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lundi 9 janvier 2012

Un État à reconstruire

Mélissa Guillemette 7 janvier 2012
Il n'y a pas que les maisons qui sont à reconstruire en Haïti, il y a aussi toute l'administration publique. Les ministères, des bâtiments institutionnels et des mairies se sont effondrés le 12 janvier 2010, effaçant la mémoire d'un État déjà fragilisé.
L'image du palais national effondré, magnifique bâtisse du patrimoine haïtien, a marqué les esprits. Il est toujours en morceaux, comme tous les bâtiments publics ayant été détruits.
Avant même le séisme, les analystes parlaient de Haïti comme d'un État à reconstruire. Problème de ressources humaines, faiblesses dans l'organisation et les politiques, disait-on. Le séisme a porté un coup de plus, des plus forts, sur l'administration haïtienne.
«La gravité du séisme a mis à nu l'état de délabrement des structures et des institutions du pays; l'État, qui était déjà démissionnaire», analyse Marc Prou, directeur de l'Institut haïtien de l'Université du Massachusetts, à Boston.
Aujourd'hui encore, des fonctionnaires doivent rester à la maison, faute de nouveau lieu de travail. Plusieurs d'entre eux ont d'ailleurs quitté l'administration publique pour travailler pour les organisations non gouvernementales (ONG) arrivées au pays après le séisme, aggravant les problèmes de ressources humaines au sein de l'État.
Il faudra du temps pour que les institutions reprennent le travail à plein régime, car les dégâts sont plus importants que le simple matériel. «L'administration a été très secouée; pas parce qu'il y a eu énormément de morts dans la fonction publique, mais surtout parce que les archives ont disparu, explique le rédacteur en chef du journal Le Nouvelliste, de Port-au-Prince, Frantz Duval. Il n'y a pas eu ce souci de récupérer ce qui pouvait être récupéré» dans les décombres.
Certaines institutions, par exemple le ministère de l'Éducation nationale ou celui de la Santé publique, ont pu maintenir un certain roulement ces deux dernières années, aidées par des donateurs internationaux qui ont injecté des fonds d'urgence.
Au lendemain du tremblement de terre, les autorités haïtiennes affirmaient vouloir profiter de l'occasion pour réformer certains secteurs de l'administration et pour renforcer les institutions du pays.
Mais la campagne électorale et les élections de cette année ont ralenti le tout. D'ailleurs, près de huit mois après son arrivée en poste, le président Michel Martelly n'a pas encore déposé son premier budget.
Pourtant, la reconstruction de l'État est la clé pour la reconstruction de tout le reste, estime Roromme Chantal, ancien fonctionnaire de l'ONU en Haïti et chercheur à l'Université de Montréal.
La reconstruction de bâtiments administratifs et gouvernementaux attire moins les donateurs internationaux, mais est cependant nécessaire pour assurer la reconstruction de tout le pays.
L'une des meilleures façons de renforcer l'État haïtien serait de faire transiter l'argent de l'aide internationale par l'État haïtien plutôt que par les ONG, croit M. Chantal. «On la fait transiter par les ONG pour éviter la corruption, mais même si c'est en partie justifié, ça empêche la communauté internationale d'atteindre un objectif important qu'elle s'est fixé: celui de contribuer à remettre l'État haïtien en état de fonctionnement.»

Haïti n'est pas à l'abri d'un autre puissant séisme
Selon un reportage de l'émission Découverte de Radio-Canada, Haïti, situé à la rencontre de deux plaques tectoniques, pourrait vivre un autre séisme plus fort que celui du 12 janvier 2010. Dans une portion du reportage diffusée jeudi, l'équipe de Découverte indiquait que les sismologues ont d'abord fait erreur en affirmant que la grande faille Enriquillo, au sud de l'île, avait déclenché le séisme. Des recherches ont démontré que la responsable est plutôt la petite faille de Léogâne. Ainsi, la faille Enriquillo continue à «emmagasiner de l'énergie», ce qui pourrait annoncer un autre séisme à venir. Un reportage sur le sujet sera diffusé à l'émission de dimanche.

Dates marquantes
12 janvier 2010
Un séisme de magnitude 7 frappe la Perle des Antilles. L'épicentre se trouve à une dizaine de kilomètres de la capitale, Port-au-Prince. La ville est détruite à 75 %. Près de 217 000 personnes perdent la vie. La moitié de l'économie du pays s'effondre. Près de 2000 soldats canadiens sont rapidement déployés en Haïti.

Hiver 2010
Le Canada s'engage à verser une aide de 400 millions de dollars à Haïti, en plus du fonds de 220 millions financé à moitié par les dons des Canadiens.

31 mars 2010
Au sommet de New York sur la reconstruction de Haïti, les chefs internationaux s'engagent à verser 5,5 milliards de dollars avant la fin de 2011. À ce jour, seule la moitié des fonds a été versée.

Automne 2010
Une épidémie de choléra fait plus de 2500 morts et 115 000 cas ont été recensés.

Décembre 2010
Des violences éclatent à la veille et au lendemain de la divulgation des résultats largement contestés du premier tour de l'élection présidentielle.

16 janvier 2011
L'ex-dictateur haïtien Jean-Claude Duvalier rentre au pays, après 25 ans d'exil en France.

17 mars 2011
L'ex-président haïtien Jean-Bertrand Aristide revient au pays, sept ans après son exil en Afrique du Sud.

4 avril 2011
Les électeurs ont choisi Michel Martelly comme nouveau président. Promettant une «ère nouvelle», ce chanteur populaire nouveau en politique incarne le changement.

7 janvier 2012
500 000 personnes ayant perdu leur maison vivent toujours dans des camps temporaires.
Avec l'AFP
http://www.ledevoir.com/international/actualites-internationales/339787/un-etat-a-reconstruire

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