Ils étaient 40 000 à défiler entre Papaye et Hinche. Le 22 mars dernier, les paysans haïtiens se sont mis en ordre de marche pour défendre la souveraineté nationale et dénoncer les injustices sociales dans le pays. Pour clore le congrès des 40 ans du Mouvement paysan Papaye, le cœur était à la fête et les voix aux revendications.
Récit.
Vendredi 22 mars, 11h. Remue-ménage au centre Lakay, dans la cour des locaux du Mouvement paysan Papaye (MPP) : en camion, en voiture ou à pied, les pèlerins viennent des 10 départements du pays pour répondre à l’appel de Chavannes Jean-Baptiste, directeur du MPP. Depuis 5 jours déjà, les échanges permettent de faire le bilan de 40 années de lutte, de donner un nouveau souffle et de nouvelles perspectives à la plus grande organisation paysanne du pays.
Les débats sont principalement axés sur des enjeux de la souveraineté nationale [1] et abordent des sujets comme l’insertion des femmes, l’avenir des jeunes, l’accaparement des terres, le tout rythmé par des chants et des danses locales [2].
Un défilé haut en couleur et en revendications
A midi, les marcheurs s’élancent sur la route de Hinche, fermée pour l’occasion, en chapeaux de paille et en T-shirt rouges. Les riverains, attirés par la musique et enthousiasmés par l’ampleur de la mobilisation, emboîtent le pas aux militants en liesse et scandent en chœur les slogans. Lutte contre l’exclusion sociale, renforcement des mouvements paysans et défense de l’agriculture vivrière et de la souveraineté nationale : dans les rangs, les revendications sont aussi fortes que la détermination des marcheurs. Alors que la moitié de la population active travaille dans l’agriculture [3], seuls 50% des besoins alimentaires sont couverts par la production nationale. En moyenne, les paysans détiennent 1 hectare de terre à cultiver.
La principale demande porte donc sur la mise en place d’une réforme agraire, basée sur des pratiques agroécologiques [4]. Celles-ci favorisent la rotation des cultures et visent à supprimer l’emploi d’engrais chimiques et l’utilisation de semences hybrides ou OGM.
La sécurisation des terres pour les exploitations vivrières est un enjeu majeur pour l’autosuffisance alimentaire dans le pays.
Un appel à la conscience citoyenne
14h. Les marcheurs arrivent place Charlemagne Péralte (Hinche) pour la déclaration finale.
Chavannes Jean-Baptiste appelle tous les citoyens à rester mobilisés et unis pour mettre fin à la dépendance alimentaire vis-à-vis de l’étranger. Il plaide pour que 15% du budget national soit consacré à la production de denrées agricoles autochtones et 10% à la protection de l’environnement.
Le directeur du MPP préconise de planter 50 millions d’arbres chaque année afin de reboiser les sols dénudés et dégradés.
Le discours se clôt sur les remerciements aux organisateurs du congrès et aux 1875 délégués d’organisations paysannes du monde entier venus prendre part aux débats.
Une résistance internationale
Ce congrès aura été l’occasion de croiser les enjeux, tant au niveau national qu’international et d’évoquer les difficultés auxquelles sont également confrontés les agriculteurs brésiliens, boliviens ou péruviens.
Les échanges entre paysans alimentent la solidarité internationale et renforcent les poches de résistance au modèle agricole-industriel dominant. Le défi est grand mais des liens sont tissés durablement pour les prochaines années.
Le Mouvement paysan Papaye a été créé il y a 40 ans par Chavannes Jean-Baptiste, agronome haïtien. L’association regroupe aujourd’hui plus de 60 000 membres. Sa finalité est de promouvoir une agriculture innovante, adaptée aux petites exploitations haïtiennes et respectueuse de l’environnement.
Le MPP forme et soutient les paysans en leur donnant les moyens d’être acteurs et décideurs de leur avenir.
Cet article est paru dans Résonances, mensuel d’informations citoyennes réalisé par des jeunes militants : retrouvez ici les autres articles de ce numéro ou recevez Résonances chaque mois en vous abonnant. Pour des informations quotidiennes, venez découvrir notre page Facebook !
par Angelina Tessier, ONG Frères des Hommes
http://www.agoravox.fr/actualites/citoyennete/article/haiti-40-000-paysans-mobilises-135106
Une fenêtre ouverte sur Haïti, le pays qui défie le monde et ses valeurs, anti-nation qui fait de la résistance et pousse les limites de la résilience. Nous incitons au débat conceptualisant Haïti dans une conjoncture mondiale difficile. Haïti, le défi, existe encore malgré tout : choléra, leaders incapables et malhonnêtes, territoires perdus gangstérisés . Pour bien agir il faut mieux comprendre: "Que tout ce qui s'écrit poursuive son chemin, va , va là ou le vent te pousse (Dr Jolivert)
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