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jeudi 6 mars 2008

ADIEU MANNO

Plus de dix mille personnes debout pour la sonnerie au mort exécutée par la fanfare du Palais national, au moment où Philippe Vorbe et ses coéquipiers de la sélection de 1974 accompagnaient la dépouille vers le corbillard, Haïti a offert un dernier hommage, à l'un de ses plus dignes et récents héros de l'histoire, Emmanuel Sanon. Dix mois après avoir reçu le titre de « Commandeur » honneur suprême fait à quelqu'un en Haïti, Philippe Vorbe, Jean Claude Désir dit « Tom Pouce », Guy François, Marion Léandre, Wilner Piquant, Wilfrid Louis, Guy Saint-Vil, Ernst Jean Joseph, Gérard Bobby, Serge Ducoste se trouvaient réunis une nouvelle fois au Stade Sylvio Cator où ils ont inscrit quelques unes des plus belles pages de l'histoire du football haïtien en compagnie du disparu.

Jean Claude Désir "Tom Pouce", René Argélus, Philippe Vorbe, Raphael Pierre, Ernst Jean-Joseph, Eddy Antoine, Guy St-Vil, Pierre Bayonne, Mario Léandre, Wilfrid Louis, Evans Lescouflair, Emmanuel Sanon Jr, Jacques Deschamps Fils (ex-président du Don Bosco , ex-vice président du Violette et du Comité Provisoire de la FHF) et Guy François.

Devant la dépouille d'Emmanuel Sanon reposant dans un cercueil marron recouvert du drapeau national, le président de la République , René Garcia Préval, le Premier ministre, Jacques-Edouard Alexis suivi de son cabinet, les représentants des deux chambres, les délégations représentant la majeure partie des clubs de D1 et de D2, les élèves représentant la majeure partie des Lycées et de quelques collèges de la capitale ont défilé avec des mines de circonstance. Les uns, la mine contrite, d'autres avec une pointe d'étonnement devant lee visage de celui dont ils ont tant entendu parler, et quelques-uns un peu étonnés par le décor un peu surréaliste du stade cherchaient à savourer chaque minute du moment.

Selon des informations non confirmées par l'intéressé, c'est M. Evans Lescouflair qui avait la responsabilité de s'occuper de cet aspect. En fait, il a réalisé un décor digne de l'évènement, car le fait qu'Emmanuel Sanon soit, le 2e athlète Haïtien de toute l'histoire de ce pays à avoir des funérailles nationales laissaient une porte ouverte à un manque d'expérience dans ce domaine. Après Sylvio Cator, Emmanuel Sanon est ce 2e athlète à avoir les honneurs des funérailles nationales et il est le premier footballeur haïtien à être honoré de cette manière.

« Mèsi Prezidan Preval paske gras a rekonesans seleksyon 74 la te jwenn nan menw lane pase, Manno fèm konnen kel rive wè kèk jou anplis », passeur lors du but d'Emmanuel Sanon face à l'Italie en 1974, Philippe Vorbe, la voix émue, les yeux embués, souligne l'importance de cette reconnaissance nationale que les héros de Munich avaient reçu en mai 2007, après avoir défini le caractère de l'homme qu'on honorait pour une dernière fois, dix mois plus tard. La reconnaissance de mai, selon beaucoup, a été un acte méritoire du gouvernement Préval et il a servi à réconcilier ces héros frustrés d'avoir été bafoués, floués par des dirigeants sans scrupules et sans honte.

« La réparation doit continuer » a, pour sa part, déclaré, le Président de la Fédération Haïtienne de Football, M, Yves Dadou Jean Bart, avant de préciser en substance qu'il faudra accompagner le football national pour que le pays continue par ses résultats à honorer la mémoire de ce grand homme.
Pour souligner le départ de cet homme qui a marqué l'histoire du club « jaune et noir », un représentant du Don Bosco, a remis, la tunique flanquée du dossard 10, à Mme Sanon avant d'annoncer officiellement que plus jamais personne ne portera ce dossard au Don Bosco vu qu'il y restera comme un patrimoine d'Emmanuel Sanon.
Sanon est parti sans voir se concrétiser son rêve le plus cher, car selon son ancien condisciple au Lycée de Pétion-Ville, son ancien coéquipier au Don Bosco de Pétion-Ville et remplaçant en sélection nationale, Raynald Devilmé : « Emmanuel Sanon nourrissait un rêve, celui de voir une nouvelle sélection haïtienne senior représenter son pays dans une autre phase finale de Coupe du Monde ».
Sans parler, la mine grave, le président René Gracia Préval s'est contenté de se recueillir devant la dépouille de l'homme qu'il a contribué a réconcilier avec son peuple, sous les yeux d'Emmanuel Sanon Jr, Jean Marc Sanon, Sarah Sanon (l'un des fils d'Emmanuel Sanon, Steeve Sanon ayant eu un empêchement) et Mme Suzie Sanon qui ont suivi les dépouilles de leur père et mari au cours de ces funérailles nationales.
10h07 du matin, treize mille personnes debout, Philippe Vorbe accompagnés de ceux qui ont écrit l'épopée de 1974, se dirigent, au son de l'hymne au mort, vers la porte sud-ouest du Stade Sylvio Cator, portant la bière contenant le corps de leurs anciens coéquipiers en sélection, Emmanuel Sanon part définitivement vers sa dernière demeure. Dehors, les badauds s'accumulent de part et d'autres de la rue pour essayer de voir une dernière fois le corbillard contenant le cercueil de celui qui a motivé autant de déplacement, de l'homme qui par son coup de rein fantastique, sa pointe de vitesse phénoménale, son pied gauche magique a inscrit le nom d'Haïti en lettres d'or dans l'histoire de la Coupe du Monde. La foule est dense et il est difficile d'aller plus loin derrière cet homme qui marquera les esprits è jamais, alors il ne reste qu'à dire avec ce vieillard qui dit l'avoir vu jouer en 1971 : « Adieu Manno »
Enock Néré
nenock@yahoo.com


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