Elles doivent obligatoirement faire la lessive, repasser des vêtements, faire le ménage, cuisiner, accompagner des enfants à l'école, changer la couche du bébé...pour presque rien. Voilà le fardeau de ces milliers de femmes de maison à Port-au-Prince.
Oliana, une jeune Barradéroise, a travaillé pendant quinze ans comme employée domestique dans une famille plutôt connue à Pétion-Ville. Elle a été recrutée non seulement pour accomplir les travaux ménagers mais aussi pour assurer la garde du nourrisson de la patronne. Grâce à son savoir-faire et son sens de responsabilité, la jeune femme a gagné la confiance de la patronne qui a décidé de lui octroyer officiellement le poste de gouvernante de la maison. « De 400 gourdes en 1993, mon salaire était passé en deux ans à 600 gourdes », se rappelle-t-elle. Cette modique somme, au fil des années, a augmenté mais ne dépassera pas 3000 gourdes. De 1993 à janvier 2007, Oliana a tristement constaté que sa condition socio-économique n'avait pas du tout changé. Les 2250 gourdes qu'elle reçoit par mois comme salaire, ne peuvent grand-chose ni pour ses petits frères et soeurs qui doivent aller à l'école ni pour ses parents de la province qui attendent régulièrement son soutien financier.Elle ne peut non plus penser à des projets d'avenir. Il y a quelques mois, elle a finalement laissé tomber ce boulot pour aller travailler dans un hôtel de la place. Mais jusque-là, rien n'a réellement changé. « C'est pas meilleur par rapport à mon premier boulot, avoue-t-elle. J'espère trouver mieux que ça. »Pareil dans la maison voisineLa réalité d'Oliana n'est pas différente de celle des milliers de travailleuses domestiques qui, en moins d'une année, ont servi dans deux, trois ou quatre maisons en quête d'un meilleur traitement. Elles sont plus de 800.000 à travers Port-au-Prince à croupir sous le poids des travaux ménagers, selon la ministre à la Condition féminine et aux Droits des femmes, Marie Laurence Jocelyn Lassègue. La plupart du temps, elles se voient obligées d'accomplir des tâches pour lesquelles elles n'ont pas été embauchées. Un surplus de travail pour lequel, elles ne sont pas non plus rémunérées. « J'étais venue pour la lessive, repasser des vêtements, assurer le ménage. Mais, j'ai été chargée, après quelques mois, de mener les enfants à l'école, changer la couche du bébé de la soeur de la patronne », explique une jeune domestique.
Vous êtes congédiée
Dans la majorité des cas, elles ne peuvent rien revendiquer de peur d'être renvoyées. En fait, une employée domestique peut être congédiée pour diverses raisons. Sa façon de gérer le matériel de cuisine, son comportement ou son manque de professionnalisme. Dans certains cas, c'est le propriétaire de la maison qui, par fatigue, décide sans aucune explication de congédier sa domestique. D'ailleurs, trouver une femme de maison n'est pas si difficile à Port-au-Prince. En moins de quatre mois, Mme Paula, une commerçante qui habite à Delmas, dit avoir déjà renvoyé deux femmes de maison. La première pour avoir passé plus de jours que prévus dans sa ville natale sans la prévenir. La deuxième pour sa lenteur dans ses travaux domestiques. « Je ne tolère pas des employés paresseux, dit-elle. Elle vient travailler quand elle le veut. Alors, je l'ai renvoyée », explique Mme Paula.
En général, les travailleuses domestiques ne sont pas bien vues aux yeux des responsables de maison. Certaines d'entre elles sont mêmes victimes de viol et d'autres abus sexuels de la part d'un membre de la famille. « Nous avons récemment reçu une jeune fille de 23 ans qui a été violée par le frère de la patronne où elle travaille depuis 2 ans », témoigne une responsable d'une organisation féministe de la capitale. Professionnaliser le métier« Ce secteur mérite une attention spéciale en termes de formalisation et de traitement », reconnaît Dr Mimose Bruny. La psychologue et travailleuse sociale prône la professionnalisation du travail domestique. Question d'offrir une nouvelle image du métier et valoriser le travail de ces milliers de femmes à travers Port-au-Prince.
Actuellement, une femme de maison reçoit un salaire variant entre 1500 à 5000 gourdes par mois, dépendamment du niveau économique de l'employeur. « Je pourrais donner mieux à la femme de maison, mais mon salaire ne me le permet pas », explique Rose-Adèle Joachim. Elle se réjouit, par contre, du fait qu'elle offre certains privilèges a Ketty en plus des 1750 gourdes de salaire mensuel. « Elle a droit à un boni, à des jours de congé, au repos au cours de la journée et comme tout le monde, elle participe au repas de la famille », se contente-t-elle.Rares sont les employées de maison qui bénéficient de l'attention de leur patron. Les responsables de maison exigent en général beaucoup des travailleuses domestiques mais se soucient peu de leur condition de vie, regrette la ministre Lassègue. « Il est important de savoir que ces femmes ont de lourdes responsabilités. Elles ont des enfants, elles ont d'autres activités et méritent, tout comme les femmes qui travaillent dans d'autres secteurs, un meilleur traitement », dit-elle.
Au regard du Code du travailMe Samuel Madistin, lors du séminaire organisé par le Réseau national de défense des Droits humains (RNDDH) sur le droit à la non discrimination dans les systèmes onusien et interaméricain, a reconnu que les travailleuses domestiques sont aussi mal vues au regard de la législation nationale. Le code du travail prévoit certains bénéfices pour les ouvrières, notamment assurance maternité, congé de maternité, salaire égal à compétence égale. Mais les femmes de maison ne jouissent pas de ces prérogatives. Lueur d'espoir
Récemment, la ministre Lassègue a soumis au Sénat un avant-projet de loi visant le respect et la promotion des droits de ces femmes conformément au code du Travail. Cet avant-projet de loi, voté à l'unanimité par la chambre du Sénat, a ainsi modifié l'article 257 du code du travail et envisage un meilleur traitement pour ces employées. Ceci, au même titre que celles qui travaillent dans les industries. Par ces dispositions légales, les femmes de ménage pourraient désormais jouir obligatoirement d'un repos absolu de dix heures par jour, de deux repas par jour et d'un jour et demi de congé par semaine. L'avant-projet de loi garantit également aux employées de maison d'un boni en fin d'année conformément aux articles 154, 155, 157 et 158 du code du Travail.
D'ici quelques jours, la Chambre des députés devra également se pencher sur cet avant-projet de loi. Peut-être, l'adoption de ces dispositions légales changera les conditions de vie de ces milliers de femmes qui se sacrifient quotidiennement « Kay madanm », pour éduquer leurs enfants.
Jean Max St Fleur
tmaxner@yahoo.fr
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=52472&PubDate=2007-12-28
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Une fenêtre ouverte sur Haïti, le pays qui défie le monde et ses valeurs, anti-nation qui fait de la résistance et pousse les limites de la résilience. Nous incitons au débat conceptualisant Haïti dans une conjoncture mondiale difficile. Haïti, le défi, existe encore malgré tout : choléra, leaders incapables et malhonnêtes, territoires perdus gangstérisés . Pour bien agir il faut mieux comprendre: "Que tout ce qui s'écrit poursuive son chemin, va , va là ou le vent te pousse (Dr Jolivert)
vendredi 28 décembre 2007
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