Après l’occupation américaine, Haïti a connu deux gouvernements dirigés par les deux meilleurs présidents de l’histoire : Dumarsais Estimé et Paul Eugène Magloire.
Cependant eux-aussi, ils sont sortis pas la petite porte de l’exile quand ils ont voulu à tout prix conserver ce pouvoir.
Après 1956, le pays était redevenu ingouvernable comme il l’avait été avant l’occupation de 1915. Les intérêts politiques étaient si divergents que les intérêts nationaux s’y trouvaient enfouis dans les dédales de l’obscurantisme partisan aveugle dont la seule cible était le fauteuil présidentiel.
L’armée d’Haïti, la bourgeoisie haïtienne, la classe politique se refusèrent de trouver une entente pour une politique orientée vers le bien être du peuple.
Après la survenue d’évènements les uns les plus invraisemblables que les autres, un concours de circonstances historiques conduisirent le Docteur François Duvalier à la Présidence de la République en 1957. Un autre président de plus. Un président conjoncturel qui ne devrait pas faire long feu à l’instar du populaire Daniel Fignolé pris au piège et chassé du pouvoir après deux semaines.
L’aventure de François Duvalier avait été conçue avec prologue et épilogue. Une sorte de chronique d’une mort annoncée.
Cependant, quand quinze ans plus tard, son fils-successeur Jean-Claude Duvalier disait dans un discours : « mon père a gagné la bataille politique », il avait certainement raison. En effet, pour garder le pouvoir pendant 14 ans, il a fallu se battre sérieusement et vaincre tous les obstacles. Il avait su démanteler puis asservir les forces armées ; décapiter puis réduire au silence l’opposition ; amadouer le peuple en le faisant croire qu’il était le pilier de sa révolution.
Ce ne fut pas sans heurt car les adversaires étaient aussi déterminés à le chasser du pouvoir que lui il était disposé à s’y accrocher.
Une des premières grandes et sérieuses épreuves qu’il a dues affronter reste la première invasion du 28 juillet 1958.
En effet, dans la nuit du 28 au 29 juillet 1958, moins d’un an après l’accession au pouvoir de François Duvalier, un groupe de huit hommes armés, à bord d’un yatch 55 pieds de long, Mollie C, débarquèrent à Délugé près de Montruis. Les huit hommes sont identifiés comme le Capitaine Alix Pasquet, les Lieutenants Henri Perpignan et Philippe (Fito) Dominique, donc des anciens officiers de l'Armée d’Haïti ; Arthur Payne, Dany Jones, Levant Kersten, Robert F. Hickey, Joe D. Walker, de nationalité américaine. Ils avaient embarqué à Miami.
Un habitant de Délugé, ayant observé le débarquement des armes lourdes ont vite fait d’avertir le chef-section qui à son tour ne tarda pas à alerter le post militaire de Saint Marc. Une patrouille militaire de trois soldats est donc envoyée sous le commandement du Lieutenant Léveillé. Il y eut une escarmouche entre les envahisseurs et la patrouille militaire. L’escarmouche devint combat. Les militaires réguliers y compris le lieutenant Léveillé sont tués et du côté des envahisseurs, Arthur Payne reçu une balle à la cuisse.
Les envahisseurs s’emparent du véhicule militaire marque Jeep, y chargent leurs armes et prennent la route vers Port-au-Prince. Sur le trajet, le véhicule tombe en panne. Puisque les anciens militaires, membres de l’invasion portaient les uniformes réguliers de l’armée, ils n’eurent pas beaucoup de difficulté à se procurer une camionnette tap-tap de couleur bleue.
Au milieu des décorations artistiques caractéristiques de ce genre de véhicule de transport, on lisait sur un écriteau posé en haut et en avant « Ma douce Clairmène » et de chaque côté « an depi de tou se bondye ki sel mèt ». Le conducteur du véhicule se croyant en présence des membres de la toute puissante armée haïtienne n’hésita point à aider à charger les armes et à les engouffrer à l’intérieur du tap-tap. Les huit hommes atteignirent donc Port-au-Prince vers minuit. Philippe Dominique conduisait le véhicule avec, assis à ses côtés, Alix Pasquet.
Arrivé devant le portail des Casernes Dessalines, Alix Pasquet dit au soldat en poste qu’il vient d’écrouer quelques citoyens blancs pour le compte du gouvernement. Le portail s’ouvrit sans heurt et les envahisseurs occupent sans résistance les locaux des Casernes Dessalines.
Ils tuent le soldat posté en sentinelle, le colonel Champagne constant officier de garde. Le capitaine Pierre Olly, en tournée d’inspection dans les locaux des Casernes put fuir avec une fracture du bras. Il a été conduit pour des soins à l’hôpital militaire. Choqué et paniqué, l’officier ne sut pas dire l’effectif des mercenaires ayant occupé les enceintes militaires. Un sergent, ordonnance du capitaine Olly a été cependant tué ainsi que le Caporal Bovil. Un autre officier, un médecin Docteur Edouard sera retrouvé mort dans les salles de bains des casernes à la fin des affrontements.
Pasquet et son groupe attaquèrent le Palais National et les Casernes Dessalines en même temps. Les anciens officiers haïtiens connaissaient bien les lieux y ayant été cantonnés.
Cependant, une fois en possession des Casernes Dessalines les envahisseurs pourront constater que François Duvalier avait fait transférer l’ensemble de l’arsenal qu’il avait fait placer sous sa surveillance et son contrôle dans les sous sols du Palais national. François Duvalier avait compris l’importance des Casernes Dessalines dans la planification des coups militaires qui ont jalonné l’histoire récente du pays. Le Capitaine Pasquet essuie un deuxième revers stratégique quand il se mit à appeler ces aniciens camarades, des militaires actifs et d’anciens militaires pour se joindre à lui et que personne n’accepta de l’aider.
L’histoire raconte qu’il appela François Duvalier par téléphone et lui demanda de se venir se rendre avec un drapeau blanc en main dans les locaux des Casernes. Ce dernier lui aurait répondu : - Si vous avez des couilles, venez vous présenter devant moi à la rue des Casernes !
En ce moment, Duvalier ignore tout de l’invasion, les nouvelles parlent de trois cents soldats et mercenaires venant de Miami, ayant déjà occupé les Casernes Dessalines, la garnison militaire la plus importante du pays et située a quelques mètres du Palais national.
Le président pris lui-même les commandes de l’opération. Il fait conduire ses enfants Jean Claude et Simone chez le colonel Merceron puis chez le Capitaine Claude Raymond. La petite histoire rapporte que, devant tant d’incertitude, le Président François Duvalier avait pris la décision de partir …
Au prime abord, le Président Duvalier ne savait pas à qui il avait affaire et combien était le nombre des agresseurs. Ainsi il se revêtit d'un uniforme de soldat et s'apprêtait à fuir. Mais, Le lieutenant Henri Perpignan eut envie de fumer. Il envoya donc un soldat lui acheter deux paquets de cigarettes marque SPLENDIDES.
Grosse erreur !...Énorme connerie !
Le soldat est capturé. Certains disent qu’il s’est rendu lui-même. Il est amené à Monsieur LUCIEN CHAUVET, sous secrétaire d’état de l’intérieur et de la défense nationale. Interrogé, le soldat dira que les envahisseurs n’étaient pas plus nombreux que huit. Personne ne voulut le croire.
Pendant les échanges de tirs entre les Casernes Dessalines et l’artillerie du Palais national, le Colonel Louis Roumain put abandonner les Casernes en sautant par une fenêtre et fuir. C’est lui qui confirmera par la suite les propos du soldat.
François Duvalier ordonna donc une attaque massive contre les Casernes Dessalines et vers neuf heures du matin, les forces régulières reprirent le contrôle de la situation.
Tous les agresseurs seront maîtrisés et tués. Les forces régulières retrouvèrent dans les locaux des Casernes les cadavres d’Alix Pasquet avec le crâne ouvert baignant dans la matière cérébrale éparpillée, Philippe Dominique, Dany Jones et Joe Walker criblés de balles.
Arthur Payne, blessé lors de l’escarmouche de Délugé se rendit, enveloppé dans un matelas, s’identifiant comme un journaliste. Il sera exécuté sans pitié.
Henri Perpignan et Robert Hickey réussirent s’échapper des Casernes. Ce dernier sera identifié par les soldats réguliers qui l’exécuteront d’une balle à la tête. Henri Perpignan se dirigea vers une maison proche des casernes et demandera au gérant de lui permettre de se cacher dans un poulailler. Le gérant entendit le vacarme de la foule à la recherche de l’agresseur. Celui-ci prit de panique s’apprêtait à partir quand Perpignan fit feu et le tua.
Attiré par les coups de feu la foule se précipita sur Perpignan et le tua à coups de couteau. Son cadavre, dépouillé de ses vêtements sera traîné par la foule en folie et en furie jusqu’au palais national.
Levant Kersten, le dernier des envahisseurs américain, réussira à sortir des locaux des Casernes mais subira le même sort que le lieutenant Henri Perpignan.
Ainsi s’acheva l’épopée d’un groupe d’hommes qui avaient pensé pouvoir épargner Haïti et les haïtiens des trente ans de dictature des Duvalier.
En histoire, il n’y a pas de "SI".
Cependant on peut quand même imaginer que si Henri Perpignan eut été non fumeur et pouvait se passer des cigarettes SPLENDIDES, l’invasion de juillet 1958 aurait pu chasser François Duvalier du pouvoir et on aurait hérité ni de Jean-Claude Duvalier, ni des tontons makout, ni de Aristide, ni des chimères, ni de Préval I, ni de Aristide II ni de Préval…LE PAYS AURAIT PU ETRE…DIFFERENT…
Auteur : Docteur Jonas Jolivert
(Référence: Jean Julien in ISTWA PEYI DAYITI..Vol 11 contact jnjull1@aol.com)
SI on pouvait prendre les commandes du temps et avoir le pouvoir et la faculté de faire machine arrière, l’humanité aurait été encore à ce jour au point de départ. Le scepticisme, la notion de l’inachevé auraient orienté nos actes vers un inamovible point de départ. Fort heureusement alors que nous ne soyons pas maîtres de ce temps dont nous subissons les caprices et les faveurs.
Cependant, souvent nous déplorons ne pas pouvoir revenir sur notre passé, sur le passé et surtout sur certains épisodes de notre histoire, de l’histoire et de celle de nos proches. Pourtant nous vivons constamment avec notre histoire comme structure identitaire. Elle ressasse et nous plaque à la figure le sens de nos choix à un moment déterminé et dans des circonstances données.
Notre histoire n’est rien d ‘autre qu’un ensemble de petites décisions quelques fois prises dans la bonne direction. Souvent des décisions complètement erronées et ratées.
SI au lieu de sourire à ma femme j’avais seulement souri à celle qui était à côté d’elle ?...
SI j’avais tout simplement osé dire non à l’officier d’état civil, le jour de mon mariage ?...
Heureusement aussi que l’histoire ne se reconstitue pas en tenant compte des « SI ». Sauf ce qui concerne le nez de Cléopâtre. Car il est évident que si le nez de Cléopâtre eut été moins long….
Mais il est tout de même rageant de voir des pans d’histoires mal tourner à cause d’un détail insignifiant non indispensable. Si insignifiant qu’ils ne sont même pas envisagés au cours de la planification. Fumeur ou non fumeur…That’s the point !
La lutte sans concession pour le pouvoir en Haïti a maintenu une instabilité politique de plus de 150 ans ponctuée par la première occupation américaine de 1915. Pendant près de 20 ans la gestion du pays a été assurée par les américains tenant les ficelles d’un certain nombre de président-marionnettes qui ont pu terminer leurs mandats présidentiels.
Après l’occupation américaine, Haïti a connu deux gouvernements dirigés par les deux meilleurs présidents de l’histoire : Dumarsais Estimé et Paul Eugène Magloire.
Cependant eux-aussi, ils sont sortis pas la petite porte de l’exile quand ils ont voulu à tout prix conserver ce pouvoir.
Après 1956, le pays était redevenu ingouvernable comme il l’avait été avant l’occupation de 1915. Les intérêts politiques étaient si divergents que les intérêts nationaux s’y trouvaient enfouis dans les dédales de l’obscurantisme partisan aveugle dont la seule cible était le fauteuil présidentiel.
L’armée d’Haïti, la bourgeoisie haïtienne, la classe politique se refusèrent de trouver une entente pour une politique orientée vers le bien être du peuple.
Après la survenue d’évènements les uns les plus invraisemblables que les autres, un concours de circonstances historiques conduisirent le Docteur François Duvalier à la Présidence de la République en 1957. Un autre président de plus. Un président conjoncturel qui ne devrait pas faire long feu à l’instar du populaire Daniel Fignolé pris au piège et chassé du pouvoir après deux semaines.
L’aventure de François Duvalier avait été conçue avec prologue et épilogue. Une sorte de chronique d’une mort annoncée.
Cependant, quand quinze ans plus tard, son fils-successeur Jean-Claude Duvalier disait dans un discours : « mon père a gagné la bataille politique », il avait certainement raison. En effet, pour garder le pouvoir pendant 14 ans, il a fallu se battre sérieusement et vaincre tous les obstacles. Il avait su démanteler puis asservir les forces armées ; décapiter puis réduire au silence l’opposition ; amadouer le peuple en le faisant croire qu’il était le pilier de sa révolution.
Ce ne fut pas sans heurt car les adversaires étaient aussi déterminés à le chasser du pouvoir que lui il était disposé à s’y accrocher.
Une des premières grandes et sérieuses épreuves qu’il a dues affronter reste la première invasion du 28 juillet 1958.
En effet, dans la nuit du 28 au 29 juillet 1958, moins d’un an après l’accession au pouvoir de François Duvalier, un groupe de huit hommes armés, à bord d’un yatch 55 pieds de long, Mollie C, débarquèrent à Délugé près de Montruis. Les huit hommes sont identifiés comme le Capitaine Alix Pasquet, les Lieutenants Henri Perpignan et Philippe (Fito) Dominique, donc des anciens officiers de l'Armée d’Haïti ; Arthur Payne, Dany Jones, Levant Kersten, Robert F. Hickey, Joe D. Walker, de nationalité américaine. Ils avaient embarqué à Miami.
Un habitant de Délugé, ayant observé le débarquement des armes lourdes ont vite fait d’avertir le chef-section qui à son tour ne tarda pas à alerter le post militaire de Saint Marc. Une patrouille militaire de trois soldats est donc envoyée sous le commandement du Lieutenant Léveillé. Il y eut une escarmouche entre les envahisseurs et la patrouille militaire. L’escarmouche devint combat. Les militaires réguliers y compris le lieutenant Léveillé sont tués et du côté des envahisseurs, Arthur Payne reçu une balle à la cuisse.
Les envahisseurs s’emparent du véhicule militaire marque Jeep, y chargent leurs armes et prennent la route vers Port-au-Prince. Sur le trajet, le véhicule tombe en panne. Puisque les anciens militaires, membres de l’invasion portaient les uniformes réguliers de l’armée, ils n’eurent pas beaucoup de difficulté à se procurer une camionnette tap-tap de couleur bleue.
Au milieu des décorations artistiques caractéristiques de ce genre de véhicule de transport, on lisait sur un écriteau posé en haut et en avant « Ma douce Clairmène » et de chaque côté « an depi de tou se bondye ki sel mèt ». Le conducteur du véhicule se croyant en présence des membres de la toute puissante armée haïtienne n’hésita point à aider à charger les armes et à les engouffrer à l’intérieur du tap-tap. Les huit hommes atteignirent donc Port-au-Prince vers minuit. Philippe Dominique conduisait le véhicule avec, assis à ses côtés, Alix Pasquet.
Arrivé devant le portail des Casernes Dessalines, Alix Pasquet dit au soldat en poste qu’il vient d’écrouer quelques citoyens blancs pour le compte du gouvernement. Le portail s’ouvrit sans heurt et les envahisseurs occupent sans résistance les locaux des Casernes Dessalines.
Ils tuent le soldat posté en sentinelle, le colonel Champagne constant officier de garde. Le capitaine Pierre Olly, en tournée d’inspection dans les locaux des Casernes put fuir avec une fracture du bras. Il a été conduit pour des soins à l’hôpital militaire. Choqué et paniqué, l’officier ne sut pas dire l’effectif des mercenaires ayant occupé les enceintes militaires. Un sergent, ordonnance du capitaine Olly a été cependant tué ainsi que le Caporal Bovil. Un autre officier, un médecin Docteur Edouard sera retrouvé mort dans les salles de bains des casernes à la fin des affrontements.
Pasquet et son groupe attaquèrent le Palais National et les Casernes Dessalines en même temps. Les anciens officiers haïtiens connaissaient bien les lieux y ayant été cantonnés.
Cependant, une fois en possession des Casernes Dessalines les envahisseurs pourront constater que François Duvalier avait fait transférer l’ensemble de l’arsenal qu’il avait fait placer sous sa surveillance et son contrôle dans les sous sols du Palais national. François Duvalier avait compris l’importance des Casernes Dessalines dans la planification des coups militaires qui ont jalonné l’histoire récente du pays. Le Capitaine Pasquet essuie un deuxième revers stratégique quand il se mit à appeler ces aniciens camarades, des militaires actifs et d’anciens militaires pour se joindre à lui et que personne n’accepta de l’aider.
L’histoire raconte qu’il appela François Duvalier par téléphone et lui demanda de se venir se rendre avec un drapeau blanc en main dans les locaux des Casernes. Ce dernier lui aurait répondu : - Si vous avez des couilles, venez vous présenter devant moi à la rue des Casernes !
En ce moment, Duvalier ignore tout de l’invasion, les nouvelles parlent de trois cents soldats et mercenaires venant de Miami, ayant déjà occupé les Casernes Dessalines, la garnison militaire la plus importante du pays et située a quelques mètres du Palais national.
Le président pris lui-même les commandes de l’opération. Il fait conduire ses enfants Jean Claude et Simone chez le colonel Merceron puis chez le Capitaine Claude Raymond. La petite histoire rapporte que, devant tant d’incertitude, le Président François Duvalier avait pris la décision de partir …
Au prime abord, le Président Duvalier ne savait pas à qui il avait affaire et combien était le nombre des agresseurs. Ainsi il se revêtit d'un uniforme de soldat et s'apprêtait à fuir. Mais, Le lieutenant Henri Perpignan eut envie de fumer. Il envoya donc un soldat lui acheter deux paquets de cigarettes marque SPLENDIDES.
Grosse erreur !...Énorme connerie !
Le soldat est capturé. Certains disent qu’il s’est rendu lui-même. Il est amené à Monsieur LUCIEN CHAUVET, sous secrétaire d’état de l’intérieur et de la défense nationale. Interrogé, le soldat dira que les envahisseurs n’étaient pas plus nombreux que huit. Personne ne voulut le croire.
Pendant les échanges de tirs entre les Casernes Dessalines et l’artillerie du Palais national, le Colonel Louis Roumain put abandonner les Casernes en sautant par une fenêtre et fuir. C’est lui qui confirmera par la suite les propos du soldat.
François Duvalier ordonna donc une attaque massive contre les Casernes Dessalines et vers neuf heures du matin, les forces régulières reprirent le contrôle de la situation.
Tous les agresseurs seront maîtrisés et tués. Les forces régulières retrouvèrent dans les locaux des Casernes les cadavres d’Alix Pasquet avec le crâne ouvert baignant dans la matière cérébrale éparpillée, Philippe Dominique, Dany Jones et Joe Walker criblés de balles.
Arthur Payne, blessé lors de l’escarmouche de Délugé se rendit, enveloppé dans un matelas, s’identifiant comme un journaliste. Il sera exécuté sans pitié.
Henri Perpignan et Robert Hickey réussirent s’échapper des Casernes. Ce dernier sera identifié par les soldats réguliers qui l’exécuteront d’une balle à la tête. Henri Perpignan se dirigea vers une maison proche des casernes et demandera au gérant de lui permettre de se cacher dans un poulailler. Le gérant entendit le vacarme de la foule à la recherche de l’agresseur. Celui-ci prit de panique s’apprêtait à partir quand Perpignan fit feu et le tua.
Attiré par les coups de feu la foule se précipita sur Perpignan et le tua à coups de couteau. Son cadavre, dépouillé de ses vêtements sera traîné par la foule en folie et en furie jusqu’au palais national.
Levant Kersten, le dernier des envahisseurs américain, réussira à sortir des locaux des Casernes mais subira le même sort que le lieutenant Henri Perpignan.
Ainsi s’acheva l’épopée d’un groupe d’hommes qui avaient pensé pouvoir épargner Haïti et les haïtiens des trente ans de dictature des Duvalier.
En histoire, il n’y a pas de "SI".
Cependant on peut quand même imaginer que si Henri Perpignan eut été non fumeur et pouvait se passer des cigarettes SPLENDIDES, l’invasion de juillet 1958 aurait pu chasser François Duvalier du pouvoir et on aurait hérité ni de Jean-Claude Duvalier, ni des tontons makout, ni de Aristide, ni des chimères, ni de Préval I, ni de Aristide II ni de Préval…LE PAYS AURAIT PU ETRE…DIFFERENT…
Auteur : Docteur Jonas Jolivert
(Référence: Jean Julien in ISTWA PEYI DAYITI..Vol 11 contact jnjull1@aol.com)
Inscription à :
Articles (Atom)