Le français est parlé dans divers pays d'Europe, d'Amérique, d'Afrique et d'Asie. Son lexique s'est diversifié et s'est enrichi de milliers de mots traduisant l'originalité de chaque communauté francophone.
On appelle régionalismes les mots ou expressions qui sont caractériques du français d'une région donnée, mais qui ne sont pas employés partout dans la francophonie. Les dictionnaires signalent les régionalismes par l'abréviation rég. ou région. et par l'indication du nom de la région concernée : CRAMIQUE [kramik] n.m.- 1831 ; cramiche 1830 ; moy. Néerl. Cramicke, de l'a. fr. crammiche ; Région (Belgique) : Pain au lait et au beurre, garni de raisin de Corinthe. (Nouveau Petit Robert de la langue française, Paris, Le Robert, 1996).
Dans cet article nous tenons compte de quelques régionalismes tout en nous référant au français hexagonal. Il existe un bon nombre de mots limités au territoire de la France ; ce sont des francismes. Haïti possède ses particularités lexicales qu'on appelle des haitianismes. La Belgique wallone et la Suisse romande possèdent leurs particularités lexicales qu'on appelle respectivement des belgicismes et des helvétismes (de helvète, nom latin du peuple habitant la Suisse). Les régionalismes en usage au Canada français sont les canadianismes, qui comprennent les québecismes des Québecois et les acadianismes des Acadiens. Les régionalismes du lexique français s'étendent à tous les autres territoires francophones, dont l'Afrique noire qui a donné au français une foule d'africanismes.
Francismes
Il y a des mots et expressions qui sont propres à la culture française, à la langue française de l'Hexagone, c'est-à dire la France métropolitaine. Pour la petite histoire, rappelons que le mot « Hexagone » a été employé pour la première fois en « France » en 1934, par le général Charles De Gaulle.Le mot « aoûtien » est utilisé en France pour désigner d'une part un vacancier du mois d'août, d'autre part une personne qui reste dans une grande ville, en août. Le mot aoûtien n'est pas utilisé dans d'autres régions francophones.
Jocelyn est un aoûtien (francisme). J
ocelyn prend ses vacances en août (autres régions francophones)
En France, le mot « papillon » peut vouloir dire « avis de contravention », « procès verbal ». Dans d'autres régions francophones, on n'utilise que les termes « contravention » et « procès-verbal ».
Il a attrapé un papillon pour excès de vitesse (francisme).
Il a attrapé une contravention pour excès de vitesse (autres régions francophones)
Haïtianismes
Dans la pratique du français en Haïti, on peut repérer non seulement des mots, expressions ayant un ou des sens différents du français hexagonal, mais également d'autres n'existant que dans le français haïtien.Le mot blocus est utilisé souvent dans le français haïtien pour parler d'encombrement de véhicules qui arrête la circulation. En français hexagonal, on utilise les mots embouteillage ou bouchon. Les mots bouchon et embouteillage participent de la même métaphore. A noter que le mot blocus en France peut signifier fortin, blockhaus ou investissement d'une ville ou d'un port, d'un littoral, d'un pays entier, pour l'isoler, l'empêcher de se ravitailler.
Je suis pris dans un blocus (haitianisme).
Je suis pris dans un embouteillage (autres régions francophones)
Pour parler de la bande d'étoffe de matière souple qui se passe sous le col de chemise et se noue par-devant, il est courant en Haiti d'utiliser le mot « col » en lieu et place du mot « cravate » utilisé dans le français hexagonal et celui d'autres régions francophones.
Le directeur porte un joli col aujourd'hui (haitianisme).
Le directeur porte une jolie cravate aujourd'hui (autres régions francophones)
Africanismes
L'implantation du français en Afrique et dans l'océan Indien (Réunion, Seychelles, Comores, etc.) est récente. A l' exception du Sénégal où des postes français ont été rétablis des le XIIIe siècle, l'expansion de cette langue a commencé au XIXe siècle avec de nouvelles conquêtes militaires, l'effort de l' 'évangélisation et le développement de l'organisation scolaire. Dans cet article, on va tenir compte des tournures, expressions propres au français au Sénégal
Le verbe « boulotter » dans le contexte sénégalais vient du mot « boulot » qui est synonyme de « travail, emploi, job ». Par contre, en français hexagonal boulotter signifie manger : ils me payaient à boire mais jamais a boulotter. Ce mot vient peut-être de pain boulot, qui désignait le pain rond ordinaire, base de l'alimentation.
Je boulotte depuis l'âge de 16 ans (africanisme)
Je travaille depuis l'âge de seize ans (français hexagonal)
« Absenter quelqu'un » dans le contexte sénégalais veut dire « ne pas trouver la personne qu'on est venu voir en raison de son absence ». Il est à remarquer qu'il s'agit d'un verbe transitif direct. Dans d'autres régions francophones la forme simple n'existe pas. Essentiellement pronominal, « s'absenter » veut dire s'éloigner momentanément du lieu ou l'on doit être, quitter, s'éclipser, sortir, etc.
Je suis allé trois fois chez le directeur, à chaque fois je l'ai absenté (au Sénégal).
Je suis allé trois fois chez le directeur, à chaque fois il était absent (francisme)
Québécismes
Répandus au Québec, les mots et expressions soulignés ne s'entendent guère ailleurs dans la francophonie, car il s'agit de mots ou de sens particuliers au vocabulaire québécois. 1) C'est fin d'être venu ; 2) Il y a épais d'eau ici ; 3) Quelle bande de nonos ! 4) Hier je suis allé au ciné-parc ; 5) Nous prendrons le traversier à Tadoussac ; 6) Elle passait des heures autour des comptoirs, à magasiner; 7) Philomène est assise sur une chaise berçante qui craque et grince.
En France, le mot « fin » n'a plus le sens de «gentil» et la locution «épais de» a été remplacée par « beaucoup de » pour marquer la profondeur. Héritage d'anciennes provinces françaises, l'adjectif familier « nono », encore très vivant au Québec, est presque disparu du français parlé en Europe. On ne le trouve même pas dans le Petit Larousse. Quant aux mots « ciné-parc », «traversier », « magasiner » et « berçante » ils remplacent ici les anglicismes «drive-in », « ferry-boat », « to shop » et « rocking-chair » utilisés dans d'autres régions de la francophonie.
Belgicismes
En français hexagonal, on utiliserait le mot « taciturne » et non « taiseux » comme c'est le cas en Belgique par exemple pour parler des gens qui par nature parlent peu, qui restent silencieux.
Ces écoliers sont taiseux (belgicisme).
Ces écoliers sont taciturnes (francisme)
Si en Belgique un légumier est un « marchand de légume », dans d'autres régions francophones ça peut signifier a) un jardin potager, b) relatif aux légumes : culture légumière, c) pièce de vaisselle de table dans laquelle on sert généralement des légumes : le maître d'hôtel lui présentait [...] le légumier d'argent.
J'ai donne de l'argent au légumier (belgicisme).
J'ai donne de l'argent au marchand de légumes (francisme)
Helvétismes
Le verbe se « royaumer », qui vient du mot « royaume », une particularité suisse en français, veut dire « se prélasser, se promener en prenant du bon temps ». En français hexagonal, le verbe « se royaumer », me semble-t-il, n'existe pas. On ne le trouve pas dans le dictionnaire Larousse ni dans le Nouveau Petit Robert. Parmi d'autres faits de langue propres au français de la Suisse romande, signalons le verbe « roiller » qui veut dire « pleuvoir a verse ».
L'âne, se prélassant, marche seul devant eux (francisme)
L'âne, se royaumant, marche seul devant eux (helvétisme)
Il roille depuis ce matin (helvétisme)
Il pleut à verse depuis ce matin (francisme).
Wesner MERAN
Twmerant@yahoo.fr
Enseignant à la Faculté de Linguistique Appliquée
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=55658&PubDate=2008-03-25
Une fenêtre ouverte sur Haïti, le pays qui défie le monde et ses valeurs, anti-nation qui fait de la résistance et pousse les limites de la résilience. Nous incitons au débat conceptualisant Haïti dans une conjoncture mondiale difficile. Haïti, le défi, existe encore malgré tout : choléra, leaders incapables et malhonnêtes, territoires perdus gangstérisés . Pour bien agir il faut mieux comprendre: "Que tout ce qui s'écrit poursuive son chemin, va , va là ou le vent te pousse (Dr Jolivert)
mardi 25 mars 2008
Parlez-vous français...La variation géographique et sociale des mots dans la francophonie
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