Rudolph Henry Boulos ne remettra pas son tablier de sénateur comme il l'a annoncé devant l'assemblée des sénateurs, le 18 mars 2008, juste avant la lecture de la résolution considérant sa présence au Grand corps comme une usurpation et une imposture. Il a, dans une correspondance adressée au président du Sénat, Kelly C. Bastien, informé de sa « ferme décision de ne pas démissionner et de rester à son poste ». Selon Rudolph Boulos, son retrait serait une trahison envers ses mandants qui lui ont confié la mission de défendre leurs intérêts. Le sénateur du Nord-Est, dans la foulée, a qualifié de « lynchage politique » digne des pires dictatures les pressions qu'on aurait exercées contre sa personne et sur celles de ses collègues suite au dépôt du "Rapport Latortue". Un rapport qu'il a banalisé, en soulignant que les opinions émises dans ce document n'engageaient que leurs auteurs.Rudolph Boulos, dans les souliers du sage, du conseiller, a demandé à ses collègues sénateurs « de ne pas être les outils d'une campagne de déstabilisation du Sénat qui n'a d'autre but que d'arriver à sa caducité ». M. Boulos, dans cette lettre datée du 19 mars et écrite à Ouanaminthe, a réaffirmé au président du Sénat, Kelly C. Bastien, qu'il est un Haïtien d'origine et qu'il n'a jamais renoncé à sa nationalité haïtienne acquise à la naissance.
« Seule la justice de mon pays peut décider du contraire. Vous n'êtes pas sans ignorer que la seule instance compétente pour se prononcer sur les questions de nationalité et d'état des personnes est le Tribunal de Première Instance et que le Sénat n'a aucune compétence pour trancher ce type de questions », a-t-il fait valoir en rappelant à Kelly C. Bastien qu'aucune entité ne peut se substituer à ce Tribunal dans l'exercice de ses attributions.«Les citoyens me demandent de continuer le travail et de considérer la résolution du Sénat comme nulle, a déclaré dans la presse M. Boulos, bénéficiaire de l'immunité parlementaire jusqu'en 2012, qui revient d'une série de consultation avec ses partisans et sympathisants dans le Nord-Est. « Il s'agit d'un complot du Palais national et du Sénat », a-t-il dit en soulignant qu'il n'avait pas démissionné mais s'était retiré de la séance, rapporte-t-on.
Boulos fait des vagues. Alors que Rudolph Henry Boulos annonce son intention de saisir les tribunaux pour défendre ses droits et ceux de ses mandants, Me Osner Févry a indiqué que ce dernier n'a pas demissionné comme on le dit dans la presse. « Il a pris les devants en annonçant sa démission en sachant pertinemment qu'il allait être exclu, destitué au Sénat », a précisé Me Févry, leader du PDCH.
De son côté, Me René Julien de l'ADEBAH a déploré l'irresponsabilité du sénateur. « C'est seulement en Haïti que ces genres de choses peuvent se produire », a-t-il fait remarquer en réaction au revirement pour le moins spectaculaire du sénateur de la Fusion des socio- démocrates. Cependant, Me Samuel Madistin, avocat de Rudolph Henry Boulos, a indiqué que la saga Boulos est une bonne chose. Elle permettra de clarifier la situation de nombreux enfants haïtiens nés à l'étranger, jouissant, selon la loi, de la nationalité haïtienne.S'agissant de la résolution du Sénat, Me Madistin estime que ce document a été produit par « des gens qui ne savent rien et qui ne disent rien qui ont rapport à la loi ». « Il s'agit d'une mauvaise compréhension de la part de l'assemblée, de quelques sénateurs et de quelques citoyens qui n'ont pas de compétence juridique et qui ne comprennent pas qu'un Haïtien a le droit de donner sa nationalité à son enfant né n'importe où sur la terre », a-t-il ajouté. Constitutionnaliste reconnu, Mme Mirlande Manigat avait réclamé dans la presse à la fin de semaine dernière la publication des documents utilisés pour confirmer la nationalité étrangère de Rudolph Boulos. Mme Manigat qui avait déploré l'absence de 9 sénateurs lors de la séance ayant donné lieu à l'annonce de la démission de Rudolph Boulos avait mis l'accent sur le fait que l'on ne pouvait pas faire allusion à la clameur publique dans le cadre des arguments du rapport de la Commission Youri Latortue.« La nationalité établit une fidélité, une adhésion, vous ne pouvez avoir une adhésion à deux pays, ceci va créer des suspicions », avait-elle argumenté d'un autre côté en référence aux hommes d'Etat. L'historien Georges Michel, pour sa part, avait indiqué que le sénateur Rudolph Boulos peut faire valoir sa nationalité haïtienne en se basant sur le code de droit privé international Bustamente.Ce document signé par Haïti et les Etats-Unis permet de déterminer la nationalité d'une personne ayant acquis automatiquement plusieurs nationalités. Selon des chiffres avancés par Georges Michel, plus de 20 000 enfants d'origine haïtienne sont nés hors du pays ces derniers temps. Souvent, ce sont des choix délibérés, reconnaissent des observateurs de la saga Boulos qui souhaitent que l'on planche sans faux-fuyants sur l'amendement de l'article de la Constitution interdisant la double nationalité.
Roberson Alphonse
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