« La poésie sauvera le monde ». C'est autour de ces maîtres mots que les initiateurs de Transe Poétique invitent le public à se joindre à eux pour la toute première édition du festival de poésie contemporaine à Port-au-Prince. Profitant de la floraison des multiples artistes haïtiens et de l'appellation « peuple de poètes » que ce pays insuffle, l’association Loque Urbaine consacrera quatre jours à cet événement phare au coeur de la capitale haïtienne. En effet, du mercredi 18 au samedi 21 septembre 2019, des hauts lieux aménagés pour la poétique seront investis dans le cadre ce festival. En attendant ces jours de transe, posons nos bagages avec Jean D’Amérique, directeur artistique du festival Transe Poétique.
Publié le 2019-08-27 | Le Nouvelliste
Le Nouvelliste : Pourquoi organiser un festival de poésie contemporaine à Port-au-Prince ?
Jean D’Amérique : En Haïti, il y a un grand intérêt pour la poésie, on la reconnaît facilement comme le genre littéraire majeur. Les poètes poussent comme des arbres, dit-on souvent. Il m’a semblé important de créer un événement qui fait écho à cette situation – qui est très rare dans le monde.
L.N : Transe Poétique. Comment aborder cette appellation ? Que donnez-vous à voir à travers cette expression ?
J.D'A : On essaie de mettre en place un festival de poésie au sens large, c’est-à-dire où, à côté de la présence des poètes et de leurs œuvres, on évoque la poésie à travers d’autres formes artistiques, comme le cinéma, la photographie, la performance, la musique, le théâtre… Cette façon de montrer comment la poésie s’incruste dans d’autres champs fait écho à l’appellation du festival. Sinon, c’est aussi une façon d’inviter le public à s’immerger de plain-pied dans le poème, à entrer en transe poétique...
L.N : Depuis quand rêvez-vous de faire un festival de poésie ?
J.D'A : Je ne sais pas exactement. Mais on a commencé à y penser il y a environ deux ans.
L.N : Dans un monde enclin à laisser très peu de place à la poésie, dans quel état d’esprit êtes-vous avant la réalisation de ce projet ?
J.D'A : Porter le projet d’un festival de poésie, c'est fou et c’est très lourd; car réunir des moyens pour la poésie n’est pas chose facile. On a fini par colmater les brèches. Nous sommes très heureux de voir ce rêve se réaliser.
Sinon, du côté de la réception, nous sommes plutôt sereins. Chez nous, la poésie a une grande place, nous savons qu’il y a un public qui attend le festival, c’est plutôt rassurant. Il reste à voir comment ce public reçoit le contenu que nous allons proposer.
L.N : La poésie est en effet un genre littéraire majeur en Haïti. Toutefois, comme on dit dans l’industrie du livre, la poésie ne se vend pas. Qu’avez-vous à dire à ce propos ? Pensez-vous obtenir suffisamment de fonds pour réaliser cette première édition ? Où en êtes-vous à ce stade ?
J.D'A : Au départ, le contenu du festival impliquait un budget que nous pensions pouvoir combler. En cours de route, nous avons dû revoir les choses, émincer la programmation pour réduire les coûts. L’État haïtien, à ma connaissance, n’a aucun dispositif de subvention pour la culture. Depuis des années un ministère qui se dit de la Culture, ne nous a jamais mis au courant de l’utilisation de son budget. La municipalité de Port-au-Prince aussi a un service culturel muet. Dans de telles conditions, il est difficile d’introduire une demande, voire d'obtenir quelque soutien. Nous nous sommes tournés vers d’autres structures d'Haïti, de France et de la Belgique, où nous avons pu trouver un peu d’aide, financière entre autres. Nous avons aussi lancé une campagne de financement en ligne qui a réussi, grâce aux dons de 91 personnes, voilà une très belle solidarité qui a été mobilisée pour le festival, une bonne partie de notre financement vient de là !
L.N : « La poésie sauvera le monde », soutenez-vous. Comment et dans quelle mesure est-ce possible face à tous les fléaux qui menacent planète et notamment Haïti?
J.D'A : « La poésie sauvera le monde, si rien ne le sauve », nous apprend Jean-Pierre Siméon. Une chose est claire : l’état actuel du monde est le résultat d’un manque de poésie. Nous en avons besoin plus que jamais. Il s’agit d’une attitude, d'un élan vers l’humain. L’esprit, tout comme le corps, a besoin de nourriture pour subsister. La poésie nourrit l’être. Nous avons besoin de cette lumière, de cette beauté. Comme je le disais récemment, la poésie est notre dernière chance. Quand on a la poésie, on ne devient pas Jovenel Moïse, on ne devient pas Donald Trump.
L.N : La programmation du festival…
J.D ‘A : Pour cette première édition, il y a eu plus d’une dizaine d’artistes à présenter des interventions originales pour créer une belle fête poétique. La programmation est disponible sur notre page Facebook et notre site web via ce lien :
https://loqueurbaine.com/transe-poetique/edition-2019/programmation/
L.N : Les invités…
J.D'A : Jean-Pierre Siméon, Lisette Lombé, Coutechève Lavoie Aupont, Antoine Boute, Makenzy Orcel, Dominique Gillerot, Samuel Suffren, Gaëlle Bien-Aimé, Milady Renoir, Mehdi Étienne Chalmers, Mélanie Godin.
L’organisation de cet événement est l’œuvre d’une équipe. L’association Loque Urbaine dont le noyau est composé de Marie Monfils, Jean Gesner Dorval et Jean D’Amérique. Avec la phrase curieuse et pure « La poésie sauvera le monde », c’est plus un slogan qu’un thème. C’est aussi le titre même de l’essai du poète Jean-Pierre Siméon, invité d’honneur de Transe Poétique pour cette année.
https://lenouvelliste.com/article/206101/port-au-prince-accueille-la-premiere-edition-du-festival-transe-poetique
#EUNICE
Une fenêtre ouverte sur Haïti, le pays qui défie le monde et ses valeurs, anti-nation qui fait de la résistance et pousse les limites de la résilience. Nous incitons au débat conceptualisant Haïti dans une conjoncture mondiale difficile. Haïti, le défi, existe encore malgré tout : choléra, leaders incapables et malhonnêtes, territoires perdus gangstérisés . Pour bien agir il faut mieux comprendre: "Que tout ce qui s'écrit poursuive son chemin, va , va là ou le vent te pousse (Dr Jolivert)
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