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jeudi 1 novembre 2007

Noël démasque Tabarre

La rivière Grise, en crue, a détruit une vingtaine de maisonnettes à « Dèyè mi », un bidonville de la commune de Tabarre (Photo: François Louis)

Noël, la tempête tropicale qui a frappé Haïti cette semaine, a révélé dans toute sa laideur le visage caché de Tabarre, où pullulent les constructions anarchiques. C'est le cas du bidonville « Dèyè mi » dont une

bonne partie vient d'être détruite par la rivière Grise en crue. Les avalanches d'eau et de boue qui ont dévalé soudainement des montagnes en début de semaine ont frappé sévèrement « Dèyè mi » - de l'autre côté du mur -, un bidonville de Tabarre récemment construit en partie sur le lit de la rivière Grise. En crue, celle-ci a emporté pas moins d'une vingtaine de masures dans le seul bidonville érigé à Tabarre 27.

"Dèyè mi" le bidonville récemment construit à Tabarre 27 reste sous la menace de la rivière Grise, en crue lors du passage Noël, la tempête tropicale meurtrière (Photo: François Louis)2

Beauvoir Laguerre, l'une des victimes, s'attend au pire. Même si la rivière Grise n'est même pas sortie de son lit, sa maisonnette a néanmoins été détruite par les eaux en furie. « Heureusement que personne n'a perdu la vie dans la catastrophe », soupire l'homme de 45 ans, qui regrette sa maison de trois pièces et ses animaux emportés sous ses yeux. Il ne lui reste que son courage après le passage de Noël, ce cadeau empoisonné du temps, pour assurer la survie des onze enfants vivant avec lui.

Désolant spectacle à « Dèyè mi », un bidonville de Tabarre, touché par la rivière Grise (Photo: François Louis)

« La catastrophe était prévisible pour les habitants de ce bidonville, juge un passant du haut de sa luxueuse Jeep 4X4. Je ne comprends pas l'insouciance de l'Etat qui laisse construire des maisons dans le lit des rivières. » L'homme s'attaque aux journalistes qui crient au scandale lorsque l'Etat ou les autorités municipales mettent à exécution leurs mesures de déguerpissement. Son intervention jette la brouille parmi les victimes et les quelques spectateurs venus de Croix-des-Bouquets, la commune voisine, pour assister à leur malheur.

Un porc dans le lit de la rivière Grise (Photo: François Louis)


« Nos maisonnettes n'étaient pas du tout construites dans le lit de la rivière, répliquent des habitants de Dèyè mi, qui ont tout perdu. Il y avait un monticule de terre qui nous séparait de la rivière », se défendent-ils à l'unisson, tout en désignant plus bas d'autres maisons menacées par les eaux. « Pensez-vous qu'il y avait des maisons plus sécurisées que celles-ci ? », sínterrogent les riverains.

« Dèyè mi » est emblématique de ces dizaines de quartiers construits dans l'anarchie à Tabarre. Là-bas, de luxueuses maisons sont construites, en dehors des normes primaires d'urbanisme. A la moindre averse, des tonnes d'alluvions s'étalent sur la chaussée, ce qui ralentit ou bloque la circulation à certains endroits.

Des Casques bleus de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti constatent de loin les dégâts causés par la rivière Grise à Tabarre (Photo: François Louis)

Même si Noël a laissé sur son passage de nombreuses victimes, on ne déplore heureusement aucun mort à « Dèyè mi ». Mais la force délétère de la rivière Grise continue d'effrayer les nombreux habitants qui ont construit leurs maisons dans son voisinage. Chaque fois que tombe une goutte de pluie, ils fuient leur demeure. « On a peur de la force menaçante des eaux », disent des femmes fuyant avec des enfants dans leurs bras.

Claude Gilles
gonaibo73@yahoo.fr

http://www.lenouvelliste.com/article.php?PubID=1&ArticleID=50370&PubDate=2007-11-01

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