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jeudi 11 août 2011

La presse haïtienne est-elle trop négative et le président Martelly a-t-il tout à fait tort?

PORT-AU-PRINCE, 7 Août – Le président Michel Martelly reproche à la presse haïtienne de n'être pas seulement critique, mais également trop négative et de faire ainsi du tort à l'image du pays.

Nos médias se braquent et accusent le président d'arbitraire et de pouvoir représenter une menace pour la liberté de l'information.
Un dialogue de sourds, c'est à dire qui ne dit pas toute la vérité sur la question.
1 : La presse est-elle négative dans son traitement de l'actualité nationale ?
2 : Le président a-t-il le droit d'avoir son opinion comme tout citoyen ?
3 : Michel Martelly a-t-il par contre le droit de chercher à influencer la presse jusqu'à déclarer quels sont ses médias préférés, divisant ainsi délibérément la presse entre médias pro-Martelly (sous-entendu méritant les faveurs du prince) et les anti-Martelly donc pouvant être éventuellement victimes du courroux présidentiel ?
‘Président de tous les Haïtiens' ( ?) …
Le président Martelly et le citoyen Martelly ne sont pas tout à fait une seule et même chose.
Le citoyen Martelly peut avoir ses préférences parmi les médias, ainsi que ses amis. C'est humain, comme on dit. D'autant que sa longue carrière de musicien l'y prépare.
Mais une fois qu'il parle en qualité de chef de l'Etat, le président Martelly est soumis à ce qu'on appelle : l'obligation de réserve. C'est pas par hasard qu'on dit ‘président de tous les Haïtiens.'
Tout comme il n'a pas le droit de parler de la Radio-Télévision Nationale d'Haïti (RTNH) comme de son bien propre. C'est un média public et de service public, qui est financé avec des fonds de l'Etat haïtien, donc appartenant à toutes les catégories de la population comme de la classe politique. Et il n'y a que sous les régimes totalitaires que le chef de l'Etat peut dire : ‘L'Etat c'est moi !'
Ceci dit, est-ce que la presse haïtienne présente une mauvaise image d'Haïti ?
On ne peut le cacher, la réponse est oui. Et pour toutes sortes de raisons, dues autant au manque de formation qu'à une concurrence médiocre entre une trop grande quantité de radios et de télévisions pour un marché publicitaire exigu …
Haïti comme laboratoire ! …
Mais due aussi à une certaine influence internationale qui (il y a quelques années) s'est livrée sciemment à une manipulation des jeunes journalistes haïtiens comme pour tester les nouvelles armes de conquête (et d'agression) internationale que sont la désinformation et la déstabilisation, en amenant les jeunes confrères haïtiens à les utiliser contre leur propre pays. Haïti comme laboratoire !
Nous payons aussi aujourd'hui le prix de ces expériences malhonnêtes.
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Des chiens savants …
C'est un mélange assez complexe à la fois de chômage qui pousse de nombreux jeunes à entrer dans une branche quelconque sans aucune intention d'en faire une profession, cela joint à une explosion de la bande FM (puis des stations de télévision) lancées dans une concurrence acharnée pour les quelques rares commanditaires de la place, avec pour conséquence qu'on ne prend plus le temps pour la formation du personnel et que celui-ci se complait vite dans sa médiocrité 'triomphante', véritables chiens savants car en effet les nouvelles technologies sont censées remplacer toutes les années qu'on peut passer sur les bancs de l'université ou dans un centre de training. Du moins le croient-ils!
Mais le dernier gadget électronique ne peut vous apprendre à faire la différence entre un simple incident et un grand événement.
De plus nous vivons, ne l'oublions pas, dans un pays à plus de 60% d'analphabètes. Et où environ le tiers d'une population de 10 millions d'âmes se trouve concentré à la capitale.
Ensuite, de soi-disant instituts de sondage poussent à cette même tendance au nivellement par le bas. A cette guerre à forte dose contre la qualité. Encourageant donc nos médias au moindre effort.
Charité bien ordonnée commence par soi-même! …
Par conséquent ce n'est pas tant (ce n'est plus) une volonté délibérée de salir l'image du pays dont il s'agit, ce n'est pas une intention politique (sauf peut-être chez certaines publications paraissant à l'extérieur du pays), mais c'est pour beaucoup d'entre nous parce que ne sachant faire autrement. C'est aussi simple que cela.
Cependant est-ce au président Martelly qu'il revient d'apporter une correction au problème?
Mais d'abord le président a-t-il le droit d'avoir son avis sur la question? Absolument oui. D'autant qu'il s'attribue la mission de lutter contre la mauvaise image du pays. Sur tous les fronts. Extérieur (par ses voyages incessants à l'étranger) et intérieur aussi, bien entendu, charité bien ordonnée!
Cependant le président Martelly adresse très mal la question en en faisant un instrument polémique. Allant jusqu'à afficher ses préférences au niveau des médias eux-mêmes. C'est la meilleure façon évidemment de ne pas se faire suivre.
Non à l'auto-déstabilisation! …
Non, c'est à la presse haïtienne qu'il revient de prendre elle-même la question en main.
La semaine dernière, même pour annoncer l'approche de la tempête Emily que les prévisionnistes de TV5 doivent dire 'la maudite Haïti'!
Ou quand on lit dans Le Monde ou Le Figaro: 'évidemment c'est moins dangereux qu'en Haïti, en Irak ou en Afghanistan.'
Et comment parler de la famine qui fait rage actuellement en Somalie sans oublier de mentionner Haïti!
Est-ce qu'on doit continuer à apporter de l'eau au moulin de cette déstabilisation dont on sait qu'elle est fort intéressée?
Et aujourd'hui encore continuer à nous déstabiliser nous-mêmes alors que nous en payons les conséquences!
Haïti en Marche, 7 Août 2011
http://www.haitienmarche.com/articledelasemaine.php?completedate=2011-08-08

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