Google

dimanche 24 octobre 2010

Les élections au temps du choléra

Haïti: Les inquiétudes, la panique et la tristesse suscitées en Haïti par le choléra sont justifiées avant tout par l'état déplorable de nos infrastructures et l'inefficacité légendaire des pouvoirs publics. Nous sommes un peuple, blotti dans la plus abjecte promiscuité organisationnelle, qui défie toutes les lois de la santé publique et de la bonne gouvernance. Dans ces conditions, le choléra, ou toute autre épidémie, est une menace collective qui doit être prise au sérieux par nous tous, gouvernants et gouvernés, riches et pauvres, au-delà de nos frontières intérieures.

Il est clair que la communication est incontournable dans ce combat contre un mal dont l'évolution et l'expansion dans un pays insalubre comme le nôtre peuvent perturber totalement la vie nationale dans tous ses aspects en entraînant des pertes massives en vies humaines. A cet égard, les élections pourront être reportées en cas de détresse nationale.
Soutenues par l'assistance internationale, les mesures annoncées par les autorités doivent être fermes et tatillonnes pour obtenir des résultats immédiats et définitifs. De quelle nature? De quel ordre ? Outre les méfaits répugnants de l'insalubrité, amplifiés par cette saison cyclonique active, l'exode rural apparaît chez nous comme une autre condition de propagation rapide du choléra.
Quelles sont les dispositions envisagées et appliquées pour freiner sa propagation à travers la mobilité des individus et le déplacement des groupes ? C'est une question on ne peut plus inquiétante lorsqu'on sait nos carences en matière de sécurité routière, de surveillance transfrontalière, de gestion et de prévention des risques et désastres, de contrôle du territoire. Lorsqu'on sait aussi que nos gouvernants, « criseurs » impénitents, ne sont pas de bons gestionnaires de crises et de catastrophes naturelles, on a davantage les tripes en bouillie et la tête en feu. En somme, même le déplacement des candidats et l'organisation de leurs meetings deviennent des activités à risque.
On ne peut pas assurément apaiser la peur collective, sans une gestion communicationnelle transparente. Mais on ne peut pas non plus combattre et prévenir les risques épouvantables d'épidémie sans de vigoureuses actions coercitives, environnementales, communautaires et sanitaires. Un rappel historique instructif peut nous éclairer en nous aidant à assumer, sans désemparer, notre destin face aux calamités de toutes sortes. Les tristes leçons du 4H (ancêtre du sida) au début des années 80, sous Jean-Claude Duvalier, méritent d'être rappelées ici. Les ravages sur l'image et le prestige de plusieurs générations d'Haïtiens ont été dévastateurs. Meurtri et avili, le pays tout entier en a souffert profondément. La gestion calamiteuse des autorités de l'époque a considérablement facilité et nourri la propagande internationale raciste et hystérique. Notre industrie touristique en est ressortie exsangue, hébétée, effilochée. Avec ses crises en cascade et ses dérapages sanglants, notamment l'inutile et néfaste coup d'État-embargo (1991-1994), cette longue quête de la démocratie a ruiné et pollué notre pays. On a aujourd'hui oublié ou fait semblant d'oublier les conséquences « sismiques » ou chaotiques du coup d'État-embargo qui a seulement enrichi un petit groupe de putschistes et d'aristidiens, mais la grande et seule victime est le peuple haïtien. Comme les précédents ouragans et autres catastrophes naturelles qui ont ponctué dramatiquement les vingt années de transition, le séisme désastreux du 12 janvier n'a pas été géré avec compétence par nos dirigeants.
Ce sombre retour en arrière est là pour nous fortifier - telle est mon intention véritable - dans nos efforts comme responsables dévoués et dans notre vigilance active comme citoyens. La tenue des prochaines élections dépend absolument de l'efficacité de cette synergie.
http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=84972&PubDate=2010-10-22

Aucun commentaire: