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samedi 12 juin 2010

Ruines, déshumanisation et, malgré tout, l'espoir

Mis à jour le 11 juin 2010 à 07h59
Le Nouvelliste

(Trois-Rivières) Annie Lafontaine et ses deux compagnes, Denise Caron et Marie-Cécile Ménard, sont de retour d'Haïti où elles ont été témoins de la vie déshumanisée que le tremblement de terre de janvier dernier a aussi provoquée. Malgré tout, les trois Trifluviennes y ont vu des signes d'espoir. Compte-rendu d'un séjour au coeur d'un immense bidonville.
Adjointe à la coordination au Comité de solidarité-Trois-Rivières, Annie Lafontaine pensait avoir une idée de ce qui s'offrirait à elle en débarquant à Port-au-Prince, le 26 mai dernier. Comme tout le monde, elle avait vu défiler à la télé ces nombreuses images du terrible séisme.
«C'est quand même secouant de voir avec nos yeux l'ampleur des dégâts», raconte celle qui a été aussi bouleversée de constater à quel point les Haïtiens, particulièrement les résidents de Port-au-Prince, sont laissés à eux-mêmes depuis quatre mois.
«C'est un grand bidonville. Les conditions de vie sont inhumaines», dénonce Mme Lafontaine qui raconte que les gens vivent toujours aussi nombreux sous des tentes de moins en moins étanches. Ils doivent supporter des températures oscillant autour des 40 degrés Celsius.
On dénombre environ un million de sans-abri à Haïti. Plus de 300 000 personnes ont péri dans le tremblement de terre.
«Presque toutes les maisons sont écroulées ou fissurées. Les gens ne travaillent pas. Plusieurs sont traumatisés par tous ces cris qu'ils entendaient sous les décombres. Ils ne peuvent pas tenir le coup encore longtemps comme ça», se désole la Trifluvienne qui était en Haïti pour accompagner les différentes organisations de la société civile haïtienne avec qui le Comité solidarité collaborait bien avant le tremblement de terre.
Pour Mme Lafontaine, il ne fait aucun doute que l'espoir de reconstruire le pays passe par ces groupes voués à la cause des femmes, à la défense des droits, etc.
Elle précise qu'ils ont des solutions à proposer, dont celle de décentraliser les services vers les villes et villages qui pourraient ainsi accueillir tous ces réfugiés à Port-au-Prince.
Annie Lafontaine ne cache pas cependant que le gouvernement en place se fait reprocher son inertie. De plus en plus d'Haïtiens pointent du doigt les autorités. «Ils demandent le départ de Préval. La tension monte. Il y en a qui parlent de révolution civile», dit-elle, à la fois compréhensive et inquiète devant cette réaction.
C'est pourquoi la représentante du Comité solidarité-Trois-Rivières parle de l'urgence de permettre aux organisations de la société civile haïtienne de participer aux discussions avec le gouvernement haïtien et la communauté internationale.
«On doit les appuyer. C'est maintenant que ça se joue. Le moment est critique», répète Mme Lafontaine avant de mentionner qu'il faut donner à ces associations la possibilité de travailler efficacement. «Elles sont très importantes sur le terrain. Elles représentent la majorité», poursuit-elle.
Annie Lafontaine indique que l'aide apportée au cours des deux dernières semaines par la petite délégation trifluvienne représente une minuscule goutte d'eau dans un océan.
«Nous étions là pour prendre connaissance de l'état des lieux et des besoins. Nous pourrions éventuellement relancer à Trois-Rivières un mouvement de solidarité. On espère que la population continuera de nous appuyer», souhaite Mme Lafontaine qui fait notamment état de l'augmentation de la violence faite aux femmes dans les camps de réfugiés.
«Les gens vivent à proximité les uns des autres. Il y a là-bas une perte de la dignité humaine», décrit celle qui a aussi visité Léogâne et Jacmel, deux autres villes durement touchées par le séisme.
«Nous sommes finalement allées au nord du pays où, malgré la grande pauvreté, les gens s'organisent», décrit Mme Lafontaine qui parle de cette «belle surprise» comme d'un baume sur toutes ces blessures qui marquent aujourd'hui Haïti.

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