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dimanche 23 janvier 2011

«Baby doc» présente ses excuses au peuple haïtien

L'ancien homme fort en Haïti est apparu très affaibli
à l'occasion de sa première conférence de presse.
Crédits photo : Ramon Espinosa/AP
Par Tristan Vey
22/01/2011
L'ancien dictateur Jean-Claude Duvalier a appelé vendredi à la «réconciliation nationale» sans donner de précisions sur ses intentions politiques. Les experts pensent que son retour a pour unique objectif la récupération de fonds bloqués en Suisse.
«Baby doc» est sorti de son silence. Pour la première fois depuis son retour surprise lundi en Haïti après 25 années d'exil, l'ancien dictateur Jean-Claude Duvalier s'est exprimé publiquement. En commençant, de manière inattendue, par faire amende honorable. Il a ainsi fait part vendredi, dans une brève déclaration prononcée d'une voix faible en français et en créole, de sa «profonde tristesse» pour ceux qui disent avoir été «à juste titre (...) victimes de (son) gouvernement». Le fils de «Papy Doc», qui est apparu très faible, ferait en effet l'objet d'une enquête dans son pays pour crimes contre l'humanité commis sous sa dictature (1971-86) selon Amnesty International.
L'ancien homme fort de Port-au-Prince a d'autre part appelé à «la réconciliation nationale», alors que le pays est toujours plongé au plus profond d'une crise politique qui ne cesse de s'accentuer. «Me voici pour témoigner ma solidarité en cette période difficile», a-t-il ajouté, un an après le séisme qui a dévasté le pays. S'il espère un «dénouement rapide de la crise politique», près de deux mois après une élection présidentielle toujours contestée et dont les résulats définitifs ne sont toujours pas connus, il n'a toutefois donné aucune indication sur ses intentions ou sur un éventuel retour sur la scène politique. Lors de ce premier discours, l'homme s'est dit «favorablement impressionné par l'accueil» qui lui a «été réservé pour cette visite, surtout par cette foule de jeunes» qui n'a pas connu sa présidence. Après cette allocution poussive d'une dizaine de minutes pendant laquelle il a semblé avoir du mal à s'exprimer, il n'a répondu à aucune question, laissant la parole à ses avocats.

Un retour motivé par l'appât du gain ?
Pour le moment, seul un ex-député républicain américain, Bob Barr, a soutenu l'ancien dictateur en saluant «l'amour qu'il ressent pour son pays» et «la compassion pour tous les Haïtiens» qui lui auraient fait braver «les risques encourus pas ce retour». Pas sûr que les intentions de «Baby doc» soient aussi vertueuses que ne le pense Bob Barr. Associations de défense des droits de l'homme et experts estiment que ce retour inopiné fait partie d'une manoeuvre qui lui permettrait de retrouver ses avoirs bloqués en Suisse. En grandes difficultés financières, il ne serait revenu en Haïti que par simple appât du gain. «Ca semble être l'explication la plus plausible lorsqu'on rassemble toutes les pièces du puzzle», estime Reed Brody, conseiller auprès de l'association Human Rights Watch et ancien procureur en Haïti.
Duvalier craindrait une loi suisse devant en vigueur le 1er février et qui permettra la restitution à Haïti de quelque 5,7 millions de dollars déposés par sa famille sur des comptes en Suisse. Le nouveau texte permettrait en effet au gouvernement helvétique de rendre directement à son peuple les fonds illicites bloqués même si Haïti n'avait pas engagé d'action en justice contre lui. Mais il aurait alors fallu que l'absence de poursuites soit motivé par un système judiciaire trop faible ou par son absence dans le pays. «Si Duvalier revient en Haïti et n'est pas poursuivi, alors il peut dire: je suis disponible pour des poursuites, mais vous ne me poursuivez pas, donc rendez-moi mon argent», explique Reed Brody.
Et la manoeuvre pourrait fonctionner. Si l'ancien dictateur a été inculpé mardi de corruption, de détournements de fonds publics et d'association de malfaiteurs, commis sous sa présidence et s'est vu signifier une interdiction de quitter le pays, il est ressorti libre du tribunal. «La Cour de cassation a depuis longtemps annulé ces plaintes, et en Haïti, la prescription couvre celles qui ont été déposées pour crime contre l'humanité», explique au site Marianne2 Camille Leblanc, ancien ministre de la justice haïtienne, avant de conclure : « Bref, il profite du système judiciaire que lui et son père ont mis en place.»
(avec AFP)
http://www.lefigaro.fr/international/2011/01/22/01003-20110122ARTFIG00379-baby-doc-presente-ses-excuses-au-peuple-haitien.php
Caroline Touzin

La Presse
(Port-au-Prince) L'ex-dictateur Jean-Claude Duvalier considère les accusations qui pèsent contre lui comme des «tracasseries», si l'on se fie à son discours prononcé ce vendredi en début de soirée dans un chic hôtel de Pétionville.
Vêtu de son éternel veston bleu foncé, l'ancien «président à vie» a finalement brisé le silence sur la raison de son retour d'exil, cinq jours après son arrivée surprise dans son pays natal.
«Dès l'instant que j'ai pris la décision de revenir en Haïti pour commémorer avec vous, dans notre pays, ce triste anniversaire, je m'attendais à toutes sortes de persécutions; mais croyez-moi, le désir de participer à vos côtés, à cette Konbit (travail collectif) pour la reconstruction nationale, dépasse de loin les tracasseries auxquelles je pourrais être confrontées», a-t-il dit lors d'une brève conférence de presse au cours de laquelle il a lu un discours.
L'homme de 59 ans a parlé essentiellement en français, d'un débit lent, d'une voix fatiguée. Son allocution a duré moins de huit minutes. Il a refusé de répondre aux questions des nombreux journalistes locaux et internationaux présents. Quelque 200 partisans étaient massés à l'extérieur, calmes. Ils brandissaient des photos d'un «Bébé Doc», 25 ans plus jeune.
«Bébé Doc», qui a régné d'une main de fer sur Haïti de 1971 à 1986, a commencé son discours en disant que l'accueil des Haïtiens lui avait «donné chaud au coeur». Il est rentré au pays pour rendre hommage aux victimes du tremblement de terre du 12 janvier, «malheureusement», je ne suis pas arrivé à temps», a-t-il dit sans donner davantage de détails.
«Me voici revenu vous témoigner de ma solidarité en cette période extrêmement difficile de la vie nationale où vous êtes encore des centaines de milliers à vivre à la belle étoile, au milieu des ruines», a-t-il souligné.
L'ex-chef des Tontons macoutes, cette police secrète soupçonnée d'avoir torturé et tué des milliers d'opposants au régime, a par ailleurs insisté sur le fait que son départ d'Haïti, il y a 25 ans, était «volontaire».
«Je saisis cette occasion pour présenter publiquement mes sympathies à mes millions de partisans qui, après mon départ volontaire d'Haïti, afin d'éviter un bain de sang et de faciliter le dénouement rapide de la crise politique, en 1986, ont été livrés à eux-mêmes», regrettant du même coup que certains de ces partisans aient été assassinés ensuite.
«Je saisis aussi cette occasion pour exprimer, une fois de plus, ma profonde tristesse à l'endroit de mes compatriotes qui se reconnaissent, à juste titre, d'avoir été victimes sous mon gouvernement», a-t-il poursuivi.
L'ancien dictateur a terminé son allocution en paraphrasant une allocution célèbre de Martin Luther King. «Quand vous ferez en sorte que la cloche de la réconciliation nationale puisse résonner dans tous les coeurs et que nous la laissions carillonner dans chaque commune, dans chaque ville, dans chaque quartier, dans chaque foyer, alors, nous pourrons hâter la venue du jour où tous les enfants d'Haïti, hommes et femmes, vieux et jeunes, riches et pauvres, ceux de l'intérieur comme ceux de la diaspora, puissent marcher la main dans la main sans exclusion et participer ensemble à la renaissance d'Haïti.» Il a conclu en scandant: «Vive Haïti! Que Dieu nous bénisse!».
Trois avocats américains, se présentant comme des amis de l'ex-dictateur, étaient à ses côtés lors de la conférence de presse. «C'est facile d'alléguer des choses contre quelqu'un. Il y a des gens qui l'accusent de toutes sortes de choses depuis son départ», a indiqué l'un d'eux à La Presse, Bob Barr.
L'ex-dictateur fait l'objet d'une enquête des autorités haïtiennes pour des crimes contre l'humanité commis sous sa présidence, selon Amnestie internationale. Quatre plaintes en ce sens ont été déposées mercredi à Port-au-Prince.
L'ancien dictateur a déjà été inculpé mardi de corruption, de détournements de fonds publics et d'association de malfaiteurs, commis sous sa présidence. Les autorités lui ont dès lors signifié une «interdiction de quitter le pays», selon des sources judiciaires.
Avec l'AFPhttp://www.cyberpresse.ca/international/amerique-latine/201101/21/01-4362627-duvalier-brise-le-silence.php?utm_categorieinterne=trafficdrivers&utm_contenuinterne=cyberpresse_vous_suggere_4362693_article_POS1