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lundi 13 août 2007

Qui a intérêt dans un éventuel départ brusque et prématuré de la MINUSTAH?

Les déclarations se multiplient au sein d'un certain nombre de partis politiques pour réclamer la formation au plus vite d'une nouvelle force armée et le non renouvellement du mandat de la "mission de l'ONU de stabilisation d'Haïti (MINUSTAH), considérée aujourd'hui comme trouble-fête et brebis galeuse.
D'autres formations politiques peut-être plus intelligentes, tout en ayant les mêmes objectifs, parlent plutôt de retrait programmé et graduel de la mission onusienne.
Cependant, certains secteurs et personnalités, des responsables de la MINUSTAH en tête, affirment que les partisans d'un retrait immédiat avant même une réelle stabilisation du pays, sont une minorité non représentative qui tient un double langage.
Des autorités onusiennes affirment même que la MINUSTAH ne quittera pas Haïti avant la construction d'un avenir solide et que la communauté internationale ne financera la constitution d'aucune nouvelle force armée puis qu'il y a déjà une police en construction qui sera capable de garantir la sécurité de la population au départ des casques bleus.
Déjà la semaine dernière, lors de la visite du secrétaire général Ban Ki-Moon, le président René Préval déclarait que la présence de la MINUSTAH est encore nécessaire et dénonçait la démagogie de ceux qui réclament le départ de la MINUSTAH sans le vouloir réellement.
Mais le discours des partisans réels ou virtuels d'un départ immédiat apparaît tranchant: il ne doit pas y avoir d'autres renouvellements de mandat pour la MINUSTAH après le prochain annoncé qu'ils souhaitent de 6 mois.
Il faut constituer, disent-ils, "une nouvelle force publique capable d'assurer la sécurité du pays pour qu'au départ des casques bleus, les chefs de bande des quartiers populaires ne puissent recommencer à semer la terreur".
Des questions se posent aussitôt:
Quels secteurs disposaient ou disposent encore d'armes de guerre ou d'armes illégales.
Et les réponses énumèrent:
-Les chefs de bandes des quartiers populaires
- Des GNbistes (opposants à Aristide)
- Des chimères (habitants des quartiers populaires réputés favorables à Lavalas)
-Des anciens militaires ayant gardé leurs armes après la démobilisation des Forces armées d'Haïti en 1995.
-Des secteurs du monde des affaires ayant acquis des armes pour protéger, ont-ils dit, leur business.
- Des responsables et membres du Front ayant pris les armes en janvier 2004 contre le gouvernement Aristide.
-Et des trafiquants et dealers de tous acabits.
Beaucoup estiment que plusieurs de ces secteurs pourraient avoir intérêt à voir changer le cours des choses, en cette période de lutte contre la corruption et la drogue, lutte encore timide, mais qui a l'air de n'épargner personne.
Cependant, de tous les groupes sus-cités, combien ont été désarmés, combien ont remis volontairement leurs armes ou ont commencé à les déposer.
A ce qu'on sache, seuls des chefs de bandes des quartiers populaires ont été désarmés arrêtés ou abattus au cours d'opérations conjointes MINUSTAH/police nationale.
Si toutes les armes des chefs de bandes des quartiers déshérités n'ont pas été récupérées par ces deux institutions, il y a encore pire: des secteurs ont gardé intact leur arsenal. Et si la MINUSTAH leur donne carte blanche, c'est qu'ils doivent, bien sûr, en avoir besoin pour assurer eux-mêmes leur sécurité dans les quartiers résidentiels.
Des soldats de la MINUSTAH sont accusé d'avoir commis de nombreuses violences lors de leurs interventions meurtrières dans les quartiers pauvres, tuant des innocents, femmes et enfants notamment à Cité Soleil. Ils sont accusés d'avoir commis des abus sexuels sur des jeunes filles mineures et détruit de nombreuses habitations.
On reproche aussi à la MINUSTAH son immixtion dans les différentes institutions sensibles du pays notamment la police et la justice.
Mais qui a appelé la force étrangère? Qui l'a fait venir en Haïti?
On se souvient que locaux et étrangers s'étaient opposés à la mi- février 2004 à l'envoi, avec l'adhésion de l'ONU, d'un groupe de soldats qui seraient issus de pays de la CARICOM, pour neutraliser des bandes armées qui cherchaient à renverser un gouvernement élu.
Cependant dans la plupart des milieux qui contestent aujourd'hui la présence de la MINUSTAH, personne ne trouvait scandaleux qu'une force étrangère intervienne en Haïti le jour même du départ forcé d'Aristide pour protéger un gouvernement non-élu, avant tout vote du conseil de sécurité.
De plus, les différents secteurs qui réclament le départ de la MINUSTAH ne le font pas pour les mêmes raisons.
Ce ne sont certainement pas les abus commis par des casques bleus ou "leur présidence sur le sol de Dessalines" qui dérangent. D'aucuns croient que c'est plutôt le peu de latitude laissé par la mission étrangère à certains secteurs qui pourraient encore rêver d'aventures sans lendemain.
Et la question de se poser: à qui pourrait profiter un départ prématuré de la MINUSTAH? Et les réponses suivre: A ceux qui conservent soigneusement leurs armes lourdes ? A ceux qui cherchent à obtenir la reconstitution des forces armées, cette force qui a toujours donné le pouvoir en Haïti jusqu'à l'élection d'Aristide le 16 décembre 1990, cette force qui a toujours protégé les pêcheurs en eau trouble.
Il y a certes des secteurs sincères qui considèrent comme une gifle cette nouvelle présence étrangère en Haïti.
Mais, on récolte ce qu'on a semé. Et c'est toujours ce qui arrive partout où l'on ne croit pas à l'alternance démocratique et aux élections comme voie pour arriver au pouvoir.
La MINUSTAH a encore du pain sur la planche. Et de concert, avec la PNH et la commission nationale de désarmement, elle doit poursuivre le processus de désarmement sans discrimination de zone et de personnalités, pour qu'au moment de son départ, nécessaire et incontournable, aucun secteur disposant d'armes illégales, ne cherchent à les utiliser pour tenter d'imposer sa loi et de s'accaparer du pouvoir.
Source
Agence Haitienne de Presse sur http://www.ahphaiti.org

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