Un million d'Haïtiens, dont une proportion importante vivent déjà dans un camp de réfugié, pourraient avoir besoin d'un nouvel abri. Photo: AFP |
Louise Leduc, La Presse
Igor devrait épargner Haïti, mais les fortes pluies qui secouent déjà le pays en pleine saison des ouragans ont amené les autorités à décréter «l'alerte orange», signifiant un risque important d'inondations. Jusqu'à un million de personnes - déjà sous les tentes ou pas - pourraient avoir besoin d'un nouvel abri. Encore faut-il que les Haïtiens consentent à bouger, ce qui est loin d'être acquis.
Il pleut des cordes, à Port-au-Prince, mais les sinistrés refusent de quitter leur tente et c'est là l'un des principaux problèmes, explique en entrevue téléphonique hier à La Presse Jean-Yves Jason, maire de Port-au-Prince.
«Les sinistrés sont convaincus que s'ils restent dans les camps, le gouvernement va finir par leur donner la maison qu'ils réclament. Ils préfèrent donc rester là et ils refusent d'aller ailleurs, malgré l'annonce de cyclones et de possibles glissements de terrain», dit M. Jason.
Où voudrait-on que les gens se dirigent? Vers des «abris collectifs», explique M. Jason.
Et en quoi consiste un «abri collectif» ? Il s'agit d'entrepôts désaffectés, vers le port, par exemple. Combien de personnes dans ces abris collectifs? Un millier, typiquement, répond M. Jason.
Là se trouve peut-être un élément de réponse à ce refus de partir. Quand on a au moins cela, une petite tente à nous tout seuls, aussi soumise aux éléments soit-elle, et que l'on nous incite fortement à aller vivre avec 999 autres personnes, a-t-on vraiment envie de partir?
Sophie Chavanel, responsable des communications pour la Croix-Rouge, se trouve à Port à Port-au-Prince et oui, il en pleut un coup, dit-elle. Il fait un gros soleil une minute, puis hop, le gros, gros coup d'eau. «Et ici, on n'a pas les mêmes systèmes d'irrigation qu'à Montréal, si bien que quand il pleut, tout déborde», dit-elle tout en se souvenant en riant un peu qu'il arrive aussi qu'à Montréal, sous les viaducs...
Mais les gens vivent-ils dans les tentes, les deux pieds dans l'eau? Très variable, répond Mme Chavanel. «Certains camps ont de très bons systèmes d'irrigation. C'est le cas des camps de l'organisme parrainé par Sean Penn, notamment.»
Rumeurs de fraude
Il reste que la rumeur persistante veut que les 300 000 personnes au Champ-de-Mars, par exemple, ne soient pas aussi sinistrées qu'on le croit. Déjà, un organisme humanitaire avait confirmé à La Presse, il y a quelques mois, que certains se rendaient sous la tente, de jour, pour y être minimalement pris en charge et aidés, pour aller ensuite dormir à la maison ou dans ce qui en tient lieu.
«J'entends la même chose que vous, dit Mme Chavanel, mais je ne peux confirmer cette information. Ce que je peux vous dire, c'est que nous multiplions les évaluations de familles véritablement vulnérables et que par exemple, à Port-au-Prince, nous assurons encore, chaque jour, l'approvisionnement de 2,4 millions de litres d'eau par de gros camions-citernes.»
La saison des ouragans ne saurait être une surprise. La Croix-Rouge avait déjà prévu le coup et a réparti aux quatre coins du pays 16 lieux d'entreposage contenant du matériel pouvait dépanner 125 000 familles - des couvertures, des trousses d'hygiène, quelques casseroles, des filets anti-moustiques, etc.
Le maire de Port-au-Prince, Jean-Yves Jason - que l'on a joint à Miami où il se trouvait - explique que les autorités réfléchissent depuis environ deux mois à la nécessité de déplacer les sinistrés pendant la saison des ouragans.
Même si l'ouragan Igor ne devrait pas passer directement sur Haïti, de fortes pluies, des vagues importantes et des rafales de vent, surtout sur le Nord-Ouest, sont prévues sur le pays entre demain et vendredi. C'est la prochaine grosse menace qui pèse sur Haïti.
Selon le Centre national américain des ouragans, Igor est jusqu'ici un ouragan de catégorie 4, mais il pourrait passer à la catégorie 5, sur une échelle de 5.
Avec l'Agence France-Presse
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