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vendredi 8 février 2008

CARNAVAL 2008...La publicité envahissante

L'identité des groupes se perd sous le flot grandissant de logos publicitaires. Même les carnavaliers irriguant par vagues les bandes à pied n'ont pu éviter le chant des sirènes du marketing. Agressif.

Le carnaval 2008 de la commune de Port-au-Prince baptisé « Rale mennen vini pou yon Ayiti vèt » a coûté cinquante millions de gourdes au trésor public. 21 chars musicaux, 15 chars allégoriques, 300 groupes déguisés ont animé le parcours durant les trois jours gras. Le paysage des jours gras a donné l'occasion aux sponsors de divers groupes de mettre en valeur les logos des produits consommés sur le marché local.
La concurrence faisait rage au point que certains chars ont priorisé sur leur surface disponible de larges espaces publicitaires au détriment de leur propre identité. De vastes logos de compagnies téléphoniques comme Voilà, Digicel recouvraient les chars.

Les logos du populaire riz Tchako, de riz Mega, de Voilà, de Digicel, de Bongù, de la pâte alimentaire Pasta Mama et autres s'étalaient avec ostentation sur la devanture des chars.Des groupes ont préféré ne pas faire figurer leur nom au profit de la publicité de leurs sponsors.
C'est à peine si certaines inscriptions indiquant le nom d'un groupe étaient visibles. « C'est quel groupe, maman, c'est Tchako ? » La mère devine, prête l'oreille avant toute réponse.Autrefois, le nom des ensembles musicaux était bien visible. A présent, ce qui identifie le groupe, pour les habitués, est : le style de la musique, le timbre du chanteur. Nul égard pour le spectateur désireux d'identifier le groupe qui arrive. Nul égard pour des milliers d'Haïtiens de la diaspora et d'étrangers venus se défouler au carnaval.Un marketing agressifUne anecdote. Un Haïtien de la diaspora demande à un autre : « Sur quel char ton frère et toi étiez montés pendant les deux jours gras ? » La réponse fuse : « Je suis monté sur le char Digicel et mon frère sur Voilà. »

Black Alex confie que c'est parce qu'il n'a pas trouvé de publicités alléchantes que son nom s'installe aussi grandement sur le devant de son char. Chemin faisant, il se lamente de la piteuse qualité de sonorisation de son groupe qui a coûté la bagatelle somme de « cinquante mille dollars américains. »
Voilà est parti à l'assaut de la Tour 2004. Le poster géant dominait l'avenue de la République. La publicité sur écran géant a été diffusée pendant les trois jours à un rythme non stop. Du haut de la Tour 2004, sur la façade du bâtiment de Air France, au stand de la Unibank, les messages défilaient.
Les stands qui, autrefois, portaient l'accent sur des motifs ayant rapport au carnaval, mettaient tout le paquet sur la publicité. Cependant, on notera qu'à côté de cet aspect, les stands de Voilà, de Digicel, de OAVCT, de CAM transfert ont retenu l'attention du public.

Beaucoup de carnavaliers se sont mis à la remorque des entreprises publiques et privées misant sur la publicité tous azimuts. Par vague, des gens portant T-shirt frappé au logo de X ou Y institution se frayaient un passage ou se trémoussaient dans la foule. Dans les bandes à pied, toute une colonie de carnavaliers mêlés aux musiciens des groupes véhiculaient des messages publicitaires. Les acteurs du carnaval, remarquent certains observateurs, se sont donnés vraiment sur une petite portion du parcours. Celle-ci est comprise entre le Palais national et le Rex Théâtre.
L'installation des grandes chaînes de télévision et de stations de radio dans cette partie du circuit, ont-ils constaté, est à la base de ce manque d'animation sur les 3,8 kilomètres du parcours officiel.La publicité dans le carnaval de cette année traduit le fait que nous sommes déjà à l'ère du marché. Nerf de la guerre, l'économie joue un rôle déterminant dans la réalisation des festivités. Certains pensent que l'aspect culturel devait être mis en exergue pour une meilleure présentation publique de cette grande manifestation annuelle.
Claude Bernard Sérant
serantclaudebernard@yahoo.fr

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