Selon les médecins, jusqu'à un Haïtien sur cinq nécessiterait une aide psychologique. Pour des dizaines de milliers de survivants, l'une des expériences les plus traumatisantes est de savoir que leurs proches ont été enterrés dans des fosses communes, sans funérailles dignes de ce nom qui permettraient à la famille d'enclencher le processus de deuil.
Dans les hôpitaux de Port-au-Prince, beaucoup de ces rescapés traumatisés sont assis dans des recoins, le regard plongé dans le vide, dans l'attente de calmants. "Ce n'est pas d'une aide psychologique immédiate dont ils ont besoin", explique le Dr Lynne Jones, membre de l'organisation International Medical Corps. "C'est d'une aide pour qu'ils fassent leur deuil. Les gens ne peuvent pas se relever si leurs besoins sociaux ne sont pas satisfaits."
Dans l'urgence, le Dr Jones, spécialiste des catastrophes naturelles et des théâtres de conflit (Bosnie, Indonésie), tente d'enseigner aux médecins en contact direct avec les patients les techniques de base pour déceler les symptômes traumatiques. Et, dans un premier temps, écouter leurs souffrances. "Dans de telles situations, les docteurs ont tendance à donner des calmants (...) Ce n'est pas ce que nous voulons qu'ils fassent", précise-t-elle.
Il est clair qu'Haïti devra faire appel à des professionnels étrangers ou former davantage de ses propres médecins pour faire face aux séquelles psychologiques du séisme du 12 janvier. "Le besoin le plus urgent, ce n'est pas la nourriture et l'eau, car c'est un besoin temporaire", estime Pierre Brunache, de l'ONG américaine Citizens Network for Foreign Affairs, qui a réalisé une évaluation des travailleurs humanitaires et des victimes en Haïti. "Le besoin le plus urgent, ce sont des psychiatres".
L'unique hôpital psychiatrique de Port-au-Prince fonctionne à peine. Par peur d'une nouvelle réplique, les familles ont retiré la plupart de la centaine de patients qui y séjournaient avant le tremblement de terre.
Les infirmières ne veulent pas non plus y pénétrer car "elles sont absolument pétrifiées", confie le Dr Peter Hughes, un psychiatre irlandais arrivé la semaine dernière pour évaluer les besoins.
"Il n'y a pas d'électricité ni d'eau courante. Certains patients sont dans des chambres fermées. On a besoin de matelas et de toilettes en état de marche", explique-t-il.
Le Dr Jorge Castilla, membre de
En attendant l'arrivée de l'aide, les exemples de survivants traumatisés sont légion à Port-au-Prince.
Ainsi, Hugo Emmanuel, allongé à même le sol de l'hôpital Espoir, sur les hauteurs de Port-au-Prince. Cet homme éduqué de 49 ans, blessé aux jambes, est en état de choc après avoir perdu sa maison, ses parents et son travail. Pendant des jours, il a seulement accepté d'être nourri par le directeur de l'hôpital, affirmant que le reste du personnel voulait l'empoisonner. La semaine dernière, il a lui-même arraché son plâtre.
"A chaque fois que je pense à la perte de ma famille, je perds la tête", dit-il. "Je ne suis pas fou. Je pense simplement que je souffre d'un choc psychologique.
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