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mercredi 7 novembre 2007

Le cadeau des écrivains








Du 5 au 10 novembre, la deuxième édition de la Rentrée littéraire se déroulera dans les écoles, universités, librairies et bibliothèques. M. Willems Edouard, initiateur de la Rentrée littéraire en Haïti et directeur général des Presses nationales, nous parle du bien-fondé de l'initiative et des caractéristiques de l'édition 2007 qui se déroulera sous le thème : "La rencontre des générations". Il entrainera dans son sillage une dizaine d'écrivains par les quartiers de la capitale, de Bourdon à Fontamara, de la rue d'Ennery à Carrefour-Feuilles, de Carrefour à Delmas. Contrairement à Noel, les créateurs haïtiens apporteront des cadeaux au public. Par-delà le vent et l'eau, suivez-les. A la lettre.
Frankétienne, le pape du spiralisme.

Le Nouvelliste : Vous faites une expérience de publication de livres depuis quelques années qui dévoile d'autres aspects des buts de l'institution que vous dirigez. Est-ce un des objectifs des Presses nationales ?

Willems Edouard : Il faut se référer au décret du 4 avril 1983 portant sur les ressources financières des Presses nationales. La liste inclut des livres. De là à souligner que l'ancêtre des Presses nationales était l'imprimerie de l'Etat, il n'y a qu'un pas à faire. L'imprimerie de l'Etat a joué un rôle prépondérant dans les publications qui ont marqué l'histoire littéraire du pays. René Depestre y a publié "Gerbe de sang" et "Etincelles". Il y a donc une raison touchant à la tradition littéraire haïtienne et à une référence légale. Les Presses nationales d'Haïti, depuis ma nomination à la tète de cette importante institution, veulent jouer un rôle actif dans la promotion du livre et de la lecture en Haïti. Cependant, elles renouent avec la tradition sur une base programmatique et éditoriale. Ce n'est plus un client qui vient pour une publication. Nous avons un programme défini et un projet éditorial.
Louis Philippe Dalembert, auteur de L'autre face de la mer.

L.N. : Comment définissez-vous ce projet éditorial ?
W.E. : Nous nous engageons à rééditer des classiques de la littérature haïtienne, nous rapatrions des oeuvres d'auteurs haïtiens contemporains édités à l'étranger et nous publions des livres d'auteurs étrangers qui mettent Haïti en scène, son histoire et sa culture. En fait, le projet éditorial, c'est la promotion de la production littéraire haïtienne et la sauvegarde du patrimoine de créativité et d'analyse scientifique du pays.

L.N. : Y a-t-il des procédures spécifiques suivies par l'institution au sujet de ces publications ?
W.E. : On ne publie pas à compte d'auteur. Ce n'est pas la situation financière de l'écrivain qui va déterminer sa publication. C'est son talent. J'achète aussi des droits des auteurs et des éditeurs. On a travaillé avec Gallimard, Grasset, Actes Sud, Edition Hors Commerce, Edition Payot, Mercure de France, Edition Dapper et du Canada Courte Echelle, Edition du Marais.
L.N. : Vous avez innové avec les « Rentrées littéraires » depuis l'année dernière. Quelles ont été les caractéristiques de la première édition ?
W.E. : Elle a eu un effet d'annonce et a été bien accueilli. Le mot Rentrée Littéraire n'était pas dans nos habitudes. La Rentrée littéraire a été retenue par le quotidien Le Matin comme l'un des événements littéraires de l'année 2006. La réaction du public a été positive. Des lecteurs ont retrouvé des livres rares, disparus ou introuvables. Notre projet éditorial se fait en regard du programme officiel de littérature haïtienne. Les textes d'auteurs retenus se vendent très bien.
Lyonel Trouillot: plaisir du corps et mémoire.

L.N. : Parlez-nous de l'édition 2007 de la Rentrée littéraire.
W.E. : Elle se déroulera du 5 au 10 novembre avec une quarantaine de titres. Il y aura des écrivains étrangers invités, ceux de la diaspora haïtienne, des écrivains de l'intérieur et des classiques réédités.
L.N. : Parmi les classiques, pouvez-vous citer quelques auteurs et des titres ?
W.E. : « Coeur des Iles » de Ida Faubert, premier recueil de poèmes publié par une femme haïtienne; le premier roman féminin haïtien : « Cruelle destinée » de Cléante Valcin; les trois premiers romans haïtiens « Francesca » (1873), « Le damné » (1873) de Demesvar Delorme, « Une chercheuse » (1888) de Louis Joseph Janvier. Il faut citer aussi « Canapé vert » de Phillipe Thoby Marcelin et Pierre Marcelin.
L.N. : La littérature haïtienne est représentée par qui à cette rentrée ?
W.E. : « L'Amour avant que j'oublie » des Editions Actes Sud de Lyonel Trouillot, « La gravitante » de Janine Tavernier, « Au chevet des fenêtres », poèmes, de Michael Mondésir, « Mots d'ailes en infini d'abîme » de Frankétienne, « Le coeur à haute voix » de Josué Cazeau, jeune poète qui collectionne des prix de 2000 à 2007, « Etrangère de nulle part » de Monique Mesplé Lassale.
L.N. : On a remarqué qu'une des caractéristiques de la Rentrée littéraire est d'aller vers le public à travers des institutions de proximité.
W.E. : Nos faisons cela pour rendre le livre plus accessible à la majorité et maintenir le cap d'une parole plus familière autour du livre. Les conférences autour du livre se tiendront dans les bibliothèques de proximité avec l'objectif de porter les jeunes à s'intéresser aux livres et à la littérature. C'est le cadeau de la Rentrée offert par les Presses nationales.
L.N. : On a constaté que cette année il n'y a pas de livre en créole.
W.E. : Il y a eu Lea Kokoye ak lòt odians de Maurice Sixto, Plidetwal et Blengendeng bleng de Georges Castera. Nous avons pour 2008 un vaste projet de publication des fictions en créole avec les grosses pointures de la littérature haïtienne.


Jean Euphèle Milcé de la génération des années 90.

L.N. : Que peut-on dire pour les essais ?
W.E. : Les essais de la première édition étaient Le sacrifice du Tambour Assotor et Analyse schématique de Jacques Roumain, « Le livre de l'Esclave », une réflexion sur l'esclavage et la traite des nègres d'Ottobah Cugoano. « L'histoire littéraire et le littéraire haïtien », un texte à partir des actes du colloque de Jacmel en décembre 2004, est l'essai de la Rentrée 2007.
L.N. : Il y a une boulimie d'événements autour du livre alors que les statistiques sur la lecture n'ont pas bougé d'un cran.
W.E. : C'est de bon augure et cela s'effectue suivant les aléas du calendrier. Les événements littéraires qui n'ont pas de caractère commercial ont du succès. Notre projet éditorial concerne l'encouragement des jeunes à intégrer l'espace littéraire. Nous faisons la promotion des jeunes talents. Le Prix Justin Lhérisson de la nouvelle a été gagné par Cynthia Bastien avec « Les mendiantes du soleil ». Cette année, Josué Cazeau et Michael Mondésir sont au programme de la Rentrée littéraire.
L.N. : Comment se répartira le programme ?
W.E. : Des écrivains seront en signature dans les écoles et universités, dans les librairies et les bibliothèques. Ils seront aussi en causerie avec le public. Cela pour écarter la vision mortifère de l'écrivain défunt. Ils ne sont pas toujours morts. Ils prendront contact avec le public en vue de provoquer un effet de modèle et de stimuler la vocation littéraire. La Rentée 2007 sera marquée par des conférences sur l'économie du livre et le droit d'auteur.
L.N. : Quels sont vos espoirs ?
W.E. : Que l'opération Rentrée littéraire soit pérenne. Il faut que les Presses nationales d'Haïti ne soient plus l'unique éditeur à travailler suivant un programme de publication. Nos éditeurs doivent avoir un projet éditorial, un catalogue. C'est le pari que lancent Les Presses nationales d'Haïti aux éditeurs haïtiens.
Propos recueillis par Pierre Clitandre

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