Les craintes de fraude planent sur la présidentielle, dans un pays ravagé par le séisme et le choléra. Depuis un mois, chez les Dolcy, les repas de famille sont animés. La mère, la fille, le fils : chacun défend un candidat différent pour l’élection présidentielle prévue demain. Dans leur shelter flambant neuf, une petite cabane en bois venue remplacer leur tente de fortune, les débats sont quotidiens. "On essaye tous de se convaincre que l’autre se trompe, c’est la démocratie!", s’amuse Ronald, le fils.
Les Dolcy font partie des 1,3 million de déplacés qui vivent toujours dans un camp, onze mois après le séisme du 12 janvier. Aujourd’hui, comme 4,7 millions de Haïtiens, ils sont appelés à élire le successeur du président René Préval ainsi que 99 parlementaires et 11 sénateurs. La nouvelle majorité aura la lourde tâche de rebâtir un pays ravagé par le tremblement de terre, le passage du cyclone Tomas et l’épidémie de choléra qui frappe l’île depuis octobre et a fait, selon le dernier bilan, 1.648 morts.
Autour de la cabane des Dolcy, dans le camp Carradeux, les tentes à perte de vue le disputent aux shelters roses, verts et turquoise construits par les ONG. Près de 70.000 personnes s’y sont installées progressivement depuis janvier. Deuxième plus grand camp de la capitale, Carradeux a été choisi avec six autres pour accueillir les bureaux de vote destinés aux déplacés. "Tous ont été installés en zone rouge", explique David Berthomier, policier français chargé de la sécurité du scrutin dans les camps.
L’officier fait référence au classement mis en place par la police haïtienne en collaboration avec l’ONU: vert pour les 891 sites les moins dangereux ; jaune pour 238 autres ; rouge pour les 354 les plus sensibles. Ce matin, dès 6 heures, dix militaires des forces spéciales, deux des Nations unies et leurs collègues haïtiens seront postés autour des deux bureaux de vote.
En premier, la crainte des violences et des tricheries
Ailleurs, 3.200 policiers et 8.000 militaires internationaux ont été envoyés aux quatre coins de l’île. Des milliers d’observateurs nationaux et internationaux, en plus des agents électoraux formés par les Nations unies, s’assureront aussi de la bonne tenue de l’élection. Malgré ce dispositif, David Berthomier reste conscient des failles du système: "Seulement deux bureaux de vote pour 70.000 personnes et un dépouillement sur place en pleine nuit dans un camp mal éclairé, cela va être difficile à gérer… Mais, attention, nous n’entrerons pas dans les bureaux de vote, sauf demande d’intervention. Nous ne devons pas être accusés d’influencer le processus électoral."
Cette crainte d’ingérence angoisse moins les habitants de Carradeux que les risques de violences et de tricheries. La famille Dolcy, comme le président du comité de quartier, affirme avoir été menacée à plusieurs reprises par les partisans d’un des candidats en lice. "Ils viennent chez nous avec leurs armes en nous disant qu’ils sauront si on a bien voté", affirme Huyguette, la mère de famille. Elle sera seule dans l’isoloir, "mais tout de même, ça fait réfléchir"… Cette violence a encore troublé la campagne vendredi soir. L’un des candidats, Michel Martelly, star de la musique kompas reconvertie en politique, a été la cible d’une embuscade, aux Cayes (sud), avec son équipe. Bilan de l’attaque: un mort et plusieurs blessés.
Les soupçons de fraude qui pourraient entacher le scrutin inquiètent également. Interrogée par le JDD, Mirlande Manigat, favorite de l’élection, se montre pessimiste. Epouse de l’ex-président Leslie Manigat, renversé par un coup d’Etat militaire en 1988, la candidate du Rassemblement des démocrates nationaux progressistes est en tête des sondages devant Jude Célestin (beau-frère de l’actuel président René Préval et candidat du parti au pouvoir), Michel Martelly, Charles-Henri Backer (un industriel puissant) et Jean-Henry Céant, un notaire qui a tenté de fédérer les anciens partisans des ex-présidents Duvalier et Aristide. Mirlande Manigat, qui se dit "centriste de gauche", affirme que "500 bureaux de vote fictifs ont été créés et [que] 500.000 faux bulletins de vote circulent déjà".
Philippe R.J. Augustin, directeur du registre électoral, confie: "Cela va être très compliqué. Qui peut garantir que les 3.300 agents des bureaux de vote et leurs superviseurs ne sont pas achetables Il faut s’assurer aussi que les gens ne voteront pas plusieurs fois car l’encre [les doigts des votants seront marqués] peut être retirée avec du dissolvant." Et d’ajouter: "La seule garantie contre la fraude est la participation massive de la population aux élections." Ainsi, les fraudes, si elles ne sont pas généralisées, ne pourront-elles pas influencer le résultat final.
http://www.20minutes.fr/article/630159/monde-haiti-elections-commence-confusion
Une fenêtre ouverte sur Haïti, le pays qui défie le monde et ses valeurs, anti-nation qui fait de la résistance et pousse les limites de la résilience. Nous incitons au débat conceptualisant Haïti dans une conjoncture mondiale difficile. Haïti, le défi, existe encore malgré tout : choléra, leaders incapables et malhonnêtes, territoires perdus gangstérisés . Pour bien agir il faut mieux comprendre: "Que tout ce qui s'écrit poursuive son chemin, va , va là ou le vent te pousse (Dr Jolivert)
dimanche 28 novembre 2010
Haïti: Des urnes dans un champ de ruines
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