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mercredi 14 avril 2010

EN HAITI LES SANS ABRIS SOUS LA MENACE DES CYCLONES

Trois mois après le tremblement de terre qui a fait plus de 220 000 morts en Haïti, le relogement de plusieurs centaines de milliers de sans-abri reste le principal défi du gouvernement et des organisations humanitaires internationales. Brèves mais intenses, des averses tropicales ont transformé les campements improvisés en bourbiers la semaine dernière. Des tentes ont été emportées sur le terrain de golf du Pétionville Club, où s'entassent 50 000 sinistrés, dans la banlieue de Port-au-Prince.


COUTEUSE RECONSTRUCTION
1,3 million de personnes ont perdu leur habitation dans le tremblement de terre du 12 janvier qui a fait 220 000 morts.
11,5 milliards de dollars (8,4 milliards d'euros) : les besoins pour la reconstruction au cours des dix prochaines années, selon le gouvernement haïtien. Le séisme a fait des dégâts évalués à 120 % du produit intérieur brut haïtien de 2009.
9,9 milliards de dollars d'aide à la reconstruction ont été promis lors de la conférence des donateurs, le 31 mars, dont 5,3 milliards au cours des deux prochaines années.


Les pluies vont s'intensifier au cours des semaines à venir. Les météorologues de l'université d'Etat du Colorado (Etats-Unis) ont annoncé une saison cyclonique active à partir de juin. Reprises par les radios haïtiennes, ces prévisions annoncent quinze tempêtes tropicales et quatre ouragans majeurs dans la région caraïbe. L'Organisation météorologique mondiale s'efforce de reconstruire un système de veille et d'alerte météo. "L'arrivée de la saison des pluies constitue l'inquiétude principale car elles vont détériorer les conditions sanitaires", met en garde l'ONG Action contre la faim.
En voie d'installation à une quinzaine de kilomètres au nord de la capitale, le nouveau camp de Corail Cesselesse a reçu ses premiers habitants au cours du week-end des 10 et 11 avril. Volontaires, ils ont été évacués par bus depuis le Pétionville Club où ils s'étaient installés dans des zones menacées par les inondations et les glissements de terrain. Au total, plus de 7 000 personnes vivent "dans des zones à hauts risques", selon l'ONG Catholic Relief Services qui gère le camp installé sur le golf de Pétion ville.
Les autorités haïtiennes et les Nations unies prévoient de les reloger dans le camp de Corail au cours des dix prochains jours. Des tentes, des points d'eau et des latrines ont été installés dans le nouveau campement. L'ONG Vision mondiale y construira des "abris transitionnels". Dotés d'une charpente en aluminium, recouverts d'une toile ou d'une bâche, ces abris comptent deux petites chambres et un coin salon. Une école est en construction sur le site qui s'étend sur 7 450 hectares. Les familles pourront obtenir un lopin de terre pour cultiver un potager.
Beaucoup de temps a été perdu à la recherche de terrains pouvant accueillir les rescapés menacés par la saison des pluies, regrettent les ONG. Le décret présidentiel expropriant les terrains pour installer le camp de Corail n'a été publié que le 22 mars, laissant peu de temps aux agences internationales pour rendre habitable cette vaste étendue aride, parsemée d'épineux.
Le transfert au camp de Corail est la dernière des options proposées aux sinistrés. Plusieurs pourraient retourner dans leurs maisons épargnées par le séisme. Selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA), environ 40 % des milliers de maisons inspectées par des ingénieurs sont habitables.


Incidents
Traumatisés et craignant de nouvelles répliques, la plupart des habitants refusent d'y retourner. D'autres préfèrent rester dans les camps pour bénéficier des distributions d'aliments et des soins qui y sont dispensés. Pour décongestionner les camps de la capitale, les autorités incitent aussi les sans-abri à chercher refuge chez des parents ou des amis.
Des incidents se sont produits au cours du week-end lorsque la police a entrepris d'évacuer le stade Sylvio-Cator, le plus grand de la capitale, qui abritait plusieurs milliers de sinistrés. A la demande de la Fédération haïtienne de football, le directeur du stade, Rolny Saint-Louis, entend le remettre en état avant le premier match de la Coupe d'Haïti annoncé pour le 21 avril.
L'évacuation de plus de 10 000 sans-abri qui ont improvisé un camp dans le parc du collège Saint-Louis-de-Gonzague se heurte aussi à une forte résistance. Les responsables de cet établissement déplorent de n'avoir pu assurer la rentrée scolaire, prévue le 5 avril. L'ONG Médecins sans frontières y a installé un hôpital de campagne.
Mises en veilleuse par le tremblement de terre, les querelles politiques ont resurgi à la faveur du débat parlementaire sur la prolongation pour dix-huit mois de l'état d'urgence décrété le 12 janvier. La Chambre des députés l'a approuvée le 8 avril. Mais le débat s'annonce plus houleux au Sénat, qui devait examiner le projet de loi, mardi 13 avril.
Plusieurs partis ont condamné ce texte, qu'ils jugent "immoral et illégal". Ils critiquent la présence d'étrangers au sein de la commission intérimaire pour la reconstruction d'Haïti. La création de cette commission, coprésidée par le premier ministre haïtien, Jean-Max Bellerive, et l'ancien président américain Bill Clinton, a été décidée à la conférence des bailleurs de fonds, le 31 mars à New York.
Jean-Michel Caroit
http://www.lemonde.fr/planete/article/2010/04/13/en-haiti-les-sans-abri-sous-la-menace-des-cyclones_1332858_3244.html

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