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Se déguiser : une tradition qui tend à disparaître. Il y a une trentaine d’années, c’était la norme au carnaval. Hormis les reines et rois, les membres du cortège, le déguisement devient de nos jours une pratique presque insolite pour le particulier.
Certaines personnes maintiennent la tradition du déguisement. Elles sont certes rares. C’est le cas de Jean-Marie, 42 ans, rencontré au détour de la rue Oswald Durand, le premier jour gras. Alors que la majorité des participants exhibent en majorité des maillots appellant à « construire une Haïti verte » ou encore à combattre « la violence », lui, arbore un corsage en trapèze blanc, un chapeau en tuile noir que les vieilles dames portaient autrefois lors des funérailles, avec un ballon blanc noué à l’arrière du chapeau et flottant au vent. Autour de son cou se dessine une cravate avec au bout un papillon de couleur or. « J’ai acheté le corsage à vingt-cinq gourdes au marché Salomon. Le chapeau appartient à ma mère, je l’ai déniché dans sa mallette. Le ballon, c’est un cadeau de mon petit-fils, j’y tiens beaucoup », apprend Jean-Marie.
Soûl à ne plus pouvoir se tenir debout, JeanMarie était au centre de l’attention d’une partie de la foule massée au niveau de la rue Oswald Durand. « Je suis le char, j’ai une tenue pour les trois jours gras. Demain ce sera autre chose. Je ne sais pas exactement ce que sera. Peut-être que ce sera une tenue de militaire. J’aime ça, mon père a été militaire et j’admirais son uniforme », raconte-t-il, buvant à grandes gorgées de l’eau-de-vie dans un bidon en plastique. Les gens aimant à se déguiser sont peu nombreux de nos jours dans le pays. Cependant, il arrive qu’au passage d’une bande à pied on aperçoive un homme en liseuse, en caleçon, mais emporté par la musique et la séduction de la musique au point d’éluder les questions d’un geste de la main, ou encore déguisé en Père Noël, ou portant un caleçon pour tout vêtement, voire une veste. « Le carnaval, c’est le plus beau événement de ma vie. En pareille occasion, on porte ses plus beaux vêtements. C’est pourquoi je suis habillé de la sorte », soutient un homme, vêtu d’une veste noire et qui se déhanchait au son de la musique de Soul Rasta, une bande à pied basée à la de 5e Avenue Bolosse.
Parce que le carnaval est un lieu de jouissances et de levées d’interdits, ces débordements sont souvent accueillis avec le sourire. « J’ai l’habitude de voir des hommes se mettre nus comme ils sont venus au monde pour danser. Il y a un homme qui habite mon quartier, quand il va s’amuser dans les bandes à pied, il chipe les plus beaux vêtements de sa femme. Ce qui crée par la suite de vives discussions entre eux. Malgré tout, il continue à le faire. Quand je lui demande pourquoi il persiste sur cette voie qui de toute évidence peut aboutir à une rupture, il a avoué que c’était sa façon à lui de se venger de sa femme qui lui cassait les oreilles tout les soirs », rapporte Mario, 27 ans.
vendredi 8 février 2008
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