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vendredi 19 octobre 2007

Les Haïtiens mangent trop gras

Dans la cuisine haïtienne, le gras est consommé sous diverses formes et en forte proportion. La consommation poussée en huile comestible et aliments riches en graisses animales prédispose aux maladies cardio-vasculaires, selon des nutritionnistes.
« La cuisinière a utilisé en une semaine un gallon d'huile pour faire la cuisine, c'est vraiment incroyable ! », s'étonne une Québécoise en mission humanitaire à Saint-Marc depuis tantôt deux ans. La coopérante se dit étonnée de voir à quel point les femmes haïtiennes utilisent de l'huile en grande quantité pour la cuisson des aliments. « Partout en Occident, le gras est consommé en faible quantité, dit-elle.

Chez nous par exemple, un gallon d'huile dure facilement trois mois. Et nous sommes quatre à la maison. »Beaucoup d'Haïtiens consomment en effet d'incroyables quantités d'huiles comestibles et des aliments riches en graisse animale. Outre l'huile végétale déversée en grande quantité dans la chaudière pour la cuisson des céréales et des haricots, on y ajoute - afin de rendre la nourriture plus appétissante - de la graisse d'origine animale comme le lard, le beurre, le fromage et la manthèque.
Un arsenal de lipides solides et liquides qu'on retrouve généralement dans les différents plats qui garnissent la table : le riz aux haricots, la gratinée, la friture, sans oublier les sauces. Cette habitude alimentaire s'observe dans les ménages tout comme dans le secteur de la restauration formelle et informelle.
D'ailleurs, certaines personnes exigent même de leur cuisinière un repas riche en gras. C'est à ce compte qu'ils se sentent bien dans leur assiette. « Chez moi, quand on cuisine le spaghetti, j'aime voir glisser dans l'assiette quelques gouttes d'huile », se réjouit un jeune homme rencontré dans un petit restaurant à Delmas. Questionné à ce sujet, Jean Ernst St-Fleur, professeur de nutrition à la Faculté d'Agronomie et de Médecine vétérinaire (FAMV), croit qu'il s'agit d'une mauvaise perception sociale. « Beaucoup d'Haïtiens assimilent un excès de poids à la prospérité. Dans leur tête, plus on est bien en chair, plus on est prospère. »
En fait, les aliments riches en graisses ont un effet direct sur le corps. Avec le temps, l'excès de graisse s'accumule dans les tissus, parfois au point de les rendre malades, surtout chez les gens qui ne pratiquent aucun exercice physique.
Par contre, d'autres n'aiment guère ces nourritures baignant dans la graisse. Ils sont cependant souvent obligés d'en consommer. C'est le cas de beaucoup d'employés des institutions publiques et privées et de nombreux citoyens qui passent le plus clair de leur journée au centre-ville. Dans le secteur de la restauration par exemple, le gras domine sans conteste. Cette réalité a, selon l'ex-colonel Himmler Rébu, nutritionniste et professeur de culture physique, de sérieuses répercussions sur la santé. « La consommation poussée de lipides est très mauvaise pour l'organisme», dit-il. Les lipides dans les aliments ne sont pourtant pas mauvais en soi. Du grec lipos qui signifie «graisse», les lipides sont nécessaires au maintien d'une bonne santé. Ils contribuent à la formation des membranes des cellules, à la synthèse des hormones et donnent de la saveur aux aliments. Ils représentent une source importante d'énergie.

Le consommateur reçoit 9 kilocalories par gramme de lipides, soit deux fois plus que les glucides ou les protéines. De plus, les lipides constituent des vecteurs importants pour certaines vitamines, notamment les vitamines A, D, E, K que seules les graisses peuvent dissoudreLe problème, c'est l'utilisation exagérée qu'on en fait. Trop de graisse concourt à la formation de maladies cardio-vasculaires. La consommation abusive du gras animal bouche les pores des cellules, contrarie la circulation du sang au niveau des artères et favorise un taux élevé de cholestérol dans l'organisme. Le cholestérol est certes indispensable dans le fonctionnement des cellules, mais son excès nuit sérieusement. Pire. Quand l'huile végétale est recyclée constamment dans la cuisson, la porte est ouverte aux maladies du coeur et des vaisseaux sanguins.
A une certaine température, l'huile comestible devient même toxique pour la santé. « Plus on mange de graisses recyclées, plus on s'empoisonne », affirme le nutritionniste Rébu. Et c'est là la grande inquiétude de beaucoup de citoyens avisés. L'usage d'huile recyclée est monnaie courante en Haïti avec les marchandes de fritures rencontrées à chaque coin de rue. Mais aussi avec les petits détaillants qui sillonnent les rues avec leur chaudière apportant la nourriture aux citoyens pour un prix dérisoire. Pour les marchandes de frites, rien ne se perd : pâtés, acra, viande...
Elles font frire toute la garnison, dans un même récipient.
L'huile recyclée est conservée pendant plusieurs jours et souvent est utilisée à d'autres fins, notamment pour la cuisson à la maison.La consommation poussée en huile végétale et en graisse animale nuit à la santé, c'est un fait aujourd'hui avéré. Il est donc important d'en contrôler l'usage qu'on en fait. Trop de graisse est souvent synonyme de moins de grâce.
Jean Max St Fleurtmaxner@yahoo.fr
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=49874&PubDate=2007-10-16

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