Je fais souvent un rêve. Je vois le pays entier tapissé de panneaux solaires, se passant la lumière comme on se donne la main. De morne en morne, de plaine en vallée. Du morne La Selle à celui des Enfants perdus. Du pic Macaya au morne L'Enfer. De la vallée de l'Artibonite aux villes, comme Gonaïves, situées au-dessous du niveau de la mer. Il y en a partout. Tant et tant et tant. Il y en a tellement qu'ils font concurrence aux étoiles qui, le soir, éclairent nos pas. Tellement que nous n'avons plus besoin de déboiser pour cuire notre manger.
Tellement qu'il n'est plus nécessaire d'utiliser le gasoil pour faire fonctionner les groupes électrogènes et les générateurs qui ajoutent aux mille bruits des villes et polluent tout autant. Tellement que chacun en a pour ses besoins propres. Et il ne vient à l'esprit de personne d'acheter au marché noir des panneaux volés.
On peut boire sa bière bien fraîche, regarder son match de foot sans craindre de manquer un but de toute beauté et de première importance à cause d'une panne d'électricité. Se passionner tous les après-midi pour ses feuilletons préférés, qu'ils viennent du Mexique ou des Etats-Unis. Et nos morts, partout dans le pays, attendent bien au froid le retour des parents installés à l'étranger pour un dernier adieu. De nuit, le pays brille comme de jour, de cette énergie que nous avons à ne savoir qu'en faire.
Et tous, enfants et adultes, s'en vont dans la lumière, sans peur ni des loups-garous ni des zenglendo [les criminels]. Et voilà le pays catapulté sous tous les projecteurs du monde, non plus pour ses catastrophes politiques, non plus pour les calamités naturelles que nous n'avons pas su gérer, mais comme hier notre indépendance a pu servir de phare aux peuples épris de liberté.
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Louis-Philippe Dalembert est écrivain et poète. Il vit entre Haïti, Paris et Berlin. Il a reçu le prix Casa de las Americas pour Les dieux voyagent la nuit (Ed. du Rocher, 2006). Il a aussi publié un roman en créole, Epi oun jou konsa tèt Pastè Bab pati (Ed. des Presses nationales d'Haïti, 2008).
http://www.lemonde.fr/ameriques/article_interactif/2010/05/24/paroles-d-espoir-en-haiti_1361270_3222_6.html
Une fenêtre ouverte sur Haïti, le pays qui défie le monde et ses valeurs, anti-nation qui fait de la résistance et pousse les limites de la résilience. Nous incitons au débat conceptualisant Haïti dans une conjoncture mondiale difficile. Haïti, le défi, existe encore malgré tout : choléra, leaders incapables et malhonnêtes, territoires perdus gangstérisés . Pour bien agir il faut mieux comprendre: "Que tout ce qui s'écrit poursuive son chemin, va , va là ou le vent te pousse (Dr Jolivert)
lundi 24 mai 2010
REVES SOLAIRES....LOUIS-PHILIPPE D'ALEMBERT
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