Journaliste à Radio-Canada, Florence Meney publie un premier... - image 1.0
Le plus étonnant, c'est que Florence Meney n'a jamais mis les pieds à Haïti. Elle ne connaît de cette malheureuse île que ce qu'elle a vu à la télévision et sur son ordinateur. C'est bien la preuve, comme disait Aragon, que la littérature est le règne du mentir-vrai.
Ceci dit, ce premier roman révèle une romancière prometteuse.
Le personnage central de Répliques mortelles est une journaliste de la télévision, Elsa, 37 ans. Talentueuse, impulsive et imprévisible, elle vit dans une maison ancestrale du vieux Boucherville avec son chien Bof.
Comme tout le monde, elle se pose des questions sur sa vie, sa famille, sa carrière, son avenir. Elle a couvert le séisme en Haïti, en 2010. Où sa mère, éducatrice bénévole dans un orphelinat, a trouvé la mort.
Deux années ont passé et elle vient de mettre la touche finale à une rétrospective faite de documents d'archives. Elle rêve de retourner à Haïti pour parachever cette rétrospective, mais c'est la jolie Ludovica qui est choisie.
Lors d'un visionnement privé chez son rédacteur en chef, Elsa met fin à sa relation avec Stéphane, son caméraman, un homme marié et père de deux enfants. Une relation qui avait commencé deux ans plus tôt, à Haïti.
Quelques heures plus tard, Stéphane est retrouvé mort dans une salle de montage.
L'inspecteur-chef Dupin, un flic français débarqué vingt ans plus tôt de sa Bourgogne natale, mène l'enquête. Avec compétence, mais rugosité.
À partir de là, l'histoire va de rebondissement en rebondissement. En passant notamment par Sherbrooke, où un brillant chirurgien s'était porté volontaire en Haïti, et par Boston, où un couple d'Américains a de la misère avec un petit Haïtien, Nathan, qu'ils ont adopté deux ans plus tôt.
Adopté? Pas vraiment, ils l'ont acheté...
Q Ainsi, Florence Meney, c'est votre premier roman?
R Oui, je commence dans le métier. J'ai travaillé fort pour écrire ça. J'ai encore des choses à apprendre. Ce roman est très perfectible, mais j'ai eu beaucoup de plaisir à l'écrire. Je voulais mener une intrigue qui se tienne. Je suis imprégné du roman noir, du thriller. J'ai toujours voulu en écrire un... un qui soit de moi... Le prochain sera peaufiné.
Q Vous avez choisi Haïti pour toile de fond. Y êtes-vous déjà allée?
R Non, jamais. Mais des Haïtiens m'ont dit qu'ils s'y étaient retrouvés... les odeurs... les couleurs. C'est incroyable, non?
Q Pourquoi Haïti?
R Je voulais que le destin individuel tragique de mon héroïne ait pour toile de fond un grand événement collectif tragique. Au quotidien, dans mon travail, j'ai été touchée par le séisme en Haïti. Je suis chef de pupitre web à Radio-Canada et on a mis en ligne un gros dossier sur Haïti. Toute une partie du livre est directement transposée de la réalité. Mais attention, ce n'est pas un documentaire sur Haïti. Il y a aussi un regard sur le journalisme.
Q En effet, vos personnages posent un regard critique sur le journalisme tel qu'il est pratiqué à la télévision. Ils disent que l'information est devenue racoleuse et toujours plus axée sur le commercial et le résultat instantané. Vous-même, êtes-vous d'accord avec eux?
R C'est une tendance lourde à laquelle moi-même je ne suis pas trop assujettie parce que j'ai des rédacteurs en chef qui sont éclairés. Plus on vous donne des moyens techniques et plus vous avez le choix de faire de l'instantané ou de respirer... Chez nous, à Radio-Canada, on peut encore respirer.
Q Dans votre roman, j'ai trouvé que ça prenait un peu de temps pour entrer dans le vif du sujet.
R Oui, c'est possible... je ne sais pas... J'ai peut-être trop voulu définir mes personnages... Ce doit être une erreur de débutante.
Q Votre personnage principal, Elsa, vous ressemble-t-il?
R Je la vois dans ma tête, cette Elsa. C'est un mélange de plusieurs personnes que je connais, y compris moi. Peut-être que je visualise trop les choses, que je pense beaucoup trop par image.
Q J'ai été dérangé par votre obsession sur les marques : la Yaris bleu électrique, les luxueuses bottes Geox, la télé HD Sony 54 pouces, le manteau Kanuk, l'eau de Cologne Roger & Gallet, etc. Était-ce bien nécessaire de mentionner toutes ces marques?
R C'est drôle ce que vous dites parce que je ne suis pas une fille qui s'intéresse aux marques. J'ai l'impression que ça situait mieux mes personnages.
Q Votre livre est écrit avec une touche française. Vous employez des mots et des expressions qui n'ont pas cours ici. Comme appeler une enfant ma poulette ou ma cocotte. Ou dire : il y va fort sur la bibine, son année de fac, la robe de chambre en pilou...
R Écoutez, je suis française d'origine. Ce mélange, c'est moi. Mon père m'a relu et mon éditrice, aussi. Mais j'ai réussi à garder l'essentiel.
Q Votre père, c'est Lionel Meney, le réputé linguiste qui a rédigé le Dictionnaire Québécois français?
R Oui.
Q Jusqu'à présent, Répliques mortelles a été bien accueilli par la critique. Qu'est-ce que vous en espérez?
R Qu'il me donne confiance pour continuer à écrire. L'avoir terminé, déjà, ça m'a donné confiance. Ce que je veux faire, c'est écrire. Je veux me dépasser sur le plan de la langue, sur le plan du style.
Q Combien de temps cela vous a-t-il pris pour l'écrire?
R Sept mois. Mais ça a cogité beaucoup plus longtemps dans ma tête. Quand je me suis mis à l'écrire, je ne partais pas de zéro.
Q Avez-vous un deuxième roman en projet?
R J'ai deux projets de livres. Un roman qui sera un suspens, mais pas un truc à dénouement. Ce sera une histoire de haine et de manipulation. Ça se passera au Québec... Et un essai sur les animaux. J'adore les animaux, les chiens en particulier. Un essai sur la relation homme-chien. Je vais l'écrire en collaboration avec Jacques Galipeau, un dresseur à Varennes qui a une approche humaniste.
http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/arts-et-spectacles/livres/201201/22/01-4488302-florence-meney-meurtre-derriere-la-camera.php
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