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dimanche 7 octobre 2007

Les petites choses qui rendent la vie difficile (1)Vivre avec le stress .. Survivre à Port-au-Prince

A Port-au-Prince, on a tellement pris l'habitude de vivre avec l'anormal que l'on ne se rend plus compte de ce qui ne marche pas. Il y a une infinité de petites choses qui dérangent, qui, sans que l'on s'en rende compte, énervent, rendent agressif et nous portent à avoir un comportement antisocial. Si l'on prend le temps d'observer, on se rendra rapidement à l'évidence que l'haïtien est agressif dans toutes les situations, qu'il soit à pied dans la rue, au volant, au restaurant, au travail. Il y a vraiment de quoi se questionner au sujet de ces petites choses qui, parfois, causent de grands problèmes.
On a beau s'efforcer de commencer sa journée avec le sourire et la bonne humeur, il est presque impossible que cela dure longtemps si l'on ne reste pas tranquillement assis chez soi en évitant d'arriver même devant la barrière, car, très souvent, c'est là que les choses commencent à se gâter.
Beaucoup de gens piquent leur première crise de nerfs en sortant de chez eux. Ils se retrouvent, aussitôt la barrière franchie, devant le spectacle désolant et démoralisant d'une multitude de marchandes installées sur le trottoir, devant leur maison, obstruant même l'entrée de leur propriété. Cette violation flagrante de leurs droits en tant que propriétaires les met en rogne, surtout si leurs protestations énergiques provoquent la très « démagogique » et « démocratique » réponse habituelle : « Lari se salon pèp la, lari a pou nou tout ». Ceci dit avec arrogance et agressivité. De quoi nourrir des instincts de meurtre.Le problème ici est déjà plus complexe qu'il n'y parait. Il ne s'agit pas simplement de l'occupation de l'espace, mais, aussi de sa gestion qui a des conséquences directes sur l'environnement physique et moral des personnes concernées.
On se demande, en l'absence de toilettes publiques, comment et où ces commerçantes, qui sont présentes de six heures du matin jusque fort tard dans la soirée, arrivent à gérer leurs besoins physiologiques. D'un autre côté, à entendre les chapelets d'insanités qu'elles égrènent à longueur de journée, il est difficile de gérer l'éducation que l'on veut donner à ses enfants. Et dire qu'on a payé le prix fort pour un logement dans un quartier potable et tranquille avec un environnement sain !Mais ce n'est là qu'un détail puisque la journée ne fait que commencer.
Il faut ensuite affronter les incontournables embouteillages où chacun se comporte comme un animal frustré en quête d'une proie sur laquelle déverser toute sa hargne. Pas question d'être courtois. Ceux qui se disent les plus instruits, les mieux éduqués se comportent comme de vrais primates. Derrière leur volant, ils n'ont aucune considération pour les piétons qui, n'ayant pas le choix, marchent au milieu de la chaussée, les trottoirs servant « légalement » d'aire de stationnement ou de marché dans leur intégralité. Les acrobaties au milieu des voitures deviennent, de ce fait, légitimes, aussi légitimes que la colère des conducteurs qui ne se gênent pas pour lancer de ronflantes insultes à ceux qui ont le malheur de se trouver sur leur chemin. Et c'est sans compter ceux qui, non contents d'occuper les trottoirs, étalent leurs marchandises sur la chaussée, la réduisant, par endroit, de moitié.
Pour les piétons, ce n'est pas la joie. Le soleil pique et l'on transpire énormément. Toute fraîcheur a disparu avant même que l'on soit à destination. De plus, il faut faire attention aux égouts à ciel ouvert éviter les piles nauséabondes de fatras qui pullulent en dépit des nombreuses poubelles remarquées tout le long du parcours et qui sont loin d'être remplies. Les avertisseurs de voiture font sursauter de temps, en temps, et au moindre heurt accidentel entre piétons, les grossièretés fusent. De là à en venir aux mains, il n'y a qu'un pas qui, de temps en temps, est franchi. Et l'oxyde de carbone que l'on avale à grandes bouffées n'est pas pour arranger les choses.
Fin de la première partie. Continuons ! Ou, plutôt, recommençons !
Il ne faudrait pas oublier ceux qui, pauvres d'eux, doivent utiliser le transport en commun. Quelle horreur ! L'attente est longue et quand, enfin, un véhicule vide ou avec quelques places de disponible arrive, c'est la ruée. Tous les coups sont permis : bousculades, coups de coude, d'épaule. Les prises de gueule s'en suivent et, quelques fois, les coups de poing. Ce genre de spectacle qui fait douter de l'humanité ou de la « civilisation » des acteurs. Et pourtant, on a l'impression qu'ils n'ont pas le choix. Soit on se comporte comme un cochon, soit l'on risque de ne pas arriver à destination. Ensuite, c'est l'embouteillage dans des conditions inacceptables, mais pourtant acceptées, d'inconfort.
Pour certains de ces passagers, le plus dur reste à venir. Pour eux, il n'y a rien de plus terrible que les décibels qui leur sont imposés par un conducteur qui prend son véhicule, déjà mal ventilé, pour une boite à musique. Une véritable torture. A croire qu'il n'existe aucune loi pour protéger le citoyen de la pollution sonore. Et pourtant les juges qui travaillent au palais de justice sont bien placés pour le savoir. Ils subissent, à longueur de journée, cette agression sonore.
Continuons !Mais... Pourquoi continuer ? N'est-ce pas déjà suffisant pour passer une mauvaise journée ? Et si nous laissions le reste pour une prochaine fois ?
Patrice-Manuel Lerebours
patricemanuel@yahoo.com
plerebours@lenouvelliste.com
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=49304&PubDate=2007-10-07

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