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dimanche 15 août 2010

La pression de l'impression

Publié le 15 août 2010 à 05h00
Jean-Simon Gagné, Le Soleil
(Québec) Parfois, la première impression est la bonne. Surtout lorsqu'elle est mauvaise.
Par exemple, si vous avez l'impression que les gens parlent beaucoup de la pluie et du beau temps, vous n'avez peut-être pas tort.
Selon un sondage effectué récemment en Grande-Bretagne, les Britanniques passeraient 49 heures par année à discuter de météo. Au cours d'une vie, cela représente six mois complets!
Les deux tiers des Britanniques feraient connaissance de cette manière. Et c'est seulement après qu'ils passeraient aux questions sérieuses. Du genre : pourquoi Tarzan n'a jamais de barbe? ou pourquoi il n'existe pas de nourriture pour chats à saveur de souris?
Je blague, évidemment. Après avoir discuté de la météo, tout le monde sait que les gens corrects écoutent les discours songés du député de Beauce, Maxime Bernier, sur la nécessité de se méfier des beaux parleurs, des démagogues et des gens qui échafaudent des théories économiques sur tout et sur n'importe quoi. Bref, sur la nécessité de se méfier des gens comme lui, finalement.
«En théorie, il n'y a pas de différence entre la théorie et la pratique, disait Yogi Berra. Mais en pratique, il y en a.»
Parfois, la première impression est la mauvaise. Surtout lorsqu'elle est bonne.
Par exemple, si on nous propose d'écouter l'histoire d'un toboggan ou celle d'un python, il paraît que nous serons plus nombreux à choisir celle du python. Les experts en publicité ont échafaudé plusieurs théories étranges sur le sujet. C'est pour ça qu'il y aurait autant de pubs télé avec des lézards ou des hippopotames qui ont l'air plus humains que n'importe lequel d'entre nous.
Mais ne dévions pas du sujet. Nous choisissons donc l'histoire du python, et nous avons tort. Une anecdote, sans plus. Ça se passait à Rome, mercredi. En effectuant une perquisition, la police italienne est tombée sur un python albinos de trois mètres, qui gardait un paquet de cocaïne. Les policiers ont amadoué l'animal en lui offrant un poulet entier. Fin de l'histoire.
En revanche, l'affaire du toboggan apparaît plus inquiétante. Le personnage central s'appelle Steven Slater. Un agent de bord. Ou plutôt, un ancien agent de bord. Car lundi, au terme d'un vol entre Pittsburgh et New York, Slater en a eu assez de répéter aux passagers qu'il faut rester assis tant que l'avion ne s'est pas immobilisé.
Quand une valise lui est tombée sur la tête, gracieuseté d'un passager ayant mal refermé son compartiment à bagages, Slater a craqué. Il a bondi sur le téléphone de bord pour invectiver les passagers. Puis il a actionné le système de toboggans qui permet de sortir d'urgence d'un avion.
Steven Slater a pris deux bières au passage - pour la route, comme on dit - et il est sorti en glissant sur un toboggan.
Le colérique Slater a été renvoyé. Il risque sept ans de prison, «pour avoir mis la vie d'autrui en danger».
Mais en attendant, il est devenu un héros. Des dizaines de milliers de personnes lui ont écrit pour assurer qu'elles l'imiteraient, si seulement elles trouvaient le courage.
Pour reprendre une expression célèbre, il ne s'agit peut-être que de la pointe de l'asperge. En tout cas, si j'étais grand patron, je commencerais à m'inquiéter des sondages qui révèlent que plus de la moitié des gens sont malheureux au travail...
On a beaucoup parlé de la première impression. Mais parfois, c'est pire : il n'y a pas d'impression du tout.
Prenez les inondations qui ravagent actuellement le Pakistan. Le quart du pays a été touché. On dénombre 14 millions de sinistrés. Plus de 260 000 bâtiments auraient été endommagés.
Pourtant, on ne sent pas le moindre élan de solidarité, de ce côté-ci du monde. Rien à voir avec le tremblement de terre de janvier, en HAITI.
Il est vrai que le Pakistan n'a pas très bonne réputation. Le plus souvent, le pays est décrit comme une base arrière des talibans et d'Al-Qaïda.
Trop loin. Trop compliqué. Alors Céline Galipeau n'ira pas animer le Téléjournal sur les lieux. Et il n'y aura pas de gentils artistes québécois qui vont organiser un téléthon.
Le rap d'Islamabad, qui voudrait brailler là-dessus?
Sans jouer sur les mots, cela pourrait créer une mauvaise impression.
http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/opinions/chroniqueurs/201008/14/01-4306608-la-pression-de-limpression.php

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