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vendredi 31 août 2007

La santé à la merci des religieux

Chaque mois, des religieuses de la Charité de Jacmel distribuent gratuitement des médicaments aux habitants de Peredo. Faute de contrôle, ces médicaments pourront aggraver les problèmes sanitaires dans la communauté.

Nadège, une jeune mère de dix-sept ans. Tête ceinte d'un mouchoir rouge, sous un soleil de plomb, elle fait la queue avec son bébé de six mois dans ses bras. Objectif: Nadège vient à l'Ecole nationale de Peredo pour recevoir des médicaments pour son enfant de la part des soeurs de Charité de Jacmel. « Vous déclarez votre maladie et on vous donne des médicaments », lâche tout bas la petite génitrice en baissant la tête, comme pour empêcher aux soeurs de l'entendre.
Lorsqu'on ne fait pas son travail, on le fait pour vous. « Ici on nous donne des médicaments sans aucune consultation », confie Nadège avec, en main, deux paquets de comprimés et un tube contenant du Stérovit (vitamine A pour bébé) expiré depuis novembre 2005. Malheureusement, elle ne pouvait pas lire la notice écrite en anglais. « Ou wè mwen ka bay ti bebe a remèd sa ? », me demande-t-elle, vigilante. «J'ai laissé les bancs de l'école dès la 3e année fondamentale», regrette l'adolescente avouant que sa famille l'a contrainte de se marier très tôt.

A Peredo, la santé coûte cher. Le dispensaire de la zone est dans un état lamentable. A la salle d'attente, on fait tout : accouchements, consultations des adultes et des bébés, monitoring avec les Pv/VIH .... Ce centre de premier soin ne dispose pas de moyens pour répondre aux besoins de la population. A cette infirmerie, il y a un médecin résident qui n'est pas toujours disponible pour les malades. Une infirmière pour desservir une population évaluée à environ 20 mille habitants.

Parfois, selon Manithe Pierre, infirmière depuis douze ans à la seule institution de santé de la zone, on ne peut même pas donner un premier soin aux patients par manque de moyens. « On leur conseille d'aller à Jacmel pour se faire soigner », affirme l'infirmière. Ceux qui disposent de moyens vont à l'hôpital, et ceux qui n'en n'ont pas peuvent attendre leur mort à défaut d'être secourus par les bons samaritains de la Charité de Jacmel.

Physiquement, le dispensaire de Peredo est dans un état déplorable. « Nous souhaitons que les responsables du Ministère de la santé publique réhabilite le dispensaire. Les conditions dans lesquelles on fonctionne ici sont inhumaines », lâche l'infirmière en charge du dispensaire.



Construit au début dès années 80, cet établissement de santé n'a bénéficié que des couches de peinture.



Consciente des complications que peuvent provoquer les médicaments avariés, madame Pierre dit inviter la population à ne pas consommer ceux de la congrégation de la Charité qui sont très souvent périmés. « Ils sont incrédules », martèle l'infirmière. Selon elle, les patients prétextent ne pas avoir de l'argent pour se procurer des médicaments.



L'urgence d'intervenir
 
A côté des problèmes de santé auxquels est confrontée cette communauté, le passage du cyclone Dean sur la côte Sud d'Haïti a sévèrement frappé Peredo. Près d'une vingtaine de maisons ont été endommagées ou détruites. A en croire le coordonnateur du CASEC de la zone, M. Luc Coachy, presque toutes les plantations ont été rasées. Ce qui rendra difficile la rentrée des classes. « Si les autorités n'interviennent pas, les élèves ne vont pas pouvoir aller à l'école. Il faut que le gouvernement fasse quelque chose pour les paysans de Peredo », a affirmé M. Coachy qui parait très préoccupé.



Principal représentant de l'Etat dans la zone, M. Coachy se transforme en policier et en juge de paix pour combattre ce qu'il appelle les « ti bat Kò ». Selon lui, des policiers visitent Peredo seulement quand ils viennent voir leur famille.



Située à 29 Kms de Jacmel, Peredo fait partie des cinq sections communales de Marigot. Surplombée par le morne La Selle, elle est bornée par la rivière de Marigot communément appelée Rivière Fesles. La rivière Citronnier, un des affluents de Fesles, représente une menace pour la population. « Nous sommes obligés de laisser nos toits à chaque fois que cette rivière est en crue », a fait savoir M. Coachy. Il demande au ministère des Travaux publics, Transports et communications (MTPTC) de bien vouloir faire curer cette rivière pour le bien des habitants de cette localité.



Contrairement à d'autres sections communales, Peredo bénéficie du bétonnage de la route principale et d'installations électriques de l'EDH. Cependant, elle n'échappe pas au rationnement drastique de l'électricité.
 
Péguy André Joseph

peguy_andre@yahoo.fr
 
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=47884&PubDate=2007-08-31 
 

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