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mercredi 12 décembre 2007

L'ENTRETIEN DE MADAMEMIRLANDE MANIGAT ACCORDE A MONSIEUR ROBERT BENODIN DE RADIO CLASSIQUE INTER: DEUXIEME PARTIE

RB : Le CEP n’ayant pas été formé jusqu'à présent, force le pays au seuil d’une dangereuse crise institutionnel.
L’article 111.8 de la Constitution de 1987 se lit comme suit :
ARTICLE 111.8: En aucun cas, la Chambre des députés ou le Sénat ne peut être dissous ou ajourné, ni le mandat de leurs membres prorogé.
Il est évident qu’au 14 janvier 2008, le tiers du Sénat plus un, n’étant pas renouvelés, il sera impossible pour le Sénat d’avoir un quorum des deux tiers.
Quelles seront les conséquences de cette caducité pour la 48e législature ?
MHM : Il n’y aura pas de caducité immédiate au deuxième lundi du mois de janvier 2008. Parce que le quorum nécessaire pour former l’Assemblé Nationale, c’est la majorité plus un. Et là il suffit qu’il y ait 16 sénateurs et qu’il y ait 51 députés pour qu’on ait une Assemblée Nationale. Parce que d’après la Constitution, c’est en Assemblée Nationale qu’on ouvre la session. Si ce quorum n’était pas atteint, car le quorum va être terriblement fragilisé, Il suffira que quatre sénateurs ne se présentent pas aux diverses sessions. Nous ne voulons pas être oiseau de mauvais augure. Il suffirait que trois sénateurs tombent malade, ou affichent une maladie diplomatique et qu’un quatrième se trouve en voyage et ne soit pas rentré à temps, pour qu’on n’ait pas le quorum au Sénat, le quorum de 16. A ce moment là le deuxième lundi du mois de janvier 2008, il n’y aura pas d’Assemblée Nationale.
Maintenant, l’article 111.8 parle d’une décision qui est impossible. A savoir que le président déclare, la Chambre des députés ou le Sénat sont ajournés ou que leur mandat est prorogé. Mais là, il ne s’agira pas de proroger leur mandat. Proroger leur mandat ce serait de dire par exemple que les dix sénateurs qui ont eu un mandat de deux ans, on prolonge leur mandat pour quelques mois. Il est impossible de le faire.
D’autant, il y a un point auquel les gens n’ont pas suffisamment fait attention, peut être par manque d’information. Dans la vie de l’histoire parlementaire haïtienne, ce n’est pas la première fois qu’une session ne s’ouvre pas à la date constitutionnelle prévue. Et le Moniteur est rempli d’appels des bureaux des deux chambres qui demandent, à l’approche de chaque début de session, aux députés et aux sénateurs de venir s’inscrirent. S’ils ne viennent pas, et le jour constitutionnel prévu, ceux qui se présentent doivent constater qu’il n’y a pas de quorum. On convoque pour deux jours plus tard, toujours pas de quorum, une semaine après pas de quorum. Dans la vie parlementaire haïtienne ce ne serait pas la première fois qu’une session ne commence pas, voir une législature ne commence pas, à la date constitutionnelle prévue.
Mais il y a quelque chose qui s’est passée l’année dernière à laquelle les gens n’ont pas suffisamment fait attention. Après que les sénateurs et les députés sont entrés effectivement, non pas le deuxième lundi du mois de janvier, ils sont entrés beaucoup plus tard. Le deuxième lundi du mois de mai, ils ont implicitement fermé la première session. Car ils ont ouvert une session extraordinaire. Ils sont entrés en session extraordinaire. Or la session extraordinaire ne prend naissance que lors qu’il y a eu une session ordinaire. Dans la mesure où ils ont fermé la session, ils ont ouvert une session extraordinaire, puis après quelques jours, ils ont fermé la session extraordinaire. Et le deuxième lundi du mois de juin ils ont ouvert une nouvelle session, c’est que implicitement eux-mêmes ont accepté que la première session s’est déroulée normalement. C’était un geste qui n’était pas voulu dont les conséquences n’étaient pas simplicités. Mais qui signifie quoi ? Ce qui signifie, que pour les députés et les sénateurs, la première session a eu lieu. Donc, ils ont accepté que la législature de la chambre des députés, a commencé a la date constitutionnelle prévue.
Donc, je profite de souligner ce que je souligne toujours à l’attention de mes compatriotes que les sénateurs ne sont pas liés par une législature. La législature s’entend seulement de la durée du mandat des députés qui est de quatre ans. Le mandat des sénateurs est de six ans. Quand on dit les sénateurs de la 48e législature par exemple, ceci est impropre. Les sénateurs ne sont pas liés par des sessions. Le sénat est permanent.
Quand on dit que la première session a lieu, ça signifie dans l’histoire parlementaire, quand il s’agira de parler de la 48e législature, on sera obligé de constater que cette législature aura eu sept sessions et pas huit. Car la première session ne s’est pas ouverte à la date prévue. Elle a été conclue et fermée et une session extraordinaire s’est ouverte.
Donc, si vous voulez, le dysfonctionnement du Sénat, dont on parle tellement, que l’on craint, n’interviendra pas nécessairement le deuxième lundi du mois de janvier. Le dysfonctionnement du Sénat interviendra, si le deuxième lundi du mois de janvier et si après on se rend compte que faute de quorum les sénateurs ne peuvent pas se réunir parce qu’ils n’ont pas de quorum. C’est ça.
Le quorum va être très fragilisé, car ils seront 19. Ils sont 29 maintenant. Remarquez que ça arrive plus souvent du coté de la chambre des députés que du Sénat. On ne peut se réunir a la chambre des députés parce qu’il n’y a pas de quorum. Or c’est un absentéisme qui est presque voulu, car ils sont très nombreux. Ils sont 99, et le quorum est de 51. Tandis que pour les sénateurs le quorum est de 16. C’est la moitié plus un. Ils étaient 29. Parfois ils ne se réunissaient pas. Mais en ce qui concerne la situation qui va être créée, ils seront 19. Donc quatre sénateurs manquant et le Sénat devient dysfonctionnel.
Le dysfonctionnement du Sénat ce n’est pas l’affaire d’un moment. Ce n’est pas l’affaire d’un jour. Ce serait spectaculaire, si le deuxième lundi du mois de janvier, on n’a pas les 16 sénateurs présents. Mais le dysfonctionnement peut se révéler un événement chronique, après. Si le Sénat n’arrive jamais à se réunir, ou se réunit une fois sur cinq. Tout simplement, parce qu’on fait l’appel nominal une première fois, il n’y a pas de quorum, une demi-heure après on fait l’appel nominal, il n’y a pas de quorum, la troisième fois on constate qu’il n’y a pas de quorum, et à ce moment là le président est obligé de renvoyer la séance. Si ça devient chronique, on parlera de dysfonctionnement.
Cependant ce sera un moment crucial que le deuxième lundi du mois de janvier, on n’ait pas de quorum. Car on verra précisément quelle sera l’attitude des sénateurs. Il y en a qui disent, je constate que je ne suis plus en fonction je me retire. Il y en qui dise que : « wè pas wè » le deuxième lundi du mois de janvier ils seront présents. Il y a des députés qui acceptent la première hypothèse. Il y a des députés qui disent qu’ils n’accepteront pas des sénateurs qui auront eu un mandat de deux ans.
Voilà une situation qui est lourde, lourde de virtualités conflictuelles. Et ces virtualités, nous parlions de contrôle tout à l’heure, elles peuvent se révéler incontrôlables, et débouchées sur une crise parlementaire.

RB : Il est évident que votre décision de ne pas participer à la 48e législature n’a laissé personne indifférent. Pour répondre à certaines critiques, vous avez évoqué les fraudes dans le comptage des voix, et par-dessus de marché, vous avez avoué avoir repéré trois ou quatre occasions, qui vous auraient porté à démissionner de cette législature. Quelles sont elles ?

MHM : Je n’aurais pas démissionné de la législature. Encore une fois je le dis, la notion de législature ne s’applique pas au Sénat.
Vous savez depuis ces élections de l’an dernier, je me suis abstenue de dire quoi que ce soit contre le Sénat. J’observe comme citoyenne, comme tout le monde. Mais je n’interviens pas précisément pour que les gens ne disent pas, voyez si vous étiez là, peut être que les choses seraient différentes. D’abord je ne le crois pas. Car je suis assez lucide, pour ne pas admettre que la présence d’une seule personne, pourrait faire un changement.
Je vais vous donnez un seul cas. Le cas qui me parait le plus mineur. Lorsque le secrétaire Général des Nations Unies était venu en visite en Haïti, en visite officielle, et les sénateurs ont refusé de le recevoir. Voilà un cas. Car j’estime que le Sénat organe de l’Etat ne peut pas refuser de recevoir le Secrétaire Général des Nations Unies. Il est un personnage important. Il est en visite officielle. Il avait annoncé qu’il viendrait au Sénat. Finalement sa visite a été un peu escamotée. Mais le Sénat avait décidé de ne pas le recevoir, à cause d’un incident qui s’était produit entre la Minustah et un sénateur. J’ai estimé pour ma part que si j’étais là, non seulement j’aurais manifesté mon désaccord profond et peut être ça m’aurais porté à me retirer. Parce que j’estime que ce n’était pas sérieux. C’est comme si la présidence de la République refuserait de recevoir un personnage comme le Secrétaire Général des Nations Unies. D’autant qu’il y avait des choses. Il y avait tout un cahier de charges, des reproches à adresser à la Minustah, en profitant de la visite du Secrétaire Général. J’estime que vous ne pouvez pas avoir eu cette opportunité exceptionnelle, qui serait certainement médiatisée de recevoir le Secrétaire Général, pour qu’avec toutes les formes diplomatiques requises, vous lui fassiez part de vos griefs, de vos reproches, de vos suggestions etc. J’ai estimé pour ma part, que ce n’était pas sérieux. Ce n’était pas normal. Je vous donne un cas pour lequel vraiment les journalistes m’avaient demandé d’opiner. Je n’ai pas opiné. J’estimais que les gens pourraient dire que si j’étais là, j’aurais fait ceci ou cela. Si j’étais là, j’aurais fait entendre ma voix publiquement pour exprimer mon désaccord. Mais ça n’aurait pas changé les choses. Puisque ils avaient décidé, je crois, à la majorité, si non la totalité des sénateurs s’étaient prononcés dans ce sens. Les souvenir sont un petit peu lointain. Je m’abstiens de donner trop de précision. Voilà un cas qui m’avait paru vraiment énorme. Le manque de sagacité politique, le manque de raisonnement politique, et le manque de forme.

(A suivre)

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