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samedi 19 avril 2008

CRI DU COEUR DE CARLTON RARA... AUX HAITIENS ET AUX AMIS D'HAITI

Je me permets de partager avec vous ce cri du cœur d’un haïtien, haïtianophyle et surtout un humain. Carlton Rara pourtant n’a pas parlé lui-même. Il n’a fait de présentation non plus. Je savais qui il était. J’avais visité son site.
Cependant en recevant ce document j’avais eu une sorte de hoquet m’invitant à le balancer à la poubelle comme je le fais avec les centaines de courriers de gens venant de la Côte d’Ivoire héritiers pour la grande majorité de richissimes hommes d’affaires assassinés qui, dans leur grande bonté vous demandent gentiment de leur passer un numéro de compte pour bénéficier de 15 ou 10 % après juste un naïf transfert de fonds qui se comptent toujours en millions de dollars.

Le mot DIASPORA avait aussi eu un effet très désagréable sur moi. Je sais ce qui se dit autour de ce groupe d’expatriés et surtout comment des individus en panne et en quête de notoriété s’avisent du jour au lendemain de se parer d’un habit de représentant de plus de 2.000.000 d’haïtiens, - sans leur en demander l'autorisation- avec à la clé des congrès mondiaux au Venezuela (ou résident quelques dizaines d’haïtiens, en ou Haïti juste quelques mois après la victoire de Préval.
J’ai quand même pris le soin de lire et je me suis retrouvé de plein pied dans l’approche de Carlton RARA à travers les différentes questions qu’il se pose. Je me suis dit que si on se pose les mêmes questions pourquoi ne pas se les poser en même temps , dans un même espace de réflexion de façon à construire et élaboré les réponses.
Je l’ai contacté tout de suite. Je n’ai pas été le seul. Il y a un réseau qui est entrain de se former. Ce n’est point pour une énième association, ONG, collectif mais pour un vrai espace de concertation pour aller au-delà des démarches routinières qui ne donnent pas de résultats.
C’est dans cet esprit que je propose aux lecteurs de HAITI RECTO VERSO le partage de ce document.

Vous pouvez contacter Carlton Rara qui assure rapidement l’échange des courriers électroniques entre l’ensemble des individus qui ont pris le temps de réagir.
Pour contact : Carlton Rara
infocarlton@yahoo.com

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Lettre ouverte à tous les Haïtiens de la diaspora ou permanents du pays, tous sexes, tous âges, tous passeports confondus et autres intéressés francophones
Chers vous tous
A tous ceux qui voudraient anticiper la fuite d’un énième discours politique de bistrot, ne partez pas tout de suite, rien de tel ci-après, rassurez-vous, je ne suis qu’un illustre cancre.Je ne suis même pas citoyen de mon pays : Haïti...et l'état civil de cette République ne peut rien pour moi, enfin je ne m'en porte pas plus mal après tout...
Mon pays, lui, ne se porte pas bien; on me demande ici ou là si j'ai encore de la famille « là bas », si tout va bien pour eux....enfin, la politesse d'usage quoi ; à ça j'ai envie de répondre que oui, j'y ai encore de la famille effectivement, à peu près 8,5 millions de parents et pas grand chose ne va pour l'immense majorité d'entre eux.
J’ai grandi en dehors d’Haïti avec comme album de famille les crises sociales et politiques qui rythment la survie du pays depuis 200 ans et avec moi a grandi l’idée que cette « misère » et ce désordre faisaient partie du décor jusqu’à ce que cette idée se brise le jour où j’ai compris qu’en Haïti il n’y avait pas plus de fatalité qu’en Sibérie ou en Papouasie Nouvelle Guinée et que la situation à l’échelle d’un collectif ou d’un pays est la conséquence de causes et que ces causes sont produites par des actes, posés eux-mêmes par des décisions et que finalement ces décisions il fallait bien que ce soit des hommes qui les prennent.
Derrière, devant ou dedans le tableau apocalyptique de la situation de tiers monde qui galope en Haïti on distingue bien des hommes en effet (ne vous offusquez pas les filles je prends le mot homme dans une acception philosophique et générique, allez bisou), qu’ils soient ceux qui meurent, ceux qui souffrent, ceux qui souffrent moins, ceux qui ne souffrent pas du tout.
En effet, étranglés à travers le maillage si « complexe » du « système », on aperçoit rien d’autre que des hommes ou enfin ce qu’il en reste.
On a beau m’expliquer toute l’extraordinaire complexité de la chose, en chiffres, diagrammes, statistiques savantes, exposés et rapports de sciences humaines par les plus brillants spécialistes de ce monde, j’ai encore aujourd’hui la faiblesse de penser que même si la majorité de mes compatriotes crèvent « complexement » la dalle ou crèvent « complexement » tout court, que cela revient au même que si la mécanique du fléau avait été dérisoirement simple.
A qui la faute ? Qui aurait mal agi ou mal décidé et dont les conséquences des actes auraient été directement responsables de cette calamité ? Que devrait-on faire ?
L’histoire une fois de plus fera en son temps son œuvre en nous enseignant après coup les tenants, le déroulement et les aboutissements de la bataille dans des écritures préfigurant l’exposition des vestiges dans les musées.
Nous, les diasporés d’Haïti, ferons nous parti de cette histoire?
Comme nombre d’entre nous donc, et à toute époque la contemporanéité de sa crise, il y a bien longtemps que je me suis demandé ce que je pouvais bien faire pour ce pays qui souffre et qui finalement a enfanté pour partie ce que je suis aujourd’hui.
Comme beaucoup j’ai été inlassablement découragé, submergé par l’ampleur des difficultés, rendu incapable d’agir, par le ressac des crises ou des catastrophes, les impressions de déjà vu, les bis repetita placent, en proie à la résignation devant le déferlement implacable du destin, esseulé dans mes réflexions ou intellectuellement mal accompagné, livré à la facilité d’enfoncer des portes ouvertes et de jeter des pavés dans le sens du vent pour finir par me convaincre que de toutes manières il n’y a rien que je puisse faire moi et mes amis.
Sans compter que des difficultés, il y en a aussi ici (en France pour ma part où je réside le plus clair de mon temps) pour la plupart d’entre nous dans des pays industrialisés qui connaissent leur lot de souffrance et de misère pour être eux aussi le fruit du règne de l’homme évolué (il faut bien qu’on se marre un peu quand même). Ca n’est pas toujours dimanche en effet pour nous ici mais à celui qui voudrait s’égarer dans sa complainte je dis tout net que la « pénibilité » de la vie dans les pays industrialisés est sans commune mesure avec la réalité haïtienne « insoutenablement » pesante.
Evidemment les plus jeunes d’entre nous et ceux qui n’auront jamais mis les pieds dans ce pays impraticable pour les non initiés, ne connaissent pas les coupures de courant, quand bien sûr on en a dans sa maison, quand bien sûr on a une maison, quand on a les moyens d’en avoir une ; pas plus que le manque d’eau potable qui, lui frappe tout le monde ; ne leur évoque rien le soleil de plomb qui sèche la terre auquel succèdent les pluies torrentielles et la boue meurtrière dans ce pays déroutant et sans route où l’on saute un repas comme on oublierait un rendez-vous chez la manucure.
J’ai connu toutes sortes d’haïtiens (même chose que pour les « hommes » les filles, mettez tout ça au féminin évidemment), des gros, des petits, des noirs et des moins noirs, des artistes, des paysans, des portauprinciens, des provinciaux, des vaudouisants, des ecclésiastiques, des diplomates, des banquiers, des docteurs, des marchandes de pistaches, des policiers, des nés prématurés, des chauffeurs, des putes, des déconneurs, des dépressifs, des pédés, des alcooliques, des poètes, des riches, des très très pauvres, des infirmes, des blancs, des rouges, des qui dorment avec une pétoire sous l’oreiller, des gentils, des cons, des ordures, des sirènes, des gueulards, des escrocs et mêmes des princesses, et oui…… et tout aussi divers qu’ils m’apparaissent, ils ont une ressemblance qui tient dans le fait, il me semble, qu’ils viennent tous d’Haïti.
Après ces tergiversations d’Haïtien naturel, j’en viens au fait avec mon lot de questions connexes et subsidiaires.(accrochez-vous, y en a encore pour 7 pages, mais non je plaisante…quoique)
Depuis la dernière grosse crise en Haïti, qu’elle fut d’ordre socio-politique ou liée aux outrances climatiques et alors qu’une fois de plus nous nous trouvions mus par les émotions tous désireux d’agir mais dans l’impossibilité de le faire (vous remarquez bien que je n’envisage même pas qu’il y en eût parmi nous qui n’eussent pas eu l’intention d’agir, vous avez vu comme je manie bien le subjonctif).
Après le constat de cette vieille incapacité donc, qu’avons-nous fait depuis pour réparer les rouages défectueux qui précisément entraver nos actions ? Alors que les indices sont à l’heure de toutes les régressions en Haïti.
Qu’avons-nous entrepris qui nous fasse voir aujourd’hui de façon flagrante le fruit de nos actions ?

Nous ne sommes même pas capables aujourd’hui d’acheminer un container lorsqu’il le faudrait d’un point A dans le monde à un point B en Haïti.
Le nombre d’associations ne cesse d’augmenter, Haïti est un des pays comportant le plus d’ONG au monde.
Pourquoi cette quantité nouvelle ne produit-elle pas plus d’effet, pourquoi sa proportion se laisse-t-elle dépasser par celle de la paupérisation ?
Doit-on aujourd’hui encore attendre et ce au niveau mondial que le « système » apporte des solutions au mal même dont il est la cause ?

Y en a t-il encore parmi nous qui pensent ça ? Le fait de penser ci ou ça dispense-t-il d’agir ?
Les actions locales doivent elles se faire au détriment d’actions plus globales, ne peut on pas les mener toutes de front ?

Les derniers événements en Haïti ( cf journaux, nouvelles en tout genre pour les moins informés) semblent démontrer de façon criante que nous faisons malgré tout trop peu, ou mal, ou pas assez, que cela ne suffit tout simplement pas dans ce climat d’exceptionnelle pauvreté. Exceptionnels la pauvreté et les problèmes, exceptionnelle la mobilisation devrait être, hors force est de constater que nous sommes loin du compte.
Nous ne sommes même pas capables de coordonner des actions au niveau national dans un petit pays comme la France.
La vitesse de mobilisation (ce qui implique que la conscience ait fait préalablement son chemin dans les esprits de chacun) au niveau international, toutes problématiques confondues, n’a jamais été aussi lente et inopérante (je prends pour référence, le siècle passé) alors que les machines et les moyens de communications n’ont jamais été aussi performants et aussi répandus.
Nous n’avons jamais produit autant de denrées alimentaires dans le monde qu’à l’heure actuelle et on m’explique que des gens meurent de faim alors que les poubelles des autres ici trop pleines finissent d’engraisser les chiens errants.
Comment se fait-il aujourd’hui qu’UNE SEULE femme tibétaine ait réussi à faire exister médiatiquement la cause de son pays 20 fois plus que les vagues échos qu’on a pu entendre à propos d’Haïti sur les principales stations d’information (pour la seule France) ?
Je crois savoir pourtant que notre communauté compte jusqu’à plusieurs dizaines de milliers d’individus en France.
Nous serions pourtant en mesure d’agir, qu’est ce qui nous retient donc ?
Est-ce peut-être alors parce qu’une femme tibétaine vaut plusieurs dizaine de milliers d’haïtiens ? (comme quoi, à rien ne sert d’ignorer les maths modernes)
Ne me rétorquez pas que le sort d’Haïti n’intéresse pas le reste du monde, les gens sont intéressés par ce à quoi on veut bien les intéresser.
Sommes nous désunis à ce point, sommes nous négligents à ce point ?
Je ne veux tout de même pas croire à l’indifférence.
Y en-t-il parmi nous qui considèrent que travailler à faire accéder l’ensemble de la population haïtienne à des conditions de vie acceptables prête à débats ou controverses ?
Sommes nous à ce point habitués à ces situations hors normes au point de les considérer comme normales ?
Faut-il plus de sang, faut-il plus de misère, faut-il plus de chair refroidie, plus de rien ?

Tradition orale oblige, nous nous permettons d’avoir un avis sur toutes les questions soulevées par les problématiques haïtiennes mais notre participation à la vie du pays est sporadique et n’a aucun poids n’en déplaise aux amuseurs, aux fanas du microphone, à ceux qui montent à la tribune pour montrer leur cul et leurs bonnes manières comme dirait l’autre. Passons pour une fois la parole à ceux qui n’amusent personne, ceux qui n’ont soit disant rien à dire et qui gardent leur arrière train en bonne place.
Nous avons, par tradition désormais, cessé de considérer les institutions de ce pays comme crédibles (fautes qu’elles l’aient toujours été certes) mais aujourd’hui il y a bel et bien un gouvernement en Haïti, il y a bel et bien des hommes qui décident et sur qui repose le sort de la nation, au-delà de la politique et des divergences de point de vue, qu’on les considère légitimes ou pas, il sont bien là.
Hors quel rapport avons-nous avec eux ? De quel conseil sommes-nous à leur endroit ? Quel débat citoyen avons-nous avec eux ?
Quelles exigences avons-nous envers eux ? De la même façon qu’on a décrété leur surdité à nos attentes depuis fort longtemps, quelles mesures, quels moyens d’action forts et fédérés avons-nous mis en œuvre pour forcer le rétablissement de leur écoute ?
Le fait d’avoir souvent échoué dans nos tentatives implique-t-il qu’il faille renoncer à recommencer, et à recommencer encore, et encore et encore…. ?

Le fait que la bataille soit âpre implique-t-elle que nous ne dussions pas la mener ? (décidemment ce subjonctif, une merveille)
Quel plan, quelle stratégie avons-nous établis pour peser dans la balance ?
Quelle organisation avons-nous mis en place ? Quel espoir avons-nous donc généré chez nos familles restées au pays et qui aujourd’hui pensent par pure ignorance que nous buvons ici (en pays riches) du miel et du lait et que nos poches se remplissent d’argent comme par miracle ?

J’entends fuser ici et là des avis déterminés réclamant le départ de ces « traîtres » de Minusthas qui sont aujourd’hui la seule force armée, il faut le dire, dans le pays.
Par qui va-t-on les remplacer ?
Ne doit-on pas également réclamer par conséquent le départ de nombre d’ONG qui viennent justifier de leur budget dans des études ou des travaux trop souvent obsolètes, inachevés, inachevables, irréfléchis, impropres, ne produisant rien ou parfois du désordre ?
Vous me dites pour certains d’entre vous envisager votre propre avenir en Haïti, mais comment le préparons-nous ?
Des étrangers de bonne fois et de bonnes compositions veulent nous aider, hélas bien souvent le fait de ne pas être « initiés » (pas d’acception cultuelle ici) les rend inefficaces ou à côté de la plaque ou alors cachent en définitive leurs véritables motivations dans leur inconscient qui s’avère cibler trop la rédemption de leur individu.
Voila pourquoi je m’adresse en priorité aux Haïtiens. Nous, nous ne devrions pas être en proie à cet excès même si aider l’autre et se soucier de lui reste toujours une manière de se soucier de soi, nous sommes d’accord.
Sans aller décrocher la lune, avons-nous encore des échanges sur les questions primaires, nous parlons nous encore, dans des pays où nous sommes pourtant libres de penser à voix haute ?
Même pas le minimum à vrai dire ! Les e-mails, les boîtes aux lettres sont vides, les téléphones muets, les bouches pleines de salive ? (La répétition des vieilles conneries sans science et sans conscience exclue, bien entendu, car pour ça nous avons encore pas mal de ressources inépuisées).
Et quand il nous arrive de retrouver l’usage de la parole dans nos familles, parlons nous vraiment de l’essentiel ?.....de ce qui peut préoccuper un enfant, une femme, un vieillard que sais-je, qui ne bouffe pas, ou qui souffre d’une maladie qui lui est inconnue? de ce qui les préoccupe ou de ce qui ne les préoccupe plus…..
Y en a-t-il parmi nous qui ont agressé leur boulanger parce que son pain été trop cher, casser sa vitrine, mis sa vie en danger ?
Non personne vraiment ?...
vous m’étonnez. Mais alors comment se fait-il que nous laissions nos familles faire une chose aussi « insensée » sans être alarmés, sans réagir, seulement sous prétexte que c’est en Haïti que ça se passe. C’est bien ce que je disais, les normes sont à géométrie variable, y compris celles du bon sens.
Ne soyons pas, je vous prie, démissionnaire ou actionnaire d’Haïti lorsque ça nous chante, lorsque le vent est favorable, lorsque les plus faibles d’entre nous ont joué leur rôle de tampon et de bouclier contre l’adversité et qu’ils nous ont rendu la voie libre.
C’est encore le plus faible qui a besoin du plus fort pour vivre à ce que je sache et non l’inverse.
Qu’allons nous raconter à nos petits enfants ? Que le jour de la bataille nous étions à la plage ou à la foire ? Que l’après-midi ou mamie a pris une balle, nous étions au supermarché ?
Nous leur dirons tout simplement que nous étions des incapables ou pire encore, nous n’aurons rien à leur raconter du tout… encéphalogramme plat !
A ceux qui travaillent modestement de leur côté, ne vous sentez vous pas seuls et en sous nombre parfois ? Cela aussi vous semble-t-il normal ?
Sommes nous tous d’un certain âge et usés ou en proie au handicap ou à la maladie?
Cette immense partie du peuple haïtien dispersé que nous sommes, ne peut-il pas trouver d’ambassadeur (nous avons des ambassadeurs et des consuls mais nous ne les considérons pas plus que n’importe quel autre officiel ou alors juste au moment de faire mettre un tampon sur un document). Ne peut-on pas créer des entités qui matérialisent notre présence, qui rendraient plus probables nos actions ?
Ne me dites pas que je pose trop de questions et que je n’apporte pas assez de réponses, nous allons nous épargnez pour une fois les débats merdiques, les formules de prétoire et la poésie mal placée ou encore les idées politiciennes qui font chier tout le monde, tout ça ne doit pas avoir cours ici.
J’ai déjà pour ma part trop parlé et pas assez agi. Il appartient à chacun de vouloir apporter des réponses ou bien de se poser d’autres questions, enfin de prendre ses responsabilités pour les plus responsables d’entre nous et ça je ne peux pas le faire à votre place.
Il est d’usage que les artistes ou les intellectuels essaient de chatouiller les monolithes… il est tard, je suis fatigué, j’ai sommeil mais je suis à mon poste.
Les manifestations imposées du 10 mai et ce partout en France ont-elles pensé à remanier leur programme pour la circonstance ? Les problèmes actuels sont-ils au programme ? Des manifestations (revendicatives) sont-elles prévues, des gens ont-ils prévu de s’exprimer, que préparons nous à part une bonne popote et un bon bal kompa ?
Allons-nous célébrer bêtement et béatement l’abolition de l’esclavage alors que nous sommes on ne peut plus asservis aujourd’hui, asservis à mort ?
Allons nous encore faire comme si de rien n’était ?

Prévoit-on une aide de masse directe à la population haïtienne (je ne parle pas uniquement de parachuter de la bouffe) ? Doit-on encore attendre le prochain coup de canon pour s’indigner à heure fixe.
Est-il prévu qu’Haïti regarde Haïti dans les yeux sans honte ?


Enfin voilà, je m’interrogeais modestement, juste comme ça, loin du désir d’importuner quiconque….enfin si j’en emmerde quelques uns c’est pas plus mal non plus, mais affectueusement s’entend (que voulez-vous c’est mon esprit taquin).
Un peu de théâtre maintenant (je vous l’ai dit, faut bien se marrer un peu quand même, enfin, m’ap ri men m’p’ap jwe – traduction : je ris mais je ne m’amuse pas) , allez, un peu de courage c’est la dernière ligne droite.
Moi, je soussigné Carlton Rara, citoyen illégitime mais conséquent du pays d’Haïti.
J’en appelle, à tous ceux qui aiment ce pays, tout ceux qui en parlent, tous ceux qui n’en parlent plus, tout ceux qui ne l’ont pas oublié, tous ceux qui y vivent, tous ceux qui y ont une habitation, tout ceux qui n’y ont rien ni personne, tous ceux qui ont des idées, tous ceux qui ont de la volonté, tous ceux qui n’ont pas de volonté, tous ceux qui n’ont pas d’idée, tous ceux qui parlent bien, tous ceux qui écrivent bien, tous ceux qui jouent bien du tambour ou de la cornemuse, ceux qui n’ont pas de voiture mais qui aimeraient bien en avoir une, tous les usagers des camionnettes, les femmes, les hommes, les plus jeunes, ceux qui ont des responsabilités, ceux qui n’en n’ont pas, les attachés, les détachés, ceux qui ont de l’argent, ceux qui n’en n’ont pas, ceux qui ont des terres, ceux qui bandent bien, ceux qui ne bandent plus, les premiers de la classe, les derniers, les non voyants, les politiques, les parvenus, les revenants, les inconnus, les scientifiques, tous ceux qui ont des pigments dans la peau, les albinos, les retardés, les attardés, les optimistes, les pessimistes, les saltimbanques, les comptes en banque, ceux plus au Nord, ceux moins au Sud, ceux qui n’entravent rien à ce que je raconte, ceux qui me reçoivent 5 sur 5, ceux qui sont partis en court de lecture, ceux qui avaient gardé un cinquième as dans leur manche ou une poire pour la soif, celles qui aiment toujours leur mari après 50 ans de mariage, mes frères, mes sœurs, l’oncle Sam, l’oncle Tom, les culs de jatte, les malpolis, tout ceux qui ont compris que la prochaine bataille n’aura pas lieu faute de combattants, ceux qui savent qu’il est plus que temps, ceux qui entendent Haïti hurler sourdement comme on entend son gosse, Haïtiens de mon cœur, j’en appelle à tout ceux qui comme moi ne connaissent rien de plus doux pour la tête que les senteurs de la brune enveloppante d’Haïti.
Je compte sur tout ceux-là pour agir, pour parler, pour faire hommage à tout ce qu’Haïti nous a enseigné de bon, nous a donné sans compter, sans reprendre, nous a transmis à nous, ses enfants égarés.
Je m’excuse par avance auprès de tout ceux à qui tout cela n’évoque rien et ceux qui penseraient qu’on leur fait la leçon (soyez vous-mêmes vos professeurs).

Nous avons un jour fait trembler de stupeur le monde par une révolution improbable, perdue et condamnée d’avance et pourtant achevée par la volonté et la stratégie des hommes.
Ce que nos ancêtres ont fait de la révolution n’enlève rien à l’exemplarité de cette victoire…voilà encore la seule chose que tous les haïtiens savent encore aujourd’hui…nous avons un jour fait trembler de stupeur le monde …
et bien recommençons voulez-vous !?

Merci bien de votre attention
Allez on se fait la bise, n’oubliez pas d’éteindre en partant…
Allez hop en deux clics passe le message à ton voisin, enfin c’est toi qui vois.
Carlton Rara
Fait à Mont de Marsan (France) le 14 avril 2008
PS : et moi qui pensais faire court

2 commentaires:

VC a dit…

Dans le cadre de la Quinzaine de l'Ecole Publique, "PAS D'ECOLE, PAS D'AVENIR", Droit à l'Education pour tous..Ligue de l'Enseignement, j'ai vu qu'une école en Haïti faisait partie des projets de soutien 2008, aux Cayes... http://www.pasdecolepasdavenir.org/

J'ai aussi vu que SANSEVERINO était le parrain de cette campagne.
Qu'il devrait également se rendre dans un des pays (peut-être pas encore déterminé et pourquoi pas Haïti ?) où la Ligue de l'enseignement soutient des projets d'aide à l'accès à l'éducation afin de mettre en avant les difficultés de scolarisation dans le monde. Pourquoi pas Haïti avec Carlton Rara ? Entre artistes ? Peut-être facile de se contacter ????
Un CD ensemble... du rythme pour les écoliers, ils adorent ! Les maîtresses aussi !

Anonyme a dit…

Bien en phase Carlton Rara. Reçu 5/5.

On est une sacrée bande d'hypocrite et moi la première.

J'ai passé plus de 2 mois en Haïti cet été, au sein du Mouvement Paysan Papaye. Inoubliable, superbe ! Etranges qualificatifs pour un voyage au coeur de la pauvreté et pire encore, de la misère. Parce que j'ai découvert une richesse humaine insoupsonnée. Pas un jour n'est passé sans que je n'entende le mot "grangou" et pourtant, allez dans les villages les plus reculés, vous vous verrez offrir de la nourriture par des petits paysans qui ne mangent même pas chaque jour à leur faim. Prenons-en de la graine. Et nous, européens qui sommes soit-disant des gens ouverts et généreux...
J'ai aimé Haïti, j'ai aimé les haïtiens. J'ai vu des personnes aux visages avenants, aux sourires étonnants. Mais nous, obnubilés par nos trains de vie devrais-je dire nos TGV de vie, on prend chaque jour notre place dans le trafic et on voit plus les autres. Revenons en Haïti. Parlez un peu avec les haïtiens, leur sourire s'estompera : "il n'y a qu'à attendre Dieu","si je pouvais j'irai vivre dans un autre pays"(technicien agricole MPP), "parfois je me réveille le matin avec des idées révolutionnaires"(agronome au MPP). Exploités jusqu'à la moelle, d'espoirs déçus en catastrophes naturelles, les haïtiens souffrent et sont à bout de souffle. Je ne pouvais tout de même pas m'arrêtez avant de vous parler de leur immense courage devant la cruauté de la situation qui s'éternise. Prenons l'exemple du MPP : le coup d'Etat de 91 lui a porté un coup casi fatal : assassinats, tortures, destruction des pépinières, des documents (informatiques ou non), pillages des coffres-forts... Les paysans, non seulement ont été blessé dans leur chair, mais on leur a volé leur maison, leur épargne, leur outil de travail. Tout à refaire. Imaginez ! Non, on ne peut pas s'imaginer. Terrible. Ils sont toujours là, toujours membres du MPP, ils se sont relevés. Le MPP et donc les 60 000 paysans qui le composent ne se sont pas encore remis de cette catastrophe mais ils tiennent le coup tant bien que mal. "Nou se wozo nou ka pliye nou pap kase" C'est l'exemple du MPP mais ça vaut certainement pour nombre d'haïtiens.

Ils m'ont vraiment touché. Haïti chérie. Quand on aime on protège. Transformons notre amour en action.