Publié le 27 mai 2010 Stephen Thorne, La Presse Canadienne, OttawaDes trafiquants s'emparent d'orphelins haïtiens et en font des esclaves sexuels en République dominicaine, affirment les autorités. |
Une policière de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) récemment rentrée d'Haïti a expliqué à La Presse Canadienne que les responsables ont découvert l'existence de maisons de passeurs où les enfants sont cachés avant d'être envoyés de l'autre côté de la frontière.
Les trafiquants se font passer pour des travailleurs humanitaires et oeuvrent même parfois pour des organismes légitimes, dans le but spécifique d'avoir accès aux enfants, selon la sergente Lana Prosper.
Les enquêteurs croient que ces mêmes trafiquants auraient pu être à l'oeuvre au Sri Lanka, en Thaïlande et dans d'autres pays après le tsunami de 2004.
Mme Prosper -qui a passé un mois en Haïti avec le Centre canadien de police pour les enfants disparus et exploités- croit que des vidéos montrant les jeunes victimes haïtiennes feront éventuellement surface.
«Depuis que nous avons été sur place et depuis que nous sommes revenus, des groupes d'enfants ont été trouvés près de la frontière dans des maisons de passeurs, a-t-elle dit. Les trafiquants placent les enfants dans ces maisons et ils attendent la tombée de la nuit pour traverser la frontière.»
L'équipe à laquelle appartenait Mme Prosper a travaillé dans la capitale, Port-au-Prince, où elle collaborait avec la police nationale pour protéger les enfants dans la foulée du séisme du 12 janvier, qui a fait 230 000 victimes et un million de sans-abri. Ils se sont rendus sur place quand la communauté internationale a compris que les enfants rendus orphelins par la catastrophe étaient extrêmement vulnérables à l'exploitation sexuelle.
Après le tsunami de 2004 et l'ouragan Katrina en 2005, des enfants ont été vendus à des bordels, utilisés dans le tournage de vidéos pornographiques ou contraints de se prostituer.
Comme la Thaïlande et certains pays de l'ancien bloc de l'Est, Haïti et la République dominicaine étaient déjà connus comme des destinations de choix pour des pédophiles intéressés à profiter de la pauvreté et de l'instabilité qui y règnent.
L'équipe de Mme Prosper est basée à Ottawa. Ses collègues et elles passent leurs journées à naviguer sur l'internet à la recherche de pédophiles. Elle affirme que ces gens sont «le mal incarné», puisqu'ils s'en prennent aux membres les plus vulnérables de la société et détruisent des vies.
Mme Prosper explique que les groupes en ligne sont régis par une sorte de hiérarchie tordue, qui voit le statut des participants augmenter grâce aux photos -ou encore mieux aux vidéos- qu'ils partagent avec les autres, et qui montrent de nouvelles victimes ou des actes sexuels bizarres mettant en scène des bambins ou des enfants.
Certains malfaiteurs offrent des vidéos tournées sur mesure pour moins de 1000 $, tandis que d'autres ont vendu aux enchères les sous-vêtements des victimes.
«Ces gens vont voyager pour faire tout ce qu'ils peuvent à ces enfants et les prendre alors qu'ils sont les plus vulnérables, a-t-elle expliqué en entrevue. Dans les groupes de discussion, ils se disent: «joins-toi à cette organisation, il y a moins de formulaires à remplir, ils vérifient moins les antécédents.»
La police haïtienne estime qu'il y a 250 orphelinats en Haïti, tandis que l'Unicef en recense 600. Mme Prosper croit qu'il y en a plutôt 1000, certains accueillant jusqu'à 400 enfants.
Son équipe et elle ont profité de leur présence en Haïti pour documenter l'identité des orphelins, dans l'espoir de pouvoir plus facilement les retrouver plus tard.
Mme Prosper est une ancienne enseignante du Nouveau-Brunswick. Elle s'est jointe à la GRC il y a 17 ans après avoir découvert qu'une de ses élèves était la victime du nouveau conjoint de sa mère.
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