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samedi 17 octobre 2009

Haiti-Alimentation : État d’urgence

vendredi 16 octobre 2009: Prise de position de la POHDH Document soumis à AlterPresse le 15 octobre 2009
La Plate-forme des Organisations Haïtiennes des Droits Humains (POHDH) déplore que les efforts déployés par l’Etat haïtien visant à assurer le droit à une alimentation adéquate de la population soient loin d’être suffisants. Du train où vont ces efforts, les objectifs du millénaire à l’horizon de 2015 ne seront très probablement pas atteints. A l’art.22 de la constitution de 1987, les législateurs constitutionnels ont fixé les obligations de l’Etat en matière d’alimentation et ont posé les fondements de ce droit. Ces obligations pourtant tardent à devenir une réalité dans la vie de la population.
L’Etat semble ne pas se sentir obligé face à ce droit. Et la conséquence est plus que dramatique. On ne le répétera jamais assez : manger est jusqu’à présent un luxe pour la plupart des couches de la population. En effet, en matière d’alimentation, une bonne fraction de la population est en situation de vulnérabilité, la plus grande tranche est déjà dans la dépendance et les crève-la-faim forment déjà une quantité non négligeable. Dans ces conditions, l’Etat ne remplit pas ses obligations constitutionnelles, n’honore pas ses engagements internationaux.
Eliminer la faim n’est pas un simple idéal noble. Assurer le droit à une nourriture adéquate et le droit fondamental d’être à l’abri de la faim sont une question de droit international, spécifiquement garanti dans un certain nombre d’instruments relatifs aux droits de l’homme. La Déclaration universelle des droits de l’homme (1948) proclame que « Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation (art. 25) ».
Près de 20 ans plus tard, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, adopté par l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations unies le 16 décembre 1966, et entré en vigueur le 3 janvier 1976, approfondissait ces concepts, en soulignant « le droit de toute personne à une nourriture adéquate » et en précisant « le droit fondamental de chaque être humain à être libéré de la faim ».
Quelle est la différenciation entre le droit d’être à l’abri de la faim et le droit à une nourriture suffisante ? Le droit d’être à l’abri de la faim est fondamental. Cela signifie que l’Etat a l’obligation de respecter, de garantir, au minimum, que ses habitants ne soient pas victimes de la famine. En tant que tel, ce droit est intimement lié au droit à la vie. Ce qui fait donc que l’Etat doit aussi faire tout ce qui est en son pouvoir pour encourager la pleine jouissance du droit à une nourriture suffisante pour chaque Haïtien - autrement dit, les gens devraient avoir un accès physique et économique, à tout moment, à une nourriture de qualité adéquate en quantité suffisante pour mener une vie saine et active.
Quand est-ce qu’une nourriture est jugée adéquate ?Une nourriture est jugée adéquate lorsqu’elle est culturellement acceptable, et elle doit être produite d’une manière écologiquement et socialement durable. Enfin, sa fourniture ne devrait pas entraver la jouissance d’autres droits de l’homme - par exemple, l’achat de nourriture suffisante pour un régime adéquat ne devrait pas être trop coûteux ou menacer la satisfaction d’autres droits socio-économiques, ou se faire au détriment des droits civils et politiques.
Les Etats parties au présent Pacte, reconnaissant le droit fondamental qu’a toute personne d’être à l’abri de la faim, adopteront, individuellement et au moyen de la coopération internationale, les mesures nécessaires, y compris des programmes concrets :
pour améliorer les méthodes de production, de conservation et de distribution des denrées alimentaires par la pleine utilisation des connaissances techniques et scientifiques, par la diffusion de principes d’éducation nutritionnelle et par le développement ou la réforme des régimes agraires, de manière à assurer au mieux la mise en valeur et l’utilisation des ressources naturelles ;
pour assurer une répartition équitable des ressources alimentaires mondiales par rapport aux besoins, compte tenu des problèmes qui se posent tant aux pays importateurs qu’aux pays exportateurs de denrées alimentaires.
Voilà pourquoi la POHDH ne cesse résolument de recommander voire d’exiger la ratification du PIDESC afin de renforcer le cadre légal visant la jouissance des droits humains en Haïti.
L’Etat haïtien jusqu’à date ne ratifie pas le Pacte International relatif aux Droits Economiques, Sociaux et Culturels, malgré les nombreux appels lancés par la POHDH et par d’autres organisations de droits humains. La ratification de cet instrument international s’avère impératif et urgent. Les dirigeants doivent travailler à résorber les conditions de famine qui sévissent dans les différents endroits du pays en améliorant les conditions d’accès de la population à une nourriture de la qualité.
La POHDH fait les recommandations suivantes :
Mise en application de l’article 22 de la constitution haïtienne ;
Ratification du Pacte International relatif aux Droits Sociaux, Economiques et Culturels ;
Investissement dans le secteur agricole (mise sur pied de la reforme agraire, renforcement de la production nationale, ouverture des magasins et des banques agricoles) ;
Instauration d’un système de sécurité sociale ;
Création d’emplois en milieu rural et dans les zones défavorisées ;
Adoption d’une politique d’intégration de toutes les couches sociales ;
Utilisations des institutions étatiques comme outils de transformation sociale ;
Création de lien de solidarité entre les organisations de la société civile et les classes paysannes et ouvrières ;
Allocation de 30% du budget national aux financements du secteur agricole (agriculture, élevage, pêche) afin de regagner notre souveraineté alimentaire ;
Contrôle de l’importation et de la vente des produits de consommation.
Antonal MORTIME
Secrétaire Exécutif
http://www.alterpresse.org/spip.php?article8890

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