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jeudi 28 octobre 2010

L'Artibonite tient le coup

La vie reprend timidement à Drouin, la plus touchée des 11 localités de Grande Saline, qui a vu enterrer, en moins d'une semaine, 73 de ses enfants. Comme dans tout le département de l'Artibonite, l'épidémie de choléra se stabilise. Les gens ne meurent plus dans ce coin du département, où désormais les habitants ont peur de vivre. Haïti: Depuis trois jours, on ne compte plus de morts au centre de santé de Drouin. Les cas de contamination vont aussi au ralenti dans cette localité de Grande Saline où le vibrio cholerae a été, le premier, découvert dans le département de l'Artibonite. « Je peux enfin respirer, soupire Jean Emmanuel Thibert, ambulancier du ministère de la Santé publique (MSPP) affecté depuis vendredi au centre de santé de Drouin. Jusqu'à hier lundi, personne d'ici n'a eu droit au repos tant les cas de contamination se multipliaient. Maintenant, ils ne viennent plus au même rythme depuis dimanche. »
Grâce à la mise en place de cliniques mobiles à travers les localités les plus enclavées de Grande Saline, la distribution massive d'eau et de produits traitants et surtout la mobilisation communautaire qui s'intensifie dans les 11 localités de cette commune, les cas de contamination ont baissé. « Plus d'une dizaine d'ONG sont arrivées sur le terrain », explique Jean-Robert Délivrance, maire adjoint de Grande Saline. Ces organisations apportent l'aide nécessaire afin d'aider les autorités à venir à bout de la maladie qui a entraîné la mort de 73 Saliniens et plus de 280 dans les deux départements affectés.
« La mobilisation communautaire a donné beaucoup de résultats », fait remarquer le maire adjoint. Les voisins du fleuve sont de plus en plus réceptifs des messages véhiculés autour des risques encourus par les utilisateurs de cette eau contaminée, il y a une semaine, par des bactéries d'origine non encore connue. Les règles d'hygiène semblent aussi y avoir été observées. « Ils ne fréquentent plus les canaux d'irrigation ni le fleuve », dit l'édile de Grande Saline, qui pense déjà à la réhabilitation du seul cours d'eau de sa commune.
« Les habitants risquent de mourir si l'eau doit être désaffectée pour longtemps, s'inquiète Jean-Robert Délivrance. Notre agriculture, la cuisson de notre nourriture, notre breuvage et celui de notre bétail, notre bain, tout dépend du fleuve. »

Opération portes fermées.
Jusqu'à présent, aucune activité n'est encore reprise à Drouin. Les portes des maisonnettes sont verrouillées, les écoles et les boutiques sont fermées. « Nous nous attelons à rouvrir les classes lundi, dit Estama Murat, directeur de l'Ecole méthodiste Etzer Vilaire. Mais, de toute évidence, ce ne sera pas chose facile. Car certains de nos élèves ne se relèvent pas encore de la maladie ; d'autres ont eu des parents décédés, d'autres encore ont quitté la zone. »
M. Murat explique que les habitants de Drouin ont cru à une calamité de source diabolique à l'apparition de la maladie. Ils ont fui leurs maisons pour se réfugier aux Gonaïves et à Saint-Marc, les deux plus grandes villes du département de l'Artibonite.
Des 350 écoliers qui fréquentaient son établissement scolaire, M. Murat ne s'attend pas à revoir la moitié. Car, dit-il, le village est encore sous le choc.
Pour favoriser l'accueil des écoliers, les autorités sanitaires, avec le concours de partenaires étrangers, ne lésinent pas sur la distribution de produits traitants dans les écoles. Pure Water for the World travaille à l'installation de filtres d'eau en vue de faciliter la vie à la population. 300 filtres sont déjà disponibles, selon Noelle Thabaut, l'un des responsables de Pure Water.
En dépit des multiples rencontres et de promesses du gouvernement, la mairie se trouve encore dans l'incapacité de venir à bout de ses responsabilités vis-à-vis de la population. « La mairie serait heureuse de prendre en charge certains membres du personnel médical en déplacement, mais nous ne disposons pas de ces ressources », dit M. Délivrance
La magie de la mobilisation communautaire
La mobilisation communautaire, c'est le maître mot qui a pu aider les autorités sanitaires à reprendre confiance, en dépit du fait que la maladie tend à se propager dans d'autres régions du pays. Le maire adjoint de Grande Saline le croit, à l'instar de Agma Prins, chef de mission du projet Santé pour le développement et la stabilité d'Haïti (SDSH) implémenté par Management sciences for health (MSH), qui encourage les acteurs à ne pas abandonner la campagne de sensibilisation enclenchée. « Ce sera dangereux pour la population si on ne poursuit pas avec la campagne, dit-elle. Car la population se déplace à l'intérieur du pays et les gens infectés peuvent constituer des risques de propagation des bactéries à travers les endroits sains. »
Lima Soirélus
lsoirelus@lenouvelliste.com
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=85106&PubDate=2010-10-27

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