Google

vendredi 14 décembre 2007

Haïti/Presse/Assassinat Lindor : 2 condamnations à perpétuité, mais mobile toujours inconnu

jeudi 13 décembre 2007
P-au-P, 13 déc. 07 [AlterPresse] --- Deux personnes ont été condamnées à perpétuité, une acquittée et une autre retenue pour une nouvelle instruction, le 12 décembre 2007, dans le cadre du procès sur l’assassinat le 3 décembre 2001 à Petit-Goâve (Ouest d’Haïti) du journaliste Brignol Lindor, mais le mobile du crime n’a pas été révélé, observe le Réseau national de défense des droits humains (Rnddh).
Jean Rémy Démosthène et Joubert Saint Juste, membres présumés d’une milice gouvernementale de l’époque, dénommée « Dòmi nan Bwa », sont deux des principaux accusés dans l’assassinat du Journaliste Brignol Lindor à être condamnés à perpétuité, après 2 jours de procès, en raison de leur participation à ce crime, selon le verdict prononcé par le juge Emmanuel Tataye.
« La montagne a accouché d’une souris », estime Vilès Alizar du Rnndh dans une interview accordée à l’agence en ligne AlterPresse.
Pour le responsable de programme au sein du Rnddh, - qui, en tant qu’organisme de droits humains luttant contre l’impunité, affirme disposer du recul nécessaire pour analyser les conclusions du tribunal -, la sentence prononcée ne comble pas les attentes sur plusieurs points relatifs à l’assassinat du journaliste Lindor.
La lumière n’est pas faite sur le mobile de l’acte ayant conduit à l’assassinat du journaliste Lindor le 3 décembre 2001. Alors que l’ordonnance de renvoi demande le jugement de 10 personnes présumées coupables, aucun gros bonnet n’a été cité.
Le Rnndh se réfère à Guy Paul, ministre de la culture et de la communication (mars 2001 – mars 2002), selon qui, à l’époque, Brignol Lindor a été assassiné « non comme journaliste, mais comme militant politique ».
N’ont pas été appelés, non plus, à comparaître les membres du conseil municipal de Petit-Goâve de l’époque, à savoir le maire Emmanuel Antoine et ses deux adjoints, Dumey Bony et Cimeres Bolière, qui avaient réclamé « zéro tolérance » pour Brignol Lindor dans une conférence de presse le 30 novembre 2001.
« Des acrobaties ont été utilisées pour écarter les gros bonnets et négliger la responsabilité de l’Etat » dans l’affaire Lindor, dénonce le Rnddh.
En outre, malgré une demande de « requalification » faite par le ministère public et la partie civile au procès des 10-12 décembre 2007, le tribunal a préféré parler de « meurtre », au lieu de « assassinat » qui renverrait au caractère de « crime d’Etat ».
Parmi les personnes jugées, au lieu de le citer comme témoin, l’instruction a noté le nom de Simon Cétoute, appréhendé en 2005 à la place de son fils décédé. L’ordonnance a évoqué le nom de Fritzner Doudoute à la place du supposé Fritznel Doudoute dont on découvrira par la suite qu’il s’agit de Lyonel Doudoute.
Il en ressort un questionnement sur le sérieux du travail accompli par le cabinet d’instruction dans le cadre de l’affaire Brignol Lindor, selon le Rnddh.
A signaler que les deux hommes, condamnés à perpétuité le 12 décembre, restent détenus à Petit-Goâve, mais pourraient bien être transférés au pénitencier national, la prison civile de Port-au-Prince.
Nouveaux éléments pour une nouvelle instruction
Le juge Emmanuel Tataye, en charge du dossier, a également décidé d’engager la procédure de contumace au cas où les personnes, contre lesquelles des mandats ont été émis, ne se manifesteraient pas.
Les individus concernés disposent d’un délai de dix jours (un délai de reddition allant jusqu’au 16 décembre 2007) pour se présenter au cabinet d’instruction. Dans le cas contraire, des poursuites seront engagées contre eux, selon les informations parvenues à AlterPresse.
Il a été décidé, lors de ce procès tenu à Petit Goâve, de l’ouverture, d’ici à la fin de la semaine, d’une nouvelle instruction sur la base de nouveaux éléments issus du procès déroulé à Petit-Goâve du 10 au 12 décembre 2007. La nouvelle instruction devrait donner lieu à l’audition d’autres témoins et de toute personne liée à l’assassinat du journaliste Brignol Lindor, témoins et autres qui n’auraient pas été interrogés au procès.
La famille de Brignol Lindor s’était constituée partie civile dans ce procès. Elle a toutefois émis, quelques jours avant le procès, des réserves fondées sur le fait que seulement 4 personnes sur 10 accusées sont jugées.
« Les deux condamnations à la réclusion criminelle à perpétuité sont proportionnées aux circonstances, particulièrement atroces, de l’assassinat de Brignol Lindor », écrit Reporters Sans Frontières (Rsf) dans un communiqué transmis à AlterPresse.
Néanmoins, souligne l’organisme de défense des Journalistes, une procédure complète, solide et réunissant tous les acteurs d’un dossier, constitue le préalable nécessaire à tout débat contradictoire, a fortiori dans une affaire de cette ampleur.
Reporters Sans Frontières doute fort « que l’injonction du doyen du tribunal civil de Petit-Goâve ait un effet persuasif sur les six miliciens inculpés et toujours recherchés. Leur arrestation doit intervenir rapidement ».
« Nous attendons surtout de savoir quel a été le degré d’implication de l’ancienne équipe municipale de Petit-Goâve dans l’assassinat barbare de Brignol Lindor », déclare Rsf dans ce communiqué.
Directeur de l’information de Radio Écho 2000, Brignol Lindor a été tué à coup de piques et de machettes, le 3 décembre 2001, à l’Acul, première section communale (Bino) de Petit Goâve.
Des membres de “Dòmi Nan Bwa”, une organisation proche du régime Lavalas de l’époque, avaient ouvertement revendiqué cet assassinat. [vs do rc apr 13/12/2007 13:00]
http://www.alterpresse.org/spip.php?article6756
Ndlr : Sur l’assassinat de Brignol Lindor, voir
http://www.alterpresse.org/spip.php ?article124

Aucun commentaire: