Google

samedi 29 janvier 2011

Haïti. Le côté obscur de la coopération internationale

de : rebelion.org samedi 29 janvier 2011 (12h48)
Daniel Martínez Cunill Rebelión.org
Traduction non officielle.
Le 20 décembre 2010, Ricardo Seitenfus, représentant spécial en Haïti de l’O.E.A. (organisation des états américains), a donné une entrevue au quotidien suisse Le Temps. Il y exprimait son opinion sur les causes et les erreurs qui ont conduit aux échecs de la communauté internationale dans ce pays des Caraïbes. Le jour de noël, alors qu’une bonne partie de l’humanité se remettait des excès dans la célébration de l’enfant Jésus, l’OEA a destitué le fonctionnaire brésilien.
Entre autres critiques, le diplomate a souligné que l’ONU a imposé la présence de troupes en Haïti bien que ce pays « ne connaît pas de guerre civile et n’est pas une menace internationale », mais que son plus grand péché c’est d’être un proche voisin des USA. Pour lui, il s’agissait de « geler le pouvoir et de transformer les haïtiens en prisonniers sur leur île ». Une de ses affirmations les plus fortes, il l’appelle oegénisation c’est à dire « une relation perverse entre la fragilité du pouvoir haïtien et la puissance des ONGs dans le pays. Ici, le « bien » est privé grâce aux médecins, hôpitaux, écoles, nourriture qui arrivent du monde entier alors que le « mal » est public puisque l’état haïtien n’est présent que par sa police.
L’ex-fonctionnaire n’a pas tort. Haïti manque de ressources publiques pour pouvoir jeter les bases d’un minimum de système étatique et quand le taux de chomage atteint les 80 %, il devient impossible à l’ONU ou à l’OEA de déployer un mission de stabilisation. Il n’y a rien à stabiliser et tout est à faire, mais chaque entité coopérante dispose d’une niche des besoins et la développe à sa façon, en prenant garde à ce que les haïtiens n’interviennent en rien dans la gestion et le contrôle. La plupart des fonctionnaires de la coopération ignore ou méprise les ministères locaux, les rendant par là dysfonctionnels.
En Haïti, la coopération internationale a fait place à la charité. Et la charité ne peut être un point de départ pour les relations internationales ni pour l’apport de la communauté mondiale à un pays aux carences extrêmes. Peut-être les choses fonctionneraient-elles mieux si elles étaient basées sur le respect de l’autonomie et la souveraineté du pays. La dictature de la coopération internationale n’a porté comme fruits que la dépendance, elle a empêché l’organisation de la société civile en agissant comme facteur de démobilisation permanent. La solidarité sociale qui résulte généralement d’un traumatisme grave tel qu’un tremblement de terre ou une guerre, a été totalement et consciemment inhibée par la « communauté internationale » emmenée par Bill Clinton et une foule d’ONGs.
Cela ne veut pas dire que les ONGs soient mauvaises en soi. Au contraire, elles neutralisent partiellement la burocratie onusienne et de l’oea qui gaspillent des sommes gigantesques dans leurs salaires et leur logistique mais il est avéré que l’implication excessive des coopérants empêche la consolidation des structures de la société civile. Là est la perversion de cette coopération internationale qui veut imposer la démocratie depuis le sommet mais anéanti toute velléité de participation communautaire dans le diagnostic des priorités, l’élaboration des projets, le contrôle/gestion de ceux-ci. Il existe des exceptions telles l’OXFAM ou MSF entre autres, mais les grands donateurs ont peur de la participation communautaire naisse la rébellion.
Personne, pas même l’exécutif n’a la moindre idée des sommes d’argent qui arrivent en Haiti. Ni de la façon dont sont organisées les dépenses ni de qui décide des priorités. C’est ainsi que les habitants qui sont supposés être les destinataires de cette aide sont infantilisés et finissent par faire la queue entourés de policiers et de militaires, que leur rôle se réduit à recevoir ce que d’autres ont décidé qu’ils ont besoin. En rang pour l’eau, pour la nourriture, pour les vaccins, en rang et votez pour recevoir la démocratie et ainsi de suite... Les haitiens n’existent qu’alignés dans un longue et interminable file d’attente où des agences étrangères leur promettent une vie meilleure mais à qui personne n’a jamais demandé à quel genre de vie ils aspirent.
D’ailleurs, seuls l’élite du pays et les étrangers ont fêté noël dans l’ile naufragée des caraïbes.
http://bellaciao.org/fr/spip.php?article113033