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mardi 30 décembre 2008

Affaire de Port-de-Paix....

LE NOUVELLISTE National 26 décembre 2008
Comme Ali Baba
L'appareil répressif de l'État dans le Nord-Ouest est sur la sellette. Commissaire du gouvernement, juges, greffiers et policiers sont considérés comme Ali Baba pour n'avoir pas su résister à la sirène de la tentation, aux narcodollars de Alain Désir. Récit des temps forts d'un nouveau scandale qui ruine le capital de crédit de la police et de la justice haïtienne.
Le trafiquant de drogue Alain Désir est au frais dans une prison fédérale des États-Unis et son argent bien au chaud dans la maison de son oncle, à Lavaud, une section communale de Port-de-Paix. Mais, le 12 novembre 2008, grâce à une fuite intéressée ou à l'ingéniosité des services de renseignements de la PNH, la planque est identifiée. Seize agents de l'UDMO, des policiers administratifs, un membre de la Unpol, Samson Mangel, et des autorités judiciaires y débarquent. Une perquisition est effectuée. Le même jour, le responsable de la Section départementale de la Police judiciaire (SDPJ), l'inspecteur de police Registre Harry, selon le député Steven Benoît, écrit dans son rapport avoir trouvé un coffre-fort, une valise et une boîte en carton contenant 510 000 dollars. Entre-temps, dans la cité de Capois- La- Mort, la rumeur de la perpétration d'un pillage par des autorités policières et judiciaires ayant participé à cette opération se répand comme une traînée de poudre. Elle fait tache d'huile.
Plusieurs millions de dollars auraient été retrouvés au sous-sol de la maison perquisitionnée. Des policiers étrangers collaborant avec la DEA se rendent sur place. Le 15 novembre, ils collectent des informations. Pour sa part, le doyen du tribunal de première instance de Port-de-Paix, Me Ronel Gelin, ferme le tribunal et exige une enquête pour faire la lumière sur cette affaire qui met sur la sellette l'appareil répressif de l'Etat dans le Nord-Ouest.Le député de Port-de-Paix, Lucas Sainvil, reçu à la rubrique « Invité du Jour » de Valéry Numa sur Vision 2000, fait écho de rumeurs accablantes ou informations non confirmées sur cette fameuse opération au cours de laquelle des autorités policières et judiciaires se sont transformées en danseurs dans "le corridor de la tentation", ou, pire encore, en Ali Baba et ses quarante voleurs. Le doyen Ronel Gelin, vraisemblablement renvoyé pour « insubordination », sur cette même radio, balance, lui aussi des témoignages accablants. Un calme plat s'en suit. Ou tout au moins un calme en surface.
Le 14 novembre 2008, le délégué départemental du Nord-Ouest, Me Henry Max Thélus - selon les confirmations du député Steven Benoît et Renan Hédouville de Carli, invités de « Kase Moso » sur Magik 9- écrit une lettre au ministre de l'Intérieur et des Collectivités territoriales, Paul Antoine Bien-Aimé. Dans cette correspondance, il fait un récit clair des événements. « Le commissaire, les juges, les greffiers, la police se sont transformés comme les voleurs de Zadig en enfilant des paquets de dollars dans leurs vêtements et dans leurs bottes. Le commissaire du gouvernement, René Moïse, le juge de Paix Bouquet Saint- Marc, son suppléant, Jean Mathieu Dorvélus, le greffier du tribunal de Paix, Gaby Dorélien, Albert Loriston, Tertullien Guilbeau , la police, tout le monde en est sorti riche avec de gros magots ». Le rapport des policiers (PCI) qui collaborent avec la DEA fait état de témoignages concordants à ce sujet. Scandale.
Mario Andrésol savait-il, avait-il été mis au parfum, tenu au courant de la substance de cette correspondance ? Mystère ! Le vendredi 28 novembre 2008, en marge d'une « cérémonie symbolique » de remise de cinq camions de pompiers et des ambulances à la Primature, le chef de la Police nationale d'Haïti (PNH) relativise. Une délégation composée du secrétaire d'État à la sécurité publique, du directeur des affaires judiciaires du ministère de la Justice, Me Moline Louis Jeune Junior, avait été dépêchée à Port-de-Paix à l'initiative du ministre Jean Joseph Exumé afin de savoir ce qui s'est passé. Dès lors qu'il est question d'argent, il y a des rumeurs qui circulent. Mais, selon les premiers éléments d'information obtenus après des entretiens avec des responsables de la police, de la justice,le délégué départemental, le maire, personne n'a donné des preuves concrètes des allégations avancées. Il y a eu un tollé. On travaille afin de faire la lumière sur cette affaire, souligne le patron de la PNH.
Le délégué départemental et les autres responsables ont-ils fourni des informations authentiques, fiables à la délégation du ministère de la Justice ? Un autre mystère, une autre zone d'ombre ?
Feu de tout bois
« Il n'y a pas de volonté réelle des autorités de faire la lumière sur cette affaire. On a l'impression que l'on joue sur le temps afin de classer ce dossier dans les tiroirs. Nous sommes indignés face au silence de plus en plus complice des autorités judiciaires. C'est une situation qui scandalise la justice haïtienne, qui ternit l'image du pays à l'échelle internationale », déplore, consterné et indigné,Me Renan Hédouville. "Le Carli recommande au Parlement haïtien de convoquer sans délai les responsables du ministère de la Justice et de la police pour qu'elles fournissent des explications sur ce scandale" , soutient-il.
« Nous vivons dans un État délinquant dans lequel le voleur a toujours raison », estime le député de Pétion-Ville, Steven Benoît, l'un des membres de la commission anticorruption de la Chambre des députés. Le chef est responsable. J'attends et la population attend des explications du ministre de la Justice, du chef de la police Mario Andrésol, poursuit-il. " La police est corrompue du sommet jusqu'à la base. L'épuration de l'institution n'a jamais été faite. Le ministère de la Justice est le ministère le plus corrompu et le groupe qui est aux affaires actuellement est le plus corrompu de tous les temps", confie-t-il en rappelant une affaire de 450 kilos de cocaïne classée sans suite qui avait éclaté en 1998 lors du premier mandat du président René Préval.
Alors que le capital de crédit des autorités judiciaires et policières est ruiné, dans les rues de Port-de-Paix, la malice populaire considère les hommes et uniformes comme ceux en costard cravate de la basoche comme le fameux Ali Baba et ses quarante voleurs...
Roberson Alphonse
robersonalphonse@yahoo.fr

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