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mardi 22 janvier 2008

Haïti-Corruption : Bientôt des procédures judiciaires contre les bandits en col blanc

Lundi 21 janvier 2008
par Djems Olivier
Les individus, impliqués dans des actes de corruption ou de malversation au préjudice de l’Etat haïtien, commenceront bientôt par avoir leur châtiment. Des procédures judiciaires sont déjà entamées contre corrupteurs et corrompus, si l’on s’en tient aux propos du professeur Amos Durosier, directeur général de l’Unité de lutte contre la corruption (Ulcc).
P-au-P, 21 janv. 08 [AlterPresse] --- Au Parquet de Port-au-Prince, la bataille contre les criminels en col blanc serait sur le point de porter du fruit depuis l’installation, par le procureur Claudy Gassant, d’une cellule anti-corruption, apprend l’agence en ligne AlterPresse.
Des personnes accusées de corruption sont sur le point d’être punies conformément à la loi, selon Amos Durosier, directeur général de l’Unité de lutte contre la corruption (Ulcc), qui rencontrait plusieurs journalistes dont de l’agence AlterPresse.
Cette structure de l’Etat, créée par décret du 8 septembre 2004 sous l’administration intérimaire de Boniface Alexandre/Gérard Latortue, travaille en synergie avec d’autres institutions publiques, tout en restant indépendante dans ses interventions.
« Nous avons des cas de poursuite qui sont déjà engagés par le pouvoir judiciaire, ce sont des cas en instruction », informe Amos Durosier.
« Nous sommes indépendants, nous n’avons de directive à recevoir ni du pouvoir exécutif, ni du pouvoir judiciaire », poursuit-il.
Tout en précisant qu’il n’y a pas encore de verdict jusqu’ici prononcé, Durosier réitère la volonté manifeste des autorités haïtiennes d’enrayer ce phénomène qu’est la corruption.
« Je ne peux pas nommer les noms des personnes » qui sont actuellement en instruction, indique Amos Durosier.
L’Office national d’assurance vieillesse (Ona), le Ministère des affaires étrangères, la Direction générale des impôts (Dgi) sont, entre autres, des structures de l’administration publique haïtienne où des cas de corruption ou de malversation identifiés sont en cours de traitement.
Des dossiers de corruption, relatifs aux institutions de service public et des collectivités territoriales, sont également en examen, indique le directeur général de l’Ulcc.
A l’Unité de lutte contre la corruption, une vingtaine de personnes travaillent directement dans les investigations.
Des antennes de l’Ulcc seront bientôt établies dans trois villes de province, ouvertes au commerce extérieur. Ce sont Miragoâne (Sud-Ouest), Cap-Haïtien (Nord) et Saint-Marc (Artibonite, Nord).
Ces ports de province ont la mauvaise réputation d’être corrompus, rapporte Amos Durosier
Des projets de loi sont même déjà soumis à l’Exécutif haïtien en matière de lutte contre la corruption, ajoute le directeur général de l’Ulcc.
Ces textes de loi concerneront notamment la déclaration du patrimoine des hauts fonctionnaires, en vue de vérifier le degré ou non d’enrichissement illicite à la fin du mandat de ces grands commis de l’Etat.
Une enquête-diagnostic sur la gouvernance et l’état de la corruption en Haïti
Avec un échantillon de 3000 personnes, l’Ulcc a mené, en 2007, une enquête-diagnostic, au cours de laquelle 93% des ménages interrogés ont laissé croire que la corruption est un problème très grave, 68% d’entre eux ont indiqué que la corruption a empiré au cours des trois années (2004, 2005, 2006) qui ont précédé l’enquête.
Les résultats de l’étude ont été divulgués en août 2007, lors d’un colloque scientifique réunissant les membres de secteurs vitaux de la société haïtienne, dont des fonctionnaires et universitaires haïtiens.
Financée par la Banque mondiale, l’étude de l’Ulcc a permis aux agents publics de reconnaître que l’administration publique est gangrenée de corruption tout en rejetant l’implication de l’institution dans laquelle ils travaillent dans des actes frauduleux, souligne à AlterPresse Marilyn B. Allien de la Fondation Héritage pour Haïti (Lfhh), la branche haïtienne de l’organisation non gouvernementale Transparency International (TI).
L’obtention de contrats sans appels d’offre, les pots-de-vin en échange de service, l’évasion fiscale, sont des actes de corruption, selon Marilyn Allien.
Le 1er janvier 2008, le président René Garcia Préval a annoncé la soumission prochaine au parlement d’un projet de loi criminalisant l’évasion fiscale.
« En Haïti, ne pas payer l’impôt n’est pas un crime, alors que dans d’autres pays comme les Etats-Unis [d’Amérique] c’est un crime qui entraîne la prison », avançait René Préval qui pense qu’« il faut criminaliser l’évasion fiscale ».
Elargir l’assiette fiscale
Permettre à l’Etat haïtien d’augmenter ses recettes est l’un des objectifs poursuivis par l’Unité de lutte contre la corruption. Amos Durosier croit nécessaire de fournir de meilleures conditions de travail aux fonctionnaires en vue d’éviter à ces employés de l’Etat d’être soudoyés.
Consciente que l’Etat se trouve dans l’incapacité de procurer des services adéquats à la population, la présidente de la Fondation Héritage pour Haïti pense qu’« il faut élargir l’assiette fiscale » en veillant à ce que tout le monde s’acquitte de son engagement envers le fisc.
« Tant que le niveau de pauvreté reste ce qu’il est, il y aura toujours des gens à avoir des services sans payer », estime Marilyn B. Allien tout en saluant les progrès qui se dessinent en matière de lutte contre la corruption.
En Haïti, les plus grands corrompus, pour ne pas dire les plus grands criminels, ont été des chefs d’Etat, selon la présidente de la branche haïtienne de Transparency International.
Marilyn Allien précise, toutefois, qu’aucun cas de corruption lié directement à René Préval n’a, jusqu’à présent, été identifié. Mais, d’anciens présidents de la république, comme Jean-Bertrand Aristide et Jean-Claude Duvalier, étaient des dirigeants corrompus, selon la présidente de la Lfhh.
En 2007, avec un score de 1.8, Haïti se trouvait parmi les quatre pays les plus corrompus de la planète dans le classement de Transparency International. Les experts de cette organisation non gouvernementale utilisaient, entre autres, les études de la Banque Mondiale et de Global Insight pour définir l’indice de perception de la corruption à l’échelle mondiale.
Ce mauvais score avait soulevé l’indignation de plusieurs secteurs de la vie nationale qui avaient critiqué le classement d’Haïti présenté par Transparency International, tenant compte que ce pays n’est ni en conflit ni en guerre.
La même année, le juge Claudy Gassant était sélectionné parmi les personnalités qui devaient recevoir le prix Transparency International de la lutte contre la corruption. Sa candidature a été proposée par le Comite des avocats pour le respect des libertes individuelles (Carli). [do rc apr 21/01/2008 12 :00]
http://www.alterpresse.org/spip.php?article6864

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