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dimanche 14 octobre 2007

Tiga céramiste : les années d'apprentissage
Peu de gens savent que Jean-Claude Garoute, notre fameux Tiga, a vraiment commencé sa carrière d'artiste au Centre de céramique de Port-au-Prince. Fritz Racine, professeur au centre pendant les années 50 s'en souvient, lui.
Carlo A. Célius : Quand avez-vous rencontré Tiga pour la première fois ?

Fritz Racine : J'ai rencontré Jean-Claude Garoute pour la première fois au milieu des années cinquante lorsque son oncle, le colonel Hamilton Garoute, l'accompagna au Centre de céramique où j'enseignais. Il a été présenté comme un jeune garçon surdoué qui manifestait déjà depuis quelques temps de fortes dispositions artistiques. Il a été reçu comme tel et il était le plus jeune du Centre.
C.A.C : Avait-il eu, à votre connaissance, une initiation artistique antérieure ? Avait-il fréquenté d'autres lieux d'apprentissage artistique ?
F.R : Je doute fort qu'il ait eu une initiation artistique antérieure ou qu'il ait fréquenté d'autres lieux d'apprentissage artistique, ni même le Centre d'art de Port-au-Prince. À l'époque, il n'y avait à Port-au-Prince que le Centre de céramique de l'Éducation nationale à la rue Bonne foi et le Centre d'art à la rue de l'Enterrement.

C.A.C : Quel type d'étudiant était-il ?
F.R : C'était un jeune homme artistiquement doué qui passait entre 5 et 8 heures à travailler à toutes les étapes de la création céramique artistique.
C.A.C : Pouvez-vous nous rappeler ce que fut le Centre de céramique?

F.R : Le Centre de céramique avait été créé par le département de l'Éducation nationale à l'instigation d'un céramiste nord-américain de l'Université Southern California, Glen Lukens. Ce dernier était un passionné de la céramique qui était convaincu qu'Haïti avait de la matière première (plusieurs variétés d'argiles) et des talents dormants qu'il fallait développer. À la suite de plusieurs voyages de prospection dans le Nord (Cap et ses environs) et à Jacmel et ses environs, Lukens était arrivé à la conclusion que les artisans de ces régions pratiquaient déjà une céramique artisanale et rudimentaire qu'il fallait encourager en les initiant à des méthodes modernes de finissage et de cuisson.
Le Centre devait être intégré dans le cadre du programme d'enseignement professionnel du département de l'Éducation nationale dont le Directeur Clovis Charlot et l'inspecteur Soray assuraient le fonctionnement.
C.A.C : Quels étaient les critères d'admission ?

F.R : Il n'y avait pas de critères d'admission. Il suffisait d'avoir des dispositions et de manifester un intérêt pour cette forme d'expression artistique. Pour beaucoup, c'était une nouveauté. Tout était nouveau. Il n'y avait pas de précédent.
C.A.C : En quoi consistait cette formation ?
F.R : Théoriquement, la formation s'étendait sur une année ; mais les étudiants restaient aussi longtemps qu'ils le voulaient. Les premiers étudiants devenaient des employés rémunérés ou recevaient un pourcentage de la vente de leurs pièces. Cette formation consistait dans la prospection des matières premières locales, le tournage des pièces artistiques ou fonctionnelles, le séchage, la glaçure et la cuisson.
C.A.C : Quels sont les différents professeurs qui y enseignaient ?

F.R : Le Centre fonctionnait avec un directeur, feu mon frère Hugo Racine, qui avait étudié la céramique a l'University of Southern California. Le Centre avait un budget de fonctionnement autonome octroyé par le département de l'Éducation nationale. J'étais le seul professeur, et j'émargeais du budget du département de l'Éducation nationale.
C.A.C : De quels milieux sociaux provenaient les étudiants ?
F.R : Les étudiants provenaient de divers milieux sociaux, des dames du corps diplomatique aux plus humbles artisans qui savaient à peine lire.
C.A.C : Vous rappelez-vous de ceux qui fréquentaient votre cours au même moment que Tiga ? Quels rapports entretenaient-ils entre ceux au Centre ? Organisaient-ils des activités en commun ? Ont-ils tous fait une carrière artistique ?
F.R : En même temps que Tiga, en dehors de quelques dames du corps diplomatique et au gré de ma mémoire, il y avait Marcus Douyon qui a émigré aux États-Unis et continue à y pratiquer la céramique ; Jeannette Armand qui vit en France depuis des décennies. Jules Gay qui, par la suite, a établi son propre atelier « Gay Poterie » qui s'est révélé une entreprise de production céramique rentable; deux filles Sergile, dont l'une, Myrtho, avait épousé un membre du secteur maritime privé et l'autre (dont j'oublie le prénom) avait épousé le jeune Valmé de la pharmacie du même nom ; Hilda Williams, qui a fait carrière dans la céramique et la sculpture; Anthony Phelps, qui a émigré au Canada et est devenu un poète de renom ; Jacqueline Kébreau, fille du général Antonio Kebreau ; Rigaud Benoît, Néhémie Jean et Luckner Lazard qui fréquentaient régulièrement le Centre pour se familiariser avec le médium de la céramique. Les rapports étaient tout à fait harmonieux.
C.A.C : Parlez-nous plus longuement de vous, de votre formation et de vos activités d'enseignant au Centre de céramique.

F.R : J'ai enseigné la céramique pendant quatre ans environ au Centre de céramique, à mon retour d'un voyage d'études en génie céramique au New York State College of Ceramics. Ma méthode consistait à inculquer des notions de céramique scientifique, notamment la prospection d'argiles, la préparation de glaçures à partir d'oxydes métalliques importés, la cuisson dans des fours à briques réfractaires. Et aussi, à inventorier les problèmes techniques. Par exemple, réduire le pourcentage de casse causée par la présence de calcium dans l'argile. Les conditions de travail étaient peu encourageantes. J'ai aussi fréquenté le soir, pendant trois ans, la Faculté de droit de Port-au-Prince. Après une dizaine d'années à la section économique et commerciale de l'ambassade américaine de Port-au-Prince comme assistant a la section économique et commerciale, je me suis rendu à Washington pour travailler à la US Information Agency. J'y suis resté 25 ans, dont les 8 dernières années comme chef de section de traduction au service de presse.
C.A.C : Tiga a travaillé sous votre direction pendant combien de temps ? A-t-il eu d'autres professeurs ?
F.R : Je ne me rappelle pas exactement, à peu près deux années. Comme autres professeurs, il y avait Lates Jean Georges pour le modelage, Jules Gay pour le tournage et Jean Petit Frère pour la cuisson.Tiga était un jeune surdoué, un autodidacte qui n'avait besoin que d'un cadre approprié et d'encouragement. Après les acquis techniques, il produisait déjà pour la vente. C'était assez informel.Il était obsédé par cette idée: trouver une formule permettant de contourner les matériaux importés très coûteux à l'époque. Trouver une glaçure locale ou une argile qui, cuite à haute température, deviendrait étanche.
C.A.C : Selon vous, en quoi la formation qu'il a reçue au Centre et votre enseignement en particulier ont-ils marqué son oeuvre postérieure ?
F.R : Dans toutes ses démarches artistiques, il est resté attaché à la céramique comme médium. Je me rappelle cet anecdote : un jour, on est allé chez Sister John de l'École pour handicapés de Port-au-Prince et elle nous a présenté un élève dont le manque de concentration était quasi pathologique. Après avoir été initié au modelage, il ne voulait plus le quitter. Il était guéri. Sister John a crié au miracle. Et je me souviens que cette expérience avait profondément marqué Tiga.

C.A.C : Tiga a-t-il participé à des expositions collectives ou a-t-il exposé en solo pendant sa formation au Centre de céramique ?
F.R : Non, pas à cette époque. Sa production se vendait vite et bien. Tiga, à l'époque, fabriquait des assiettes décoratives, des vases et plutôt des sculptures.

C.A.C : Avait-il créé des pièces qui, à l'époque, avait retenu votre attention ?
F.R : Toutes ses créations attiraient l'attention. Sa personnalité artistique s'affirmait déjà dans sa production. Il travaillait avec passion et acharnement. Il pouvait y passer la nuit.
C.A.C : Tiga est resté membre du Centre et en deviendra le directeur. Parlez nous de ce cheminement ?
F.R : J'avais déjà quitté le Centre quand Tiga en devint le directeur. Une des caractéristiques de sa direction a dû être la persévérance, le suivi, une attitude engagée, et enfin le sens de la recherche et de l'innovation.
Propos recueillis par Carlo A. Célius et transcrits par Mireille Perodin Jérôme
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=49664&PubDate=2007-10-13

Tiga : signifier plutôt que représenter

par Jean Emmanuel Jacquet
L'oeuvre de Jean-Claude Garoute suit directement le processus de la création, signalée par le mouvement spiralique qui y est présente. A ce point, l'un de ses plus proches élèves, Philippe Dodard, aurait dit que tout ceci marquait le commencement et la fin. Ainsi, ce dernier répétait continuellement cette phrase éternelle de Tiga «On ne commence pas, on ne recommence pas, on continue».
D'autres auraient dit autre chose qui vient s'ajouter à ce qu'a dit Dodard, comme, par exemple, le ministre de la Culture et de la Communication, Eddy Lubin qui, lui, pense que dans l'oeuvre de l'artiste il y a la célébration de la vie, ou comme Michel-Philippe Lerebours affirmant que Tiga cherchait à signifier plutôt qu'à représenter.Toutes ses déclarations donnaient à découvrir l'oeuvre de l'artiste exposée au Musée d'art haitien du collège Saint-Pierre. Et c'est là, dans une ambiance festive, que s'est déroulée, le dimanche 7 octobre 2007, la première journée de la semaine-hommage à l'artiste multidimensionnel, en présence de plusieurs personnalités du monde artistique et culturel haitien, des parents et amis de l'artiste.Comme annoncer au lancement, est ouverte, vers 10 h du matin, cette exposition Rétrospective des oeuvres de Tiga. Par une matinée très sombre, les organisateurs ont monté le programme de façon à permettre aux visiteurs de témoigner leur admiration de l'oeuvre de l'artiste et en même temps découvrir une première partie de sa dimension artistique.Introduite par la directrice des Ateliers Jérôme, Mireille Pérodin Jérôme, la journée au Musée d'art haïtien a été investie d'amateurs de l'art, de critiques d'art, de peintres, ... qui sont venus voir des oeuvres de Tiga tirées dans les collections du musée d'art haitien, du Musée du Panthéon national d'Haïti (MUPANAH), des collections privées, ...
Après les témoignages pleins d'émotions de quelqu'un qui a été pendant longtemps avec Tiga, Louis Dubois, l'évêque de l'Eglise épiscopale d'Haïti, Mgr Zaché Duracin a présenté au public les propos de cette église. Tiga a contribué à l'épanouissement de la culture haïtienne. « Sa mort, et d'ailleurs toute mort, doit être vue comme la porte de la vie éternelle ».Combien sont ceux qui ont promis à quelqu'un, après sa mort, de continuer son travail ? Combien ont tenu leur promesse ? Mme Claude Michel et Marie Pascal Garoute, les deux filles de Tiga, sont de ceux-là. La première a dit avoir promis à son père - qui lui avait demandé d'appréhender une série de thèmes, dont la cosmogonie-de tenir le flambeau. Mme Claude Michel a beaucoup mis l'accent sur la simplicité et la passion de Tiga dont elle tient la force. Malheureusement, elle n'a pas pu terminer son intervention, tellement elle était en larmes.
Nombreux sont ceux qui reconnaissent l'incontournable valeur de la rotation artistique par son pouvoir de libérer l'individu et de l'initier à la dimension humaine. En effet, l'initiateur du mouvement l'a signalé dans un texte extrait de Laboratoire de Création en Rotation artistique Saint Soleil d'Haïti. « La méthode Rotation artistique consiste en l'utilisation simultanée des différents supports sensibles ou médiums correspondant à chaque organe sensoriel ».Certains ont dit avoir découvert le sens des symboles. Philippe Dodard accepte avoir appris le sens et le graphisme du vêvê et découvert la poterie indienne grâce à la formation qu'il a eue aux côtés du peintre. Son frottement avec l'artiste l'a conduit à demander aux parents de laisser venir leurs enfants aux musées et aux ateliers d'art.
Tiga s'est beaucoup fait remarquer par son amour des hommes, du partage. Le ministre de la Culture et de la Communication, Eddy Lubin, a demandé que chacun se fasse le messager de son héritage. Il a souligné que le jour où notre culture sera diffusé dans les classes, on aura un Haïtien nouveau, un homme nouveau, un pays nouveau.
Jean Emmanuel Jacquet
zebaklandy@yahoo.fr
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=49658&PubDate=2007-10-13

Stephen Alexis, nègre tragique(1890 - 1962)

par Pierre-Raymond DumasScribe méticuleux, avocat, enseignant, journaliste, humaniste batailleur pour qui l'amour de la patrie était une vertu cardinale, pétri d'idéal, fasciné par ce milieu qui se refuse à lui, il demeure une sorte de héros à la fois optimiste et pessimiste aux yeux de qui tout va pour le pire, car tout pourrait aller mieux. Sans Jacques Stephen Alexis, le fils prodigue, que resterait-il du père né aux Gonaïves le 29 novembre 1890 ? Et même avec le fils, qu'en reste-t-il ? Intéressantes questions. Il y a certes du profit à se conduire comme un bon élève, comme un fils qui, à l'ombre du père, fait victorieusement son petit bonhomme de chemin éclatant, mais il y faut de l'ambition, et ce n'était pas le seul atout familial et personnel d'Alexis fils. C'est à cela que nous devons provisoirement nous arrêter. Sur lui, le temps n'a aucune prise. Plus précis que précieux, il avait été témoin et acteur de la fin d'une époque glorieuse, celle des indigénistes et d'une vision dynamique d'une culture nationale authentique. Et ceux qui n'aiment pas sont des «égarés» ( au sens créole haïtien du terme) : Stephen Alexis est désormais intouchable comme grand lecteur devant Père l'Eternel. Celui que Duvalier père appelait le «Prince de l'écriture» reste, quarante-cinq ans après sa mort, à découvrir. Alors il faut écouter cette voix, et maintenant. Aux dires de ceux qui l'ont côtoyé, Alexis père ne vérifiait pas seulement ses sources. Symbole d'une humanité nègre sans dogmes ni systèmes, nommé le 14 octobre 1938 conservateur du Musée national, il prenait soin aussi de vérifier les idées, de peser les mots, de cibler. Pétri de culture française, ministre délégué permanent à l'Organisation des Nations Unies en 1948, il avait une grande souplesse dans les relations avec les autres. Tout chez lui était parfaitement maîtrisé. Et puis je suis de ces natures qui ne résistent pas à un critique élégant. Le génie de l'écriture, dans tous les domaines qu'il a abordés- le roman, la nouvelle, le journalisme, l'enseignement - continue à étonner par sa puissance, sa générosité, son engagement politique, sa foi en la perfectibilité de l'homme. Trop humain pour être cynique et trop sensible pour être passif. Riche de sens et de vitalité, trop libre pour être discret.
Avant d'en marquer les conséquences, je voudrais simplement vous faire remarquer le caractère marxiste de cette conception de l'écriture. C'est quoi, la conscience ? Lisez Stephen Alexis. Etait-il conscient d'être venu trop tôt, que tout restait à dire ? Bien différente, en cela encore, des descriptions esthétisantes ou «chaleureuses» qui présentent le profil d'une oeuvre, sa manière est toujours au pluriel : elle s'exerce avec une sensibilité foisonnante ; elle parcourt des interstices et des écarts ; elle a son domaine là où les oscillations se juxtaposent, les enchaînements se fixent et dessinent entre eux des espaces blancs. L'esprit d'examen, pour lui, n'a pas un effet unificateur, mais multiplicateur. Cela fut le trait fondamental de sa personnalité et, en cette qualité, il n'est pas exempt de contradictions, de faiblesses même. Peu de chroniqueurs, à son époque, connaissaient aussi bien les auteurs du passé.
Combinant la stature d'un intellectuel de belle eau avec la sagacité d'un diplomate aguerri (consul général à Anvers entre 1926 et 1930), il avait tout lu, tout étudié, exquis et raffiné comme une estampe japonaise, on le voit dans les endroits à la mode, il étale son chic à la face d'un tout Port-au-Prince admiratif et complice. Nourri de la critique du progrès matériel, détenu au Pénitencier national de Port-au-Prince, il échappe de justesse au massacre des prisonniers le 27 juillet 1915: il aura beau batailler, son image de marque restera celle du gentilhomme. Résolument éclectique, directeur de Haïti-Journal en 1936, il s'imposera dans ce style chatoyant qu'on lui reproche et envie. C'est un homme en cendres. On a dit «chatoyant», car son obsession va contre l'esprit de son temps, comme s'il voulait se rebiffer contre sa biographie, trop pure pour ses goûts d'esthète. Mais, après tout, Stephen Alexis n'était-il pas le souverain des années 30 et 40 ? Cela ne peut être résolu pour nous par aucun photo-souvenir, par aucun témoignage d'époque. J'en laisse ici la question ouverte.
D'un portrait à l'autre, d'un compte-rendu de lecture à l'hommage se déclinent la vie et les préoccupations d'une époque. Mais derrière les conventions de ses portraits d'apparat et de ses recensions de circonstance, Stephen Alexis est à l'affût d'une vérité humaine que dénoncent l'éclat d'un succès, le prolongement d'une idée. Dans l'entre-deux- guerres et dans les années 50, il nous en fournit la preuve dans de superbes plaidoyers : la critique ne se laisse pas enrober dans les destins individuels figés, les particularismes étroits ; le critique veut ressaisir plutôt les traits universels de la condition humaine. C'est même ce que l'on attend de nous.L'effet produit par ce nègre tragique est proportionnel à ces différences de conscience. Son oeuvre, prétendue secondaire, est mesurée, on le constate, à l'aune de la passion littéraire, et sa force rhétorique est reconnue dès que sa vision de l'oeuvre est captée, débattue, analysée. Alexis père était un grand séducteur. De la même manière, il faisait plus confiance à l'imagination, à la langue, aux possibilités qui sommeillent en chaque homme, qu'aux tirades infinies des censeurs et aux professeurs les plus ronflants. Ni homme facile, ni auteur prolixe, ni complaisant, mais intellectuel et chroniqueur, d'une espèce devenue rare, celle qui prend son temps et se préserve ainsi des jugements hâtifs. Professeur d'histoire et de géographie, il revenait beaucoup sur ses ouvrages (Abrégé d'histoire d'Haïti 1492 - 1946), Cours élémentaire et moyen, Introduction à l'instruction économique, morale et civique, 1953), il les retouchait et les corrigeait sans fin. Son dilettantisme a toutes les apparences d'une conversation brillante et recherchée, mais, derrière les traits d'esprit du ciseleur de mots, se cache la lucidité d'un homme nostalgique et blessé, dont l'extrême amabilité se refuse à bannir une époque déjà lointaine. Toujours soigné et disponible, il a collaboré aux revues et journaux Cahiers d'Haïti, L'Essor, La Presse, Le Matin, L'Action Nationale et il considère avec brio et fascination qu'il a le temps d'en éviter les contrecoups déplaisants. Avec ses phrases irrevoltantes, il était un très grand styliste, doublé d'un esthète prodigieux.
Finalement, son talent n'a pas de secret, sauf celui du travail bien fait, de l'effort soutenu, de l'optimisme maîtrisé. Les variations que j'ai décrites valent pour définir un style particulier d'intellectuel ; ce sont aussi des signes éclairants pour décrire en ses parties essentielles le visage d'une culture et d'un passé. Le romancier du «Nègre masqué» (1933) maître à critiquer, ou plutôt permettant à chacun la maîtrise de ses propres jugements? La vieillesse de Stephen Alexis est assombrie par la grande vague répressive duvaliériste, qui révèle la fragilité du miracle nègre de prospérité haïtienne : il meurt en exil à Caracas, le 15 août 1962.
Pierre-Raymond Dumas

e-mail : padreramonddumas@yahoo.fr
cell : 557-9628
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=45874&PubDate=2007-10-13

Le «Tap-Tap» d'Haïti a volé la vedette à Montréal

Un «Tap-Tap» importé d'Haïti et baptisé justement «Haïti chérie» a volé la vedette lors de l'exposition «Haïti dans toute sa splendeur» organisée récemment à Montréal.
En effet, ce symbole du transport en commun haïtien a monopolisé l'attention de bon nombre de curieux et rappelé à des visiteurs des souvenirs indélébiles de la terre qu'ils ont laissée, malgré eux, il y a longtemps.

Réactions de quelques visiteurs

La jeune Sabine Jean-Louis, née de parents haïtiens à Montréal, qui a volontiers accepté d'opiner au micro de Mediamosaique.com, se dit «frappée par l'extravagance de l'art haïtien à travers ce Tap-Tap».

N'ayant jamais mis les pieds en Haïti, Sabine a profité de sa visite à la Place Bonaventure pour s'approcher de l'engin, l'explorer afin de se faire sa propre petite idée du véhicule le plus utilisé en Haïti.

Pour d'autres visiteurs plus âgés, comme Pascal Augustin, par exemple : «c'est franchement hallucinant de voir un vrai Tap-Tap à Montréal, ça me renvoie à ma jeunesse à Carrefour-Feuilles ou bien quand je vais à Carrefour (banlieues de Port-au-Prince)!».

La fameuse carrosserie du Tap-Tap
Pour ceux qui n'ont pas encore eu la chance de faire un tour en Tap-Tap, il faut dire qu'il s'agit d'un camion au-dessus duquel des ébénistes haïtiens érigent la fameuse «carrosserie» faite exclusivement en bois, en tôles avec des barres de fer un peu partout dans la structure.Le travail est complété par des peintres, des artistes. Ces derniers, doués d'un génie hors pair, finissent par le transformer en une oeuvre d'art au point où il est difficile pour un touriste ou même les autochtones de bouder la réalisation.Pas comme dans un autobus de Montréal ou de Paris!
Toutefois, si vous prenez un Tap-Tap de Carrefour-Feuilles ou de Carrefour à Port-au-Prince, sachez que l'ambiance lors du trajet diffère diamétralement de celle qui règne ordinairement dans les autobus en Occident.Et si vous avez horreur des décibels, de grâce, prenez de préférence un taxi! Car le son ou la musique qu'on diffuse à longueur de journée dans un Tap-Tap risque de vous faire mal aux tympans. Dans un Tap-Tap, ça parle fort, il fait chaud, l'espace est exigu, les gars sont galants envers les filles qui n'arrivent pas à s'asseoir. Une discussion commence et, des fois, aboutit à une relation sérieuse. Demandez à un Haïtien, il vous dira!
À noter que le mot Tap-Tap, est utilisé couramment en créole pour exprimer des mots comme «rapide», «vite vite» ou «en un clin d'oeil» en français. Sur ce, bon voyage virtuel en Tap-Tap!

Tiga et ses amis Saint-Soleil

Jean-Claude Garoute (Tiga) et les maîtres Saint-Soleil honorent les cimaises de nos galeries du 7 au 13 octobre. La galerie Nader montre les acryliques de l'artiste et différents Saint-Soleil à partir du mercredi 10 octobre 2007.
Il est encore possible de rencontrer l'art de Tiga, le merveilleux catalogue que lui consacre la communauté artistique haïtienne et internationale l'atteste. Le préfacier du catalogue, Christian Connan, ambassadeur de France en Haïti, écrit : « C'est Louis Deblé, ami de Malraux, et à ce moment-là ambassadeur de France à Port-au-Prince, qui invita l'ancien ministre du général De Gaulle. Malraux, envisageait de venir en Haïti « à la découverte de l'art brut ». A Soissons -la- Montagne, il n'a pas manqué de remarquer l'esprit généreux et altruiste de Tiga, son sens de la fraternité humaine, son idéal de solidarité, son désir de comprendre et d'apprendre aux autres, sa curiosité universelle, son humanisme et toutes ses qualités que l'artiste manifestait à l'égard des gens de toutes conditions, profanes en matière artistique ou autodidactes de génie, jeunes talents, artistes les plus modestes, malades mentaux ou simples d'esprit ».
Et rentrant d'Haïti en janvier 1976, à quelques mois seulement de sa mort, Malraux n'hésitera pas à remplacer dans l'Intemporel (déjà sous presse chez Gallimard) un chapitre sur Goya par une trentaine de pages sur l'art vodou haïtien et le Mouvement Saint- Soleil.

Aujourd'hui encore, regardeurs avertis et simples amateurs d'art restent fascinés par les toiles, sculptures, drapeaux, poèmes des artistes Saint- Soleil, les " vèvès " enchanteurs de Prosper Pierre-Louis. Des regards de plus en plus attentifs se posent sur les créations de Levoy Exil, puis lèchent les séquences de Louisanne Saint-Fleurant ou celles de Mathieu Saint Juste. Il faudrait revoir Albérik, Saint-Jean, deux des rebelles de Saint-Soleil.
L'art de Tiga La technique « du soleil brûlé », mélange de sienne, d'encre et d'acide, s'accorde à la « dernière manière » de Tiga, axée sur l'abstraction figurative et l'épuisement symptomatique du figuratif à travers quelques unes de ses toiles.
Fondateur du mouvement Saint-Soleil et théoricien de la « rotation artistique » (base de l'exploration de l'être créatif à partir des différents supports sensibles),Tiga pourrait être considéré comme l'un des grands créateurs caraïbéens contemporains.

Comme Salvador Dali, à certains égards, il a voulu écrire une sorte de « journal de son génie » et s'attarde de manière vertigineuse à capter les spectres christiques, sans vouloir les représenter de manière « obséquieuse » comme un Fra Angélico.
Les « Saintes faces », peintes par Tiga, associées ici à des christs, à des Vierges quelque part incandescentes, où surgit soudainement le « phénomène du sphinx », annoncent de manière presque atypique des icônes d'une profondeur hautement séraphique.Entre ombres et lumières, les visages ou les gros plans de Tiga se manifestent comme des figures solaires avec la « croix axiale » comme ancrage sublimatoire. Certains christs de Tiga ont le regard impénétrable. D'autres sont traversés par une lumière constellaire, la main de l'artiste engendre des christs dans une ambiance chromatique interpellative.Loin de s'ancrer dans un syncrétisme exubérant, l'expression picturale de Tiga suggère les nimbes du crucifié, les scarifications de telle femme cosmogonique et la musique des masques baignés de couleurs chaudes et douces. Certaines oeuvres de l'artiste sont tirées parfois des roches argileuses et des matériaux de récupération.
Les séquences de Tiga s'enchaînent sur des maternités douloureuses et des apparitions / désapparitions cosmogoniques. Le visage archétypal projeté par Tiga, avec des tensions rappelant parfois Alfred Hichtcok, se rapporte à l'énergie faciale : prométhéenne, faustienne, erzulienne, sphinxiale, séraphique ...Le souffle du fondateur du mouvement d'art Saint-Soleil ré- instrumentalise l'énergie collective haïtienne : « J'ai appris mon art à l'école de mon peuple ».
Le déploiement des femmes chez ce créateur, présentées quelquefois sous forme de triardes ou d'attroupement de beautés angéliques, ressemble à une chorégraphie fixée sur la toile( en couleurs et en mouvements). Cette danse visualisante se révèle aux mouvements de la rétine ou à la prégnance des regards.
Erotiques, quelques visages naviguent entre la conquête de « l'irrationnel » et la libre expression des formes et des couleurs. Les visages peints par l'artiste sont aussi semi-clos ou plutôt perpendiculaires à la prise de vue du regardeur ou de la regardeuse. Il s'agit de profils à la fois inaccessibles et pathétiques. De face ou de profil ,les « têtes » fertilisées par Tiga engendrent une atmosphère cartharsique peut-êre. La pertinence d'une telle expression plastique se réclame du sacré réinvesti et d'un formel ni béat, ni forcé. L'univers de ce créateur se métamorphose dans la « joyeuse et éprouvante traversée» des sens où Haïti est selon lui : « rêve, création,possession et folie ».
Tiga, né à Port-Au-Prince, le 9 décembre 1935, est fortement attaché à l'exploration du patrimoine originel de la Caraïbe.
Dominique Batraville
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=49538&PubDate=2007-10-13

« Artistes haïtiens », un très beau livre de Gérald Alexis

par Dominique BatravilleConservateur de musée, historien et critique d'art, Gérald Alexis, vient de publier aux Editions Cercle d'art à Paris son ouvrage d'art intitulé : « Artistes Haïtiens ». Ce bel ouvrage sera en vente-signature à la Galerie d'art Nader à Pétion-Ville le jeudi 11 octobre 2007 de 16h à 20h.
L'auteur a essayé de décrypter certaines créations plastiques haïtiennes produites durant les deux siècles écoulés. Son dernier livre se révèle un travail envahissant, car il charrie des images et des mises en contexte d'une grande originalité. Alexis, avec adresse a fait l'historique de la peinture haïtienne, avant de définir son sens, de déterminer son essor esthétique avant et après la venue des Naïfs, nos magiciens immortels pour parodier André Breton, André Malraux, Jean Marie Drot et Michel Philippe Lerebours.
L'ancien directeur du Musée d'art du Collège Saint-Pierre réunit les éléments essentiels pour faire de ce beau catalogue, un répertoire d'artistes haïtiens assez représentatifs.

L'ouvrage compte quatre vingt dix chefs d'oeuvre reproduits en grand format et en couleurs afin d'inviter les lecteurs à explorer « l'art haïtien » dans presque toutes ses dimensions.

Les collectionneurs trouveront là une sorte de devoir de choisir ses «miroirs d'opsidienne» offerts par Alexis.

Entre l'art officiel de circonstance, l'inspiration strictement populaire ou même la contemporanéité artistique haïtienne associés aux normes académiques, le coeur de Gérald Alexis balance évidemment.

Dominique Batraville

« Le Testament des solitudes » d'Emmelie Prophète sélectionné par le jury du Prix Senghor

Paru aux Editions Mémoire d'encrier, « Le Testament des solitudes », le premier récit d'Emmelie Prophète, a été sélectionné par le jury du Prix Senghor.
Cette oeuvre est en lice parmi six autres premiers romans pour l'obtention du prestigieux prix. « Iphigénie en haute ville » de François Blais, « Le Coeur des enfants léopards » de Wilfried N'Sondé, « Migrateur » de Marylinn Maurage, « Sarcelles Dakar » d'Insa Sané, « Dans ses petits papiers » d'Aurélia Lee Jane et « Confessions des liens disparus » de Bessa Miftiu sont les oeuvres concurrentes.
Emmelie Prophète est l'auteur de deux recueils de poèmes « Des marges à remplir » et « Sur parure d'ombre », parus aux Editions Mémoire à Port-au-Prince.
Née le 15 juin 1971 à Port-au-Prince, elle est journaliste et poète. Actuellement, elle est la directrice générale de la Direction nationale du livre en Haïti. La remise du Prix Senghor aura lieu le 19 octobre au Musée de la poste, à Paris. L'année dernière, Kettly Mars l'avait remporté pour son roman « L'heure hybride ». L'obtention de ce prix lui a valu une résidence d'auteur d'une valeur de 4 000 euros offerte par la mairie de Paris.
Le Prix Senghor a été créé par Plume noire qui, pendant l'année en cours, organise son 12e salon du livre autour du thème « Une ville, une oeuvre ». « Plume noire » ouvre ses frontières à la diversité des pays francophones et innove en étendant son prix littéraire aux pays francophiles, tels l'Albanie et la Roumanie. » Ce prix se veut un hommage à l'académicien et poète Léopold Sédar Senghor, l'un des principaux tenants de la négritude et « fervent défenseur d'une langue française riche de ses diversités ». Le prix récompense un premier roman de jeunes écrivains francophones vivant en zone urbaine. Il est parrainé, entre autres, par l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF).______________
(1) PROPHETE (Emmelie), Le Testament des solitudes, Editions Mémoire d'encrier, Québec, 2007, 120 pages.
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=49666&PubDate=2007-10-13

Un concours à l'intention des enfants des rues

Un concours porté sur trois domaines (peinture, danse et chant) destiné aux enfants des rues a été lancé lundi à Presse Café par la Fondation Maurice Sixto (FMAS). Organisé conjointement avec le Volontariat pour le développement d'Haïti (VDH) et Timoun Kap Teke Chans (TIMKATEK), ce concours a pour thème :« Chak timoun se yon talan ».Réalisé à l'intention des centaines d'enfants des rues qui traînent à Port-au-Prince, le concours concerne tant la peinture que la danse et l'interprétation de chants. Les inscriptions sont déjà en cours et prendront fin le 31 octobre 2007. Ce concours aura lieu du 5 au 23 décembre. La finale aura lieu le dimanche 23 décembre 2007 dans les jardins de la Télévision nationale d'Haïti à l'occasion de son 23e anniversaire.
En cette occasion, les gagnants recevront leur prix consistant en bourses d'études dans des écoles ou des centres professionnel. Un appui technique sera offert aux divers participants en vue de les aider à mieux penser leur avenir et leur rôle dans la société.

La coordonnatrice de la Fondation Maurice Sixto, Gertrude Séjour, explique que le concours vise à offrir aux enfants des rues un espace d'expression qui leur permettra de se récréer et de se sentir appréciés. Ce qui, selon elle, contribuera à l'intégration de ces enfants dans la société.
Le responsable du Volontariat pour le développement d'Haïti (VDH), Claude Richard Acédat, précise que ce concours se veut une réponse à la perception de la société haïtienne à l'endroit des enfants des rues. « Nous sommes en train de travailler de concert avec la Fondation Maurice Sixto pour renforcer la capacité des jeunes Haïtiens », ajoute M. Acédat.
De son côté, le représentant de Timoun Kap Teke Chans (TIMKATEK), Jean Fritz Carrioth, a réitéré le fait que les enfants sont des êtres à part entière. Il croit qu'ils ont beaucoup de capacités et d'aptitudes.
L'assistant coordonnateur de ce projet, Zacary Morin, fait remarquer que les enfants des rues peuvent devenir des personnalités incontournables du pays s'ils sont encadrés. Il plaide en faveur d'un nouvel édifice social où les enfants seront enfin pris en considération.
Amos Cincir

Cincir2005@yahoo.fr
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=49492&PubDate=2007-10-13

« Treize nouvelles vaudou » de Gary VictorPréface d'Alain Mabanckou

L'ouvrage « Treize nouvelles vaudou » explore l'imaginaire dans ses mystérieux labyrinthes. Une manière propre à l'écrivain Victor de sillonner le vaudou avec humour, force et passion. Ce jeune maître du fantastique va très loin, en puisant dans son quotidien les armes pour mieux voir la réalité.
Le résultat est que dans ces nouvelles discrètes et subtiles, tombe la frontière entre réel et imaginaire, le visible et l'invisible. Les dieux et les hommes se mêlent à la même histoire loufoque qui s'appelle VIVRE.
Alain Mabanckou : « Dans ce recueil, Gary Victor a réussi le pari de convoquer le mystère sans tomber dans le piège de la sensation ou de l'exotisme. Si la peur et l'angoisse nous encerclent de nouvelle en nouvelle, c'est sans doute parce que l'auteur nous rappelle que la nature humaine est un puits sans fond. »
Edwidge Danticat : « Imagination, vision et talent... La vie s'arrête en lisant Gary Victor. Et tant pis pour le quotidien. Découvrez ces Treize nouvelles vaudou ! »
Gary Victor, romancier, scénariste et journaliste, est né en 1958 à Port-au-Prince. Il est l'écrivain le plus lu de son pays. Ses livres sont publiés en France, au Canada et en Haïti. Il a reçu de nombreux prix littéraires dont Le prix du livre insulaire à Ouessant (2003), le Prix RFO du livre (2004). Il a déjà publié chez Mémoire d'encrier Chroniques d'un leader haïtien comme il faut (2006).

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En librairie le 15 octobre 2007(1) VICTOR (Gary), Treize nouvelles vaudou, Editions Mémoire d'encrier, Québec, 160 pages

Le tambour, sa peau et son histoire

Sanba Zao rappelle que la notion de « laviwon piebwa » est un principe de non retour, un voyage « one way ». Il se souvient qu'en 1997 il a été à Nantes, en France, et qu'il en a profité pour visiter la cellule de Toussaint Louverture, au Fort-de-Joux. Il avait évoqué un chant dahoméen au réduit humide où l'Homme de Bréda est mort, seul, la tête appuyée contre une cheminée comme pour transmettre, dit Sanba Zao, « le principe du savoir. » Des concepts de « demanbre » et de « la vente d'un choisi », Sanba Zao s'est un peu étendu sur la notion de l'éclatement du vaudou, du caractère militaire des rites et des différences rythmiques d'un « lakou » à un autre.
Sanba Zao a un autre talent. On ne peut pas dire qu'il a de l'éloquence. Sanba Zao a une énergie particulière de la communication. Est-ce sa pratique de professeur à l'Enarts ou le fait de se colleter à la réalité populaire du pays qui nous le présente dans l'évidence de la proximité ? Ce qui est convaincant, c'est que cet homme dans la cinquantaine a de l'énergie à en revendre.S'il se complait dans les anecdotes de l'histoire de la musique Racine en Haïti, il est très méthodique aussi bien dans ses recherches sur le plan ethnographique que dans l'explication technique des rythmes de la musique populaire ou du Mouvement Racine dont il est, incontestablement, un des pionniers.
Au cours de sa présentation le samedi 6 octobre à la Bibliothèque du Soleil en présence d'une quarantaine d'étudiants et de professionnels, le fondateur du groupe Sanba Yo est parti de l'histoire de la terre haïtienne qui avait le nom de « Bohio, c'est-à-dire matrice originelle » pour faire mieux comprendre aux participants des Ateliers la valeur du tambour, la naissance, le développement et les évolutions de la musique haïtienne.
De l'Afrique ancestrale, il retient le phénomène de l'esclavage qui « est surtout une déstabilisation géographique et une perte de contact avec la terre mère. » Sommes-nous tous des...« exilés » ? Cette question soulève la notion contemporaine d'enracinement caribéen contre l'indigénisme africaniste.
Il rappelle que la notion de « laviwon piebwa » est un principe de non retour, un voyage « one-way » pour d'autres terres. Il se souvient qu'en 1997 il a été à Nantes, en France, et qu'il en a profité pour visiter la cellule de Toussaint Louverture au Fort-de-Joux. Il avait évoqué un chant dahoméen à la cellule où l'homme de Bréda est mort, seul, la tête appuyée contre une cheminée, comme pour transmettre, dit Sanba Zao, « le principe du savoir. » Des concepts de « granbwa », de « demanbre », de « la vente d'un choisi », Sanba Zao s'est un peu étendu sur la notion de l'éclatement du vaudou, du caractère militaire des rites et des différences rythmiques d'un « lakou » à un autre.
Précisant être né le 13 septembre 1957, 9 jours avant la prise du pouvoir par François Duvalier, le 22, Sanba Zao a fait le portrait d'une époque marquée par les préjugés de couleur et de classe à l'Université, par l'idée répandue de « premier baka de la République » dont s'enorgueillissait papa Doc. Il a mentionné les coups d'Etat intempestifs, le macoutisme anarchique et la clandestinité imposée par ces temps sombres où l'on entendait « La Voix de l'Amérique » au petit jour, dans une chambre hermétiquement close.

Contre toute attente, c'est par la musique française qu'il dit avoir commencé à chanter tout en spécifiant qu'à « l'époque nationaliste de Papa Doc on entendait plutôt les chansons d'Eddie Gorme, de Los Diplomaticos et de Miguel Acevez Mejia .Il se souvient qu'il y avait aussi, par des dimanches nostalgiques, des airs de Tino Rossi à la radio.
Sur le plan national, notre musique, soutient Sanba Zao, était représentée par Raoul Guillaume, le groupe Issa El Saïeh, le Jazz des Jeunes, Dodoph Legros et Lumane Casimir. Il n'oublie pas Toto Bissainthe, Martha Jean Claude, Nemours Jean Baptiste, Wébert Sicot et le style Tipico dont, sur le tambour, il a montré les variations qui on produit d'un côté le Compas Direct et de l'autre le "Cadence Rempas". Il considère ce dernier rythme « plus sophistiqué, plus élaboré que le compas plus facile et plus popularisé. »
Mais, qu'en était-il des instruments traditionnels, du folklore et de notre identité musicale ? Sanba Zao informe que « le lambi, le bambou, le cornet en tôle, le tambour accompagnaient les instruments harmoniques. » En soulignant que la culture populaire était clandestine dans les années 50, sous Paul Magloire, malgré le boom touristique, il précise que le vaudou était relégué à l'arrière-plan, que le français bousculait le créole dans ses derniers retranchements, que l'évangélisation des sectes religieuses gagnait du terrain. Il argumente que François Duvalier « avait du respect dans toutes les religions ». Pourquoi ?
De peau et de rythme
Les changements, commente Sanba Zao, commencent chez lui en passant par Aznavour, Ferrat et Adamo à James Brown, le Pop américain, le blues de Harlem et les nuits de discothèque, à Pétion-Ville. Il a cité, pour le souvenir : Michèle's Scotch, Rétro Folies, entre autres. Dans la vingtaine, il dit avoir rencontré Yvon Louissaint, « un inoubliable artiste », reconnaît-il. A partir de 1975, il diminue sa fréquentation des discothèques en s'intéressant sérieusement au chant vaudou.
Les expériences instrumentales ont continué avec détermination du tambour à la guitare. C'est en 1982 que d'heureuses rencontres se font avec Denis Emile, Chico Boyer qui pratiquaient le « jazz n' blues » et expérimentaient le rythme vaudou. Il cite un peintre comme Jean René Jérôme, un musicologue tel Gérald Merceron parmi les premiers à accueillir le Vodou Jazz avec enthousiasme.
Il en profite pour donner des précisions sur les rituels sacrés des « lakou » et leur rapport avec le tambour. « A Soukri Danache, soutient-il, c'est le tambour Petro, le rituel du feu, qui prédomine. » Il donne l'exemple d'Azor comme le vrai prototype de la musique Petro. Sanba Zao a avancé de précieuses informations sur le matériel avec lequel on fabrique le tambour qu'il considère comme « une matrice instrumentale ». Il souligne que la qualité du bois est déterminante dans la netteté du son. Au sujet de la surface du tambour, il argumente que « la peau de boeuf est liée au rite rada, la peau de cabri au rituel Petro, la peau de mouton encore au Petro. Le tambour Asòtò représente le charbon du temple et symbolise des rituels militaires. » Sanba Zao a parlé des lwa peu connus du panthéon vaudou comme Keviesou, Bazoumennen et du rituel du feu qui s'origine en Angola.
A partir de ces données historiques et techniques, la part réservée à l'histoire de la musique Racine était plutôt mince, malgré des questions qui voulaient relancer une polémique intelligemment évitée.
Commencé à partir de 4h p.m., l'Atelier autour des savoir-faire du tambour, des rituels vaudous et de la musique Racine s'est terminé jusqu'à 7hp.m. Sanba Zao ne se fatiguait pas de parler de la drogue, le joint, chez les artistes en général et les musiciens Racine en particulier, de la relation entre la politique et la mouvance Racine.
Après le romancier Gary Victor, le musicien Théodore Beaubrun Junior, Sanba Zao est le troisième intervenant aux Ateliers du Soleil qui recevront ce samedi 13 octobre le père Castel Germeil autour du thème : « L'ambiguité du religieux dans la pensée humaniste de Jacques Roumain ». Le 17 octobre l'esthéticien et critique Mérès Wèche et le Dr Yves Dorestal parleront respectivement de l'Esthétique caribéenne dans l'oeuvre de Tiga et de « Jacques Roumain et l'Ethnologie haïtienne ».
Pierre Clitandre
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=49625&PubDate=2007-10-13

« 72 heures chrono » arrive en Haïti

'initiative Taling Dialo, en collaboration avec ses partenaires en Haïti (l'Association haïtienne des cinéastes, le Centre Pétion Bolivar, le Festival Film Jakmèl et ses partenaires au Canada, l'Office national du film du Canada, EquiJeunes et Production Bonsaï) organise les 5e et 6e éditions du concours de création cinématographique "72 heures chrono" à Port-au-Prince du 19 au 24 novembre et à Jakmèl du 26 novembre au 1er décembre.
Les activités des "72 heures chrono" visent à identifier et à former des jeunes cinéastes de la relève âgés de 18 à 35 ans et à leur permettre de se familiariser avec les outils de la nouvelle technologie : prises de vues, montage numérique, production multimédia, etc.
Précédé de trois jours de formation intensive dans les disciplines suivantes : initiation à la caméra numérique, prise de son, montage numérique, conception, scénarisation, documentaire et fiction, réalisation, direction de production, techniques d'entrevue. Les équipes en compétition font face au défi de réaliser un court film sur support numérique d'une durée maximale de 6 minutes, et ce en seulement trois jours. Les oeuvres revêtiront plusieurs formes (documentaire, animation, fiction, etc.).
Les prix et mentions seront décernés aux meilleures oeuvres lors de la soirée de projection à la fin du concours.

Contact: Port-au-Prince
Arnold Antonincpb@haitelonline
Jakmèl Film Festival
Paula Hyppolite
paula@festivalfilmjakmel.com
Initiative Taling Dialo
Hyacinthe Combary
Chyacinthe@gmail.com
Concert de jazz classique
Jens Thomas et Christof Lauer, deux musiciens allemands, vont donner un concert de jazz le jeudi 11 octobre 2007 à 18h p.m. à l'Ecole Sainte Trinité à la salle Sainte Cécile. L'entrée sera libre.
Eliacin au Festival Arts
Festival Arts et Marie-Alice Théard Ravix présentent les oeuvres de l'artiste Maud Eliacin le 12 octobre 2007 à partir de 4h p.m. L'exposition restera ouverte jusqu'au 22 octobre 2007. http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=49585&PubDate=2007-10-13

Ouf de soulagement à Croix-des-Bouquets

La rue Saint-Jean, où stationnaient les véhicules de transport à destination de Thomazeau et de Mirebalais, offre pour le moment l'image d'un espace plus ou moins agréable(Photo: Victor Jean Junior)
Les piles d'immondices qui souillaient l'entrée de la commune de Croix-des-Bouquets ont disparu. Les aires de stationnement des véhicules de transport ont définitivement changé de place. Les marchandes abandonnent peu à peu les trottoirs, et les embouteillages monstres ont considérablement diminué aux carrefours... Les résidents de cette commune respirent enfin un nouvel air.
C'est à l'occasion de la fête patronale de cette commune, la Notre-Dame du Rosaire, célébrée le week-end écoulé, que les autorités municipales ont déployé des efforts considérables afin de présenter un nouveau visage de la zone aux visiteurs. Des travaux d'infrastructure et une vaste campagne d'assainissement y avaient précédemment été mis sur pied. Résultat : la « ville du fer découpé » présente aujourd'hui un environnement quasi agréable.« Maintenant nous sommes en train de vivre dans un espace plus ou moins vivable », s'est réjouie une septuagénaire qui réside depuis sa naissance à la rue Saint-Jean. Satisfaite des travaux de nettoyage fraîchement réalisés par le conseil municipal, la veuve dit espérer que les Cruciens vont renouer avec la propreté d'antan.
Vue partielle de la petite place publique. Cet espace était un lieu de stationnement également
(Photo: Victor Jean Junior)
Pour rendre la ville attrayante, une petite place publique a été récemment construite à l'entrée de l'ancien local du marché public où des marchands - surtout des petites marchandes - installaient librement leurs produits. Aménagé par les autorités municipales de concert avec certains citoyens, selon une source digne de foi, cet espace a été transformé pendant deux jours en un véritable site d'exposition de produits artisanaux lors de la célébration de la Notre-Dame du Rosaire.
Sur l'un des murs clôturant ce lieu d'attraction, un message de sensibilisation, qui appelle à la solidarité, est lancé à tous les fils et filles de la commune : « Mezanmi ann kenbe komin nou an pwòp ». En français : « Mes amis, gardons notre commune propre ».« Si les autorités continuent d'entreprendre ces travaux d'assainissement et si les habitants décident d'apporter leur contribution pour le bon usage de l'espace environnemental, Croix-des-Bouquets pourra devenir réellement une ville digne de ce nom », estime un habitant, comme pour féliciter les employés de la mairie et pour inviter, du même coup, la population à mettre la main à la pâte.
Les embouteillages monstres ont complètement disparus au Carrefour Calvaire (Photo: Victor Jean Junior)
Applaudissant des deux mains les efforts de la mairie, d'autres résidents pensent toutefois qu'il reste encore beaucoup à faire à l'actuel conseil municipal. « Des tronçons de route attendent encore l'intervention des autorités concernées. Des citoyens, qui ne cessent de construire des maisons de manière anarchique dans la ville, doivent être interrogés. Certains points de stationnement des « Tap-Tap » méritent d'être révisés. »Après le délogement des marchands, en juin dernier, de l'ancien local du marché public situé non loin du carrefour Calvaire, le maire titulaire, Jean Saint-Ange Darius, avait envisagé de construire un complexe commercial et un centre hospitalier à cet endroit. « Nous comptons réserver cet espace pour la construction d'un hôpital et d'un centre commercial », avait-il déclaré. En attendant cette réalisation, les résidents de la « ville du fer découpé » poussent un ouf de soulagement contrairement aux six derniers mois.
Victor Jean Junior

djune14@yahoo.fr
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=49673&PubDate=2007-10-13
Commentaires
Pendant les premiers jours de la gestion des élus de la mairie de Port-au-Prince, la population n générale aait applaudi des deux mains les effort entrepris pour donner un nouveau visage à certains quartiers de Port-au-Prince. Le nettoyage et la libération des rues comme Lalue, Le déguerpissement des commerce sur la zone du Champs de Mars représenatient des actions susceptibles a réinstaurer la confiance et de se dire qu'une autre Haïti était possible.
Après des discours divergents entre la mairie et le pouvoir central "le peuple" a fait valoir ses droits au dessus de ceux de la majorité car c'est pour cela qu'ils s'étaient rendus à Montana". On comprend mieux le sens des votes en Haïti. C'est pour perpétrer le statut quo et le désordre.
Si les élus de la croix des bouquets peuvent sauvegarder ces acquis ce serait une très bonne chose pour l'image du pays.
Aujourd'hui, les innondations devastatrices à la moindre précipitation ne suffisent toujours pas à faire comprendre aux haïtiens, gouvernants et gouvernés que ces manières de gérer l'environnement ne peuvent plus continuer. Pour protéger ce qui peut l'être encore, pour que le pays ne s'engloutisse uen fois de plus il faut de la fermeté, de l'autorité de la vision et de l'action.
Bravo Croix des bouquets au moins on ne vous reprochera pas de n'avoir pas essayé!

Le bilan s'alourdit d'heure en heure

Le bilan partiel des inondations qui ont affecté plusieurs départements d'Haïti ces derniers jours fait état d'au moins 45 morts, de milliers de maisons détruites et endommagées et de dizaines de milliers de familles sinistrées.
Alors que les chiffres ne cessent d'augmenter en ce qui a trait aux dernières inondations qui ont provoqué d'énormes dégâts à travers le pays, des pluies diluviennes continuent de s'abattre sur diverses régions du territoire national. A cet effet, le Secrétariat permanent de gestion des risques et des désastres maintient toujours l'alerte jaune et orange et demande à la population de rester vigilante et d'appliquer les consignes de sécurité.Seulement dans la commune de Cabaret, plus d'une vingtaine de corps ont été recensés jeudi et une dizaine de personnes sont portées disparues après les inondations de mercredi. Trois jours après ces inondations, aucun chiffre définitif n'a encore été rendu public. Une délégation, composée de représentants du Bureau de la protection civile et d'élus locaux, sillonnait encore, ce vendredi, les endroits affectés afin d'évaluer les dégâts. La situation est tellement grave que le ministre de l'Intérieur et des Collectivités territoriales, Paul Antoine Bien-Aimé, pense qu'il faut décréter l'état d'urgence à Cabaret qui est, selon lui, menacée d'une catastrophe majeure. Le ministre Bien-Aimé affirme également que des sinistrés commençaient à être évacués.Une aide d'urgence de 10 millions de gourdes serait débloquée par le gouvernement, a-t-on appris vendredi d'une source digne de foi. Cette aide pourrait être augmentée en fonction de l'importance des dégâts. Les familles sinistrées vont-elles recevoir effectivement l'aide en question? A Zoranje, une section communale de Croix-des-Bouquets, les corps de 18 personnes auraient été retrouvés dans les décombres, selon certains riverains. Un responsable local, qui n'était pas en mesure de confirmer cette information, parle toutefois d'une vingtaine de maisons détruites.Même spectacle désolant à Croix-des-Missions, un quartier situé dans la commune de Tabarre, où les résidents font état d'un mort et plus d'une dizaine de maisons endommagées provoquées par la crue de la rivière Grise dans la nuit du mardi 9 au mercredi 10 octobre. C'est la même situation à Petit-Goâve où d'importants dégâts ont été enregistrés.Dans le département de la Grand'Anse, une mère de famille, dont le petit-fils de six ans a été blessé, est morte dans sa résidence située dans le quartier populaire de Mackandal, à Jérémie. Des dizaines de maisons ont été également détruites dans la commune de Dame-Marie et une dizaine d'autres dans la localité proche de Leçon.Récemment, le passage d'une onde tropicale dans la côte sud du pays avait provoqué la mort d'un enfant de 11 ans et laissé 3000 familles sinistrées aux Cayes. Selon les prévisions météorologiques, une zone large de basse pression continue d'influencer la météo sur presque toute la région caribéenne. Des averses éparses sont encore prévues sur nos départements.
Consignes de sécurité à appliquer en cas d'inondation, d'éboulements, de glissements de terrain et d'orages violents:

• Mettre hors d'eau tout ce qui peut être endommagé en cas d'inondation.
• Mettre les animaux en lieux sûrs.
• Se préparer à évacuer, si nécessaire, les zones exposées aux inondations et glissements de terrain : (plaines inondables, bords de mer, ravines, rivières, flancs des montagnes, ect).
• Ne rester pas sur les ponts.
• Ne pas traverser les rivières en crue sous aucun prétexte.
• S'abriter en lieux sûrs à l'intérieur des maisons, loin des fenêtres lors des orages violents.

Victor Jean Junior

djune14@yahoo.fr

L'appui technique international aux enquêtes, un atout

Une importante réunion de travail s'est tenue jeudi au Palais national sur les dossiers des journalistes assassinés et sur les moyens à mettre en place pour renforcer les structures de la presse haitienne afin de la rendre plus performante, plus indépendante, plus professionnelle et plus éthiquement responsable.Cette séance de travail, présidée par le président René Préval, a réuni les personnalités suivantes: le secrétaire général de Reporters Sans Frontières, Robert Ménard et deux autres membres de sa délégation; le secrétaire général de SOS Journalistes et président de la Commission Indépendante d'Appui aux Enquêtes relatives aux Assassinats des Jouranalistes (CIAPEAJ), Joseph Guyler C. Delva ; les autres membres de la commission: le ministre de la Justice, René Magloire ; le doyen du tribunal de 1ère intance de Port-au-Prince, le juge Rock Cadet ; le commissaire du gouvernement, Claudy Gassant; le correspondant de RSF en Haiti, Claude Gilles; des proches collaborateurs du chef de l'Etat.« Auparavant, il y avait des obstacles politiques qui empêchaient l'avancement de ces dossiers, » a dit Préval. « Aujourd'hui, les autorités s'engagent à faire tout ce qui est en leur pouvoir pour résoudre ces cas d'assassinat », a confié le chef de l'Etat, réitérant son engagement à appuyer le travail de la CIAPEAJ.Au cours de cette rencontre, plusieurs questions relatives à la liberté de la presse en Haiti, aux cas des journalistes assassinés et à la structuration de la presse ont été soulevées.« Aujourd'hui, le président Préval l'a bien dit, les obstacles politiques sont levés, mais certains obstacles techniques demeurent » a déclaré Robert Ménard, le chef de la délégation de Reporters Sans Frontières, qui comprenait également Bernoit Hervieu, Francois Boguingo, respectivement responsable de RSF pour les Amériques et représentant de RSF- Canada.« Nous allons travailler avec SOS Journalistes pour faire des propositions communes sur un certain nombre de dossiers relatifs au cadre légal pour la presse et des programmes de formation pour les journalistes », a annoncé Robert Ménard qui souligne également l'importance de la participation des patrons de presse.Les participants - y compris le ministre de la Justice, le chef du parquet et le doyen- ont convenu de la nécessité de faciliter la venue en Haiti d'experts étrangers pour aider les juges travaillant sur les cas des journalistes assassinés à bien monter les dossiers et à faciliter, par exemple, l'établissement de preuves techniques très déterminantes pour la manifestation de la vérité dans le cadre de ces meurtres.
Le président Préval s'était empressé d'entrer en contact par téléphone avec l'expert indépendant des Nations unies pour les droits humains en Haiti, l'expérimenté et respectable juge Français, Louis Joinet, depuis Paris.Lors de cet entretien, le juge Joinet a promis au président Préval et à Robert Ménard de faire contribuer à la concrétisation de cette initiatve. Il a sur le coup proposé un expert qui pourrait aider, tandis que Ménard a promis de mobiliser les instances internationales susceptibles de financer pareilles initiatives. La section de la mission de l'ONU qui s'occupe de l'appui à la justice sera également sollicitée.Six cas prioritairesLes participants - sur proposition de RSF, de la CIAPEAJ et de SOS Journalistes - se sont mis d'accord pour concentrer leurs efforts sur 6 cas de meurtre considérés pour le moment comme prioritaires sans préjudicier aux autres cas de journalistes assassinés. Il s'agit des cas de Jean Dominique, Brignol Lindor, Jacques Roche, Ricardo Ortega, Jean-Rémy Badiau et Alix Joseph.Lors d'une conférence de presse conjointe au palais présidentiel à l'issue de la rencontre, Robert Ménard et Guyler C. Delva - en présence du ministre de la justice, du doyen et du commissaire du gouvernement - ont fait un compte rendu sur l'état d'avancement des enquêtes sur les assassinats des journalistes et ont appelé les professionnels des médias à se mobiliser autour du travail de la CIAPEAJ pour exiger que lumière soit faite.Robert Ménard a présenté la création de la CIAPEAJ comme une heureuse et positive initiative qui est en train de faire une différence."Nous pensons qu'avec le travail de la commission les dossiers ont de bonnes chances de progresser, et elle peut compter sur le soutien de Reporters sans Frontières," a dit Ménard.Selon Guyler C. Delva, la CIAPEAJ va continuer à faire le suivi de chacun des cas et à insister sur le respect des délais impartis aux enquêtes.« Ce qui fait traîner les enquêtes, c'est que personne ne se soucie des délais impartis », a déclaré Guy Delva. « Il n'est plus question que les enquêtes se poursuivent indéfiniment », a dénoncé Delva.Un institut de journalismeLes participants étaient unanimes à reconnaître la nécessité de la mise sur pied d'un véritable institut de journalisme qui pourrait contribuer à valoriser ce métier.Les questions de l'adoption d'une législation adéquate sur la presse, notamment sur l'accès à l'information, et d'un code d'éthique pour les journalistes haïtiens ont été abordées.« Les journalistes et les médias ont des droits, mais ils ont aussi des devoirs », a souligné Ménard. « Ils doivent se montrer responsables et doivent savoir qu'ils sont responsables de tout ce qu'ils diffusent, même s'il s'agit de déclarations faites par tiers », a mis en garde Robert Ménard.
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=49698&PubDate=2007-10-13
Nous ne sommes pas un état en faillite mais l’appui international dans toutes nos sauces !

Franck Ciné et consorts renvoyés au correctionnel

Le juge Patrique R. Métellus a rendu son ordonnance de clôture le 8 octobre 2007, bouclant par ainsi l'instruction ouverte et poursuivie contre les anciens administrateurs de la Socabank sur plainte de l'Etat haïtien.Cette ordonnance a pour dispositif: « Disons qu'il n'y a pas lieu de poursuivre les nommés Joseph Surpris Saint-Louis, Joseph Léon Paul, Lesly Péan, les renvoyons en conséquence hors des liens de l'inculpation; disons de préférence qu'il y a charges et indices suffisants retenus contre les nommés Charles A. Beaulieu, Georges Racine, Harry Pétion, Gilbert Dauphin, Frantz Noiailles, Franck Ciné, Patrick Vieux, Franck Dessources, Harold Cadet, Claudel Joseph Géhy, Marie Robert Poitevien, Telfort Pérard, ci-dessus qualifiés et identifiés, les renvoyons en conséquences devant le tribunal correctionnel pour y être jugés, conformément aux dispositifs de l'article 337 du code pénal; ordonnons que toutes les pièces de la procédure pénale ainsi que la présente ordonnance soit transmises au commissaire du gouvernement de ce ressort pour, par lui, en être fait ce que de droit... »M. Franck Ciné, par l'intermédiaire de l'un de ses avocats mandataires, a formellement interjeté appel contre cette ordonnance par déclaration faite au greffe du tribunal de première instance de Port-au-Prince, ce vendredi 12 octobre 2007.Le conseil de défense de Franck Ciné, contacté par le journal après la déclaration d'appel, a qualifié l'ordonnance de véritable honte nationale en raison du fait que leur client a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour dettes contractées par des sociétés anonymes dans lesquelles Franck Ciné a des intérêts. La même ordonnance renvoie hors des liens de l'inculpation plusieurs anciens membres du conseil d'administration de la Socabank au motif qu'ils n'étaient pas actifs dans le Conseil.Le juge reconnait que M. Ciné n'était pas lui aussi actif dans le conseil, qu'il n'a aucune dette personnelle vis-à-vis de la Socabank, qu'il n'a jamais signé un document comptable de cette institution mais l'a quand même renvoyé devant la juridiction de jugement sans aucun motif valable.Juge Patrique Métellus devant la Cour de cassationLa cour de cassation sur demande de M. Ciné, au dessaisissement du juge Patrique R. Métellus (récusation), a rendu un arrêt - avant dire droit le mercredi 10 octobre 2007, invitant le juge d'instruction Métellus du Tribunal de Première instance de Port-au-Prince à se présenter devant la première section de la Cour de Cassation le lundi qui sera 15 octobre 2007 à 11 heures a.m., en vue d'éclairer la religion de la Cour sur le fait reproché dans la requête en dessaisissement soumise à elle par M. Franck Ciné.Il y a lieu de rappeler qu'en avril 2007, deux des avocats de Franck Ciné, Mes Camille Leblanc et Joel Petit-Homme, avaient dénoncé devant la presse le fait que le juge Métellus aurait été surpris en train de rédiger un ordre d'interdiction de départ contre leur client sous la dictée de l'un des avocats de l'Etat haïtien. C'est ce fait qui a été porté à la connaissance de la Cour de cassation contre le juge Métellus.Cette convocation intervient le 10 octobre, deux jours après que celui-ci s'est dessaisi du dossier en rendant une ordonnance de clôture.
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=49736&PubDate=2007-10-13

En palce pour combien de temps (LE CEP)


Le Conseil électoral provisoire existe toujours. Le Premier ministre Jacques-Edouard Alexis en a fait l'annonce, confirmant par ailleurs qu'une décision serait prise rapidement sur le sort de de l'institution électorale, abandonnée par ses alliés politiques.La nouvelle du renvoi du Conseil électoral provisoire dirigé par Max Mathurin, qui défraie la chronique depuis le début de la semaine, a été commentée vendredi par le chef du gouvernement, Jacques-Edouard Alexis, qui a tenu à rectifier certains points. « L'Exécutif n'a pas renvoyé le CEP », a dit le Premier ministre, confirmant cependant que des consultations étaient en cours en vue d'aboutir à un consensus sur ce dossier qui provoque maints remous. « En attendant, les conseillers électoraux peuvent continuer à remplir leur mission », a-t-il déclaré.Pourtant, au sein de l'Exécutif, il ne fait plus de doute que le sort du CEP de Max Mathurin est déjà réglé. « L'actuel CEP n'a aucune chance d'organiser les prochaines sénatoriales partielles, a laissé entendre le président du Sénat, Joseph Lambert. Pour preuve, les dernières réunions organisées entre l'Exécutif et les autres secteurs concernés dans l'organisation de ces joutes se sont déroulées autour des modalités de choix des membres du prochain CEP et de son mandat. »« Aucune décision officielle n'est encore prise sur la question », a déclaré Jacques-Edouard Alexis, se référant aux déclarations de Joseph Jasmin, ministre chargé des relations avec le Parlement, qui, le premier, avait parlé à la presse du renvoi du CEP. Vendredi, le Secrétariat de la présidence a même publié un communiqué de presse pour se démarquer des déclarations de M. Jasmin. « Toutes déclarations faites par qui que ce soit suite à une rencontre sur le dossier du CEP n'engagent pas l'Exécutif », a fait savoir Assad Volcy, qui a lu le communiqué. « Je maintiens mes déclarations, a réagi Joseph Jasmin. Je suis intervenu dans la presse comme le dirigeant de la Plateforme Lespwa et non comme porte-parole du gouvernement. »Tous les partis politiques membres du gouvernement de coalition, à l'exception de la Fusion des sociaux-démocrates haïtiens, donnent mandat à la présidence pour créer un nouveau Conseil électoral provisoire. « La Fusion ne peut pas faire cavalier seul, estime le dirigeant de l'organisation politique au pouvoir. Nous l'invitons à nous rejoindre. »
Dans un communiqué de presse rendu public ce vendredi, les responsables de la Fusion des sociaux-démocrates haïtiens ont réaffirmé leur support au CEP dirigé par Max Mathurin. « La Fusion pense qu'il faut maintenir en place le CEP, étant donné qu'il a déjà fourni un travail globalement satisfaisant au niveau des élections présidentielle, législatives et territoriales, et qu'il n'aura pas besoin d'un temps de rodage pour réaliser de nouvelles élections », lit-on dans ce communiqué qui porte la signature du professeur Victor Benoît. Les responsables de la Fusion ont aussi invité le président de la République, René Préval, à prendre en compte les points de vue de tous les secteurs du pays sur la tenue des prochaines élections. La Fusion ne fait pas cavalier seuleLa décision des chefs de partis politiques de donner mandat à l'Exécutif pour renvoyer l'actuel CEP est vertement critiquée par leurs collègues de la classe politique. « Il s'agit là d'un acte de lâcheté et de traîtrise parce que les chefs de partis ont livré les conseillers électoraux, juge le leader du Grand rassemblement pour l'évolution d'Haïti (GREH), Himmler Rébu. Ces partis auront à assumer toutes les conséquences de cette décision sur les institutions du pays. »Même s'il est favorable au renvoi du CEP actuel, René Julien, chef de file de l'Alliance démocratique pour bâtir Haïti (ADEBAH), se dit pourtant opposé à la méthode que veut utiliser l'Exécutif. « C'est dommage que le gouvernement ne veuille pas respecter les procédures légales dans la mise en place d'un CEP », regrette René Julien. Le Parti libéral haïtien a lui aussi pris partie en faveur de l'actuel Conseil électoral provisoire. « Nous recommandons au gouvernement de laisser fonctionner les institutions indépendantes comme le CEP », a écrit Jean André Victor dans un communiqué de presse.Il n'y a pas que des leaders politiques qui sont favorables au maintien du Conseil électoral provisoire. Le président de la Chambre de Commerce et d'Industrie d'Haïti (CCIH), Jean Robert Argant, dit renouveler son appui à François Benoît, représentant du secteur privé au CEP. Il dit croire que l'actuel CEP est en mesure d'organiser les prochaines élections. Pour sa part, le directeur exécutif de l'Initiative de la société civile (ISC), Rosny Desroches, estime qu'une décision consistant à renvoyer le CEP doit être interprétée comme une violation de la Constitution. « La démocratie et l'Etat de droit sont menacés parce que la loi n'est pas respectée », a-t-il lancé. En début de semaine, plusieurs autres institutions dont l'Eglise catholique avaient réaffirmé leur soutien au Conseil électoral provisoire.


Jean Pharès Jérôme
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=49740&PubDate=2007-10-13

Morne-à-Chandelle, une autre réalité

Morne-à-Chandelle, la première section communale de Carrefour est toute aussi délaissée qu'un enfant abandonné par sa mère. Pourtant, dans cette localité, survivent de vieilles traditions haïtiennes. Là-bas, se marier est une longue histoire.
La piste qui mène à la première section communale de Carrefour est un calvaire (Photo: RAJ Magazine)
Peuplée de 600.000 habitants, la commune de Carrefour est certainement, sur le plan géographique, la plus grande du département de l'Ouest. Elle comporte treize sections communales. Paradoxalement, c'est sans doute ce qui fait son malheur. La majorité de ses sections, situées dans les hauteurs, sont pratiquement coupées de la réalité sociale, économique et culturelle de la zone métropolitaine de Port-au-Prince. Quelques-unes d'entre elles sont même beaucoup plus près de Jacmel que de Carrefour. Pour s'y rendre, il faut marcher des heures, voire, une demi-journée, sous un soleil de plomb ou sous la pluie.
La maisonnette abritant le bureau du Conseil de l'administration communale (Photo: RAJ Magazine)
Morne-à-Chandelle, la première section communale de Carrefour, n'échappe pas à cette triste réalité. Ses résidents doivent marcher plus de trois heures pour se rendre à la station de camionnettes située dans les parages de l'Eglise paroissiale Saint Charles. Le trajet est plus difficile au retour qu'à l'aller et prend beaucoup plus de temps. La route, ou plutôt la piste, qui mène à Morne à Chandelle est une pente raide, cahoteuse et boueuse. Les véhicules ne fréquentent presque pas la zone depuis 1985, selon Louis Jean Robert, un des membres du Casec de la zone. Seules les grosses cylindrées résistent aux innombrables nids-de-poule.
A défaut d'âne ou de cheval, certains résidents préfèrent marcher pieds nus au lieu d'abîmer leurs chaussures sur les roches.
Tout est prioritaire...
Des membres du Conseil communal de Morne-à-Chandelle (Photo: RAJ Magazine)
A l'image de plusieurs régions excentrées du pays, tout paraît prioritaire à Morne-à-Chandelle : la santé, l'école, l'eau, l'électricité, pour ne citer que ceux-là. L'eau potable fait cruellement défaut à Morne-à-Chandelle. Il n'y a aucun système d'adduction d'eau. La Centrale autonome métropolitaine d'eau potable (CAMEP), n'est pas représentée dans la zone. Les entreprises spécialisées dans la vente d'eau non plus.
Pour s'alimenter, les habitants ont donc recours à l'eau de sources qui, souvent, est contaminée par les fosses septiques creusées n'importe où. Les plus avisés utilisent des agents purificateurs mais le font de manière exagérée. Il en résulte que les habitants sont souvent frappés de certaines maladies dues à la contamination de l'eau de consommation. « Les maladies les plus courantes enregistrées dans la localité sont généralement la malaria, la typhoïde, la diarrhée... », énumère minutieusement, Louis Jean-Robert. Des infections qui les obligent, la plupart du temps, à laisser Morne-à-Chandelle pour se rendre ailleurs en quête de traitements efficaces.En fait, à Morne-à-Chandelle, il y a seulement deux centres de santé et trois infirmières pour s'occuper des quelques 3000 habitants, selon un responsable de l'administration communale.
Quand les cas dépassent leurs compétences, les patients doivent alors se rendre dans un centre hospitalier à Carrefour ou au centre ville de Port-au-Prince. « La plupart du temps, les malades sont référés en ville », explique Constant Jules, un habitant de la zone. D'autres, à défaut d'argent, préfèrent s'adresser aux médecins traditionnels, notamment aux sages-femmes lors des accouchements. Beaucoup d'exercices pour manger le pain de l'instruction
A Morne-à-Chandelle, la population est vieillissante, les jeunes sont peu nombreux. Ceci est dû au fait que la zone ne disponse d'aucun centre de loisirs. Mais particulièrement parce que l'ambiance scolaire est pauvre. Le plus dur, c'est le long et difficile trajet que doivent parcourir quotidiennement professeurs et élèves. « Les élèves marchent de longues distances pour venir ici. Beaucoup de professeurs qui prêtent leurs services à ces écoles viennent de Mariani, de Source Corossol, de Dégan, de Waney,..», explique Dorné Genet, un représentant de l'administration communale.Les deux écoles de la section communale n'offrent pas la possibilité aux élèves d'aller au-delà de la 3e secondaire. A ce stade, les enfants mettent le cap sur d'autres écoles situées à Mariani, ou dans une autre section communale. Pour diverses raisons, la majorité ne revient plus dans la localité. « Je n'ai rien à reprocher un parent qui décide d'envoyer son enfant ailleurs », lance un sexagénaire, membre de l'administration communale. En fait, la vie n'est pas trop aisée à Morne-à-Chandelle. Il n'y a pas d'électricité ni de groupe électrogène.

Les véhicules ne fréquentent presque pas Morne à Chandelle. Heureux ceux qui possèdent un âne ou un cheval (Photo: RAJ Magazine)

« Seuls le curé de la paroisse, le révérend François Petit et Miss Adline possèdent des génératrices », lance d'un ton ironique l'ASEC Dorné Génet. Conséquemment, le secteur économique est paralysé. On n'y retrouve aucune entreprise commerciale. L'agriculture est donc la principale activité des habitants. Ces derniers cultivent le pois, le petit-mil et particulièrement les vivres et tubercules. Cette production agricole se fait à basse échelle et est destinée à l'autoconsommation. Heureusement pour les habitants, la vague d'insécurité qui prévaut dans la capitale n'a pas vraiment frappé la localité. Heureusement pour eux. « Nous n'avons pas de policiers dans la zone », déplore justement le CASEC Louis Jean-Robert. Lui et ses confrères du Casec sont les seules autorités qui gèrent les conflits entre habitants.
Les traditions ne meurent pasEn revanche, Morne-à-Chandelle est l'une des rares régions du pays qui gardent encore certaines traditions tissées des valeurs morales des générations antérieures. Là bas, demander une fille en mariage n'est pas chose facile. Le gendre doit nécessairement faire la demande aux parents de la fille qui, à leur tour, se font un devoir de rencontrer les parents du garçon pour discuter du mariage. Le jeune homme doit aussi verser une somme d'argent au père de la future mariée, question de garantir l'alliance conjugale. La cérémonie dure généralement deux jours. On organise d'abord une grande fête la veille de la cérémonie nuptiale, qui a lieu soit à la paroisse catholique de Saint-Michel ou dans une église protestante. Même s'ils sont proclamés mari et femme, tout n'est pas encore dit. A Morne-à-Chandelle, les jeunes gens portent beaucoup d'intérêt aux jeunes filles qui n'ont pas encore connu d'autres hommes dans leur vie. Si, contrairement aux attentes du jeune homme, la fille n'a pas été trouvée vierge sur le lit conjugal, les parents de celle-ci devront dédommager le marié. Le gendre achète alors un pain, communément appelée cabiche, il enlève la mie et le dépose sur la table avec une bouteille de cola. Les parents sont invités à faire, eux-mêmes, le constat. « Le pain creux (sans la mie) veut dire tout simplement '' manje gate''. Les parents vont devoir dédommager le jeune homme, la mariée, quant à elle, va payer sa duperie », raconte Constant Jules, en souriant de toutes ses dents.Morne-à-Chandelle est comme tant d'autres régions du pays une zone délaissée. Pourtant, elle a beaucoup de ressources, notamment ses mines de sable, ses roches et sa végétation. L'hospitalité, la solidarité et les valeurs morales de ses habitants donnent envie aux visiteurs d'y revenir. Mais, lorsqu'on songe au véritable calvaire que constitue la piste qui y mène, on préfère tout oublier.

Jean Max St Fleur

Haïti-UE : 26 millions d’euros sous forme d’appui budgétaire direct et non ciblé

Samedi 13 octobre 2007
P-au-P, 12 oct. 07 [AlterPresse] --- Vingt-six (26) millions d’euros, c’est le montant total d’une convention de financement budgétaire paraphée entre le gouvernement haïtien et la délégation de l’Union européenne en Haïti (UE).
La signature de cet accord a eu lieu le vendredi 12 octobre 2007 à la Primature (Bureau du premier ministre) en présence des ambassadeurs de pays contributeurs de l’Union européenne et de membres de la Presse, dont un journaliste de l’agence en ligne AlterPresse.
Ces 26 millions d’euros, qui seront décaissés en deux tranches respectives de 15 millions et 10 millions d’euros, contribueront à atténuer le gag de financement du budget des deux prochains exercices fiscaux (2007-2008 et 2008-2009), selon les clauses de cette convention.
Le reste, 1 million d’euros, sera alloué à l’assistance technique au ministère de l’économie et des finances (Mef) pour la mise en œuvre du programme de réformes macro-économiques.
Pour le premier ministre Jacques Édouard Alexis, ce geste des pays contributeurs de l’UE fait suite aux engagements pris par les donateurs internationaux à la conférence de juillet 2006 qui s’était déroulée à Port-au-Prince.
« Avec la signature de cette convention, force est de reconnaître que nous sommes en train d’engranger le fruit de la compréhension » des bailleurs de fonds internationaux, estime Alexis.
Le chef du gouvernement haïtien tient à préciser que cet accord, paraphé avec les représentants de l’UE en Haïti, concerne un programme d’appui budgétaire visant à faciliter la poursuite de la mise en œuvre des réformes initiées depuis l’année 2004.
Ces réformes, à en croire Alexis, doivent contribuer à l’amélioration de la gestion publique, à la lutte contre la pauvreté en utilisant des instruments modernes.
« Cet appui budgétaire permettra au gouvernement d’améliorer le fonctionnement du secteur public par le renforcement de sa capacité opérationnelle, afin de fournir un meilleur service à la population », dit le premier ministre haïtien.
Alexis ajoute que ce programme va également encourager son équipe à résoudre certains problèmes et à « renforcer la coordination dans le mécanisme d’appui à la réforme des finances publiques ».
L’aide budgétaire, un instrument de dialogue intergouvernemental
« Nous interprétons l’aide budgétaire comme un instrument de dialogue avec les pays partenaires », indique, pour sa part, Francesco Gosetti di Sturmeck, chef de la délégation de l’UE en Haïti.
Ce dialogue, poursuit le diplomate européen, se fait autour des priorités et des politiques identifiées par le gouvernement.
« Nous avons désormais la possibilité de passer d’une coopération faite de microprojets, généralement basés seulement sur l’urgence, à un partenariat solide avec le gouvernement légitime, basé sur des objectifs mesurables et sur une stratégie cohérente et à long terme », soutient Francesco Gosetti.
Pour le chef de la délégation de l’Union européenne, « la convention signée [ce 12 octobre] n’est qu’un premier pas de cette relation dynamique que le gouvernement d’Haïti entretient avec l’Union européenne ».
Les 26 millions d’euros de l’UE à Haïti ont été octroyés au gouvernement haïtien sous forme d’appui budgétaire direct et non ciblé, selon Gosetti.
Jacques Édouard Alexis reconnaissant envers l’UE
La signature de cet accord de coopération budgétaire a été l’occasion pour le premier ministre haïtien de raffermir les liens de son gouvernement avec l’Union européenne.
Fort de cela, Alexis considère qu’il n’y a pas de preuves plus éclatantes de la confiance installée entre Haïti et l’UE, soulignant que « ce programme d’appui budgétaire (…) démontre que les partenaires composant l’Union européenne apprécient les efforts réalisés par le gouvernement pour remettre de l’ordre dans la maison ».
Les efforts, jusqu’ici consentis par l’UE en faveur d’Haïti, inciteront, d’après Jacques Édouard Alexis, les autres bailleurs de fonds internationaux à tenir leurs promesses envers ce pays des Caraïbes.
Le premier ministre haïtien a, par ailleurs, promis aux pays contributeurs de l’UE que bon usage sera fait des 26 millions d’euros accordés, lesquels aideront les autorités haïtiennes à opérer certaines réformes au niveau des finances publiques du pays et développer, du même coup, des programmes allant dans le sens des principales revendications de la population.
Alexis ajoute que son gouvernement attend de l’Union européenne un effort complémentaire pour pouvoir atteindre les objectifs qu’il s’est fixés dans son document de stratégie nationale pour la croissance et la réduction de la pauvreté (Dsncrp).
Au cours de l’année 2006, Haïti a bénéficié, de l’Union européenne, d’une enveloppe de 60 millions d’euros, dont 10 millions ont été convertis en appui budgétaire.
Pour le 10e Fonds européen pour le développement (Fed), qui va de 2008 à 2012, l’UE envisage de consacrer une enveloppe de 230 millions d’euros pour financer des programmes et projets dans les domaines de l’infrastructure et de la gestion publique. [do rc apr 12/10/2007 14 :25]
http://www.alterpresse.org/spip.php?article6510

Le Premier ministre sur les ruines de Cabaret

Plusieurs de ses ministres accompagnaient Jacques-Edouard Alexis lors de cette visite de solidarité qui a coïncidé avec le début de la distribution de l’aide et des travaux de réhabilitation
samedi 13 octobre 2007,
Radio Kiskeya

Le Premier ministre Jacques-Edouard Alexis était à la tête d’une importante délégation gouvernementale qui a rendu samedi une visite de solidarité à la population de Cabaret (environ 35 km au nord de Port-au-Prince), une petite commune dévastée par les inondations qui y ont fait au moins 25 morts et des milliers de sinistrés.
La découverte de deux nouveaux corps a encore alourdi le bilan national qui est passé à au moins 47 morts, une trentaine de blessés et des milliers de familles sinistrées.
Accompagné notamment des ministres de l’intérieur, Paul Antoine Bien-Aimé, de la santé publique, Robert Auguste, du secrétaire d’Etat à la sécurité publique, Eucher-Luc Joseph et de la directrice de la protection civile, Alta Jean-Baptiste, le chef du gouvernement a visité les ruines de diverses maisonnettes englouties sous des coulées de boue. Il s’est entretenu avec des sinistrés retrouvés dans la désolation totale après avoir tout perdu dans les crues de la rivière Bretelle qui ont provoqué un déluge à Cabaret où l’eau atteignait jusqu’à 1m50 de hauteur dans la nuit de mercredi à jeudi.
Le Député Lavalas de la circonscription, Pierre Jérôme Valciné, qui rendait compte du passage de la délégation, a pressé les autorités gouvernementales d’agir en vue de soulager les souffrances des habitants de la commune qui, pour la plupart, n’ont plus un toit où dormir. L’élu précise que toutes les maisonnettes situées des deux côtés de la rivière ont été rasées.
http://www.radiokiskeya.com/spip.php?article4272

JO-2008/Eliminatoires : Haïti survole les débats et se retrouve au troisième tour

Après le festival de Port-au-Prince, la sélection U-23 doit affronter l’ogre mexicain ou américain pour aller à Pékin
samedi 13 octobre 2007,
Radio Kiskeya

La sélection olympique haïtienne de football s’est brillamment qualifiée pour la troisième et dernière phase des éliminatoires des JO-2008, zone CONCACAF, en la Jamaïque sur le score de 2 buts à 1 lors du match final du triangulaire du groupe H disputé samedi soir au stade Sylvio Cator devant environ 15.000 spectateurs.
Surpris en première mi-temps par un magistral coup franc des 25 mètres du jamaïcain Austin Rodolf (18’), les haïtiens ont dû attendre la pause pour concrétiser leur nette supériorité au tableau d’affichage.

A la 51e minute, Bidrès Azor, en net progrès après sa décevante prestation face aux bahaméens, égalisait de la tête après une première tentative infructueuse de Fritson Jean-Baptiste repoussée par le poteau. A l’origine de cette belle réalisation collective, Leonel St-Preux qui avait lancé en profondeur Tiga, le maestro du onze national, auteur d’un centre bien ajusté pour Fritson Jean-Baptiste, l’attaquant du Don Bosco de Pétion-Ville.
Un deuxième but, inscrit à la 75e minute, allait sceller le sort du match et récompenser le talent et l’effort des jeunes internationaux haïtiens. Tim Velten, joueur de première division aux Pays-Bas tout comme Lesly Fellinga, se trouvait à point nommé pour reprendre un tir de FaBrice Noël ayant heurté le montant gauche des "Boyz" sur un nouveau service parfait de Jean Sonny Alcéna "Tiga", impérial pendant toute la soirée.
Avec la note maximale de 6 points sur 6, Haïti décroche la première place qualificative pour l’ultime phase des éliminatoires au cours de laquelle elle devra se mesurer à trois autres équipes de la zone CONCACAF dont le Mexique ou les Etats-Unis. spp/Radio Kiskeya
http://www.radiokiskeya.com/spip.php?article4271