Que Haïti soit sans gouvernement pendant un moment plus ou moins long n’est pas choquant. On est même coutumier du fait. Et ce, à un point tel, quand il y a bien un gouvernement en place, la question c’est de savoir quand est-ce qu’il va « tomber ».
Là je me réfère bien entendu au gouvernement et non pas au poste de président de la République.
Après un passé marqué par des coups d’état, certains restent assez complaisants en observant des passassions de pouvoir successives après chaque mandat. Si l’on considère les dénouements des régimes politiques de 1986 à 2004, on comprend que certains peuvent parler d’une certaine stabilité.
Et l’institution responsable de cette situation n’est rien d’autre que la MINUSTAH dont la mission est essentiellement « contribuer à la stabilisation du pays ».
Cependant chaque quinquennat a toujours connu des crises gouvernementales. La liste des anciens premiers ministres est assez longue. La durée de vie d’un premier ministre en Haïti est plus courte que le temps de la crise qui prend naissance entre la démission ou révocation de l’ancien et la ratification du prochain.
Pourtant « les missionnaires stabilisateurs » de l’ONU ne voient pas le côté déstabilisant de cette situation. Ils se limitent à déplorer l’absence de gouvernement et applaudir la ratification du nouveau. Ainsi de suite.
De cette lecture on peut en fait déterminer que stabilisation pour la MINUSTAH signifie exclusivement une passation de pouvoir d’un président élu à un autre.
Depuis 2004, les crises ont souvent pris naissance au niveau des gouvernements avec un président jouant son rôle de chef d’Etat.
Aujourd’hui pour une fois la situation du pays est un peu différente.
Le gouvernement de Gary Conille a démissionné en février et depuis s’occupe des affaires courantes. Pendant ce temps un nouveau premier ministre est désigné et entame la longue et suspicieuse démarche de ratification.
Mais à la tête de l’Etat, il n’y a personne. Le président Michel Martelly après avoir été opéré d’une épaule dans un hôpital à Miami, aurait fait une complication identifiée par la présidence comme une embolie pulmonaire.
Selon les prescrits de la Constitution, en cas de vacances du chef de l’Etat, le chef du gouvernement assume ses fonctions. La Constitution n’avait certes pas prévu de provision dans le cas ou le chef du gouvernement aurait été démissionnaire.
Qui pis est, Monsieur Gary Conille a essayé de reprendre les commande du pouvoir exécutif en voulant réunir un Conseil ministériel. Son appel à été carrément boudé par les membres du gouvernement démissionnaire considérés proches de Martelly. Les membres du fameux cabinet rose.
En attendant on se demande qui dirige le pays ou s’accumulent des dossiers très brulants.
Tous les jours un nouveau problème, un nouveau conflit.
Dans un pays ou l’insécurité paralysent toute envie et une grande partie des activités, les forces de l’ordre locales, haïtiennes, rentrent en grève.
Les militaires démobilisés des anciennes Forces armées d’Haïti paradent à ciel ouvert dans une indifférence voulue et entretenue de façon maladroite par ceux qui tirent profit de cette situation ambigüe et inquiétante à la fois.
Maintenant s’ajoutent les doutes sur l’état de santé du président de la République. Ceux qui connaissent un peu l’histoire naturelle des maladies comprennent difficilement comme on peut faire une embolie pulmonaire après une intervention probablement endoscopique sur une épaule chez un individu de la cinquantaine.
On comprend moins encore comment un personnage de l’importance d’un président de la République, chez qui on pose le diagnostic d’embolie pulmonaire puisse monter dans un avion –un vol commercial-, sans assistance médicale pour aller se faire soigner.
Les suspicions sur l’état de santé réel du chef d’Etat trouvent du terreau fertile dans cette prise en charge scabreuse et non adaptée.
Cette semaine le chanteur de « konpa » devenu président à fait la couverture de Times Magazine avec ses amis le président dominicain Leonel Fernandez et le richissime Sénateur Felix Bautista. Une présentation dont les haïtiens en général ne sauraient être fiers.
Tout cela ajouté à la reconstruction qui ne démarre pas, au choléra qui continue à affecter la population, à l’approche des saisons de pluie et des cyclones.
L’avion continue de voler les cieux obscurs et incertains, sans pilote.
L’important ce n’est pas la destination, sinon le voyage lui-même, dit le renard !
Donc ne pensons surtout pas à la destination finale de ce vol
Bonne journée à tous.
Source AFHES http://www.afhes.org/
Une fenêtre ouverte sur Haïti, le pays qui défie le monde et ses valeurs, anti-nation qui fait de la résistance et pousse les limites de la résilience. Nous incitons au débat conceptualisant Haïti dans une conjoncture mondiale difficile. Haïti, le défi, existe encore malgré tout : choléra, leaders incapables et malhonnêtes, territoires perdus gangstérisés . Pour bien agir il faut mieux comprendre: "Que tout ce qui s'écrit poursuive son chemin, va , va là ou le vent te pousse (Dr Jolivert)
mardi 24 avril 2012
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