2 millions de dollars alloués à la PNH pour l’entretien de son parc automobile et 1,5 million consacrés à la lutte contre la drogue
mardi 16 octobre 2007,
Radio Kiskeya
Le ministre haïtien de la justice, Me René Magloire et l’ambassadeur des Etats-Unis à Port-au-Prince, Janet Ann Sanderson ont paraphé mardi un accord de don de 3,5 millions de dollars en appui à la Police Nationale et à la lutte contre le narcotrafic.
Selon un communiqué du ministère de la justice, de ce montant, deux millions de dollars sont destinés au budget direct de la PNH. Ils serviront à l’entretien du parc automobile de l’institution afin de "renforcer la capacité des policiers à répondre plus efficacement aux besoins de la population et d’intensifier leur présence à travers la capitale".
Cette nouvelle enveloppe porte à 60 millions de dollars l’appui budgétaire fourni par les Etats-Unis à la Police Nationale depuis 2004.
D’autre part, 1,5 million de dollars seront consacrés à la lutte contre le trafic de stupéfiants.
La cérémonie de signature de cet accord bilatéral s’est déroulée au ministère de la justice en présence notamment du ministre de la planification et de la coopération externe, Jean-Max Bellerive et du secrétaire d’Etat à la sécurité publique, Eucher-Luc Joseph.
Dans son rapport 2007 sur le narcotrafic, Washington place Haïti parmi les vingt principaux pays producteurs et de transit.
Pour sa part, le Conseil de sécurité de l’ONU vient d’inclure la lutte contre le trafic de drogue dans le nouveau mandat des casques bleus prorogé d’un an lundi à New York. spp/Radio Kiskeya
http://www.radiokiskeya.com/spip.php?article4289
Une fenêtre ouverte sur Haïti, le pays qui défie le monde et ses valeurs, anti-nation qui fait de la résistance et pousse les limites de la résilience. Nous incitons au débat conceptualisant Haïti dans une conjoncture mondiale difficile. Haïti, le défi, existe encore malgré tout : choléra, leaders incapables et malhonnêtes, territoires perdus gangstérisés . Pour bien agir il faut mieux comprendre: "Que tout ce qui s'écrit poursuive son chemin, va , va là ou le vent te pousse (Dr Jolivert)
mercredi 17 octobre 2007
Les inondations affectent 700.000 enfants en Haïti, selon l’UNICEF
Les responsables de l’agence onusienne préoccupés par l’accès difficile des localités sinistrées ; l’OIM achemine de l’aide sur le terrain où au moins 37 personnes ont été tuées et 78 autres blessées ; 1,4 million de personnes ont besoin d’assistance
mardi 16 octobre 2007,
Radio Kiskeya
Le Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF) a exprimé mardi à Genève (Suisse) ses préoccupations face à la situation précaire de 700.000 enfants haïtiens à la suite des inondations ayant affecté le pays au cours des deux dernières semaines, rapporte une dépêche d’EFE.
"La situation est inquiétante, surtout lorsqu’on sait que la vie des enfants est particulièrement préoccupante et difficile en Haïti où le taux de mortalité des enfants de cinq ans est de 177 pour 1.000 naissances vivantes", a affirmé la porte-parole de l’UNICEF, Véronique Tavau.
A titre indicatif, elle a souligné que dans les pays industrialisés comme les Etats-Unis le taux de mortalité infantile est de seulement 8 pour 1.000.
Mme Tavau a également mis l’emphase sur le fait que les agences humanitaires étaient confrontées à d’énormes difficultés d’accès aux familles sinistrées, certaines zones d’Haïti étant encore isolées par les effets des inondations. En dépit de cette situation, l’UNICEF et des organisations non gouvernementales (ONG) ont pu distribuer des matériels sanitaires dont des pastilles consistant à rendre l’eau potable.
L’agence onusienne souligne également que l’Organisation Internationale de la Migration (OIM) a de son côté commencé à distribuer de l’aide humanitaire à la population de Cabaret (35 km au nord de Port-au-Prince), la zone la plus gravement touchée par les pluies diluviennes.
L"OIM a distribué au cours des quinze derniers jours des articles de première nécessité aux personnes victimes de la montée des eaux aux Gonaïves (171 km au nord de la capitale), a indiqué son porte-parole, Jean-Philippe Chauzy, interrogé à Genève.
L’UNICEF et l’OIM ont dépêché des missions d’information dans les zones les plus dévastées afin d’établir les priorités de l’aide humanitaire d’urgence qui doit être débloquée en faveur 1,4 millions de personnes en dificulté.
Selon le dernier bilan provisoire de la protection civile, révisé à la baisse, les inondations enregistrées dans presque tous les dix départements, en raison du passage d’une énorme onde tropicale, ont fait au moins 37 morts et 78 blessés et des milliers de familles sinistrées. Des centaines de maisonnettes ont été également détruites, des têtes de bétail emportées et des plantations agricoles transformées en torrents de boue.
27 des 37 corps ont été dénombrés à Cabaret et à la Croix-des-Bouquets (nord de la capitale), deux communes où les crues des rivières ont été particulièrement dévastatrices.
Les autorités haïtiennes et un fabricant local de cigarettes, la compagnie Comme Il Faut, ont accordé respectivement des fonds d’urgence et des dons à certaines des zones ayant du mal à se remettre de ces graves inondations.
Mardi, le Premier ministre Jacques-Edouard Alexis s’est réuni avec les différentes agences onusiennes afin de coordonner l’aide humanitaire. Il devrait avoir aussi une séance de travail jeudi avec les parlementaires représentant les régions sinistrées. spp/Radio Kiskeya
http://www.radiokiskeya.com/spip.php?article4290
mardi 16 octobre 2007,
Radio Kiskeya
Le Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (UNICEF) a exprimé mardi à Genève (Suisse) ses préoccupations face à la situation précaire de 700.000 enfants haïtiens à la suite des inondations ayant affecté le pays au cours des deux dernières semaines, rapporte une dépêche d’EFE.
"La situation est inquiétante, surtout lorsqu’on sait que la vie des enfants est particulièrement préoccupante et difficile en Haïti où le taux de mortalité des enfants de cinq ans est de 177 pour 1.000 naissances vivantes", a affirmé la porte-parole de l’UNICEF, Véronique Tavau.
A titre indicatif, elle a souligné que dans les pays industrialisés comme les Etats-Unis le taux de mortalité infantile est de seulement 8 pour 1.000.
Mme Tavau a également mis l’emphase sur le fait que les agences humanitaires étaient confrontées à d’énormes difficultés d’accès aux familles sinistrées, certaines zones d’Haïti étant encore isolées par les effets des inondations. En dépit de cette situation, l’UNICEF et des organisations non gouvernementales (ONG) ont pu distribuer des matériels sanitaires dont des pastilles consistant à rendre l’eau potable.
L’agence onusienne souligne également que l’Organisation Internationale de la Migration (OIM) a de son côté commencé à distribuer de l’aide humanitaire à la population de Cabaret (35 km au nord de Port-au-Prince), la zone la plus gravement touchée par les pluies diluviennes.
L"OIM a distribué au cours des quinze derniers jours des articles de première nécessité aux personnes victimes de la montée des eaux aux Gonaïves (171 km au nord de la capitale), a indiqué son porte-parole, Jean-Philippe Chauzy, interrogé à Genève.
L’UNICEF et l’OIM ont dépêché des missions d’information dans les zones les plus dévastées afin d’établir les priorités de l’aide humanitaire d’urgence qui doit être débloquée en faveur 1,4 millions de personnes en dificulté.
Selon le dernier bilan provisoire de la protection civile, révisé à la baisse, les inondations enregistrées dans presque tous les dix départements, en raison du passage d’une énorme onde tropicale, ont fait au moins 37 morts et 78 blessés et des milliers de familles sinistrées. Des centaines de maisonnettes ont été également détruites, des têtes de bétail emportées et des plantations agricoles transformées en torrents de boue.
27 des 37 corps ont été dénombrés à Cabaret et à la Croix-des-Bouquets (nord de la capitale), deux communes où les crues des rivières ont été particulièrement dévastatrices.
Les autorités haïtiennes et un fabricant local de cigarettes, la compagnie Comme Il Faut, ont accordé respectivement des fonds d’urgence et des dons à certaines des zones ayant du mal à se remettre de ces graves inondations.
Mardi, le Premier ministre Jacques-Edouard Alexis s’est réuni avec les différentes agences onusiennes afin de coordonner l’aide humanitaire. Il devrait avoir aussi une séance de travail jeudi avec les parlementaires représentant les régions sinistrées. spp/Radio Kiskeya
http://www.radiokiskeya.com/spip.php?article4290
Haïti/R.dominicaine/Massacre de 1937 : Pour répondre à un devoir de mémoire
Mercredi 17 octobre 2007
Le massacre des Haïtiens en République Dominicaine a été un acte inique qui interpelle encore aujourd’hui la conscience des Dominicains et des Haïtiens. Pour répondre à ce devoir de mémoire, je me donne la mission de retracer les circonstances de cette horrible tragédie.
Les générations présentes doivent savoir ce qui s’est réellement passé ces tristes jours d’octobre de l’année 1937.
Ce sera une façon d’honorer la mémoire des disparus, de se souvenir d’un moment difficile de l’histoire nationale et de reconnaître aussi la nécessité, face à la réaction pusillanime et presque complice du gouvernement d’alors, d’une diplomatie au service des intérêts nationaux.
Soumis à AlterPresse le 16 octobre 2007
Par Maismy-Mary FLEURANT*
Le massacre des Haïtiens par le gouvernement de Trujillo en 1937
Pour répondre à un devoir de mémoire
Ce devoir de mémoire ne doit pas conduire à un regain de nationalisme et de xénophobie. Les peuples évoluent, les mentalités aussi.
Se souvenir est le moyen de comprendre le passé et de construire un avenir, qui, dans le cadre des relations haïtiano-dominicaines, doit se voir dans une perspective de coexistence pacifique dans le respect des différences.
Les circonstances du génocide
Le 2 octobre 1937, le dictateur dominicain Raphael Leonidas Trujillo y Molina était en tournée à Dajabon.
Après une réception donnée en son honneur à la résidence de Doña Isabel Mayer, Trujillo s’adressa à ses partisans venus l’acclamer. Son discours était un réquisitoire sans pitié contre les Haïtiens présents dans la province du Nord.
Le dictateur déclara :
« J’ai appris que les Haïtiens volent de la nourriture et du bétail aux fermiers. Aux Dominicains qui se plaignent de ces déprédations de la part des Haïtiens qui vivent parmi eux, je réponds : ‘Nous règlerons cette affaire.’ D’ailleurs, nous avons déjà commencé. Environ trois cents Haïtiens ont été tués à Banica. Et nous devons continuer à résoudre ce problème ». [1]
C’était un ordre de tuer. Le massacre commença la nuit même de ce 2 octobre et va se continuer jusqu’au 4 octobre, faisant entre 15 et 20 mille morts. [2] .
Le Dr. Price-Mars explique :
[…] , le carnage des Haïtiens, à l’arme blanche, commença dans la ville même. Femmes, vieillards, enfants, hommes valides, tout y passa. Ce fut dans cette nuit tragique un sauve-qui-peut formidable des résidents haïtiens de Dajabon et des environs, blessés ou non, à travers la rivière pour atteindre Ouanaminthe où l’alarme fut donnée. […] Du 2 au 4 octobre, pendant trente-six heures, la symphonie rouge en nappes lourdes répandit la tristesse des sanglots, des lamentations, des hoquets d’agonie vomis par la multitude haïtienne. [3] .
A Monte Cristi, à Dajabon, à Banica, Las Vegas, Santo Cerro, Guagual, à Villa Vasquez, Copey, Guayubin, Abucate, Esperanza, La Loma, à San Francisco de Macoris, Pelader, Mao, Puerto-Plata, Guayacan, Santiago de la Cruz, Alta Manillo, pour ne citer que ces localités, la chasse à l’Haïtien fut lancée. Elle fut féroce et impitoyable.
A Monte Cristi, les Haïtiens furent jetés à la mer pour y être dévorés par les requins. D’autres furent exécutés dans les prisons où on les avait rassemblés. Des Haïtiens furent conduits sur la route de Dajabon pour y être effroyablement assassinés.
Les Haïtiens, en fuite, se hâtèrent vers la rivière Massacre où les attendaient les militaires dominicains qui leur barrèrent la route et les obligèrent à retourner par petits groupes dans les sous-bois pour y être découpés à la baïonnette et à la machette. Plusieurs dizaines d’haïtiens périrent noyés en essayant de passer le Massacre à la nage.
Les femmes et les enfants ne furent pas épargnés. Leur sort fut encore plus horrible.
Les femmes devaient écarter les deux bras, pour se voir enfoncer une fourche à travers le corps.
Les bébés furent pris par les pieds, avant d’avoir le crâne fracassé contre les murs des maisons. Certains sont envoyés en l’air pour être accueillis avec la pointe des baïonnettes.
Suzy Castor a rapporté les témoignages de certains survivants, comme Osse Saint-Vil ou Marguerite Pierrot qui perdit en une seule nuit son mari, ses neuf enfants, ses belles-sœurs, les trois enfants de celles-ci et sa mère.
Les habitants de Ouanaminthe furent les témoins horrifiés et impuissants du drame. Le curé de la ville, le Père Robert, fait état de nombreux cadavres enterrés à la hâte dans des fosses communes ou tout bonnement arrosés d’essence et brûlés.
Les premiers blessés arrivèrent à Ouanaminthe dès le matin du 3 octobre. On organisa rapidement leur transfert vers la ville du Cap-Haïtien.
Ceux qui ont réussi à fuir, traumatisés et apeurés, faisaient le récit du monstrueux carnage. Dans tous les points de la frontière, des réfugiés, des blessés, tous rescapés du massacre affluèrent.
L’on apprit alors que le simple fait de ne pas pouvoir prononcer correctement les mots « perejil » et « cotorro » équivalait à une condamnation à mort. C’est comme cela que les tueurs dominicains identifiaient, lorsqu’ils avaient un doute, l’Haïtien qui pouvait difficilement articuler ces mots espagnols. La vie d’une personne humaine n’avait tenu dans ces moments terribles que dans la prononciation d’un mot.
La réaction du gouvernement haïtien : entre compromission et soumission
Le gouvernement de Trujillo fit tout pour cacher l’ampleur du génocide. La presse dominicaine, muselée, n’en fit pas écho. Le gouvernement haïtien, dirigé à ce moment par le président Sténio Vincent, fut officiellement informé par un rapport de Arnold Fabre, Consul haïtien à Dajabon. Mais, les dirigeants haïtiens optèrent, dès le départ, pour une politique de compromission et de soumission face à Trujillo.
Vincent s’empressa, le 10 octobre, d’écrire à « son ami » Trujillo pour solliciter une « solution juste et humanitaire ». L’ambassadeur d’Haïti en République Dominicaine, Evremont Carrié, assurait le Ministre dominicain des Affaires Étrangères, Joaquim Balaguer, que le gouvernement haïtien « met hors de cause la haute personnalité du président Trujillo et son gouvernement ».
Le 15 octobre 1937, l’ambassadeur signa un communiqué conjoint avec le chancelier Balaguer assurant de l’amitié des deux chefs d’État et de l’harmonie des deux peuples. [4] .
Il est regrettable de voir que ce communiqué, signé par notre ambassadeur et le chancelier Joaquim Balaguer, minimise et banalise ce crime, en parlant, au lieu de tuerie, de « quelques incidents qui ont eu lieu à la frontière Nord entre Haïtiens et Dominicains. »
Les gouvernements voulaient d’ailleurs prévenir par ce communiqué « des commentaires exagérés et contraires à l’harmonie et à la cordialité » des deux peuples et des deux présidents Vincent et Trujillo.
Ce fut une première victoire pour la diplomatie dominicaine, qui voulait absolument faire d’un crime d’Etat un simple affrontement entre paysans dominicains et haïtiens. Dans la préparation et l’exécution du crime, pour préparer l’opinion à une telle version des faits, ordre fut donné aux militaires de ne pas utiliser leurs armes à feu.
Le massacre se fit à l’arme blanche, à la baïonnette et à la machette. Les Dominicains gardent en mémoire le souvenir de La Corte, la (la coupe). Les Haïtiens de la frontière parlent de Kout Kouto (coups de couteaux) lorsqu’ils évoquent le massacre. A l’analyse de ces faits, nous pouvons conclure avec Leslie Manigat que cette boucherie fut un acte d’État commis sur ordre par les militaires dominicains, non pas par de simples particuliers. [5] .
La honteuse politique d’abdication du gouvernement de Vincent, pour reprendre les mots de Suzy Castor, révolta la conscience nationale.
Alors que les journaux étrangers faisaient l’écho du génocide, alors que les blessés agonisaient à l’hôpital du Cap-Haïtien, alors que des milliers de nos compatriotes arrivaient, démunis et dépossédés de tout, traumatisés par trois jours d’horreur sans nom, Vincent préféra garder un profil bas, avalisant sans vergogne la position du gouvernement dominicain.
Cependant, Trujillo ne put cacher l’ampleur du drame.
L’opinion mondiale était alertée par des dépêches de plusieurs agences de presse, comme la United Press. Des articles du New York Times commençaient à relever les circonstances du massacre. On commençait à estimer le nombre des tués. Il fut bientôt clair que les victimes se comptaient par milliers.
L’opinion nationale s’émut et commença à questionner la position du gouvernement. L’agitation gagnait Port-au-Prince, indignée et meurtrie. Des militaires profitèrent même de ce climat tendu et explosif pour méditer un coup d’Etat contre Vincent.
Aux Etats-Unis, le député républicain Fisher exigea même de son gouvernement une rupture avec le sanguinaire régime de Trujillo. Vincent comprit alors qu’il lui fallait changer de position. Abandonnant les négociations directes avec Ciudad Trujillo, il recourut à l’arbitrage interaméricain.
Le gouvernement haïtien utilisa la procédure prévue par le traité de Gondra de Santiago de Chili du 3 mai 1923 et la Convention de Washington du 5 janvier 1926.
Le 11 décembre 1937, il saisit donc la Commission permanente de Washington. Les Etats-Unis d’Amérique, le Mexique et Cuba composèrent la commission d’enquête. Cependant, Trujillo fit des résistances.
Devant son refus de coopérer, la Commission conclut, le 15 décembre, que des sanctions devraient être prises contre la République Dominicaine en application de l’accord de 1923, car l’incident était de nature à « perturber la paix dans l’hémisphère occidental. »
Craignant une condamnation internationale et l’application de sanctions qui prouveraient la faute de son gouvernement, Trujillo céda. Le 17 décembre, il câbla un télégramme à la commission, par lequel il accepta l’arbitrage.
L’affaire connut, cependant, un nouveau rebondissement quelques jours plus tard.
Alors que la Commission allait enfin commencer ses travaux, le gouvernement d’Haïti, par une lettre adressée le 3 janvier 1938 aux gouvernements la formant, retira sa plainte et fit part de son intention de traiter directement avec le gouvernement dominicain.
C’était un nouveau coup de théâtre, aussi surprenant qu’incompréhensible, dans un moment où l’opinion publique internationale était favorable à la cause haïtienne.
Cette politique de lâche soumission allait aboutir à la signature d’un nouvel accord le 31 janvier 1938 à Washington.
Aux termes de cet accord dégradant, le gouvernement dominicain exprime des regrets et donne l’assurance de lancer les procédures judiciaires « destinées à éclaircir ces faits et à punir les infractions ». L’État dominicain s’engageait encore à payer 750 000 dollars, comme compensation financière aux victimes du drame.
Cet argent a servi à la création de trois colonies agricoles en Haïti pour les rescapés du massacre : à D’Osmond, près de Ouanaminthe, au morne des commissaires et à Biliguy dans le Plateau Central. Leslie Manigat indique que la République Dominicaine n’a versé en fait que 500 000 dollars américains, soit de 25 à 33 dollars par tête d’Haïtiens tués. [6] .
Il est inutile de dire que l’histoire n’a retenu le nom d’aucun Dominicain condamné pour le massacre.
L’Accord du 15 octobre 1937 et celui du 31 janvier 1938 sont appelés les « accords de la honte » par les historiens haïtiens. Sténio Vincent et son gouvernement ont écrit l’une des pages les plus tristes et les plus sombres de notre histoire et de notre diplomatie.
Les causes du Massacre
1. Le problème des frontières
En 1844, les patriotes dominicains s’affranchirent de 21 ans de présence haïtienne et déclarèrent l’indépendance de leur pays qui prit le nom de République Dominicaine.
Cependant, jusqu’à la fin du siècle, les chefs d’État haïtiens considérèrent le territoire voisin comme faisant partie intégrante du territoire haïtien et refusèrent de reconnaître l’indépendance dominicaine. Ils organisèrent plusieurs expéditions de reconquête qui, toutes, échouèrent.
Le premier pas vers une reconnaissance de la République Dominicaine sera fait par le président haïtien Fabre Nicolas Geffrard, lorsque le général dominicain Pedro Santana accepta d’aliéner l’indépendance de son pays en signant un traité d’annexion à l’Espagne en 1861.
Haïti s’opposa, par tous les moyens, à l’Espagne qui dut battre en retraite. Grâce à une médiation haïtienne, après quatre années d’occupation, l’Espagne libéra le sol dominicain en 1865. Le président venait de sauver l’indépendance dominicaine.
Le Traité solennel de paix, d’amitié et de commerce du 26 juillet 1867 marque une autre étape dans la normalisation des relations entre les deux États.
Cependant, le premier instrument bilatéral, qui met réellement fin à une ère de luttes et de guerres perpétuelles, est le Traité de paix, d’amitié, de commerce, de navigation et d’extradition haïtiano-dominicain du 9 novembre 1874. [7] .
Par ce traité, la République d’Haïti reconnaît formellement la partie de l’Est comme un État indépendant et souverain.
Malgré cette reconnaissance réciproque et cette affirmation de vivre dans la paix et l’harmonie, le problème du tracé de la frontière va rester un véritable point d’achoppement dans les relations entre les deux pays. Plusieurs traités bilatéraux vont tenter de le résoudre.
À la fin du XIXe siècle, l’Accord du 18 avril 1898, signé par les présidents dominicain et haïtien, Ulysse Heuraux et Tirésias Simon Sam, reconnaissait à Haïti le droit de garder ses frontières de 1874, avec une compensation en argent de 1 million de dollars en faveur de l’État dominicain. Cependant, devant les difficultés d’application de la Convention de 1898, une Convention interprétative fut signée entre les présidents des deux États le 28 mai 1899.
Ce sont les accords de 1929 et de 1936 et le Protocole additionnel de 1936 qui sont venus délimiter définitivement la frontière. En 1929, Haïti était occupée par les Américains. Ces derniers voulaient mettre définitivement fin au différend haïtiano-dominicain sur la question du tracé de la frontière. Ils pressèrent les deux gouvernements de signer, le 21 janvier 1929, l’Accord binational de délimitation de la frontière.
Cet accord était nettement préjudiciable pour Haïti, car il dépossédait le pays de plus de 45 000 hectares de terre.
Trujillo accepta une révision de cet accord, ce qui permit la signature d’un nouveau traité, l’Accord de Paix, d’amitié perpétuelle et d’arbitrage du 27 février 1935. Un Protocole additionnel à l’Accord de 1929 fut enfin signé à Port-au-Prince le 9 mars 1936.
Les nouveaux accords réglèrent la situation à la satisfaction des deux États et permirent à l’État haïtien de récupérer la majeure partie des terres livrées aux Dominicains à la suite de l’Accord de 1929. La frontière définitive ainsi établie est longue de 360 km.
On ne comprend pas pourquoi Trujillo, un an après la signature du Protocole de 1936, ordonna le massacre des Haïtiens vivant sur son territoire. Cet acte s’explique, pourtant, par la volonté du dictateur de résoudre définitivement le problème de la frontière. Celle-ci était définitivement tracée par les accords de 1929, 1935 et 1936. Cependant, un nombre considérable d’Haïtiens vivaient en République Dominicaine.
En 1935, la population de la République Dominicaine était officiellement estimée à 1,5 million d’habitants.
Suite à une migration qui a commencé à la fin du XIXe siècle et qui s’était amplifiée à partir des années 1915, 1916 et 1917, suite à l’expansion de l’industrie sucrière dominicaine, le département dominicain des statistiques recensait aussi cette même année 52,657 haïtiens dans le pays. Ce chiffre était certainement au dessous de la réalité.
Joaquim Balaguer, alors Ministre des Affaires Etrangères, estimait que les Haïtiens représentaient plus d’un quart de la population totale du pays. Ces Haïtiens étaient surtout établis sur la frontière qui, en fait, n’existait que sur le papier. Trujillo avait, après la délimitation purement physique et géographique, voulu faire une délimitation ethnique, en « débarrassant » les provinces frontalières de la présence haïtienne.
Juan Almoina, exilé espagnol cité par Suzy Castor, croyait que le génocide « … clarifiait la situation une fois pour toutes et libérait le futur de la patrie. Trujillo a pris une mesure énergique qui règle la question de la frontière pour toujours. »
2. La question raciale
Les origines raciales différentes des deux peuples ont toujours posé un problème dans les relations entre les Etats. Les Haïtiens sont majoritairement descendants d’esclaves noirs importés d’Afrique, alors que les Dominicains forment une race métissée, une société mulâtre, qui s’assimile au blanc et n’en est encore que plus raciste et plus haïtianophobe.
Un ouvrage, publié par le Service Jésuite des Réfugiés et Migrants sur l’attitude raciale en République Dominicaine, révèle que la haine de l’Haïtien est surtout le fait des groupes de pouvoir, des institutions étatiques et des élites qui veulent le rendre responsable de tous les maux de ce pays. Ils campent l’Haïtien comme le nègre, l’étranger inférieur, tout juste bon à couper la canne. [8] .
L’Haïtien est un étranger mal vu, qui met en péril l’existence même de la nation dominicaine. Le sentiment anti-haïtien a toujours été très présent en République Dominicaine. Les dirigeants de ce pays savent utiliser cette haine viscérale de l’Haïtien, rencontrée chez certains de leurs nationaux, pour faire porter tout le fardeau de la misère et du sous-développement de leur territoire aux Haïtiens qui y vivent.
Sous le gouvernement de Trujillo, le sentiment nationaliste, qui se confond presque toujours chez le Dominicain avec l’anti-haïtianisme, a été porté à son paroxysme.
Arthur Pena Batlle, Ministre Dominicain de l’Intérieur, dans un discours reproduit dans le journal La Nacion le 18 novembre 1942, a expliqué et justifié la politique haïtienne de Trujillo.
Il déclare :
« Le généralissime Trujillo a compris que le tracé mathématique d une ligne frontalière ne résolvait en rien le plus simple de nos problèmes de voisinage, il a compris que l’achèvement du tracé de la ligne ne signifiait autre chose que le point de départ d’une œuvre de construction sociale, longue et épineuse, qui ne pourrait être achevée tout le temps qu’existeront sur la frontière, à l’intérieur de l’île, deux forces opposées entre lesquelles aucune fusion n’est possible. »
Ce défenseur de la cause trujilliste expliquait que Trujillo avait l’unique ambition de préserver la nation dominicaine de la « contamination haïtienne ».
La présence haïtienne était donc perçue comme une maladie incurable, une peste nocive qu’il fallait circonscrire par tous les moyens, y compris le génocide. Il fallait arrêter cette marée noire qui menaçait de submerger la population pure et blanche de la République Dominicaine. [9] .
Peu de jours avant le massacre, au mois de septembre 1937, Vicente Tolentino, responsable du Bureau dominicain de Statistiques, recommandait de favoriser l’immigration de blancs ou de croiser les dominicains avec des blancs pour améliorer la race dominicaine.
La question raciale peut être aussi vue comme l’une des causes du massacre de 1937. Raphael Leonidas Trujillo y Molina, avait décidé d’appliquer la « solution finale » [10] à la question de la présence haïtienne sur son territoire.
3. La présence des Canuqueros sur la frontière
Une cause probable, et peut-être secondaire du massacre, a été sans nul doute le souci des grands propriétaires terriens de Monte Cristi et de Dajabon de se débarrasser des paysans haïtiens qui s’étaient établis sur la frontière et qui y prospéraient.
Ces paysans exploitaient, sur toute la ligne frontalière, de petites propriétés agricoles appelées canuco, d’où leur nom de canuqueros. Ils vivaient dans une relative autonomie et possédaient des terres et du bétail. Ils cultivaient, entre autres denrées, la pistache, dont ils étaient les principaux producteurs sur la frontière.
Les grands Dons louchaient sur ces propriétés dont ils voulaient s’accaparer. Ils entretinrent, pour cela, un climat d’hostilité contre ces canuqueros qu’ils accusèrent de tous les maux, notamment de voler le bétail dominicain. Avant même le 2 octobre 1937, cette situation d’hostilité avait conduit à des représailles contre les Haïtiens. Il y eut des dizaines de morts dans la province de Banica au mois de septembre.
Isabel Mayer était l’alliée et la porte-parole des grands dons. D’ailleurs, c’est au sortir d’une réception. donnée chez elle, que Trujillo donna l’ordre d’extermination des Haïtiens.
Ces grands propriétaires terriens furent d’ailleurs utilisés par l’Armée durant le massacre. Domingo Rodriguez, Antonio de la Masa, Antonio Gonzalez, entre autres grands « Dons », furent parmi les plus sinistres et les plus cruels assassins des Haïtiens. D’ailleurs, immédiatement après le carnage, certains de ces propriétaires s’emparèrent des terres laissées par les canuqueros et firent main basse sur tous leurs biens.
Pour un autre lendemain fait de respect et de compréhension
Les vêpres dominicaines ont été un événement horrible. Rien ne justifiait cette tuerie abominable.
70 ans plus tard, les deux peuplent se souviennent.
Ils se souviennent, dans un climat encore marqué par des préjugés ridicules. Le nationalisme anti-haïtien et le racisme sont toujours présents en République Dominicaine. Certains secteurs continuent d’entretenir la haine de l’Haïtien porteur de tous les maux dont souffre la nation dominicaine.
Je garde, cependant, l’espoir que les deux peuples arriveront à trouver les moyens et les modalités d’une cohabitation pacifique. Dans le plus fort des antagonismes, des voix se sont toujours élevées pour prêcher la paix, l’harmonie et l’entente, des bras se sont tendus pour aider, assister, sauver et protéger.
Dans le souvenir de 1937, nous ne saurons oublier les paysans dominicains qui ont caché, à leurs risques et périls, des frères et sœurs haïtiens.
On ne saurait oublier ce dévouement, ces actions héroïques de simples hommes qui apportent à d’autres hommes aussi humbles, paysans comme eux, exploités comme eux, qui connaissent les mêmes privations et portent dans leur âme les mêmes espoirs, le témoignage de leur cœur blessé.
On ne saurait encore oublier ces soldats qui refusèrent de souiller leur conscience et qui furent exécutés pour avoir refusé d’obéir à l’ordre de tuer.
Un autre lendemain est possible.
Aux Haïtiens et Dominicains de bonne volonté de lutter pour le construire.
Maismy-Mary FLEURANT
maismymaryfleurant@yahoo.fr
* Maismy-Mary Fleurant est titulaire d’un Master en droit international de l’environnement, diplômé de l’Université de Limoges. Il est aussi un spécialiste en droit international des droits de l’homme.
[1] CASTOR, Suzy, Le massacre de 1937 et les relations haïtiano-dominicaines, Le Natal, Port-au-Prince, 1988, p. 16.
[2] MANIGAT, Leslie F., Les relations haïtiano-dominicaines, ce que tout Haïtien devrait savoir, in Les Cahiers du CHUDAC, Port-au-Prince, Avril-Juin 1997, p.9.
[3] PRICE-MARS, Jean (Dr.), La République d’Haïti et la République Dominicaine Tome 2, (réédition), Éditions Fardin, Port-au-Prince, 1953, p. 311.
[4] Suzy Castor parle d’une politique d’abdication.
[5] MANIGAT, Leslie F., op. cit., p 44.
[6] MANIGAT, Leslie F, op. cit., p. 9.
[7] Le Traité de 1867 n’a été ratifié et sanctionné que par les pouvoirs publics dominicains, les troubles politiques en Haïti empêchant sa ratification.
[8] ROMERO, Brigida Garcia, et al., La actitud racial en Republica Dominicana, Servicio Jesuita A Refugiados y Migrantes (SJRM), Impresora Metropolitana, Santo Domingo, 2004, p. 54.
[9] PRICE-MARS, Jean (Dr.), op. cit., p. 324.
[10] L’expression est de Leslie Manigat. L’historien fait sûrement référence à la « solution finale » préconisée par les Nazis au cours de la Seconde guerre mondiale et qui visait l’extermination définitive des Juifs. Dans le contexte anti-haïtien de la période trujilliste, la comparaison n’est pas forcée.
http://www.alterpresse.org/spip.php?article6524
Le massacre des Haïtiens en République Dominicaine a été un acte inique qui interpelle encore aujourd’hui la conscience des Dominicains et des Haïtiens. Pour répondre à ce devoir de mémoire, je me donne la mission de retracer les circonstances de cette horrible tragédie.
Les générations présentes doivent savoir ce qui s’est réellement passé ces tristes jours d’octobre de l’année 1937.
Ce sera une façon d’honorer la mémoire des disparus, de se souvenir d’un moment difficile de l’histoire nationale et de reconnaître aussi la nécessité, face à la réaction pusillanime et presque complice du gouvernement d’alors, d’une diplomatie au service des intérêts nationaux.
Soumis à AlterPresse le 16 octobre 2007
Par Maismy-Mary FLEURANT*
Le massacre des Haïtiens par le gouvernement de Trujillo en 1937
Pour répondre à un devoir de mémoire
Ce devoir de mémoire ne doit pas conduire à un regain de nationalisme et de xénophobie. Les peuples évoluent, les mentalités aussi.
Se souvenir est le moyen de comprendre le passé et de construire un avenir, qui, dans le cadre des relations haïtiano-dominicaines, doit se voir dans une perspective de coexistence pacifique dans le respect des différences.
Les circonstances du génocide
Le 2 octobre 1937, le dictateur dominicain Raphael Leonidas Trujillo y Molina était en tournée à Dajabon.
Après une réception donnée en son honneur à la résidence de Doña Isabel Mayer, Trujillo s’adressa à ses partisans venus l’acclamer. Son discours était un réquisitoire sans pitié contre les Haïtiens présents dans la province du Nord.
Le dictateur déclara :
« J’ai appris que les Haïtiens volent de la nourriture et du bétail aux fermiers. Aux Dominicains qui se plaignent de ces déprédations de la part des Haïtiens qui vivent parmi eux, je réponds : ‘Nous règlerons cette affaire.’ D’ailleurs, nous avons déjà commencé. Environ trois cents Haïtiens ont été tués à Banica. Et nous devons continuer à résoudre ce problème ». [1]
C’était un ordre de tuer. Le massacre commença la nuit même de ce 2 octobre et va se continuer jusqu’au 4 octobre, faisant entre 15 et 20 mille morts. [2] .
Le Dr. Price-Mars explique :
[…] , le carnage des Haïtiens, à l’arme blanche, commença dans la ville même. Femmes, vieillards, enfants, hommes valides, tout y passa. Ce fut dans cette nuit tragique un sauve-qui-peut formidable des résidents haïtiens de Dajabon et des environs, blessés ou non, à travers la rivière pour atteindre Ouanaminthe où l’alarme fut donnée. […] Du 2 au 4 octobre, pendant trente-six heures, la symphonie rouge en nappes lourdes répandit la tristesse des sanglots, des lamentations, des hoquets d’agonie vomis par la multitude haïtienne. [3] .
A Monte Cristi, à Dajabon, à Banica, Las Vegas, Santo Cerro, Guagual, à Villa Vasquez, Copey, Guayubin, Abucate, Esperanza, La Loma, à San Francisco de Macoris, Pelader, Mao, Puerto-Plata, Guayacan, Santiago de la Cruz, Alta Manillo, pour ne citer que ces localités, la chasse à l’Haïtien fut lancée. Elle fut féroce et impitoyable.
A Monte Cristi, les Haïtiens furent jetés à la mer pour y être dévorés par les requins. D’autres furent exécutés dans les prisons où on les avait rassemblés. Des Haïtiens furent conduits sur la route de Dajabon pour y être effroyablement assassinés.
Les Haïtiens, en fuite, se hâtèrent vers la rivière Massacre où les attendaient les militaires dominicains qui leur barrèrent la route et les obligèrent à retourner par petits groupes dans les sous-bois pour y être découpés à la baïonnette et à la machette. Plusieurs dizaines d’haïtiens périrent noyés en essayant de passer le Massacre à la nage.
Les femmes et les enfants ne furent pas épargnés. Leur sort fut encore plus horrible.
Les femmes devaient écarter les deux bras, pour se voir enfoncer une fourche à travers le corps.
Les bébés furent pris par les pieds, avant d’avoir le crâne fracassé contre les murs des maisons. Certains sont envoyés en l’air pour être accueillis avec la pointe des baïonnettes.
Suzy Castor a rapporté les témoignages de certains survivants, comme Osse Saint-Vil ou Marguerite Pierrot qui perdit en une seule nuit son mari, ses neuf enfants, ses belles-sœurs, les trois enfants de celles-ci et sa mère.
Les habitants de Ouanaminthe furent les témoins horrifiés et impuissants du drame. Le curé de la ville, le Père Robert, fait état de nombreux cadavres enterrés à la hâte dans des fosses communes ou tout bonnement arrosés d’essence et brûlés.
Les premiers blessés arrivèrent à Ouanaminthe dès le matin du 3 octobre. On organisa rapidement leur transfert vers la ville du Cap-Haïtien.
Ceux qui ont réussi à fuir, traumatisés et apeurés, faisaient le récit du monstrueux carnage. Dans tous les points de la frontière, des réfugiés, des blessés, tous rescapés du massacre affluèrent.
L’on apprit alors que le simple fait de ne pas pouvoir prononcer correctement les mots « perejil » et « cotorro » équivalait à une condamnation à mort. C’est comme cela que les tueurs dominicains identifiaient, lorsqu’ils avaient un doute, l’Haïtien qui pouvait difficilement articuler ces mots espagnols. La vie d’une personne humaine n’avait tenu dans ces moments terribles que dans la prononciation d’un mot.
La réaction du gouvernement haïtien : entre compromission et soumission
Le gouvernement de Trujillo fit tout pour cacher l’ampleur du génocide. La presse dominicaine, muselée, n’en fit pas écho. Le gouvernement haïtien, dirigé à ce moment par le président Sténio Vincent, fut officiellement informé par un rapport de Arnold Fabre, Consul haïtien à Dajabon. Mais, les dirigeants haïtiens optèrent, dès le départ, pour une politique de compromission et de soumission face à Trujillo.
Vincent s’empressa, le 10 octobre, d’écrire à « son ami » Trujillo pour solliciter une « solution juste et humanitaire ». L’ambassadeur d’Haïti en République Dominicaine, Evremont Carrié, assurait le Ministre dominicain des Affaires Étrangères, Joaquim Balaguer, que le gouvernement haïtien « met hors de cause la haute personnalité du président Trujillo et son gouvernement ».
Le 15 octobre 1937, l’ambassadeur signa un communiqué conjoint avec le chancelier Balaguer assurant de l’amitié des deux chefs d’État et de l’harmonie des deux peuples. [4] .
Il est regrettable de voir que ce communiqué, signé par notre ambassadeur et le chancelier Joaquim Balaguer, minimise et banalise ce crime, en parlant, au lieu de tuerie, de « quelques incidents qui ont eu lieu à la frontière Nord entre Haïtiens et Dominicains. »
Les gouvernements voulaient d’ailleurs prévenir par ce communiqué « des commentaires exagérés et contraires à l’harmonie et à la cordialité » des deux peuples et des deux présidents Vincent et Trujillo.
Ce fut une première victoire pour la diplomatie dominicaine, qui voulait absolument faire d’un crime d’Etat un simple affrontement entre paysans dominicains et haïtiens. Dans la préparation et l’exécution du crime, pour préparer l’opinion à une telle version des faits, ordre fut donné aux militaires de ne pas utiliser leurs armes à feu.
Le massacre se fit à l’arme blanche, à la baïonnette et à la machette. Les Dominicains gardent en mémoire le souvenir de La Corte, la (la coupe). Les Haïtiens de la frontière parlent de Kout Kouto (coups de couteaux) lorsqu’ils évoquent le massacre. A l’analyse de ces faits, nous pouvons conclure avec Leslie Manigat que cette boucherie fut un acte d’État commis sur ordre par les militaires dominicains, non pas par de simples particuliers. [5] .
La honteuse politique d’abdication du gouvernement de Vincent, pour reprendre les mots de Suzy Castor, révolta la conscience nationale.
Alors que les journaux étrangers faisaient l’écho du génocide, alors que les blessés agonisaient à l’hôpital du Cap-Haïtien, alors que des milliers de nos compatriotes arrivaient, démunis et dépossédés de tout, traumatisés par trois jours d’horreur sans nom, Vincent préféra garder un profil bas, avalisant sans vergogne la position du gouvernement dominicain.
Cependant, Trujillo ne put cacher l’ampleur du drame.
L’opinion mondiale était alertée par des dépêches de plusieurs agences de presse, comme la United Press. Des articles du New York Times commençaient à relever les circonstances du massacre. On commençait à estimer le nombre des tués. Il fut bientôt clair que les victimes se comptaient par milliers.
L’opinion nationale s’émut et commença à questionner la position du gouvernement. L’agitation gagnait Port-au-Prince, indignée et meurtrie. Des militaires profitèrent même de ce climat tendu et explosif pour méditer un coup d’Etat contre Vincent.
Aux Etats-Unis, le député républicain Fisher exigea même de son gouvernement une rupture avec le sanguinaire régime de Trujillo. Vincent comprit alors qu’il lui fallait changer de position. Abandonnant les négociations directes avec Ciudad Trujillo, il recourut à l’arbitrage interaméricain.
Le gouvernement haïtien utilisa la procédure prévue par le traité de Gondra de Santiago de Chili du 3 mai 1923 et la Convention de Washington du 5 janvier 1926.
Le 11 décembre 1937, il saisit donc la Commission permanente de Washington. Les Etats-Unis d’Amérique, le Mexique et Cuba composèrent la commission d’enquête. Cependant, Trujillo fit des résistances.
Devant son refus de coopérer, la Commission conclut, le 15 décembre, que des sanctions devraient être prises contre la République Dominicaine en application de l’accord de 1923, car l’incident était de nature à « perturber la paix dans l’hémisphère occidental. »
Craignant une condamnation internationale et l’application de sanctions qui prouveraient la faute de son gouvernement, Trujillo céda. Le 17 décembre, il câbla un télégramme à la commission, par lequel il accepta l’arbitrage.
L’affaire connut, cependant, un nouveau rebondissement quelques jours plus tard.
Alors que la Commission allait enfin commencer ses travaux, le gouvernement d’Haïti, par une lettre adressée le 3 janvier 1938 aux gouvernements la formant, retira sa plainte et fit part de son intention de traiter directement avec le gouvernement dominicain.
C’était un nouveau coup de théâtre, aussi surprenant qu’incompréhensible, dans un moment où l’opinion publique internationale était favorable à la cause haïtienne.
Cette politique de lâche soumission allait aboutir à la signature d’un nouvel accord le 31 janvier 1938 à Washington.
Aux termes de cet accord dégradant, le gouvernement dominicain exprime des regrets et donne l’assurance de lancer les procédures judiciaires « destinées à éclaircir ces faits et à punir les infractions ». L’État dominicain s’engageait encore à payer 750 000 dollars, comme compensation financière aux victimes du drame.
Cet argent a servi à la création de trois colonies agricoles en Haïti pour les rescapés du massacre : à D’Osmond, près de Ouanaminthe, au morne des commissaires et à Biliguy dans le Plateau Central. Leslie Manigat indique que la République Dominicaine n’a versé en fait que 500 000 dollars américains, soit de 25 à 33 dollars par tête d’Haïtiens tués. [6] .
Il est inutile de dire que l’histoire n’a retenu le nom d’aucun Dominicain condamné pour le massacre.
L’Accord du 15 octobre 1937 et celui du 31 janvier 1938 sont appelés les « accords de la honte » par les historiens haïtiens. Sténio Vincent et son gouvernement ont écrit l’une des pages les plus tristes et les plus sombres de notre histoire et de notre diplomatie.
Les causes du Massacre
1. Le problème des frontières
En 1844, les patriotes dominicains s’affranchirent de 21 ans de présence haïtienne et déclarèrent l’indépendance de leur pays qui prit le nom de République Dominicaine.
Cependant, jusqu’à la fin du siècle, les chefs d’État haïtiens considérèrent le territoire voisin comme faisant partie intégrante du territoire haïtien et refusèrent de reconnaître l’indépendance dominicaine. Ils organisèrent plusieurs expéditions de reconquête qui, toutes, échouèrent.
Le premier pas vers une reconnaissance de la République Dominicaine sera fait par le président haïtien Fabre Nicolas Geffrard, lorsque le général dominicain Pedro Santana accepta d’aliéner l’indépendance de son pays en signant un traité d’annexion à l’Espagne en 1861.
Haïti s’opposa, par tous les moyens, à l’Espagne qui dut battre en retraite. Grâce à une médiation haïtienne, après quatre années d’occupation, l’Espagne libéra le sol dominicain en 1865. Le président venait de sauver l’indépendance dominicaine.
Le Traité solennel de paix, d’amitié et de commerce du 26 juillet 1867 marque une autre étape dans la normalisation des relations entre les deux États.
Cependant, le premier instrument bilatéral, qui met réellement fin à une ère de luttes et de guerres perpétuelles, est le Traité de paix, d’amitié, de commerce, de navigation et d’extradition haïtiano-dominicain du 9 novembre 1874. [7] .
Par ce traité, la République d’Haïti reconnaît formellement la partie de l’Est comme un État indépendant et souverain.
Malgré cette reconnaissance réciproque et cette affirmation de vivre dans la paix et l’harmonie, le problème du tracé de la frontière va rester un véritable point d’achoppement dans les relations entre les deux pays. Plusieurs traités bilatéraux vont tenter de le résoudre.
À la fin du XIXe siècle, l’Accord du 18 avril 1898, signé par les présidents dominicain et haïtien, Ulysse Heuraux et Tirésias Simon Sam, reconnaissait à Haïti le droit de garder ses frontières de 1874, avec une compensation en argent de 1 million de dollars en faveur de l’État dominicain. Cependant, devant les difficultés d’application de la Convention de 1898, une Convention interprétative fut signée entre les présidents des deux États le 28 mai 1899.
Ce sont les accords de 1929 et de 1936 et le Protocole additionnel de 1936 qui sont venus délimiter définitivement la frontière. En 1929, Haïti était occupée par les Américains. Ces derniers voulaient mettre définitivement fin au différend haïtiano-dominicain sur la question du tracé de la frontière. Ils pressèrent les deux gouvernements de signer, le 21 janvier 1929, l’Accord binational de délimitation de la frontière.
Cet accord était nettement préjudiciable pour Haïti, car il dépossédait le pays de plus de 45 000 hectares de terre.
Trujillo accepta une révision de cet accord, ce qui permit la signature d’un nouveau traité, l’Accord de Paix, d’amitié perpétuelle et d’arbitrage du 27 février 1935. Un Protocole additionnel à l’Accord de 1929 fut enfin signé à Port-au-Prince le 9 mars 1936.
Les nouveaux accords réglèrent la situation à la satisfaction des deux États et permirent à l’État haïtien de récupérer la majeure partie des terres livrées aux Dominicains à la suite de l’Accord de 1929. La frontière définitive ainsi établie est longue de 360 km.
On ne comprend pas pourquoi Trujillo, un an après la signature du Protocole de 1936, ordonna le massacre des Haïtiens vivant sur son territoire. Cet acte s’explique, pourtant, par la volonté du dictateur de résoudre définitivement le problème de la frontière. Celle-ci était définitivement tracée par les accords de 1929, 1935 et 1936. Cependant, un nombre considérable d’Haïtiens vivaient en République Dominicaine.
En 1935, la population de la République Dominicaine était officiellement estimée à 1,5 million d’habitants.
Suite à une migration qui a commencé à la fin du XIXe siècle et qui s’était amplifiée à partir des années 1915, 1916 et 1917, suite à l’expansion de l’industrie sucrière dominicaine, le département dominicain des statistiques recensait aussi cette même année 52,657 haïtiens dans le pays. Ce chiffre était certainement au dessous de la réalité.
Joaquim Balaguer, alors Ministre des Affaires Etrangères, estimait que les Haïtiens représentaient plus d’un quart de la population totale du pays. Ces Haïtiens étaient surtout établis sur la frontière qui, en fait, n’existait que sur le papier. Trujillo avait, après la délimitation purement physique et géographique, voulu faire une délimitation ethnique, en « débarrassant » les provinces frontalières de la présence haïtienne.
Juan Almoina, exilé espagnol cité par Suzy Castor, croyait que le génocide « … clarifiait la situation une fois pour toutes et libérait le futur de la patrie. Trujillo a pris une mesure énergique qui règle la question de la frontière pour toujours. »
2. La question raciale
Les origines raciales différentes des deux peuples ont toujours posé un problème dans les relations entre les Etats. Les Haïtiens sont majoritairement descendants d’esclaves noirs importés d’Afrique, alors que les Dominicains forment une race métissée, une société mulâtre, qui s’assimile au blanc et n’en est encore que plus raciste et plus haïtianophobe.
Un ouvrage, publié par le Service Jésuite des Réfugiés et Migrants sur l’attitude raciale en République Dominicaine, révèle que la haine de l’Haïtien est surtout le fait des groupes de pouvoir, des institutions étatiques et des élites qui veulent le rendre responsable de tous les maux de ce pays. Ils campent l’Haïtien comme le nègre, l’étranger inférieur, tout juste bon à couper la canne. [8] .
L’Haïtien est un étranger mal vu, qui met en péril l’existence même de la nation dominicaine. Le sentiment anti-haïtien a toujours été très présent en République Dominicaine. Les dirigeants de ce pays savent utiliser cette haine viscérale de l’Haïtien, rencontrée chez certains de leurs nationaux, pour faire porter tout le fardeau de la misère et du sous-développement de leur territoire aux Haïtiens qui y vivent.
Sous le gouvernement de Trujillo, le sentiment nationaliste, qui se confond presque toujours chez le Dominicain avec l’anti-haïtianisme, a été porté à son paroxysme.
Arthur Pena Batlle, Ministre Dominicain de l’Intérieur, dans un discours reproduit dans le journal La Nacion le 18 novembre 1942, a expliqué et justifié la politique haïtienne de Trujillo.
Il déclare :
« Le généralissime Trujillo a compris que le tracé mathématique d une ligne frontalière ne résolvait en rien le plus simple de nos problèmes de voisinage, il a compris que l’achèvement du tracé de la ligne ne signifiait autre chose que le point de départ d’une œuvre de construction sociale, longue et épineuse, qui ne pourrait être achevée tout le temps qu’existeront sur la frontière, à l’intérieur de l’île, deux forces opposées entre lesquelles aucune fusion n’est possible. »
Ce défenseur de la cause trujilliste expliquait que Trujillo avait l’unique ambition de préserver la nation dominicaine de la « contamination haïtienne ».
La présence haïtienne était donc perçue comme une maladie incurable, une peste nocive qu’il fallait circonscrire par tous les moyens, y compris le génocide. Il fallait arrêter cette marée noire qui menaçait de submerger la population pure et blanche de la République Dominicaine. [9] .
Peu de jours avant le massacre, au mois de septembre 1937, Vicente Tolentino, responsable du Bureau dominicain de Statistiques, recommandait de favoriser l’immigration de blancs ou de croiser les dominicains avec des blancs pour améliorer la race dominicaine.
La question raciale peut être aussi vue comme l’une des causes du massacre de 1937. Raphael Leonidas Trujillo y Molina, avait décidé d’appliquer la « solution finale » [10] à la question de la présence haïtienne sur son territoire.
3. La présence des Canuqueros sur la frontière
Une cause probable, et peut-être secondaire du massacre, a été sans nul doute le souci des grands propriétaires terriens de Monte Cristi et de Dajabon de se débarrasser des paysans haïtiens qui s’étaient établis sur la frontière et qui y prospéraient.
Ces paysans exploitaient, sur toute la ligne frontalière, de petites propriétés agricoles appelées canuco, d’où leur nom de canuqueros. Ils vivaient dans une relative autonomie et possédaient des terres et du bétail. Ils cultivaient, entre autres denrées, la pistache, dont ils étaient les principaux producteurs sur la frontière.
Les grands Dons louchaient sur ces propriétés dont ils voulaient s’accaparer. Ils entretinrent, pour cela, un climat d’hostilité contre ces canuqueros qu’ils accusèrent de tous les maux, notamment de voler le bétail dominicain. Avant même le 2 octobre 1937, cette situation d’hostilité avait conduit à des représailles contre les Haïtiens. Il y eut des dizaines de morts dans la province de Banica au mois de septembre.
Isabel Mayer était l’alliée et la porte-parole des grands dons. D’ailleurs, c’est au sortir d’une réception. donnée chez elle, que Trujillo donna l’ordre d’extermination des Haïtiens.
Ces grands propriétaires terriens furent d’ailleurs utilisés par l’Armée durant le massacre. Domingo Rodriguez, Antonio de la Masa, Antonio Gonzalez, entre autres grands « Dons », furent parmi les plus sinistres et les plus cruels assassins des Haïtiens. D’ailleurs, immédiatement après le carnage, certains de ces propriétaires s’emparèrent des terres laissées par les canuqueros et firent main basse sur tous leurs biens.
Pour un autre lendemain fait de respect et de compréhension
Les vêpres dominicaines ont été un événement horrible. Rien ne justifiait cette tuerie abominable.
70 ans plus tard, les deux peuplent se souviennent.
Ils se souviennent, dans un climat encore marqué par des préjugés ridicules. Le nationalisme anti-haïtien et le racisme sont toujours présents en République Dominicaine. Certains secteurs continuent d’entretenir la haine de l’Haïtien porteur de tous les maux dont souffre la nation dominicaine.
Je garde, cependant, l’espoir que les deux peuples arriveront à trouver les moyens et les modalités d’une cohabitation pacifique. Dans le plus fort des antagonismes, des voix se sont toujours élevées pour prêcher la paix, l’harmonie et l’entente, des bras se sont tendus pour aider, assister, sauver et protéger.
Dans le souvenir de 1937, nous ne saurons oublier les paysans dominicains qui ont caché, à leurs risques et périls, des frères et sœurs haïtiens.
On ne saurait oublier ce dévouement, ces actions héroïques de simples hommes qui apportent à d’autres hommes aussi humbles, paysans comme eux, exploités comme eux, qui connaissent les mêmes privations et portent dans leur âme les mêmes espoirs, le témoignage de leur cœur blessé.
On ne saurait encore oublier ces soldats qui refusèrent de souiller leur conscience et qui furent exécutés pour avoir refusé d’obéir à l’ordre de tuer.
Un autre lendemain est possible.
Aux Haïtiens et Dominicains de bonne volonté de lutter pour le construire.
Maismy-Mary FLEURANT
maismymaryfleurant@yahoo.fr
* Maismy-Mary Fleurant est titulaire d’un Master en droit international de l’environnement, diplômé de l’Université de Limoges. Il est aussi un spécialiste en droit international des droits de l’homme.
[1] CASTOR, Suzy, Le massacre de 1937 et les relations haïtiano-dominicaines, Le Natal, Port-au-Prince, 1988, p. 16.
[2] MANIGAT, Leslie F., Les relations haïtiano-dominicaines, ce que tout Haïtien devrait savoir, in Les Cahiers du CHUDAC, Port-au-Prince, Avril-Juin 1997, p.9.
[3] PRICE-MARS, Jean (Dr.), La République d’Haïti et la République Dominicaine Tome 2, (réédition), Éditions Fardin, Port-au-Prince, 1953, p. 311.
[4] Suzy Castor parle d’une politique d’abdication.
[5] MANIGAT, Leslie F., op. cit., p 44.
[6] MANIGAT, Leslie F, op. cit., p. 9.
[7] Le Traité de 1867 n’a été ratifié et sanctionné que par les pouvoirs publics dominicains, les troubles politiques en Haïti empêchant sa ratification.
[8] ROMERO, Brigida Garcia, et al., La actitud racial en Republica Dominicana, Servicio Jesuita A Refugiados y Migrantes (SJRM), Impresora Metropolitana, Santo Domingo, 2004, p. 54.
[9] PRICE-MARS, Jean (Dr.), op. cit., p. 324.
[10] L’expression est de Leslie Manigat. L’historien fait sûrement référence à la « solution finale » préconisée par les Nazis au cours de la Seconde guerre mondiale et qui visait l’extermination définitive des Juifs. Dans le contexte anti-haïtien de la période trujilliste, la comparaison n’est pas forcée.
http://www.alterpresse.org/spip.php?article6524
Haïti : Manger demeure « un luxe »
Mardi 16 octobre 2007
par Gotson Pierre
P-au-P., 16 oct. 07 [AlterPresse] --- Passer des jours sans manger, ce n’est pas une situation exceptionnelle pour de nombreuses personnes à Port-au-Prince et dans d’autres régions du pays, selon les témoignages obtenus par l’agence en ligne AlterPresse.
L’accès à la nourriture se fait difficile à un point tel qu’il est considéré comme un « luxe ».
Il y a quelques semaines, le prix de la farine de blé a augmenté de plus de 25%, provoquant le mécontentement de vendeuses de pain dans les marchés publics ainsi que de nombreux consommateurs. La vente de pain a baissé, ainsi que celle de plusieurs autres produits de première nécessité.
Le pain est considéré comme un aliment de base en Haïti, où plus de la moitié de la population (actuellement environ 9,6 millions d’habitants) ne peut pas se procurer la ration alimentaire minimale de 225 Kg par année.
En Haïti, “manger est un luxe”, affirme la Plate-forme des organismes haitiens de défense des droits humains (Pohdh).
« La majorité des produits de consommation, tels le maïs, le riz, l’haricot, le sucre, les légumes, le fromage, les fruits, la viande de boeuf ou de chèvre, le poisson, le lait, ne sont pas accessibles aux petites bourses en raison de leur coût élevé sur le marché », souligne la Pohdh.
Selon le Document de stratégie nationale pour la croissance et la réduction de la pauvreté (Dsncrp), en processus de finalisation, « 27% des enfants (d’Haïti) souffrent de carence alimentaire », un problème qui affecte majoritairement les zones rurales, précise le document.
Jean Robert Simonise, membre du Secrétariat technique du Dsncrp, soutient qu’ « il faut créer des richesses et stimuler la croissance » pour pouvoir sortir Haïti de cette situation, résultant de 25 années consécutives de baisse de la production nationale, alors que la population n’a pas cessé de croître.
Une des périodes les plus marquantes de la crise haïtienne a été en 2004, lorsqu’il y a eu une croissance de -3,5%.
Les autorités espèrent, pour cette année 2007, une croissance de 4% du Produit intérieur brut (Pib)/habitant, actuellement évalué à 1742,00 dollars US.
Mais, ces chiffres ne reflètent qu’une moyenne et non la situation réelle, puisque Haïti est cataloguée comme le pays le plus inégalitaire de la planète. La moitié des richesses est concentrée entre les mains de 10% de la population et 70% des Haïtiens sont considérés comme pauvres ou vivant au dessous du seuil de la pauvreté.
« Sur chaque 10 personnes, on estime que 7,6 sont pauvres, ne disposant que de 2 dollars par personne et par jour », précise une étude officielle.
Le taux de mortalité maternelle est de 630 pour 100.000 et celui de la mortalité infantile de 57 pour 1.000, les plus élevés de la région latino-américaine et caribéenne, alors que l’espérance de vie est de 52 ans.
L’économiste Rémy Montas, ancien responsable de la Banque Centrale, estime que cette situation est le résultat de « l’inefficacité » des modèles de développement appliqués durant des années en Haïti et qui n’ont pas contribué à améliorer les conditions de vie de la population.
Montas préconise le changement de ce modèle pour pouvoir atteindre en 2015 les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), sur lesquels les autorités haïtiennes se sont engagées. Parmi ces objectifs, figure la réduction de moitié de la pauvreté. [gp apr 16/10/2007 16:20]
http://www.alterpresse.org/spip.php?article6522
P-au-P., 16 oct. 07 [AlterPresse] --- Passer des jours sans manger, ce n’est pas une situation exceptionnelle pour de nombreuses personnes à Port-au-Prince et dans d’autres régions du pays, selon les témoignages obtenus par l’agence en ligne AlterPresse.
L’accès à la nourriture se fait difficile à un point tel qu’il est considéré comme un « luxe ».
Il y a quelques semaines, le prix de la farine de blé a augmenté de plus de 25%, provoquant le mécontentement de vendeuses de pain dans les marchés publics ainsi que de nombreux consommateurs. La vente de pain a baissé, ainsi que celle de plusieurs autres produits de première nécessité.
Le pain est considéré comme un aliment de base en Haïti, où plus de la moitié de la population (actuellement environ 9,6 millions d’habitants) ne peut pas se procurer la ration alimentaire minimale de 225 Kg par année.
En Haïti, “manger est un luxe”, affirme la Plate-forme des organismes haitiens de défense des droits humains (Pohdh).
« La majorité des produits de consommation, tels le maïs, le riz, l’haricot, le sucre, les légumes, le fromage, les fruits, la viande de boeuf ou de chèvre, le poisson, le lait, ne sont pas accessibles aux petites bourses en raison de leur coût élevé sur le marché », souligne la Pohdh.
Selon le Document de stratégie nationale pour la croissance et la réduction de la pauvreté (Dsncrp), en processus de finalisation, « 27% des enfants (d’Haïti) souffrent de carence alimentaire », un problème qui affecte majoritairement les zones rurales, précise le document.
Jean Robert Simonise, membre du Secrétariat technique du Dsncrp, soutient qu’ « il faut créer des richesses et stimuler la croissance » pour pouvoir sortir Haïti de cette situation, résultant de 25 années consécutives de baisse de la production nationale, alors que la population n’a pas cessé de croître.
Une des périodes les plus marquantes de la crise haïtienne a été en 2004, lorsqu’il y a eu une croissance de -3,5%.
Les autorités espèrent, pour cette année 2007, une croissance de 4% du Produit intérieur brut (Pib)/habitant, actuellement évalué à 1742,00 dollars US.
Mais, ces chiffres ne reflètent qu’une moyenne et non la situation réelle, puisque Haïti est cataloguée comme le pays le plus inégalitaire de la planète. La moitié des richesses est concentrée entre les mains de 10% de la population et 70% des Haïtiens sont considérés comme pauvres ou vivant au dessous du seuil de la pauvreté.
« Sur chaque 10 personnes, on estime que 7,6 sont pauvres, ne disposant que de 2 dollars par personne et par jour », précise une étude officielle.
Le taux de mortalité maternelle est de 630 pour 100.000 et celui de la mortalité infantile de 57 pour 1.000, les plus élevés de la région latino-américaine et caribéenne, alors que l’espérance de vie est de 52 ans.
L’économiste Rémy Montas, ancien responsable de la Banque Centrale, estime que cette situation est le résultat de « l’inefficacité » des modèles de développement appliqués durant des années en Haïti et qui n’ont pas contribué à améliorer les conditions de vie de la population.
Montas préconise le changement de ce modèle pour pouvoir atteindre en 2015 les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), sur lesquels les autorités haïtiennes se sont engagées. Parmi ces objectifs, figure la réduction de moitié de la pauvreté. [gp apr 16/10/2007 16:20]
http://www.alterpresse.org/spip.php?article6522
La faim tenaille les familles sinistrées
Chaque jour apporte son lot de cadavres depuis que les eaux rageuses ont dévalé les mornes, la semaine dernière. Les trombes d'eaux ont endeuillé des dizaines de familles et fait des milliers de sans-abri qui ont souvent vu leurs plantations complètement ravagées
Une résidente de Cabaret nettoie son lit après les inondations qui ont ravagé Cabaret le 12 octobre 2007
(Photo: AFP)
(Photo: AFP)
« Depuis deux semaines notre pays est frappé par des dépressions tropicales, aucune ville n'est à l'abri », prévient Paul Antoine Bien-Aimé, ministre de l'Intérieur, qui annonce toutefois qu'Haïti est en pourparlers avec la communauté internationale afin de protéger les bassins versants sensibles, notamment ceux des Gonaïves, Fonds-Verrettes, Cabaret et Forêt-des-Pins.Lundi soir, le bilan global des victimes et des pertes matérielles s'établissait comme suit : 37 corps découverts, 78 blessés, 4 personnes portées disparues, 14 150 familles sinistrées, 4 497 maisons endommagées et 772 détruites.
Dans ce bilan officiel encore provisoire, une dizaine de corps ont été retrouvés dans le seul village de Zoranger, dans la zone métropolitaine. « Là-bas, il ne reste qu'un sentier boueux coupé par endroits, se lamente Cluny Dumay, député de la première circonscription de Croix-des-Bouquets. Des sections limitrophes de cette commune sont dévastées et une odeur désagréable se dégage par endroits. » Les quatre heures de fortes averses qui se sont abattues dans cette localité ont aussi emporté quelque 150 maisons et 1500 têtes de bétail, selon les chiffres fournis par le député Dumay.
Convoqué d'urgence au Parlement, le ministre de l'Intérieur a annoncé qu'un montant d'un million 225 mille gourdes avait été décaissé afin de venir en aide le plus rapidement possible aux sinistrés de Zoranger. « Une équipe des TPTC est également à pied d'oeuvre à Cabaret », a ajouté le ministre qui a révélé que dix millions de gourdes - environ 300 000 dollars - ont été débloqués pour des aides de première urgence. « Dès que des évaluations plus fiables seront faites, cette aide augmentera », a-t-il promis.
Convoqué d'urgence au Parlement, le ministre de l'Intérieur a annoncé qu'un montant d'un million 225 mille gourdes avait été décaissé afin de venir en aide le plus rapidement possible aux sinistrés de Zoranger. « Une équipe des TPTC est également à pied d'oeuvre à Cabaret », a ajouté le ministre qui a révélé que dix millions de gourdes - environ 300 000 dollars - ont été débloqués pour des aides de première urgence. « Dès que des évaluations plus fiables seront faites, cette aide augmentera », a-t-il promis.
Chose certaine, les habitants des villages accrochés au flanc des montagnes déboisées au nord de la capitale ont payé le plus lourd tribut. Plusieurs sont encore isolés. Une fois passé Cabaret, à 35 kilomètres de Port-au-Prince, le chemin qui mène à Cazale - le grenier de la zone - et à Sabourin, à la Station terrienne de la Téléco, a été endommagé par les eaux à maints endroits. « Ce sera un travail de titan pour tout remettre en état », affirme un habitant.
Ferdinand Sénatus, juge de paix de Cabaret, a pu faire quelques constats "très sommaires", mais n'a pas réussi à atteindre les autres villages situés plus haut dans les mornes. "On peut compter facilement 20.000 victimes directes des inondations", estime-t-il en tendant une liste de personnes ayant déclaré des pertes.
Ferdinand Sénatus, juge de paix de Cabaret, a pu faire quelques constats "très sommaires", mais n'a pas réussi à atteindre les autres villages situés plus haut dans les mornes. "On peut compter facilement 20.000 victimes directes des inondations", estime-t-il en tendant une liste de personnes ayant déclaré des pertes.
Difficile en réalité de connaître le nombre exact de victimes, car les ménages éparpillés dans des endroits inaccessibles ne sont pas tous recensés, rapporte l'AFP. Plus on avance dans les montagnes, plus on découvre l'ampleur des dégâts causés par plusieurs jours de pluies diluviennes. Un peu partout, des maisons ont été entièrement détruites, des pans de murs arrachés. Des vêtements, des meubles emportés par la puissance des eaux jonchent le chemin. Des femmes et des enfants cherchent désespérément leurs maigres possessions parmi les amoncellements de pierres et de boue. La faim en tenaille plusieurs. "Nous ne pouvons pas dénombrer les morts, nous enterrons dans des boîtes les corps repêchés sans connaître leur identité", témoigne un responsable de Bretelle, une des localités les plus touchées.
Les flots qui se sont déversés ont laissé d'autres habitations en ruine et peut-être des vies enfouies dans la boue emportée jusque dans la mer où des pêcheurs ont remonté un corps dans leur filet."Des rescapés sont rassemblés dans des églises et de écoles communales plus loin", indique Jacquelin, un jeune qui s'attend à ce que la situation empire. "Maintenant que les murs de soutènement sont tombés, la prochaine pluie fera encore plus de ravages", dit-il maudissant l'Etat qui tarde à se manifester.
Le Premier ministre, Jacques-Edouard Alexis, a survolé ce week-end les localités inondées en hélicoptère des Nations unies pour constater les dégâts. Le bureau de la Protection civile (une structure du ministère de l'Intérieur) a, pour sa part, envoyé des équipes terrestres pour venir en aide aux sinistrés. « Des matelas, des kits sanitaires et de la nourriture seront distribués aux victimes», a annoncé Alta Jean-Baptiste, directrice de la Protection civile. La Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah), qui compte 7.500 militaires et un millier de policiers, ainsi que des moyens héliportés, "a promis de contribuer aux efforts du gouvernement pour venir en aide aux sinistrés et évacuer les personnes en danger".
Claude Gilles
Claude Gilles
gonaibo73@yahoo.fr http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=49814&PubDate=2007-10-16
Anse-à-Veau...comme une ville morte
La commune de l'Anse-à-Veau est littéralement prisonnière de la « grande rivière de Nippes ». Passage obligé pour se rendre dans cette agglomération dépourvue d'infrastructures de base, le principal cours d'eau du département des Nippes est le véritable cauchemar des habitants.
A califourchon sur une motocyclette qui fait office de taxi, comme des dizaines d'autres, Antoine, 47 ans, vient de quitter Miragôane pour l'Anse-à-Veau. Son « chauffeur » roule à vive allure sur la route cahoteuse, qui est en fait , une simple piste faite de roches effilées, de mares d'eau et de nids-de-poule.
Des Nippois traversant à gué la Grande Rivière de Nippes
A califourchon sur une motocyclette qui fait office de taxi, comme des dizaines d'autres, Antoine, 47 ans, vient de quitter Miragôane pour l'Anse-à-Veau. Son « chauffeur » roule à vive allure sur la route cahoteuse, qui est en fait , une simple piste faite de roches effilées, de mares d'eau et de nids-de-poule.
Des Nippois traversant à gué la Grande Rivière de Nippes
Après trente minutes, le « taxi » l'abandonne au bord d'une rivière. C'est la Grande rivière de Nippes que Antoine doit traverser à gué. Il se déchausse, un peu amer. « Je suis Anse-à-velais. Je ne comprends pas que les dirigeants qui se sont succédé au timon des affaires de l'Etat n'aient jamais pensé à jeter un pont sur cette rivière », fulmine t-il. Ironiquement, ce cours d'eau qui devrait être une aubaine pour l'irrigation des cultures en plaine de ce département est trop souvent un cauchemar pour les Nippois. Et pour cause. Sa simple crue enclave maintes communes du département, dont l'Anse-à-Veau, Petit-Trou-de-Nippes, Baradères et L'Azile. Seules les grosses cylindrées peuvent la franchir impunément. A la moindre averse, elle se déchaîne, emportant tout sur son passage, et coupant le département en deux.
Arrivé sur l'autre rive, Antoine trouve une autre motocyclette qui le conduit finalement à destination. Empruntant le chemin désert qui conduit à l'Anse-à-Veau et qui prend parfois des allures de jungle, il ne peut s'empêcher de se demander ce qui adviendrait de lui s'il survenait un accident dans cet endroit aussi éloigné. D'ailleurs, l'hôpital Jules Fleury, qui est le mieux équipé de la commune, n'a même pas une ambulance à sa disposition. Une ville morteA l'Anse-à-Veau, Antoine découvre une ville morte. Les rues sont vides. Cette commune connaît un fort exode. Une bonne partie des adultes qui y restent sont au chômage. Il n'y existe aucune entreprise commerciale et financière qui pourrait employer des gens. Une telle léthargie économique pousse les jeunes vers la capitale.C'est le cas d'Antoine, un gaillard bâti fortement, qui a laissé sa ville natale, il y a plus de 20 ans. « Incapable de trouver du travail, j'ai dû laisser la ville qui m'a vu naître à la fin des années 80 pour me rendre à Port-au-Prince, confie-t-il. Les choses n'ont pas tourné rond pour moi à la capitale, je me suis donc installé à Miragôane, où je travaille au port.» La rue principale d'Anse-à-Veau
Le chômage n'est pas le seul problème auquel sont confrontés les résidents de cette commune. Les infrastructures routières sont inexistantes. Pas une rue n'est asphaltée. L'électricité se fait rare depuis plus de deux mois.
Arrivé sur l'autre rive, Antoine trouve une autre motocyclette qui le conduit finalement à destination. Empruntant le chemin désert qui conduit à l'Anse-à-Veau et qui prend parfois des allures de jungle, il ne peut s'empêcher de se demander ce qui adviendrait de lui s'il survenait un accident dans cet endroit aussi éloigné. D'ailleurs, l'hôpital Jules Fleury, qui est le mieux équipé de la commune, n'a même pas une ambulance à sa disposition. Une ville morteA l'Anse-à-Veau, Antoine découvre une ville morte. Les rues sont vides. Cette commune connaît un fort exode. Une bonne partie des adultes qui y restent sont au chômage. Il n'y existe aucune entreprise commerciale et financière qui pourrait employer des gens. Une telle léthargie économique pousse les jeunes vers la capitale.C'est le cas d'Antoine, un gaillard bâti fortement, qui a laissé sa ville natale, il y a plus de 20 ans. « Incapable de trouver du travail, j'ai dû laisser la ville qui m'a vu naître à la fin des années 80 pour me rendre à Port-au-Prince, confie-t-il. Les choses n'ont pas tourné rond pour moi à la capitale, je me suis donc installé à Miragôane, où je travaille au port.» La rue principale d'Anse-à-Veau
Le chômage n'est pas le seul problème auquel sont confrontés les résidents de cette commune. Les infrastructures routières sont inexistantes. Pas une rue n'est asphaltée. L'électricité se fait rare depuis plus de deux mois.
Selon le maire adjoint, Louifaite Descorbeth, la mairie qui est chargée de distribuer le courant en lieu et place de l'EDH absente de la commune, est à court d'argent. « Nous ne savons à quel saint nous vouer. Nous avons un problème d'entrées de fonds. Il n'y a pas d'argent pour acheter du carburant en vue de faire fonctionner la génératrice.
Faute de compteurs dans les foyers, la mairie ne perçoit que 100 gourdes le mois, par foyer. Cependant, faute de moyens, les gens sont parfois incapables de payer. »La génératrice, supposée alimenter en courant électrique la petite ville de 2500 habitants, est logée dans un abri de 4 mètres carrés, construit en 1973 sous le gouvernement de Jean-Claude Duvalier. Lorsque cette dernière tombe en panne, les responsables sont obligés de faire appel à des techniciens venus de Miragoâne ou de Port-au-Prince.
Un réseau d'adduction d'eau potable permet néanmoins la distribution d'eau potable. Mais selon des habitants, une mauvaise répartition de l'eau empêche certains foyers de recevoir l'eau régulièrement. Au niveau sanitaire, l'hôpital Jules Fleury, et un centre de santé communautaire situé à Saut-du-Baril, une section communale, sont les seules institutions sanitaires desservant la population.
La reconstruction de l'hôpital Jules Fleury emporté par les flammes en décembre 2004 en est à sa phase finale. Parmi les quatre services de base, seul le service de maternité fonctionne. Les cas graves sont transférés à Miragoâne.
Une dizaine d'établissements scolaires, dont six privés, deux écoles nationales et un lycée - le lycée Boisrond Tonnerre - offrent le pain de l'instruction aux jeunes Anse-à-velais. Cependant, une fois leurs études classiques terminées, les jeunes sont obligés de laisser la commune pour aller ailleurs apprendre un métier ou entreprendre des études universitaires. Selon le dernier recensement de 2003, la population de l'Anse-à-Veau comptait 52 432 habitants.
Cette commune comprend 7 sections communales : Baconnois, Saut-du-Baril et Grande-Rivière, Arnaud, Bouzi, Baquet et Dechène.
L'abri d'où est logé la génératrice alimentant en courant électrique la commune
Alain Gaillar
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=49644&PubDate=2007-10-16
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