mardi 21 août 2007
Par Wooldy Edson Louidor
Santo Domingo, 21 août. 07 [AlterPresse] --- Les gouvernements haïtien et dominicain n’ont pas encore inclus dans leur agenda les revendications des migrantes et migrants haïtiens, ainsi que celles de leurs descendants, en faveur d’un traitement plus juste sur le territoire dominicain, estiment des leaders associatifs haïtiens et dominicains d’origine haïtienne qui se sont confiés à AlterPresse.
Les actuels gouvernements d’Haïti et de la République Dominicaine manifestent un intérêt de plus en plus croissant pour intensifier et harmoniser leurs relations diplomatiques, mais ils demeurent « indifférents » à la situation difficile et inhumaine à laquelle les migrants haitiens leurs descendants se trouvent confrontés en République Dominicaine, déclarent ces responsables d’associations rencontrés à Santo Domingo.
Ils critiquent aussi les visites réciproques de plusieurs délégations officielles et la célébration pompeuse de réunions diplomatiques et d’accords binationaux en « faisant totalement fi de nos justes revendications ».
« En définitive, quelles sont les priorités des deux gouvernements en ce qui concerne notre situation ? », se demande l’un d’eux, perplexe.
« Tu ne te rends pas compte que, quand notre président, René Préval, vient en République Dominicaine, nous ne le voyons qu’à la télévision, assis près de Leonel Fernández (son homologue dominicain), en train de manger, de boire et de bavarder ; pourtant, il ne s’approche jamais de nous pour nous saluer, pour nous parler, nous demander comment nous vivons, afin de voir ce qu’il peut faire pour nous qui souffrons de beaucoup de discriminations, d’abus et de violations de droits humains ici », déclare un autre, indigné.
La « stratégie médiatique » des deux administrations dénoncée par des migrants haïtiens
Les actuels chefs d’état, haïtien et dominicain, se sont évertués à tisser et maintenir des relations très cordiales entre eux. Outre des accords binationaux en perspective dans des domaines relatifs à la santé, l’agriculture, l’environnement, le développement, le commerce, etc., les deux présidents n’ont cessé de manifester leur amitié devant la presse et l’opinion publique.
Récemment, d’autres acteurs dominicains et haïtiens, dont des parlementaires, des hommes et des femmes d’affaire, des médecins, des historiens et des artistes, ont emboîté le pas à travers des visites réciproques, des partenariats, des activités conjointement organisées, etc. Ils manifestent leur volonté de contribuer, à partir de leur champ d’action respectif, au rapprochement des deux peuples.
Ce processus visant à harmoniser les relations entre les deux nations est, cependant, considéré par des leaders des associations de migrantes et migrants haïtiens basées dans la capitale dominicaine comme des « actions médiatiques qui ont pour seul objectif de faire croire à tout le monde que tout va bien dans les rapports entre les deux pays, tout en essayant de cacher, de cette manière, la situation d’exploitation, de discrimination et de violations de droits humains vécue au quotidien par les migrantes, les migrants et leurs descendants en République Dominicaine ».
Ce groupe de migrants dénonce aussi « la stratégie des deux gouvernements » qui consistent, à leur avis, à « éluder les thèmes et problèmes considérés comme la pomme de discorde dans les relations haitiano-dominicaines ».
Les conditions infrahumaines de vie et de travail des migrantes et migrants haïtiens en République Dominicaine, ainsi que les violations de leurs droits fondamentaux, les déportations brutales et massives, l’absence de lois et de politiques migratoires justes et claires, la marginalisation sociale, la discrimination raciale, le déni de justice, constituent, selon eux, quelques points délicats que les deux administrations tenteraient d’esquiver et auxquels, pourtant, ces migrants réclament des solutions urgentes.
De plus en plus abandonnés
Les migrantes et migrants haïtiens, interviewés par AlterPresse, se sont prononcés aussi sur le comportement des représentants diplomatiques de leur pays en République Dominicaine. Ils affirment qu’ils se sentent de plus en plus abandonnés par la mission diplomatique haïtienne dans la république voisine.
« Quand les autorités dominicaines commettent une injustice contre nous ou contre d’autres compatriotes et nous nous rendons à l’Ambassade d’Haïti à Santo Domingo pour chercher de l’aide, eux, qui sont supposés nous représenter ici, ne nous prennent pas en considération, ils ne nous écoutent même pas ; ils nous répondent, la majorité des fois, d’un air indifférent, qu’ils ne disposent pas de temps pour se mêler de ces genres d’affaires », se plaint un migrant, l’air découragé.
Un autre fustige l’attitude des fonctionnaires qui « nous demandent beaucoup d’argent, quand nous allons là-bas pour renouveler un passeport ou pour solliciter un papier quelconque afin de nous inscrire à l’Université ou de faire d’autres démarches ». Parfois « ils nous font payer plus que ce que le document coûte réellement », ajoute-t-il.
De leur côté, les Dominicaines et Dominicains d’ascendance haïtienne se lamentent de ce que l’État et le gouvernement dominicains continuent de leur nier le droit à la nationalité dominicaine ; un droit qui, pourtant, est établi par le jus soli (principe selon lequel toute personne a droit à la nationalité du pays où elle est née) reconnu par l’article 11 de la Constitution Dominicaine actuellement en vigueur et renforcé par plusieurs arrêts de la Cour Interaméricaine des Droits de l’Homme (Cidh), argumentent-ils.
Cet état d’« apatrides » dans lequel ils se trouvent les prive de leurs droits civils, politiques, sociaux, économiques et culturels, les condamnant ainsi à une situation de précarité et de vulnérabilité généralisée, expliquent-ils.
Le défi de regarder l’avenir en apprenant du passé et en étant attentif au présent
« Est-il possible de construire de bonnes relations entre les deux peuples quand nos gouvernements continuent de se montrer de plus en plus insensibles et indifférents aux mauvais traitements qu’on nous inflige actuellement en République Dominicaine ? Ne faisons-nous pas partie des deux peuples ? », s’interrogent des militants d’organisations haïtiennes et dominico-haïtiennes basées à la Capitale dominicaine.
« Quand est-ce qu’il y aura assez d’emplois là-bas (en Haïti) afin que nous puissions retourner y vivre en toute tranquillité, avec dignité et à l’abri de mauvais traitements et même de massacres dont nos ancêtres furent victimes ici (en République Dominicaine) aux temps du président dominicain (Rafael) Trujillo et dont nous continuons de souffrir au compte-gouttes ? », soupire un travailleur migrant haïtien.
Les peuples et gouvernements des deux pays, se partageant une même île, doivent relever le défi de regarder l’avenir en face, tout en apprenant de leur histoire commune et en évitant de répéter les erreurs et monstruosités du passé, tel que le massacre, orchestré en 1937 par le dictateur dominicain Rafael Leonidas Trujillo contre des milliers d’Haïtiennes, d’Haïtiens et de Dominicaines et Dominicains d’origine haïtienne et à la peau noire, qui, soixante-dix ans (1937-2007) plus tard, continue d’envenimer les rapports entre les deux nations. [wel gp apr 21/08/2007 15:30]
http://www.alterpresse.org/spip.php?article6325
Une fenêtre ouverte sur Haïti, le pays qui défie le monde et ses valeurs, anti-nation qui fait de la résistance et pousse les limites de la résilience. Nous incitons au débat conceptualisant Haïti dans une conjoncture mondiale difficile. Haïti, le défi, existe encore malgré tout : choléra, leaders incapables et malhonnêtes, territoires perdus gangstérisés . Pour bien agir il faut mieux comprendre: "Que tout ce qui s'écrit poursuive son chemin, va , va là ou le vent te pousse (Dr Jolivert)
mercredi 22 août 2007
Haïti-R.Dominicaine : Les migrants haïtiens et leurs descendants revendiquent un traitement plus juste
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